Et une vidange de tiroir de plus ! Celle-là aussi est inspirée d'un rêve. Et c'est très vieux… Fin collège, peut-être…
Je crois bien que c'était la première fois que je ne déchirais pas ce que j'écrivais…
Et tout est à moi ! (je ne m'en lasserai jamais de dire ça..)
Bonne lecture
Blablabla…
Blablabla…
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oo
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J'avais emporté avec moi un souvenir parfumé d'immenses fraises qui devenaient mes trésors ; de gravier rugueux qui mordait mes pieds regrettant le tiède plancher ; de parfums auxquels tout mon être s'agrippait avec mille précautions pour en trouver la source. Dans le noir de nos yeux gigotaient les éclats d'un rire fou et incontrôlable.
Tout cela en moi je crois est mort dans le prolongement d'un oubli cultivé. Cet espace qui muet s'étale sous mon regard, j'en suis sûr maintenant ne fait pas partie de ma vie.
Le Grand Arbre pourtant il me semble chuinte comme autrefois lorsqu'il me caressait pour m'inviter à grimper ou à me balancer. Mais à présent il me palpe obséquieusement pour qu'à lui et à lui seul je me pende.
Tu seras mon trophée pour l'Éternité.
Je ne m'attarde pas auprès de lui, et d'un mouvement coulé je plonge dans la froide obscurité de la maison où enfant j'ai vécu. Sur le palier je m'arrête un moment pour regarder l'écureuil empaillé qui m'avait si souvent effrayé.
J'avais cru
Il y a tellement longtemps
Qu'il m'observait d'un air supérieur.
Il n'en est rien, je le sais à présent. Aucune hostilité ne se reflète dans ces billes de verre coloré. Avec une douceur cruelle je les extirpe de ces profondes et tristes orbites noires. Plutôt qu'une haine aveugle, ces deux gouffres expriment plus une douleur et une tristesse qui ne me sont pas étrangères.
Les yeux vides de l'écureuil pleurent des larmes de cire.
Un vertige me saisit, le silence écorche mes oreilles. La grange doucement m'appelle, me courtise de ses parfums de champs et d'oliviers.
Elle contient entre ses poutres une infinité de paysages odorants emprisonnant les feux du Soleil.
Les trous ponctuent le plancher.
Auprès de l'un d'eux, sur une colline d'or, repose une jeune fille dont la vue illumine l'espace d'un éclair ce qu'enfant j'avais hurlé au ciel de ne jamais oublier. Mais cette évidence retombe dans les ténèbres aussi soudainement qu'elle avait surgi. Je m'étends auprès d'elle. Son corps étiolé luit, étrangement inerte.
Une bribe de regard s'effiloche : ses yeux pâles libèrent la vie qu'ils retenaient. Elle s'envole et disparaît.
Seule sa main se crispe fiévreusement autour d'une bougie à la flamme épuisée dont la cire lui brûle avidement la chair. La teinte des ses cheveux adopte celle du foin, y plonge jusqu'à s'y confondre. Je me détourne lentement d'elle et me laisse glisser en une pluie étoilée dans l'abîme du plancher.
J'atterris en un bruit sourd sur une étendue de cadavres.
L'un d'eux me fixe d'un sourire triste.
Une forme sombre aux yeux de vautour me toise du haut de sa montagne de squelettes. Hilare, elle explose d'un rire sourd et démoniaque.
Je la connais.
Je crois que je pleure mais je ne saurais dire pourquoi.
Derrière cet amas putride et ce démon aux si grandes ailes, luit quelque chose qui m'attire, comme si rien d'autre n'avait existé. Je vois ma main translucide s'étendre… et je la suis.
Ma bougie.
C'est elle qui tremblote, enserrée par un squelette aux os limpides dans lesquels coule un liquide bleu et chargé de bulles dorées.
C'est la mort qui détient ma vie, mon existence entière.
Je la supplie de me la rendre.
Elle esquisse un pâle sourire et doucement sur la flamme souffle.
Et l'Écureuil éclate d'un rire sans fin.