Episode 1
Pourquoi ? Hein ? Pourquoi ils sont rentrés dans ma chambre ? Je déteste ça, je déteste ça ! Ils savent que je déteste ça ! C'est ma chambre à MOI ! Mon monde, mon univers. Je veux être ici chez moi, je veux être le maître de ce lieu, je veux qu'on me fiche la paix ! Qu'ils partent ils n'ont rien à faire ici ! Ce n'est pourtant pas dur à comprendre ! Ils sont des étrangers ici, ils n'ont pas le DROIT de franchir cette porte ! Je les déteste, je les déteste ! Je veux qu'ils s'en aillent ! Je tends ma main droite et balance le premier truc qui s'agrippe entre mes doigts. Ça fait plein de petites lumières, c'est beau, si beau quand ça explose sur l'épaule de mon père ! C'est des myriades d'étoiles qui naissent, qui naissent ici dans mon monde, dans ma chambre, contre l'épaule de mon père… Je souris. Je ris, je pars dans un grand éclat de rire. Les couleurs volent dans tous les sens, elles font des allées et venues dans la pièce, elles semblent paniquées et moi je me repais de ce spectacle cruel. J'aime les voir souffrir ces lumières, souffrir comme moi je souffre. Elles sont enfermées comme moi, quel plaisir sadique d'infliger ça aux lumières ! Quelque part, très loin quelqu'un hurle. C'est mon père qui hurle. Puis tout bascule il crie, il crie si fort quand il m'agrippe par le col de mon t-shirt et qu'il me soulève dans les airs. Il hurle si fort dans mon oreille mais ça me fait rire. Regarde toi petit papa tu es tout rouge, tu es si ridicule, je gagne contre toi, je gagne parce que moi je vois les lumières ! Toi tu ne vois rien, tu es incapable de voir quelque chose, tu vas mourir un jour et tu n'auras rien vu. Je vais devenir sourde si tu continues à hurler dans mon oreille mais je m'en fous parce que toi tu es aveugle ! Il me repose violement par terre. Maman pleure. Ne pleurs pas maman, c'est trop tard, toi non plus tu n'as rien vu, toi aussi je te déteste ! Non, non tu n'as pas le droit ! Je cherche à retenir les mains de papa mais elles courent trop vite, elles cassent tout. Non ! C'est à moi, tu n'as pas le droit ! Arrête papa, arrête je t'en supplie ne me le prends pas, je serai une bonne petite fille mais laisse moi ça ! C'est comme dans un rêve papa, je te vois prendre la bouteille et la briser. C'est malin ça ! Tu te rends compte, elle va être belle la moquette après ! C'est affreux, j'observe le liquide qui devient noir. Noir comme les pires ténèbres. Elles viennent pour nous. Parce que on est une famille de merde et que ça sert à rien notre vie. Elle monte sur toi papa, le liquide te gagne peu à peu, monte sur toi et… Non, ne me touche pas papa ! Non ! Je me débats entre tes bras. Non, tu vas me contaminer ! C'est froid ! C'est froid ! Le liquide vient sur moi maintenant petit à petit, il s'infiltre partout sous mes vêtements, il entre dans ma gorge, il m'étouffe. Mais lâche moi papa ! Comment tu peux supporter de faire mourir ta fille ? Tu es vraiment la pire ordure papa ! La pire ordure ! J'ai peur, le liquide va partout, c'est froid et tellement froid que ça me brûle ! Il me bouffe de l'intérieur. Je me frappe pour qu'il s'en aille mais on dirait qu'il s'en fout. Je frappe, je frappe, je frappe… Laisse moi ! Vas-t-en ! Non maman ! Non ! Moi aussi j'hurle maintenant. Je crie le plus fort possible, mais le liquide qui est dans ma gorge empêche le son de sortir… J'insulte mes parents. C'est de leur faute, de leur faute à eux. Ils ont tout fait de travers ! Il y a encore un concentré de lumière près de moi. Je l'attrape à nouveau dès que ma main passe à proximité et la colle dans la figure de mon père en lui hurlant de me lâcher. Il porte ses mains à son visage. Enfin je suis libre ! Je tombe par terre. Le plafond au dessus de ma tête tourne dans tous les sens et se transforme. On dirait le ciel. C'est beau, même si mes parents hurlent et qu'ils font tout pour gâcher cet instant… Je tends la main pour attraper les nuages. Ma mère répète mon nom en boucle, qu'est ce que c'est agaçant ! Mais elle va se taire ! Prends une pilule aussi maman, regarde sous mon lit, entre les lattes. Regarde maman, mets ta main et tu sentiras un petit sachet. C'est des boules de magie dedans. Après tu te sens comme Alice au pays des merveilles mais en moins cruche. Avale en une maman tu verras le monde devient plus beau, meilleur, même moi. Oui, même ta saleté de fille elle sera meilleure. Prend en une tu verras. J'attrape le sachet pour elle. Tiens maman. Elle m'arrache le sachet des mains. Oui maman, après c'est mieux. Beaucoup mieux. Papa n'arrivera pas à voyager, regarde ce qu'il a fait de ma tequila. Tout par terre. Il est malpoli. Ici c'est mon royaume, c'est moi la reine. Ceux qui ne m'obéissent pas devraient en subir les conséquences. Papa va mourir. Il va se faire avaler par le sale liquide noir. Le liquide de la rancœur. Ah ! Mais qu'est ce que tu fais ! Maman, pourquoi tu me mets les doigts dans la bouche ! Arrête. Ça fait mal ! Toi aussi, toi aussi tu m'as trahi ! Qu'est ce que tu as fait de mes pilules ? Il faut que j'en prenne ! Je lui donne une baffe. Tu l'as mérité maman, je t'avais prévenue. Ici c'est MON royaume, ma chambre, il ne fallait pas rentrer. Je décide de la règle du jeu ! Au secours, ils sont tous sur moi maintenant. Aidez moi petites lumières ! Aidez moi je vous en supplie ! Je ne peux plus bouger. Je veux partir encore. M'évader. Aidez moi petites particules d'espoir. Aidez moi. Ils me serrent trop fort. Je sens que je rentre à l'intérieur de moi-même. Je deviens minuscule, une poussière, le néant. Je veux savoir si j'existe encore. Je ne sens plus mon corps. Plus rien. Ils m'ont serré trop fort, beaucoup trop fort et maintenant je suis difforme ! Les lumières ? Où sont les lumières ? J'ai du mal à les serrer entre mes doigts, ma mère tente de les éloigner mais elle a peur d'y toucher. Non, c'est moi la plus rapide. Je les lance en l'air. Lorsqu'elles touchent le sol il s'embrase. Quel spectacle ! J'explose de rire. C'est moi qui ai fait ça ! Je suis la créatrice des lumières ! Je suis encore plus douée que Dieu ! L'étreinte se desserre, les parents vont s'occuper des lumières. Oui, jouez avec les lumières, jouez avec toutes les couleurs. J'offre le monde dans un paquet. Vous voyez ça vous plait hein ? Même si vous êtes mauvais, je vous en donne quand même. C'est une spirale qui déferle, elle est jaune et un peu rouge, un peu bleue. Elle s'enroule autour des corps, elle danse et moi je suis en extase devant une telle merveille, devant le flot de beauté que les lumières offrent à mes yeux. Mais j'ai de plus en plus de mal à les garder ouvert. Qu'est ce qui se passe ? Est-ce que je meurs ? Oh oui, je meurs avec les lumières, quelle belle mort, quel fabuleux dernier divertissement ! Je plonge mes mains dans ce flot de magie. Je joue avec. Oh oui ! Je m'immole avec la lumière !