Moonchilds

Mon meilleur ennemi Ch11

Erwan suivait toujours la jeune femme, intrigué. Tenant fermement sa main, elle le conduisait à travers un dédale de sentiers qui serpentaient au milieu d'un petit bois à la végétation clairsemée.

Au bout de quelques minutes elle s'arrêta dans une clairière où elle se laissa tomber sur une vieille balançoire accrochée à un platane qui devait bien être centenaire.

L'air renfrogné, elle n'avait toujours pas lâché sa main et il se retrouvait à lui faire face, la dominant de toute sa hauteur.

- Je suis désolée, marmonna t elle, vous amener aujourd'hui c'était une mauvaise idée…Je vous aie mis dans une situation embarrassante. C'était stupide de ma part.

Il ne dit rien immédiatement, préférant s'installer tranquillement à ses côtés. Songeur, il laissait son pouce frôler le dos de la main de la jeune femme.

- Je n'ai pas l'impression que ça se soit si mal passé, remarqua t il doucement.

- Vous essayez simplement de vous montrer conciliant, s'obstina t elle, mais j'ai du mal à vous croire.

Elle se tut et baissa la tête, sourcils froncés. Observant pensivement, ses jambes qui pendaient de la balançoire, trop courtes pour toucher le sol. Tournant la tête, elle fixa sa main toujours placée dans la sienne, avant de la retirer vivement, piquée au vif.

- Pourquoi faut il, commença le jeune homme, que les choses soient toujours parfaites avec vous ? Ca n'est pas toujours le cas, parfois il faut accepter qu'on ne puisse que faire de son mieux.

Karen ne répondit pas dans l'immédiat, elle se sentait toujours un peu sceptique à ce propos. Elle qui voulait toujours contrôler la situation. Elle n'admettrait pas que les choses lui échappent.

- J'aurais voulut que pour une fois, les gens se disent que les choses allaient bien pour moi. Et pas qu'on ait pitié de mon sort ou quoi que se soit. Je n'aimais pas que tous les ans, ils me regardent avec leur petit air désolé et compatissant.

Elle se tût alors, ayant l'impression de s'embrouiller un peu plus dans ses explications. Erwan ne fit aucun commentaire à ce propos, jugeant plus opportun de se taire.

- Maintenant qu'elles vous ont vu, mes tantes doivent soupirer de soulagement d'avoir la confirmation que je n'avais pas pour projet d'entrer dans les ordres, ou je ne sais quelle idée farfelue.

Tout à sa réflexion, elle ne se rendait pas compte que sa confidence glissait peu à peu sur un autre terrain, plus glissant et plus personnel.

Un vilain vent frais choisit ce moment pour se lever et faire virevolter ses cheveux devant son visage, resserrant machinalement son manteau, la jeune femme leva le regard vers le ciel.

Une goutte tomba sur le bout de son nez, suivie d'une autre, et d'une suivante.

- Je crois que nous ferions mieux de rentrer rapidement, marmonna t elle

Elle ne croyait pas si bien dire car immédiatement, une farine de pluie, fine et insidieuse se déclencha.

Se levant prestement, elle l'attrapa par le bras et entreprit de reprendre le sentier pour rentrer. La pluie fine s'était changée en averse et la main levée au dessus des yeux, elle pressait le pas, le guidant une fois de plus.

C'est tous trempés et tremblants de froid qu'ils arrivèrent dans l'allée de gravier de la maison familiale. A cet instant même la mère de Karen sortait sous le porche, se demandant probablement où ils étaient passés.

- Enfin je vous retrouve ! lança t elle, en ne vous voyant pas rentrer avec cette pluie, nous nous sommes inquiétés !

Karen eut pour sa mère un petit regard qui se voulait rassurant

- Nous nous sommes fait surprendre admit elle, et nous nous trouvions un peu loin de la maison

Mme Riley hocha la tête avant de les attirer tous les deux à l'intérieur

- Venez, si nous restons sous le porche vous allez finir par attraper froid.

D'autorité, elle les conduisit jusqu'à l'étage et les poussa tous les deux vers la salle de bains. Ouvrant un placard, elle leur mit chacun une serviette dans les bras.

- Essuyez vous bien, lança t elle, je vais voir si j'ai des vêtements secs pour vous, le temps de faire sécher les votre.

Et sans leur laisser le temps de réagir, elle sorti de la pièce en toute hâte.

Un grand silence envahit la salle de bain, durant lequel ses deux occupants se regardèrent les yeux dans les yeux, serviette à la main, interloqués.

Karen, de vagues souvenir d'enfance lui remontant en mémoire, se rappelait les fois précédentes où sa mère s'était trouvée dans cette situation, sermonnant sa fille quand elle rentrait trempée par une averse qui s'était déclenchée à l'improviste.

La voie impérieuse de sa mère la sortie de sa rêverie.

Madame Riley se tenait sur le pas de la porte, une pile de vêtements secs dans les mains.

- Je peux savoir ce que vous faites encore à dégouliner sur mon carrelage ? Lança t elle

Immédiatement, les deux fautifs baissèrent la tête pour admirer la flaque d'eau qui s'était formée à leurs pieds sur les carreaux.

Alors seulement la jeune femme eut l'air de sortir de sa rêverie. Ses joues se couvrant d'une jolie couleur pivoine et faisant volte face, elle attrapa les vêtements que lui tendait sa mère avant de sortir en trombe de la pièce.

Une porte claqua au fond du couloir et avec un soupire Madame Riley se pencha par l'entrebâillement de la salle de bain pour faire remarquer à sa fille qu'elle finirait par faire sortir cette porte de ses gonds un de ces jours.

Perplexe, Erwan observa sa belle mère d'un jour revenir à la charge, vêtements à la main.

- Mettez ça, déclara t elle, ils appartiennent à mon plus jeune fils. Ce n'est peut être pas votre style, mais au moins ils sont secs !

Il la regarda déplier sous ses yeux un tee-shirt noir barré d'une inscription rouge sombre et un jean bleu délavé. Elle les lui mit dans les bras avant de sortir

- On vous attend en bas, lança t elle en refermant la porte

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Karen claqua vivement la porte de sa chambre et s'y adossa, le cœur battant.

Au bout du couloir, elle entendit sa mère lui lancer quelque chose qu'elle ne comprit pas très bien, le son de sa voix étouffé par la porte.

La jeune femme finit par jeter un coup d'œil à ce que sa mère lui avait choisit.

Un accès de nostalgie s'empara d'elle sans prévenir. Elle n'avait pas remis ces vêtements depuis le lycée. Encore un petit effort er elle pouvait visualiser ce qu'avait été sa vie à cette époque. Les cours, les professeurs grincheux, les petites guerres de clan, les groupes de filles qui se toisaient depuis leur coin de la cours et les joueurs de l'équipe de basket qui flirtait avec tout ce qui portait une jupe.

Dans un soupir confus, la jeune femme enfila le jean et le cache cœur blanc après s'être essuyée puis s'installa à son ancienne coiffeuse, entreprenant de se brosser les cheveux.

Il était grand temps que cette journée prenne fin. Malgré l'assurance que lui avait donnée Erwan, elle sentait malgré elle le contrôle de la situation lui filer entre les doigts et ça elle n'aimait pas du tout.

Et qu'y connaissait-il ? Lui qui avait toujours l'air de parfaitement maîtriser la situation.

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Quand Erwan redescendit un quart d'heure plus tard, ses vêtements secs enfilés à la hâte, Karen n'était pas encore au salon.

Il y trouva Cameron, qui s'amusait avec Holly.

- On ne vous attendait plus ! Lança t elle, Karen n'a pas terminé ?

Il secoua négativement la tête. En fait, il ne savait même pas où la jeune femme se trouvait à cet instant précis.

C'est ce moment que choisit Holly pour quitter les bras de sa mère et s'installer résolument sur les genoux d'Erwan.

Avec un petit air sérieux, elle pointa son index accusateur vers lui.

- Dis, c'est vrai que tu vas l'épouser ma tatie ?

Un silence gêné emplit la pièce, Erwan fixait Cameron, sourcils froncés ne sachant comment répondre à la petite fille. Vivement, sa « belle sœur » se leva et pris sa fille dans ses bras.

- Qui t'as dit ça ? demanda t elle

- C'est Allan, il dit qu'il a entendu tante Emily le dire à mamy

Par-dessus l'épaule de sa fille, Cameron lança un regard convenu à Erwan. Dépassé, il ne put que hausser les épaules.

Karen serait enchantée d'apprendre que l'on échafaudait déjà des plans de mariage dans son dos…Très enchantée.

Cameron vint charitablement à son aide, expliquant que non ça n'était pas forcément vrai. Que tatie n'allait pas se marier et que ce n'était pas parce que l'on n'était pas marié que l'on ne s'aimait pas.

Puis remettant la gamine sur pieds, elle l'envoya s'amuser avec son frère.

Immédiatement après le départ de Holly, elle se retourna vers lui, un air moqueur sur le visage.

- Alors ? demanda t elle

- Alors quoi ? répéta Erwan le plus innocemment du monde

- Ecoute, commença Cameron, je ne suis pas une enfant de cinq ans qu'on peut tourner en bourrique. Qu'est ce qui se passe avec Karen ?

Feignant de prendre un air désolé, il haussa les épaules

- Rien, répondit-il, elle est simplement agacée parce que ses proches se montrent trop curieux…Et ça crée des tensions.

- Et vous vous être disputés pour ça ?

- Absolument pas, protesta t il, elle est juste irritable. Tu dois sûrement connaître Karen, elle s'énerve à propos de tout. quand elle a une idée en tête, même si elle sait qu'elle est en tord, elle ira jusqu'au bout, je trouve ça vraiment stupide...

Surprise par sa vive réaction, Cameron le fixa, incertaine de la façon dont elle devait le prendre.

- Mais d'un autre côté c'est sa détermination qui m'a plu dès le début, elle a du caractère et quoiqu'elle en dise, elle est très mignonne quand elle se met en colère.

Brusquement, le claquement de la porte d'entrée résonna dans tout le salon, faisant vibrer les bibelots posés dans toute la pièce.

- Karen c'était toi ? lança Mrs. Riley depuis le haut de l'escalier

Sur un signe de tête, Erwan se leva vivement et quitta la pièce, prit d'un mauvais pressentiment.

- Que se passe t il dans cette maison ? lança la matrone incrédule

Cameron haussa les épaules, incapable de lui répondre.

La maîtresse de maison secoua la tête, désabusée.

- Tous ces amoureux moi ça me dépasse.

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Irritée, Karen prenait un malin plaisir à marcher dans chaque flaque d'eau qui jonchait l'allée, laissées par l'averse soudaine. Ses chaussures étaient ruinées mais qu'importe !

Elle s'était réfugiée à l'arrière de la maison dans le petit jardinet où au printemps, sa mère faisait pousser des fraises.

La jeune femme se laissa tomber sur un banc de pierre, mouillant son jean au passage. Elle s'était faite avoir, on l'avait encore tournée en bourrique !

Elle avait déballé sa vie devant un inconnu qui racontait dans son dos qu'elle était une gamine détestable !

C'est alors qu'Erwan apparut au coin de la maison, l'air inquiet.

- Soyez gentil, laissez moi maintenant, lança t elle sombrement

- Et je peux savoir ce que je suis censé avoir fait cette fois ? s'exclama t il révolté

- Inutile de jouer à l'innocent, répliqua t elle froidement

Voilà qu'il faisait celui qui n'avait rien fait de mal, quelle hypocrisie !

Vaguement, Erwan sentait l'agacement qui montait en lui. Il commençait à avoir son compte des sautes d'humeur de la jeune femme. Elle pouvait être absolument insupportable.

- E coutez, commença t il sèchement, on peut rester ici une demi heure à se faire la tête comme des enfants de maternelle, ou vous pouvez tout aussi bien m'expliquer ce que j'ai bien put faire pour attirer vos foudres.

Karen lui lança un regard boudeur, pas décidée pour deux sous à lui raconter, ni même à lui adresser la parole.

- Vous vous êtes vue ? Continua t il, vous aimeriez que l'on arrête d'avoir pitié de vous, encore faudrait il que vous commenciez à vous comporter en ce sens. Si vous continuez vos gamineries de lycéenne personne ne cessera de vous regarder comme une enfant !

Elle ne cilla même pas. Pour qui se prenait-il soudainement à lui faire la leçon ? En l'espace de quelques secondes, il avait réussit à échanger les rôles. Elle était censée être en colère et faire la morale, pas l'inverse !

- Sérieusement, enchaina Erwan, on pourrait croire qu'à vingt quatre ans vous ayez un peu plus de plomb dans la cervelle et que vous soyez capable de vous maîtriser ! Quel intérêt de faire une scène pour chaque remarque ? Vous ne prenez même pas le temps de réfléchir cinq secondes et vous vous braquez immédiatement ! Un peu de maturité bon sang !

Il se pencha sur elle, l'air agacé, sourcils froncés. Son mutisme avait quelque chose de tout à fait exaspérant. Il aurait bien voulu déclencher une quelconque réaction chez la jeune femme.

- Regardez vous, continua t il, vous boudez dans votre coin sans rien dire. J'étais venu chercher des explications et vous restez muette. Vous croyez vraiment que cela soit diplomate de votre part ? Encore une fois si vous voulez qu'on vous traite comme une adulte agissez en temps que tel et pas comme une adolescente rebelle !

Karen se leva brusquement, des éclairs au fond des yeux, bouillant de rage mal contenue.

- C'est vous qui êtes parfaitement insupportable ! Hurla t elle, vous qui passez votre temps à m'asticoter, qui faites votre possible pour me rendre la vie difficile et qui ne perdez jamais une occasion de vous payer ma tête !

- Et vous vous êtes déjà demandée pourquoi tout le monde se faisait un plaisir de vous embêter ? Vous faites une cible idéale, susceptible et puérile ! Inutile de chercher pourquoi vous êtes toujours désespérément seul ! Vous êtes un parfait tyran mêlée à une gamine capricieuse !

Karen en resta sans voix, ouvrant et fermant la bouche plusieurs fois, telle une carpe sortit de son eau. Quel culot !

Le jeune homme sut immédiatement qu'il était peut être allé trop loin. Il n'avait peut être fait que constater certaine chose mais Karen n'était pas forcément prête à entendre cela.

- Désolé, s'empressa t il d'ajouter doucement

Sur le point de rétorquer, elle baissa immédiatement les yeux, sentant le rouge lui monter aux joues, humiliée qu'on lui fasse ainsi la leçon. Elle sentait sa colère s'évaporer peu à peu pour laisser place à un sentiment de gêne mêlée à de la honte d'être réprimandée à son âge.

- Vous avez dit à Cameron que j'étais bornée, murmura t elle d'une petite voix, et colérique

- Avouez que votre entêtement frise la stupidité quelque fois, insista t il

Voyant ses traits se durcirent à nouveau, il s'empressa de lui dédier un regard d'avertissement. Elle savait parfaitement au fond d'elle-même qu'il avait un peu raison.

Mais ça, Erwan Carlyns n'avait pas besoin de le savoir.

- Rentrons à présent

- Mais…

Elle protesta pour la forme n'ayant pas le sentiment que la discussion était terminée.

- Ne vous inquiétez pas, je vous offre l'occasion parfaite de vous faire pardonner vos sautes d'humeur.

- Et comment exactement ? s'enquit-elle sceptique

- Vous êtes libre pour le Nouvel An ?

Fin du chapitre 11

Voilà, après un temps monstrueux, Moony est venue à bout de son onzième chapitre. Je l'avais promis ! Il est là ! Comme un petit miracle pour vous souhaiter la bonne année !

Je crois que je ne vais plus m'excuser, à ce stade ce n'est même plus possible.

Donc je vous souhaite juste une bonne lecture en compagnie de ce nouveau chapitre !

Et pour celle qui trouvent que la dernière réplique sonnent comme du déjà vu, c'est effectivement une « reprise » de celle du chapitre 9.

Remerciements : à toutes celles qui ont laissé des messages, qui m'ont lut, qui ont attendu mon retour.

Je vous embrasse du fond du cœur. Vous êtes des anges de me supporter de la sorte !

Comme habituellement, j'ai répondu de mon mieux aux reviews ; certaines sont peut être passé à travers les mailles cependant.

Merci à Raphaelle qui n'a peut être pas reçu mon mail.

Et encore et toujours à ma Ptite Clo d'amour qui sait comme j'ai eut du mal avec ce chapitre. Je ne te dirais jamais assez comme t'as présence sur fp a été une motivation.

PS : chapitre sorti tout droit de l'usine. Il n'est pas encore corrigé.

Bises à tous

RDV au chapitre 12 !