Chapitre 18 : Souvenir d'un Père
Tout ceci étant expliqué, je saisissais mieux pourquoi mes alters étaient plus que déterminés à me montrer leur première rencontre avec Pierrick après la mort de son père. Ils comptaient sur ces souvenirs pour me convaincre que le danger qui menaçait Pierrick était réel et qu'il méritait d'être traité de manière radical. Je comprenais leur raisonnement mais de là à dire que je l'acceptais, il y avait encore un pas énorme à faire et même si j'étais prêt à faire tout ce qu'il fallait pour sauver Connor et Noé, je doutais d'être capable de passer à l'acte.
Savoir que je l'avais déjà fait par le passé me donnait juste l'impression d'avoir perdu plus que mes souvenirs dans ce mensonge dans lequel j'avais vécu pendant huit ans. Pas que je regrette d'une quelconque manière cette part de moi qui était tout à fait capable de tuer sans le moindre état d'âme. Non, mais je ne pouvais pas m'empêcher de penser que peut être ce moi disparut était mon véritable moi, que je n'étais qu'une pale copie de celui que mes alters considéraient comme leur chef. Que finalement je ne serais jamais à la hauteur de l'image qu'ils avaient gardé, eux, de moi.
Affreux complexe d'infériorité qui me rongeait. Jalousie déplacé envers moi même et je commençais à me rendre compte que cette pente était très mauvaise pour moi. J'avais déjà douté de ma santé mentale mais là je savais qu'il était très dangereux d'entretenir cette ambiguïté avec celui que j'avais été. En huit ans, j'avais assez fréquenté de psychologue et de psychiatre pour savoir comment ils traiteraient ce problème identitaire et pour remercier ma tante d'avoir cesser de m'envoyer en consultation.
Bref je ne pouvais pas m'appuyer sur l'image tronqué de celui que j'avais été. Je ne pouvais pas me comparer à lui. Il avait été et j'étais bien diffèrent maintenant. Il n'y avait aucun regret à avoir, tout comme je n'avais à en avoir honte. Je devais avancer et continuer à m'appuyer sur sur les principes et les valeurs qui étaient devenu les miens. Ils n'étaient pas aussi différents de ceux de mon passé. Elles étaient peut être un peu moins tranché et moins expéditives mais je restais déterminé et prêt à défendre ces idéaux. D'autant plus maintenant que je savais que je ne serais plus jamais seul.
Je secouais la tête et soupirais avant de relever mon regard pour croiser les regards de mes alters et de comprendre que mon silence les avait laissé dans l'expectative.
« Et bien je vous écoute, allons y... »
« Ou ça ? » Demanda éberlué Noé en écarquillant les yeux.
« Et bien montrez moi ce que vous vouliez me montrer à propos de Pierrick que je puisse prendre conscience de la situation !Je ne sais pas si cela sera suffisant mais je pense qu'aider Pierrick pourra nous servir de base pour me remettre dans le bain et me permettre de savoir si je pourrais effectivement tenir ma promesse envers Connor ! »
« Les affaires reprennent ! » S'exclama alors Quentin en faisant claquer ses doigts.
« Si ces gens se croient au dessus des lois et qu'ils ont effectivement commandité le meurtre du père de Pierrick, et qu'ils avaient l'intention de m'éliminer, je pense que l'on peu s'intéresser de plus prêt à leur manigances et voir comment on peu régler cette affaire sans trop faire de vague. » annonçais je avec détermination. « Quitte dans le pire des cas, à vous lâchez sur eux. »
« Entendu Axel, mettons nous au travail alors nous avons perdu assez de temps en explication et n'oublions pas que tu es tout de même en cour et que ce n'est pas le lieu idéal pour piquer un somme. » Intervint Yan avec un petit sourire en coin qui finit de détendre l'atmosphère et de me rappeler ma situation dont j'avais carrément occulté le côté incongrue.
« Et si je me fais chopper et que le prof me réveille ?! »
J'avais un petit peu mis de côté ma situation réelle et là à ce rappel, je paniquais un peu pour la plus grande hilarité des alters. Quentin se mit donc en devoir de m'expliquer que si le sommeil provoqué dans lequel je me trouvais, était contrôlé par Lenny, lui maîtrisait un espace qui lui permettait de surveiller ce qui se passait dans la réalité et avec le soutien des capacités de Noé. Ils pouvaient tous les deux détourner l'attention des curieux de ma personne. Bon, il admit que cela ne marcherait pas indéfiniment et qu'ils manquaient de pratique pour pouvoir assurer que cela fonctionne à cent pour cent, mais pour le moment il n'y avait aucun problème et ils maîtrisaient la situation.
Enfin je restais tout de même un peu méfiant, vu que la dernière fois que Quentin m'avait embarqué dans un de ses plans, cela avait quelque peu foiré. Il y avait des circonstances atténuantes bien évidemment, comme le fait qu'il aurait été très difficile de reconnaître en Audrey un alter, mais on s'était retrouvé dans la moïse.
Comme les autres ne semblaient pas douter de sa paroles et de son engagement, je finis par hocher la tête pour couper court aux explications théoriques de mon alter qui visiblement une fois lancée sur un sujet qu'il maîtrisait et aimait devenait aussi bavard que Noé. Ce qui me donnait un indice supplémentaire sur la complicité qui unissait ces deux là.
« C'est aussi Noé qui va travailler en pair avec moi. » reprit Yan plus sérieusement.
«Tu vois, pourquoi je disais que pour Noé se serait plus facile de prendre du grade. » Ne put s'empêcher de faire remarquer Connor avec une certaine aigreur.
Comment lui en vouloir ? Il n'avait vraiment pas une position facile et malgré toute ma bonne volonté, je n'étais pas certain d'arriver à tenir ma part du contrat qui nous liait, alors comment lui en vouloir de douter et de se sentir si frustré ?
Mais pour avoir été celui qui était resté. Pour avoir vécu toutes ces années avec le manque de leur présence. Pour avoir toujours eu conscience qu'il me manquait quelque chose de précieux dans mon existence, même si j'avais crut qu'il s'agissait uniquement de Yan. Pour avoir éprouver la douleur et la culpabilité d'être celui qui avait dû continuer avec ce poids, je ne pouvais pas laisser Connor continuer à s'en prendre ainsi à Noé ou bien cela finirait pas ronger l'alter aux cheveux blanc.
« Connor, j'ai bien compris la situation et je sais que tu n'as pas la meilleure place mais je t'ai promis de faire le maximum pour te permettre de grandir. Si tu n'est pas prêt à faire un effort pour patienter et vivre en harmonie avec les autres, autant en finir tout de suite. »
« En finir ? »
« Et bien oui, tue moi comme cela on mourra tous et tout sera terminé ! »
« Je peux pas faire ça ! » S'offusqua Connor visiblement vexé que je puisse penser qu'il ait pu avoir cette idée. « Jamais je ne te ferais de mal ! »
« Encore une de vos lois dont j'ignore tout ?! Peu importe j'ai déjà vécu sans vous et je sais le mal que cela fait et je ne veux pas que cela recommence ! Mais si tu doutes que je ne ferais pas l'impossible pour te faire grandir. Si tu doutes de tes camarades pour nous aider, si tu ne crois pas que ta disparition nous affecteras tous, y compris Noé, c'est vraiment que vous et moi n'avons pas la même définition de la famille ! C'est Simon qui a dit que vous étiez ma famille et je le crois et pour moi chaque membre de ma famille compte. Chacun d'entre vous compte. Si vous n'en êtes pas convaincue, c'est que je me suis trompé quelque part sur votre compte ! »
«Tu ne te trompe pas. » Affirma d'un ton sans appel Simon en posant une main rassurante sur mon épaule et pour la première fois je le sentais en accord avec chacune de mes paroles. «Nous avons confiance en toi et en ta parole. Aucun d'entre nous ne doutera du lien qui nous rassemble et pas un d'entre nous n'adoptera une attitude qui pourrais te causer un préjudice qu'il soit moral ou physique. Cela irait à l'encontre de ce que nous sommes. Si tu peux continuer à nous guider, nous avancerons. Si tu peux continuer à nous aimer comme une famille, nous grandirons. »
L'éclat qui brillait dans ses yeux quand ils plongèrent dans les miens n'étaient pas seulement de la fierté mais aussi une certaine reconnaissance comme si enfin il voyait en moi celui que j'avais été, son chef, même si pour moi cela ne voulait pas dire grand chose. Je ne sais pas exactement ce qui avait enclenché cette réaction chez lui mais je lui souris en hochant la tête, rassuré qu'au moins l'un d'entre eux comprenne ou je voulais en venir.
« Bien c'est clair pour tout le monde ? » Demandait je à la cantonade estimant qu'on avait passé suffisamment de temps sur le sujet et préférant qu'on se penche sur des problèmes plus concret et tangible et posant moins de cas de conscience.
« Oui » répondirent étonnamment en chœur Noé et Connor qui en s'entendant parler échangèrent un regard avant d'éclater de rire.
Ils furent rapidement suivit par les autres qui riaient encore tous quand ils me confirmèrent être prêt à passer aux choses sérieuses. Noé se leva donc de la place qu'il occupait et vint se placer devant moi alors que Yan se positionnait derrière moi. Ils placèrent leur mains sur mes tempes. Mon jumeaux en premier et ses mains fraîches me firent du bien, puis Noé posa ses mains par dessus celle de Yan et avant que je n'ai le temps de demander comment allait se dérouler la suite des opérations, devant mes yeux tout disparut pour être remplacé par un espace brumeux et sombre que je ne connaissais pas.
«Ceci est un souvenir que nous a confié Pierrick quand il nous a trouvé la première fois et qu'il ne pouvait garder car si d'autres Invath venaient à tomber dessus, sa vie serait encore plus en danger qu'elle ne l'ait à présent. » Me parvint comme assourdie et lointaine la voix de Yan.
Je regardait autour de moi mais ne voyais rien. J'étais tout seul dans un brouillard noir de plus en plus épais, quand soudain une lumière se mit à briller devant moi et doucement avec précaution me sembla-t-il elle se rapprocha jusqu'à ce que je puisse voir au travers.
Cette lumière était comme une fenêtre et donnait sur une salle à l'opposé de l'endroit où je me tenais. De l'autre côté tout était blanc et lumineux. De l'autre côté, il y avait Pierrick qui allongé semblait flotter dans le vide et dormir du sommeil du juste. Il portait un simple caleçon ce qui me permit de voir le sceau sur sa hanche commencer à rougir. Comme si il avait sentit lui aussi que quelque chose se passait, son visage se déforma sous la douleur et il commença à s'agiter.
Une main invisible jusque là, enfin d'après ce que j'avais pu en voir de mon côté, effleura sa joue et comme s'il en avait reconnut le propriétaire, mon camarade se calma presque instantanément et je remarquais une larme qui s'échappa du coin de sa paupière pour glisser jusqu'à la main qui l'essuya.
Je ne comprenait pas ce que je voyais. Premièrement parce qu'imaginer Pierrick aussi fragile ne me serait jamais venu à l'esprit. Deuxièmement parce qu'il me semblait que celui qui me collait depuis notre première rencontre au lycée, ne pouvait pas, ne devait pas être ainsi en face d'une autre personne. Il n'y avait que moi qui pouvait le voir ainsi et …. Je secouais la tête pour essayer de reprendre mes esprits. Qu'est ce qui me passait pas la tête à présent ? Un seul mot dont je n'avais pas besoin du dictionnaire pour connaître la définition : Jalousie.
Inutile de nier. J'étais jaloux. Depuis le départ même si Pierrick était un inconnu pour moi, les émotions et les sentiments que j'éprouvais à son contact avait été toujours très fort et entier, voir comme exacerbés. Avec les souvenirs qui m'étaient revenue en mémoire et ce que m'avait raconté mes alters j'avais fini par comprendre que notre ancienne relation avait été très forte et fusionnelle même si je ne comprenais pas pourquoi encore aujourd'hui il gardait une si grande emprise sur moi. Et savoir qu'il y avait eut dans son existence passée quelqu'un qui avait été aussi proche de lui en dehors de moi attisait une pointe de colère que je tentais non pas de repousser mais de maîtriser.
Tout du moins tant que je n'aurais pas découvert de qui il s'agissait. Car une fois que je connaîtrais son identité je lui ferais comprendre qu'il n'avait plus sa place dans la vie de Pierrick. Ma détermination me surprenait moi même, mais je renonçais à m'interroger sur ce qui la motivait pour ne garder à l'esprit que la quête d'information pour laquelle mes alters m'avaient envoyé dans ce souvenir.
Me concentrant à nouveau sur Pierrick, je vis la main gagner en épaisseur et une silhouette commencé à apparaître aux côtés de mon ami qui dormait toujours même si je pouvais voir ses paupières bouger signe qu'il luttait pour se réveiller. Il fallut attendre quelques minutes pour que l'individu qui continuait de passer sa main sur la joue de Pierrick ne soit complètement visible. Il me fût alors assez simple de le reconnaître pour l'avoir déjà vu, dans les souvenirs que Pierrick avait partagé avec moi lors des nuits précédentes. Son père.
Je me sentais ridicule d'avoir été jaloux de son père et je m'en voulais de ne pas avoir compris que seul son père avait été aussi proche de lui que ce que j'avais pu l'être. Alors que Pierrick ouvrait enfin les yeux toujours larmoyant, son père lui sourit et commença à lui parler doucement.
« Pierrick, si tu savais comme je m'en veux. »
« Père ? Oh Père, ils ont dit que vous êtiez mort ! Je suis si content de vous revoir ! » s'écria Pierrick en se précipitant dans les bras de son père et en le serrant fortement. S'accrochant à lui comme s'il avait peur que si celui-ci s'éloignait de lui, il disparaîtrait.
Vu la grimace qui déforma le visage de l'adulte, j'étais certain que Pierrick n'allait pas apprécier la suite de cette conversation.
« Fils, ils ont raison. Je suis bien mort dans cet accident. »
« Non, c'est impossible ! Tu es là devant moi et je... » s'écria Pierrick oubliant dans sa détresse le « vous » protocolaire qu'il utilisait pour s'adresser à son père
«Tu es en train de dormir, Pierrick. Comme ton sceau est encore scellé, il va être difficile pour toi de croire et de comprendre ce que je vais te dire, mais rien de ce que je vais te dire maintenant n'est faux. Tout est vrai et tu dois t'en convaincre ! »
« Mais Père, je ne comprends pas ! Tu es là devant moi !»
« Écoute moi bien, fils. Bientôt ta mémoire va te revenir et tu devras faire attention car ceux qui ont provoqué ma mort ne s'arrêteront pas là et tu es en danger. »
« Provoqué votre mort ? » répéta Pierrick vraiment déboussolé.
« J'ignore qui exactement mais je crois que le conseil administratif de notre famille est corrompu. J'ignore quel but poursuive ceux qui m'ont lâchement tué mais je sais qu'il va te falloir te montrer prudent pour survivre. Ta seule chance est de rapidement retrouver la mémoire et de réactiver UEI 999 !»
J'étais déjà captiver par la scène qui se déroulait devant moi et profondément touché par la douleur qui émanait de Pierrick mais quand mon code fut prononcé mon attention se focalisa encore plus sur ce qu'avait à dire le père de Pierrick.
L'adulte posa une main sur la hanche de Pierrick qui se crispa de douleur retenant difficilement un gémissement de souffrance. La main du père de Pierrcik se mit à luire d'une douce lumière mauve et irisé. Le sceau sur la hanche de mon ami à ce contact se mit à pulser et à rougeoyer de plus en plus.
« Pierrick, il y a tellement de chose que j'aurais voulu te dire et t'expliquer avant de te quitter mais je n'ai malheureusement pas le temps. Grâce à mes connaissance et mon pouvoir d'Invath, j'ai pu enregistrer un peu de ma présence dans un espace onirique de transition que je savais que tu pourrais atteindre. Ton pouvoir a toujours été plus puissant que le mien et tu en as gardé une excellente maîtrise même si nous avons bloqué ta mémoire. »
« De quoi tu parles ? » S'inquiéta Pierrick tout en continuant a serrer son père contre lui craignant visiblement qu'il ne disparaisse
« Ta mémoire a été scellé il y a huit ans, Pierrick, quand notre vaisseau spatiale s'est écrasé sur cette planète. »
Malgré le moment dramatique que représentait ce souvenir pour Pierrick, j'éprouvais une certaine curiosité malsaine à voir ses réactions quand lui avait appris la vérité. Il m'avait donné le sentiment quand j'avais à mon tour découvert pour le crash, d'avoir toujours su ou de savoir gérer la situation bien mieux que moi.
Maintenant que je pouvais voir sa première réaction face à ses révélations, je commençais à comprendre pourquoi tout ceci semblait être facile pour lui. En dehors du fais qu'il avait eu plus de temps que moi pour s'y habituer, tout était plus facile à accepter que la mort de son père. Pierrick était prêt à tout croire, tout accepter pour repousser l'idée que son père avait définitivement rendu l'âme. Il s'en moquait d'être un extra terrestre, tant qu'il pouvait garder son père près de lui.
Je pouvais comprendre et j'aurais voulu lui épargner la désillusion qui n'allait certainement pas tarder à suivre, toutes ses vérités ne lui permettrait pas de garder son père. Les Archanti avaient beau être plus développé sur le plan technologique et scientifique, il y avait des miracles qui leur échappaient encore.
A suivre...