Me revoilà ! Ce n'est pas trop tôt me direz-vous et vous avez parfaitement raison !
J'espère que ce chapitre saura me faire pardonner...
Un remerciement particulier à mes deux relectrices : Miss Spooky Muffin et Pivoine ainsi qu'à tous mes reviewers : Agrumes Chocolat, Ayuluna, Cloclochan, Criket 32, Doudou 352, Edhil Mogul, frei100, Ichy-chan, Ketsuchi, Lilui, , Lunatanis, Lun, Lola, Lilang, Mouf-Mouf, Meanne77, Mydaya, Nass, Omb66, Pyrane, Pauline, Roxanne Black, Staphy, Sasuga, Superketchup, Shisen, Tine, Tsuda et vous tous lecteurs anonymes et inconnus qui avez partagé et j'espère apprécié cette histoire.
J'espère n'avoir oublié personne.
Un énorme merci à vous.
Votre dévouée ^^
Aceituna.
*
Encore dix pompes...
Le souffle court, Julien commença à plier les coudes jusqu'à ce que son menton touche le sol. Il venait d'avoir Romain au téléphone et celui-ci avait encore une fois annulé leur rendez-vous. Il avait perdu le compte, mais cela le contrariait, il n'avait pas l'habitude...
Julien remonta puis redescendit lentement. Il avait pourtant besoin de le voir, il avait toujours besoin de le voir...
Mais n'était-ce pas lui qui avait fixé les règles du jeu ? N'était-ce pas lui qui ne voulait pas lui laisser la moindre chance d'espérer quoi que ce soit de sa personne ? Alors où était son problème, exactement ?
Son problème ? Il ne supportait pas l'idée qu'il puisse y en avoir un autre. Et pourtant, lorsqu'il partirait, mieux valait savoir Romain dans les bras d'un tiers capable de le consoler que seul, non ?
Il secoua la tête en grimaçant. L'idée même le révulsait.
Monter, descendre...
C'était pourtant l'excuse qu'il avait offerte à Ethan lorsqu'ils avaient rompu. Il savait qu'il fréquentait d'autres personnes alors, même avant son accident. La fidélité n'avait pas été une base essentielle de leur couple et il n'en avait jamais souffert. Ils étaient bien ensemble, ils formaient un « beau » couple, assuraient au lit, autant qu'en soirée. L'amant avait juste été une manière comme une autre de rompre, sans avoir à se justifier outre mesure.
Ethan...
Lorsqu'il avait accompagné, quelques jours auparavant sa sœur -- page { size: 21cm 29.7cm; margin: 2cm } P { margin-bottom: 0.21cm } --Laura, fraîchement débarquée des États-Unis, pour l'aider à faire ses dernières emplettes avant Noël, elle n'avait cessé de lui parler d'Ethan. Julien savait qu'elle l'aimait beaucoup et qu'ils se revoyaient, mais il n'avait pas imaginé être encore un sujet dans leur conversation, surtout que lui n'en parlait jamais. Et pourtant, il avait appris qu'Ethan n'avait pas gardé plus de rancune que ça à son encontre, voire même qu'il attendait son retour au pays avec une certaine impatience...
Et alors qu'il l'avait quasiment oublié, il n'avait ensuite cessé de le voir. Mannequin de profession, Ethan avait enfin réussi à percer dans le métier et posait maintenant pour un grand nom du sous-vêtement masculin. Ses photos s'affichaient dans la rue, même ici en France, et bien qu'il n'y avait jamais prêté attention, il lui semblait maintenant l'y voir partout.
Il sentit une vague de douleur lui traverser les bras et s'affala sur la moquette de sa chambre. Il se mit sur le dos et observa un instant le plafond en reprenant son souffle, avant de poursuivre par une séance d'abdominaux.
Ethan l'avait même traqué jusque chez son kiné, la veille. Bien en vue, sur la petite table de la minuscule salle d'attente, le magazine était ouvert sur lui. C'était une publicité pour un parfum, où il posait torse nu, avec un regard capable d'enflammer le monde. Julien s'était saisi de la photo en souriant. C'était avec ce genre de regard qu'il l'avait accroché, qu'il les avait tous accrochés. C'était un pouvoir facile et distrayant, un pouvoir qu'aucun autre n'avait eu sur lui, jusqu'à Romain...
Et cela l'effrayait. Il ne pouvait être autant accro à quelqu'un, pas lui, pas aujourd'hui. Il se souvint avoir rejeté le magazine sur la table et fermé les yeux, visualisant toujours la photo de son ex dans son esprit, sauf que ce n'était plus lui. Ethan n'avait pas de tatouage et ses épaules étaient plus carrées. Il avait aussitôt rouvert les yeux, refusant d'aller plus loin dans la comparaison.
Ethan pourrait toujours lui servir de placebo à son retour aux États-Unis...
Il s'était prit la tête dans les mains et l'avait secoué.
Quel connard ! Comment cela pouvait-il ne serait-ce que lui traverser l'esprit ?
Il grimaça à ce souvenir, alors qu'il remontait une nouvelle fois le buste vers ses genoux. Il avait trouvé un moyen de coincer ses jambes pour que celles-ci ne travaillent pas trop, au contraire du reste de son corps. Il sentait ses abdominaux chauffer et accéléra la cadence.
Il avait fini par en parler à Marius, lui expliquant ce qui s'était passé au resto, qu'il l'avait appelé ensuite, qu'ils avaient couché ensemble, encore une fois... Qu'ils recommenceraient jusqu'à ce qu'il parte en juin... « Si tu peux te contenter de ça... », lui avait juste dit son ami, et la phrase continuait à tourner dans son esprit.
Monter, descendre.
« Je me contente d'être à sa dispo pour le moment... », murmura alors Julien entre ses dents.
Plus que six mois...
L'exercice était de plus en plus difficile et ses muscles ne cessaient de le lui faire remarquer, mais il continua encore. Cela faisait près de trois heures qu'il s'entraînait. Son corps devrait s'y faire, tout comme lui.
Tout à coup, son téléphone se mit à vibrer sur sa table de nuit. Il pivota sur le côté, étendit le bras et le saisit. Il y lut le nom de Romain sur l'écran et se redressa en essayant de reprendre son souffle.
- Oui ? dit-il essoufflé.
- Salut, c'est moi, je te dérange pas ? Tu as couru ?
La dernière question avait été faite sur un ton de reproche et Julien ne put s'empêcher de grimacer.
- T'inquiète ! lui répondit-il avec une pointe d'agacement, pour lui faire comprendre qu'il était assez grand pour prendre soin de lui et que l'histoire des trois étages avait été une erreur qu'il n'était pas prêt de recommencer, tant il avait souffert les jours suivants.
- C'est mon boulot, tu sais ! reprit Romain avec une pointe d'humour.
- Ouais ! Qu'est-ce que tu veux ?
La dureté de son ton le surprit lui-même mais la colère qu'il avait tenté de chasser en faisant de l'exercice était toujours là.
Romain ne répondit pas tout de suite et Julien regretta immédiatement son emportement. Mais au moment où il voulut s'excuser, l'infirmier reprit :
- Je t'appelais juste pour te dire que finalement, je suis dispo ce soir... alors si tu veux toujours qu'on se voie...
Julien ferma les yeux une seconde avant de répondre, essayant mentalement de prendre le contrôle des battements de son cœur.
- Je passe te prendre à quelle heure ?
- Dans deux heures, ça t'ira ?
- Ça devrait le faire. Tu as une envie particulière pour ce soir ? demanda alors Julien.
Le silence à l'autre bout du fil le surprit puis l'amusa.
- Je te parle pas de sexe, là ! s'exclama-t-il alors.
- J'avais compris ! lui répondit Romain un peu trop fort alors que Julien l'imaginait rouge d'embarras.
Il rit franchement.
- Pour faire original, je suis claqué, lui répondit Romain sur un ton morne, et je bosse demain... Enfin, j'aimerais un truc juste toi et moi... Toute la nuit... et je te parle pas que de sexe, là ! crut-il bon d'ajouter ce qui provoqua de nouveau l'hilarité de Julien.
- Ta coloc rentre pas ? demanda-t-il une fois calmé.
- Si, normalement... soupira Romain. Elle passe juste prendre ses bagages, tu vas me dire... Il faut vraiment que je me trouve un appart à louer pour pouvoir recevoir sans l'embêter !
« Parce que tu reçois beaucoup de monde ? » fut la première chose qui lui traversa l'esprit, puis ce fut l'image d'Alexis. Il se mordit la lèvre pour que les mots ne traversent pas sa bouche.
- Ok, je vais voir ce que je peux faire, répondit-il alors avec une colère retenue dans la voix.
- Quoi ? Qu'est-ce que j'ai dit ? demanda Romain, surpris.
- Rien, rien...
- Vraiment ? Si tu as prévu autre chose ce soir...
Le cœur de Julien rata un battement et un creux se forma dans son estomac.
Il allait annuler encore ?
- Non ! Je... On se voit tout à l'heure, ok ?
- Ok, lui répondit Romain, avant d'ajouter qu'il devait retourner travailler.
Julien raccrocha et s'allongea sur son lit en se traitant d'imbécile.
Il était jaloux...
Mais que faire ? Et s'il ne partait pas ? L'idée lui avait vaguement traversé l'esprit. Rester sur Paris, rester avec lui... Continuer à le partager ? Abandonner la finance, oublier New York... Y arriverait-il ? Lui qui ne s'était jamais sacrifié pour personne, lui qui avait l'habitude de poursuivre son chemin sans s'attarder sur les détails...
Romain n'était pas un détail... Mais Romain arriverait-il à lui faire oublier ses rêves ? N'en viendrait-il pas un jour à le lui reprocher ? Et si ça ne marchait pas entre eux ?
Juste son bonheur...
Et Romain n'attendait rien de lui, en plus... C'était ce qu'il avait dit, non ?
Il prit son téléphone pour organiser leur soirée, puis se redressa et alla prendre sa douche, avant de passer un bon quart d'heure devant sa penderie. Après quelques hésitations, il opta pour une chemise près du corps noire à rayures noires et un pantalon à pince de la même couleur. Rasé de près, il s'observa un instant dans la glace, satisfait : deux boutons ouverts, une chaîne en argent à grosse maille plutôt discrète, une coiffure déstructurée, la perfection faite homme ou tout simplement la classe. Il sourit et alla rejoindre sa sœur Jessica et son petit frère dans le salon, pour patienter jusqu'à l'heure de son rancard. Assez nerveux malgré son petit numéro devant le miroir, il préférait ne pas rester seul à broyer du noir. !
Lorsqu'il arriva au salon, ils regardaient un film. Julien s'affala alors sur le canapé l'air de rien et Jessica l'observa du coin de l'œil appréciatrice, avant de froncer légèrement les sourcils.
- What ? lui demanda-t-il en soupirant.
- Rien, je me demandais juste si tout va comme tu veux... Tu sembles soucieux... lui dit-elle en anglais.
- Non ça va ! répondit-il dans la même langue.
- Rancard ? poursuivit-elle.
- Non c'est juste pour tes beaux yeux ! lui répondit-il en français cette fois, mécontent qu'elle le perce à jour aussi facilement .
Il lui était pratiquement devenu impossible de lui cacher quoi que se soit et ce soir cela l'agaçait.
Jessica, vexée, le toisa du regard et se tourna de nouveau devant la télé, répondant au regard interrogateur de leur petit frère par un haussement d'épaules.
- I'm sorry, s'excusa alors Julien, honteux. I'm just tired.
- Tu n'as qu'à être à la maison alors ! s'exclama Paul, son petit frère dans un français approximatif, mais qu'il utilisait à chaque fois qu'il s'adressait à son grand frère. C'était devenu une sorte de code entre eux, étant donné que dans la famille Julien était le seul, avec leur mère à parler français.
Il sourit et reprit dans sa langue natale pour son petit frère.
- Pas ce soir mon grand... Demain...
- Oui, lui répondit le garçonnet déçu, since it's Christmas tomorrow !
- Je m'arrangerai pour nous trouver un peu de temps mon grand...
- Mais tu es en vacances non ? Avant tu passais toujours tes vacances with me...
Julien le regarda sans savoir que répondre. Avant son frère, sa famille passait avant tous les autres...
Avant.
- Paul, please, intervint alors Jessica avant de se pencher à son oreille et de lui souffler quelques mots qui firent glousser l'enfant.
- He's in love, really ? demanda-t-il à sa sœur avec étonnement.
- Jess ! s'exclama Julien sur un ton plein de reproche, He's seven !
Jessica se contenta de hausser les épaules
- Comme moi ! J'ai un amoureux aussi ! répliqua le garçonnet avec une certaine fierté,en français, laissant son frère et sa sœur bouche-bée
- Well, finit-il par dire presque désolé, c'est a fille.
- It's good ! s'exclamèrent en cœur Jess et Julien qui se turent ensuite et firent leur possible pour se concentrer sur le film en cours.
- S'il devient gay, Chris ne me le pardonnera jamais, murmura alors Julien dans sa langue natale en fixant l'écran avec un sourire.
- S'il est aussi compliqué que toi je n'en doute pas un instant ! répliqua Jess également dans sa langue natale.
---
Julien arriva à l'hôpital avec une bonne demi-heure d'avance. Il alla voir l'infirmière à l'accueil qui après s'être renseignée, lui demanda de patienter en salle d'attente où il avait pris ses habitudes.
Lui qui détestait les hôpitaux... Il ne devait jamais y avoir passé autant de temps depuis son accident de ski.
Machinalement, il étendit les jambes. Maintenant qu'il allait régulièrement chez le kiné, il avait fait de gros progrès et très prochainement, il n'aurait plus besoin de son fauteuil. Lui qui était si fier de son mètre quatre-vingt-neuf, il allait enfin pouvoir de nouveau regarder les gens de haut à plein temps. Aujourd'hui aussi, il aurait pu venir sans son fauteuil, mais l'attente à l'hôpital était souvent très longue et les chaises occupées.
De plus, en règle générale, Romain n'était jamais à l'heure. Julien devait toujours l'attendre et aujourd'hui ne faisait pas exception.
Il regretta immédiatement l'oubli de son livre de maths, en observant la salle pleine de monde, puis se fit une raison. « Ainsi, Romain ne se vexera pas de me voir encore plonger dans ses maths » se dit-il en soupirant.
Comme s'il arrivait à se concentrer en sachant que l'infirmier pourrait apparaître d'une minute à l'autre...
Lorsque son amant était là, même endormi, Julien devait faire un effort surhumain pour se concentrer sur ses chiffres, surtout depuis quelque temps.
Les minutes passèrent sans que Romain apparaisse. Lassé, il alla de nouveau voir la jeune fille de l'accueil, qui lui apprit que l'infirmier était encore coincé au bloc et qu'elle venait d'avoir tout juste l'information.
- Il devrait encore en avoir pour un quart d'heure... Avec les opérations, on ne peut jamais vraiment savoir, vous savez...
Oh oui, il le savait.
Il soupira puis se dirigea de nouveau vers la salle d'attente, avant de se décider à bifurquer sur sa droite pour voir autre chose. Il se mit à rouler au hasard des couloirs sans que personne ne lui demande rien. Au détour d'un chemin, il finit par apercevoir l'objet de ses fantasmes juste à quelques mètres de lui, vêtu de sa blouse de travail. Il avait les traits tirés et se massait l'épaule gauche en grimaçant. Julien roula vers lui en souriant de sa chance, mais bientôt l'infirmier entra dans une salle réservée au personnel.
Arrivé devant la porte, il hésita à le suivre, mais décida plutôt de l'attendre un peu plus loin dans le couloir, histoire de ne pas gêner la circulation des chariots. Après tout, Romain pouvait ne pas être seul dans la pièce et il n'apprécierait peut-être pas la surprise.
Il attendit donc quelques minutes, juste avant d'apercevoir Alexis. Également vêtu de la blouse bleue, il entra à son tour dans la salle sous le regard meurtrier de Julien. Ce dernier grimaça en serrant les poings. Il avait presque réussi à oublier que le médecin et l'infirmier travaillaient dans le même hôpital et s'était consolé en se disant qu'aucun d'eux ne voyait Romain autant qu'ils l'auraient souhaité...
Mais s'ils travaillaient ensemble... !
Il observa encore la porte sans avoir bougé de son point d'observation et hésita à aller lui dire ses quatre vérités. Il ne voulait pas les retrouver encore dans une auscultation d'amygdales improvisée...
Il vit soudain deux infirmiers sortir de la salle en gloussant et se demanda s'ils étaient partis pour les laisser seuls.
Il resta encore là, sans bouger de longues minutes jusqu'à ce qu'excédé, il décide de rentrer chez lui. Cependant, alors qu'il s'apprêtait à faire demi-tour, il vit Alexis sortir de la salle. Ce dernier souriait doucement et se dirigea vers lui sans le voir. Mais, lorsqu'il le reconnut enfin, son sourire s'accentua et il passa son pouce sur ses lèvres d'un air pleinement satisfait en le défiant du regard. Julien sut alors que deux options se présentaient à lui : lui casser la gueule ou partir.
Il opta pour la seconde et sans un regard en arrière, il rebroussa chemin jusqu'à la sortie un noeud à l'estomac.
*
Romain referma la porte de son placard en soupirant. Il était crevé, encore une fois. Il se demandait sérieusement s'il arriverait encore à tenir ce rythme. L'hôpital manquait d'infirmiers et beaucoup de ses collègues avaient posé leurs vacances de Noël. Au manque d'effectifs s'ajoutait le harcèlement à peine caché d'Alexis. Ce dernier avait bien compris le message lui semblait-il, mais il ne pouvait s'empêcher de le réclamer sur ses opérations et de lui imposer des horaires de fou. Romain ignorait si le médecin savait pour Julien, mais très certainement au vu de son emploi du temps et du nombre de fois qu'ils finissaient ensemble au bloc. Ce devait être une petite vengeance qui se résumait à un tout, sauf Julien.
Si Albane ne l'avait pas remplacé ce soir-là, il aurait été bon pour encore six heures de service, mais la condition du remplacement avait été claire : il devait voir Julien et lui parler...
Il regrettait maintenant d'en avoir discuté avec son amie et surtout, qu'elle ait réussi à le convaincre que rien ne le retenait ici et qu'il pouvait partir aux États-Unis. Elle avait même poussé le vice jusqu'à se renseigner sur la compatibilité des diplômes entre les deux pays. Il n'aurait finalement qu'un examen à passer, l'obstétrique n'étant pas au programme français et obligatoire là-bas. De plus, avec la pénurie d'infirmiers, il n'aurait aucun mal à trouver un poste 1 et obtenir sa « green card », surtout s'ils s'installaient en Californie où les formalités administratives étaient plus simples, apparemment. Seul son niveau d'anglais pouvait être pénalisant et c'était là que Julien devait intervenir, le plus tôt étant très certainement le mieux.
- Je suis sûr qu'il pourrait t'apprendre ! lui avait-elle répliqué. Il a toujours été très doué pour les langues !
Romain avait grimacé et elle s'était moquée de lui.
Il soupira. Comment lui dire ? Et surtout, pourquoi maintenant ? S'il ne voulait pas, ils ne resteraient pas ensemble... De toute façon, s'il ne disait rien, ils n'allaient pas rester ensemble non plus...
Pourtant, ce n'était très certainement pas le meilleur moment. Julien lui semblait nerveux depuis quelque temps, à fleur de peau. Romain avait mis ça sur le compte des examens de fin d'année, mais là, il était en vacances... Il aurait aimé en parler avec lui, mais en avait-il vraiment le droit ?
Il se frappa le front contre son vestiaire. Si c'était pour se prendre autant la tête, il n'aurait jamais dû parler au restaurant avec lui, il n'aurait jamais dû lui dire ce qu'il lui avait dit... Il n'aurait jamais dû boire non plus...
Depuis quand ne supportait-il plus l'alcool à dose modérée ? Parce qu'il n'avait pas vraiment bu lors du repas avec Alexis... La bouteille de vin n'avait même pas été vidée entièrement... mais il avait été nerveux. Il avait appréhendé alors la réaction d'Alexis, il aurait dû savoir qu'il n'y aurait rien eu à craindre. Alexis n'était pas du genre à faire d'esclandre au restaurant.
Non, il était plutôt du genre à venir l'emmerder dans les vestiaires, alors qu'il se rhabillait, pour des broutilles sans importance... Romain avait dû lui promettre d'aller voir son patient avant son départ et le médecin était reparti satisfait.
Il secoua de nouveau la tête pour chasser Alexis de ses pensées. Il avait bu ce soir-là... Il ne s'en était même pas rendu compte... Il aurait été tellement plus facile de faire comme s'il ne l'avait pas vu... Pourquoi était-il si difficile d'être avec Julien ? Et comment éradiquer la petite flamme d'espoir qui s'animait dans son cœur à chaque fois qu'ils passaient la soirée ensemble ? Trop rarement d'ailleurs.
Ce soir, il devrait lui parler et très certainement le perdre. Il avait du mal à s'y résoudre. Il soupira résigné, puis partit rejoindre l'élu de son cœur pour lui demander de patienter encore un peu.
Lorsqu'il arriva dans la salle d'attente, il fut surpris de ne pas l'y voir. Camille à l'accueil lui avait pourtant dit qu'il y était depuis une bonne heure. Il fronça les sourcils et regarda son téléphone : rien.
Soulagé, Romain sortit. Peut-être que Julien l'attendait dehors ? Il connaissait l'aversion de son amant pour les hôpitaux, mais avec ses horaires, pour se retrouver, c'était encore le meilleur endroit...
Il le chercha du regard et finit par l'apercevoir un peu plus loin, alors qu'il semblait se diriger vers la sortie.
Avait-il mis autant de temps pour que, lassé, Julien s'en aille ? Il se mit à courir après lui et finit par arriver à sa hauteur, essoufflé.
- J'ai été un peu long ? demanda-t-il alors en s'arrêtant pour reprendre son souffle.
Julien l'observa en silence, visiblement contrarié.
- J'avais besoin de prendre un peu l'air, finit-il par dire avec une certaine colère dans la voix, avant de se saisir de l'avant-bras de l'infirmier pour l'attirer à lui et l'embrasser.
Un baiser exigeant, possessif que Romain mit sur le compte de l'attente. Lorsqu'enfin Julien le relâcha, il eut besoin d'un certain temps pour s'en remettre. La tête lui tournait et il tituba légèrement, ce qui redonna le sourire à son amant.
- J'ai faim, se justifia Romain un peu honteux.
Il était inhumain d'embrasser aussi bien...
- Moi aussi... répondit Julien avec ce regard si particulier pour lequel il vendrait son âme sans hésiter.
Romain fit la moue pour le principe.
- Dans le coin on a un Japonais, un Indien voire un Chinois. Une préférence ?
- Les Champs.
- Maintenant ? demanda Romain surpris.
- Tu m'as demandé de trouver quelque chose pour toi et moi, toute la nuit, et donc on va sur les Champs.
- Tu m'emmènes pas en boîte au moins, hein ?
Il vit Julien lever les yeux au ciel.
- Avec mon fauteuil ?
- Ah oui c'est vrai ! répondit Romain avec une sincérité qui finit par dérider son amant.
Ce dernier prit son téléphone et appela un taxi en secouant la tête d'un air désespéré.
Dix minutes plus tard, dans la voiture, Julien indiqua l'adresse au chauffeur qui les déposa au niveau du magasin Louis Vuitton sur les Champs Elysées.
- On va où ? demanda une nouvelle fois Romain, intrigué, en soufflant dans ses mains pour créer un petit nuage de condensation.
- Si je te le dis, tu ne voudras très certainement pas y aller...
- Pourquoi ? s'offusqua Romain
Julien haussa les épaules et commença à avancer dans une rue perpendiculaire aux Champs jusqu'à arriver devant le « Four Seasons ».
- Jess n'arrête pas de me parler du bar de cet hôtel, ça te tente ?
- Pourquoi pas... répliqua Romain suspicieux.
« Toi et moi, toute la nuit... »
Quoi de mieux qu'un hôtel ? Romain frissonna. Il n'aimait pas les hôtels, il n'aimait pas ce qu'ils représentaient.
Ils pénétrèrent dans le hall de celui-ci et Romain dut reconnaître qu'il avait le mérite d'être différent de ceux qu'il fréquentait à l'époque. Ici, tout était luxe et volupté et il ne savait plus où donner de la tête tant tout ce qu'il voyait était beau.
Il suivit Julien et arriva dans un salon aux tons bleus et à l'atmosphère cossue. Ils s'installèrent à une table et Julien commença à regarder la carte des cocktails.
- On peut aussi grignoter un truc, si tu veux...
Romain ouvrit à son tour la carte et stoppa net sur les prix.
- C'est un peu cher... commença-t-il
- C'est Noël ! répliqua alors Julien. Détends-toi, je travaille, mes grands-parents sont plus que généreux en étrennes et je vis encore chez mes parents qui me paient mes études. Laisse-moi t'en mettre plein la vue, pour une fois !
Romain se détendit un peu et retira enfin la veste qu'il avait gardée jusqu'alors, en soupirant. Il prit la carte et choisit un cocktail sans alcool dans les moins chers, avant de la reposer et d'observer son amant qui regardait ailleurs. Il sentit ses joues chauffer légèrement lorsqu'il le détailla. Il était vraiment très classe ce soir-là, ses vêtements le mettant savamment en valeur. Il n'était d'ailleurs pas le seul à s'en apercevoir et il croisa de nombreux regards féminins, prolonger avec trop d'insistance leur observation. Romain se dit que Julien devait en être parfaitement conscient et cet air absent qu'il prenait, mi-concentré mi-soucieux, devait faire partie du personnage. L'infirmier soupira, légèrement jaloux. Il aurait préféré profiter du spectacle seul... Puis tout à coup, leurs regards se croisèrent et Julien s'empressa alors de détourner les yeux en fixant la moquette.
- Qu'est-ce qui se passe ? demanda Romain, vexé.
Julien secoua la tête sans pour autant le regarder. Il se détourna vers la baie vitrée en soupirant.
- T'inquiète, ça va passer... lui dit-il, visiblement mal à l'aise.
Il le vit ensuite plisser les paupières un instant puis se pincer l'arrête du nez.
- Qu'est-ce qui t'arrive ? insista alors Romain en fronçant les sourcils.
- Je... commença Julien en se raclant la gorge avant d'être interrompu par le serveur.
Il commanda un café avec un club sandwich. Romain prit la même chose, oubliant son cocktail, soucieux qu'il était de l'étrange comportement de Julien.
Allait-il lui dire quelque chose de désagréable ? Allait-il rompre ?
- Alors ? redemanda l'infirmier, de plus en plus nerveux.
Julien se mordit les lèvres et soupira encore une fois avant de promener ses yeux dans la salle, évitant toujours son regard.
- Enfin, c'est un truc con... Mais... ton pull...
- Quoi ? Il est pas bien ? Attends, je ne savais pas où tu m'emmenais... s'énerva l'infirmier en regardant son haut qu'il étrennait ce soir-là.
- Non c'est pas ça, au contraire...
- Au contraire ? Romain ne voyait vraiment pas où Julien voulait en venir.
- Le cashmere sur une peau nue ça me fait fantasmer ! Voilà, t'es content ?
Romain lui offrit alors son plus beau sourire en sentant ses joues s'empourprer légèrement.
« C'était juste ça... enfin non, pas juste ça ! » s'amusa Romain, en observant Julien plus attentivement avant de remercier mentalement Albane.
En effet, son amie venait tout juste de lui offrir le pull, sachant qu'elle ne serait pas là pour Noël et le trouvant trop beau pour qu'il reste dans son emballage. Il faut dire qu'elle avait réussi à trouver le modèle. D'une couleur similaire à ses yeux, un gris bleu qui lui seyait à merveille, avec des boutons devant dont deux étaient restés ouverts.
Julien semblait terriblement gêné et Romain ne put s'empêcher de pouffer.
- Remet'en, mon ange ! lui dit-il en se rendant compte trop tard du sobriquet employé.
Il se racla la gorge et observa Julien qui ne semblait pas réagir outre mesure, à part son air boudeur dû à son hilarité précédente plus qu'à ses mots.
Puis, se ressaisissant, Julien sourit et lui glissa l'air de rien quelques paroles à l'oreille qui le firent virer au pourpre instantanément. Il n'était pourtant pas prude et il en avait vu dans sa vie, mais Julien avait une manière de parler de sexe, une intonation dans sa voix rendue légèrement rauque qui aurait pu le faire rougir même s'il lui parlait météo.
Ce fut au tour de Julien de rire alors que leur commande arrivait et la soirée continua ainsi pour le meilleur.
---
Alors que la salle commençait à se vider lentement, Romain, fatigué mais heureux, laissa de nouveau son regard vagabonder sur le décor. Il reviendrait ici un jour, pour se souvenir de cette soirée... Une lueur de tristesse passa dans son regard, mais il la chassa très vite. Il leur restait encore la nuit...
Il regarda Julien qui lui sourit doucement, la tête visiblement ailleurs.
- Encore un problème de maths ? demanda Romain, moqueur.
- Même pas, j'ai trouvé mon palliatif ! lui répondit Julien les yeux brillants de malice avant de se rapprocher de lui, soucieux.
- L'idée de passer la nuit ici te paraît comment ? demanda-t-il après une certaine hésitation.
- C'est un peu trop, non ?
Julien sourit comme soulagé puis poursuivit :
- La chambre est payée, je n'aurais pas pu en réserver une sinon...
- Tu as quoi ? s'exclama alors Romain. Mais ce doit être hors de prix !
- Peut-être, mais entre toi et moi c'est pas une histoire d'argent, si ?
Non, juste une histoire de cul.
Romain ne répondit pas.
- Et puis, acheva Julien, ce n'est que pour une nuit...
Sa dernière phrase résonna comme un glas à leur histoire. Romain sentit la peur l'étreindre. Il devait absolument se lancer.
Demain, pour n'avoir aucun regret... Une nuit...
L'infirmier se leva alors, bien décidé à en profiter.
- On y va, répondit-il à la question muette de Julien.
- Je règle la note et j'arrive, tu n'as qu'à aller chercher la clef de la chambre, j'ai réservé à mon nom, répondit-il avec un air de plus satisfait.
Romain partit vers l'accueil et se présenta en tant que « Monsieur Morea ». Cela lui fit étrange, comme une jeune épouse qui paraît pour la première fois sous le nom de son époux. Il prit la clef, troublé et attendit Julien près de l'ascenseur. Ils montèrent ensuite les étages en silence, puis arrivèrent à leur chambre. Julien passa le premier alors que Romain allumait la lumière et restait dans l'entrée, émerveillé par la chambre, une « superior room » avait-il eut le temps de voir avant le retour de la jeune fille.
Tout à ses pensées, il ne fit pas attention à son mec qui avait déposé son fauteuil dans un coin et revenait vers lui, tel un félin prêt à bondir sur sa proie.
Il sursauta donc légèrement lorsqu'il sentit les lèvres de son amant s'emparer des siennes et son corps se plaquer contre la porte avec violence. Romain répondit avec la même ferveur au baiser affamé de son petit ami, une main perdue dans ses cheveux et l'autre sur son fessier, alors que Julien s'occupait déjà des boutons de son jeans.
Insatiable, Julien finit par lâcher les lèvres de Romain qui tentait de reprendre son souffle, et s'occupa de son cou, léchant, mordillant chaque centimètre de peau offerte, s'appliquant à y laisser sa marque. Romain étouffa un gémissement et s'attaqua à son tour avec tout autant d'empressement aux boutons de la chemise de Julien.
Soudain, ce dernier recula et s'interrompit dans ses caresses pour déboutonner les manches de son vêtement. Romain le regarda, haletant et stupéfait par la brusquerie du geste.
- Tu ne m'auras pas deux fois, s'expliqua Julien avant de reprendre tout aussi rapidement ses baisers.
Romain se contenta de sourire et envoya la chemise à l'autre bout de la pièce, avant de s'attaquer au pantalon de son amant, dont la ceinture avait elle aussi été retirée.
Il ferma les yeux un instant et se souvint de cette fameuse fois où il avait justement réussi à attacher Julien avec les manches de sa chemise derrière son dos et où ce dernier avait été contraint d'être de nouveau spectateur dans leurs ébats, ce dont il ne s'était pas particulièrement plaint. Romain le savait, son amant avait une préférence pour les passifs « actifs ». Julien n'était d'ailleurs jamais aussi bon dans l'art de l'amour que lorsque Romain se montrait combatif. Ce soir ne ferait pas exception, l'ardeur de Julien était pour lui une déclaration de guerre qu'il s'appliquerait à remporter.
Profitant d'un retrait léger de son partenaire afin que ce dernier puisse jeter son pantalon un peu plus loin, Romain se soustrait de l'étreinte de son amant pour se diriger vers le lit. Julien interrogateur le suivit du regard, visiblement satisfait du spectacle que lui offrait maintenant Romain. À moitié nu, il commença à l'aguicher en se masturbant avec délectation, avant d'enfiler un préservatif. Il sentit le regard brûlant de Julien sur lui et se permit de simuler son plaisir en le narguant ouvertement de ne pas en être l'instigateur. Ce qui visiblement commença à le contrarier sérieusement, à la grande satisfaction de Romain.
Le jeu venait à peine de commencer. Romain se passa alors la langue sur les lèvres et Julien prenant sûrement cela pour une invitation s'avança vers lui avec assurance. Romain sourit de toutes ses dents devant la prévisibilité de son amant jusqu'à ce que ce dernier, au lieu de lui sauter dessus, se contente de s'allonger à ses côtés sur le lit. Son compagnon avait maintenant ce regard qui le rendait tout simplement irrésistible et Romain comprit que Julien venait d'inverser les rôles. Bien décidé cependant à ne pas succomber aussi facilement, Romain continua son manège sans sembler prêter attention à Julien. Ce dernier ne s'en offusqua pas et profitant sans retenue de la vue de son amant à moitié nu, il s'adonna au plaisir solitaire à son tour.
Vexé, l'infirmier n'eut d'autre alternative que de se précipiter sur Julien et de l'embrasser avec fougue, effaçant en même temps le sourire victorieux de son partenaire.
Il venait de perdre une bataille, pas la guerre.
À cheval sur lui, l'infirmier commença à bouger les hanches doucement, puis il se pencha en avant pour effleurer du bout de la langue les abdominaux parfaitement dessinés de Julien. Il vit du coin de l'œil son compagnon faiblir légèrement et perdre de son arrogance alors qu'il s'attaquait maintenant à son nombril. Tout en s'appliquant à provoquer le plus de sensations à son compagnon avec sa langue, Romain, en profita pour retirer son pull, mais il n'en eut pas le temps. En un quart de seconde, il se retrouva sur le dos, plaqué sur le lit par le corps puissant de Julien qui le dominait maintenant. Ce dernier se saisit de ses poignets et les plaça au-dessus de sa tête. Romain tenta de résister pour la forme mais en fut tout bonnement incapable. Puis, il vit l'un des bras de Julien redescendre lentement le long de son flanc, provoquant en lui des frissons incontrôlables. Romain gémit sans même sans rendre compte. Il était à sa merci et ne demandait plus que ça. Julien s'amusa encore avec le corps soumis de son amant. Il le caressa du bout des doigts, l'effleurant à peine par moment, et lui murmura mille choses à l'oreille de sa voix suave et légèrement rauque. Romain s'arc-bouta soudain alors que les doigts de Julien frôlaient l'intérieur de ses cuisses.
Il n'en pouvait plus, il était au bord de l'asphyxie, en oubliant presque de respirer, mais Julien ne semblait pas encore prêt à arrêter son jeu. Il mordilla l'oreille de Romain avant de se repaître de son cou, laissant des traînées de salive brûlante sur son passage qui rendirent l'infirmier pratiquement fou. Il voulut crier mais aucun son ne réussit à franchir ses lèvres. Julien s'attaquait maintenant à son menton alors que sa main libre jouait toujours les indécises autour de son sexe tendu à l'extrême. Lorsque Julien releva la tête pour l'observer un instant, Romain n'avait plus aucun contrôle sur son corps. Il ne pouvait que gémir et lorsque la main mutine cessa également ses caresses, il crut mourir.
Suppliant, il vit Julien savourer pleinement sa victoire, puis avec la dextérité du félin, se saisir de son sexe pour l'avaler goulûment. Il le lécha avec avidité, imposant son propre rythme dans un lent mouvement de va-et-vient, qui finit d'achever l'infirmier.
Totalement impuissant, Romain tenta vainement d'étouffer les cris qui lui échappaient, mais il ne contrôlait plus rien. Il ne désirait plus que sentir la chaleur de la bouche de Julien sur sexe et se délecter des sensations divines qui parcouraient son corps comme des décharges électriques.
Romain n'avait plus conscience que du mouvement imposé par son amant qui allait en s'accélérant. Toujours plus vite, toujours plus loin...
Et puis ce fut le black-out, Romain vit des points blancs scintiller au travers de ses paupières closes avant de sentir une vague de chaleur le submerger et une explosion de sensation l'envahir. Il lui sembla flotter un instant, avant d'être envahi par une impression de bien-être, jamais égalée.
La pipe du siècle !
Après ce qui lui parut une éternité pour s'en remettre, il rouvrit alors les yeux, un sourire béat gravé sur les lèvres. Julien était maintenant à sa hauteur et le regardait en souriant doucement avant de reprendre ses baisers et de s'introduire lentement en lui, réveillant une nouvelle fois les sensations découvertes plus tôt et à peine disparues. Son corps se cambra sans qu'il y pensât afin d'offrir et d'obtenir encore et toujours plus de plaisir. Il sentait le poids de Julien sur lui, sa chaleur et son souffle dans son cou, c'était tout simplement jouissif.
Romain ferma de nouveau les yeux et se laissa aller avant de rassembler suffisamment de force pour réussir, dans un mouvement de bassin, à faire basculer Julien sur le dos, sans qu'ils ne se séparent pour autant.
À califourchon sur son amant surpris, il lui murmura doucement en cherchant son souffle :
- Laisse-moi m'occuper de ça...
Romain ferma les yeux et imposa à son tour un rythme à son petit ami, bercé par les gémissements naissants de ce dernier. Il ne sut exactement combien de temps dura leur danse, mais après un dernier effort, récompensé par le râle de contentement de son amant, Romain s'effondra sur Julien exténué.
Ils restèrent ainsi un long moment, le silence juste interrompu par le bruit du sang battant dans les tempes de Romain et sa respiration hachée. Julien, quant à lui, semblait avoir retrouvé un rythme cardiaque normal. Romain se décala légèrement sur le côté et joua distraitement avec les abdominaux de Julien, dessinant des arabesques du bout des doigts sur la peau douce de ce dernier avant d'y renoncer, trop épuisé.
Peu après, il sentit la main de Julien lui caresser doucement le dos, sous son pull. Puis, sans que Romain n'eût le moindre effort à faire, il le lui retira. Alors l'infirmier ferma les yeux et se laissa bercer par la respiration apaisante de son amant.
« Tout pour ne jamais oublier ça » pensa-t-il dans un demi-sommeil, « tout pour ne pas le perdre... » Alors, il pensa très fort à la petite phrase qu'il avait préparée pour Julien, celle qu'il ne dirait sûrement jamais et qui pourtant devait lui permettre de rester à ses côtés... Ou mettre plus simplement fin à leur idylle.
« Laisse-moi t'accompagner... »
Soudain, il sentit le corps de Julien se crisper sous le sien et comprit avec retard qu'il venait de prononcer la phrase à voix haute. Un froid indescriptible l'envahit tout à coup et sans ouvrir les yeux il abandonna la chaleur du corps à ses côtés pour s'allonger sur le lit en se recroquevillant.
Julien allait partir... Il n'arrivait plus à raisonner normalement. Le matelas bougea près de lui et il imaginait déjà son amant se rhabiller.
Romain serra les poings très fort et essaya en vain de calmer les battements de son cœur qui s'affolait de nouveau. Il était épuisé, au bord de la crise de nerf.
Il ne sut pas vraiment combien de temps cela dura, ni même si Julien était parti...
Après ce qui lui parut plusieurs minutes ou peut-être quelques heures, il sentit quelqu'un le secouer. « Peut-être la femme de chambre ? » se dit-il bien qu'il n'eut pas conscience d'avoir dormi.
- Romain ? l'appela une voix emprunte d'inquiétude.
Il frissonna, mais refusa encore d'ouvrir les yeux. On le secoua encore.
- Romain ? Ça va ?
Les intonations de la voix mirent du temps à arriver jusqu'à son cerveau. Il crut se tromper un instant, mais finit malgré tout par ouvrir les yeux et se tourner vers celle-ci. Seules quelques secondes s'étaient finalement écoulées, des secondes qui lui avaient pourtant paru des heures. Un échantillon de ce que serait sa vie sans Julien...
Il cligna plusieurs fois les yeux, se demandant s'il n'était pas tout simplement en train de rêver. Julien le regardait avec un mélange d'incompréhension et d'inquiétude.
- Ça va ? demanda-t-il une nouvelle fois.
Romain, la gorge sèche à présent, se contenta de hocher la tête. Julien parut rassuré.
- Qu'est ce que tu as dit ? demanda-t-il alors en se penchant légèrement sur Romain.
Ce dernier se redressa, presque soulagé. Julien ne l'avait pas entendu.
- Rien, articula-t-il avec difficulté.
- Si, insista alors son compagnon, tu veux m'accompagner, c'est ça ? Mais où exactement ?
Romain ferma de nouveau les yeux et se relaissa tomber sur le lit.
- Je... commença-t-il, un bras sur les paupières.
Sa respiration s'était faite plus difficile et une crampe lui tordait l'estomac. Les mots ne voulaient pas sortir. Soudain, il sentit la chaleur de Julien tout autour de lui. Il ouvrit les yeux et vit que son amant était au-dessus de lui, soutenant son corps à quelques centimètres du sien à la force des bras.
- Où veux-tu m'accompagner Romain ? demanda de nouveau Julien d'une voix douce et suave, aux intonations rassurantes.
- Aux États-Unis... lâcha-t-il alors d'une toute petite voix en détournant le regard.
Julien s'écarta d'une simple poussée pour se placer à ses côtés, les sourcils froncés.
- Tu veux partir avec moi ? souffla-t-il visiblement surpris.
Romain hocha la tête pour toute réponse.
J'aurais aimé oui...
- Mais... et l'autre ? demanda Julien en encrant ses yeux dans les siens.
- Quel autre ? interrogea Romain surpris.
- Eh ben l'autre... Alexis.
- Alexis ? Qu'est-ce qu'il vient faire là, lui ? questionna l'infirmier en se relevant sur ses coudes, les sourcils froncés.
- Eh ben... C'est ton mec, non ?
- C'était mon mec. On n'est plus ensemble depuis... deux mois maintenant. Pourquoi ? Tu pensais que j'étais toujours avec lui ? s'exclama Romain en se redressant.
Julien regarda le mur et se contenta de hocher la tête.
- Tu veux dire que pendant tout ce temps, tu croyais que je sortais avec vous deux en même temps ?
Nouveau hochement de tête.
- Et t'étais d'accord avec ça !
Romain se mit alors debout, estomaqué, et se saisit de son boxer qu'il enfila rapidement.
C'était incroyable... Comment Julien avait-il pu accepter ça, lui qui s'était montré si jaloux à l'époque...
A l'époque... Pouvait-on vraiment changer à ce point ? Où alors était-ce qu'il ne lui importait plus autant qu'avant...?
« Je ne peux rien t'offrir, l'adolescent que tu as connu a disparu ». Ses paroles résonnaient maintenant dans son esprit et Romain sentit la nausée l'envahir. Comment avait-il pu se tromper à ce point, comment avait-il pu y croire ?
- Attends-lui ! s'écria alors Julien en lui enserrant le poignet.
Romain tenta de se dégager, mais il tint bon.
- Lâche-moi ! dit alors l'infirmier d'une voix qu'il voulait glaciale, mais qui se révéla trop chevrotante.
- Non, pas maintenant ! Il ne m'éloignera pas de toi une nouvelle fois ! s'exclama Julien avec colère.
Romain le fusilla du regard, mais Julien n'y prêta pas attention et poursuivit en évitant cependant de croiser ses yeux.
- Je ne savais pas que tu n'étais plus avec lui... Comment j'aurais pu le deviner, Romain ? Je n'avais rien à t'offrir et tu n'attendais rien de moi !
- C'était des conneries ! Je voulais avoir une chance... s'exclama alors Romain à bout de nerfs.
Julien secoua la tête.
- Et tu as bien joué...
Il releva la tête et plongea son regard dans celui de son amant tout en relâchant son poignet.
- Je n'ai jamais été aussi jaloux de ma vie... Je ne veux pas te quitter Romain... Je veux que tu viennes avec moi aux États-Unis...
Romain l'observa, méfiant. Puis voyant que Julien était sincère, il se précipita sur lui en le serrant dans ses bras. Julien lui rendit alors son étreinte et souffla au creux de son oreille un « merci » que Romain eut juste le temps d'entendre avant de sombrer dans un profond sommeil.
*
Sept heures plus tard...
Marius se frotta les yeux et jeta un œil au réveil, qui affichait onze heures du matin, avant de prendre son téléphone portable qui lui annonçait qu'il venait de recevoir un message. Il se redressa dans son lit en faisant bien attention de ne pas réveiller le garçon endormi à ses côtés. La nuit avait été particulièrement courte et Marius se rappellerait encore longtemps du cadeau de Noël de Vincent.
À ce souvenir, un sourire béat s'inscrivit sur ses lèvres alors qu'il consultait distraitement ses SMS avant d'ouvrir de grands yeux et de jurer à voix haute.
- Qu'est-ce qu'il se passe ? demanda la voix endormie de Vincent.
- Julien va faire une connerie...
Vincent se redressa et se colla à Marius pour lire le message.
« À ton avis, jusqu'où irais-je par amour ? »
Vincent fronça les sourcils.
- Tu me réveilles parce que ton ami est d'humeur philosophe ?
- Non, parce qu'il va plaquer Romain...
- Le grand amour de sa vie ?
Marius hocha la tête tout en pianotant le numéro de Julien sur son téléphone. Ce dernier sonna occupé et il pesta.
- Arrête de t'énerver...
- Tu ne comprends pas, il est tellement persuadé qu'il ne peut pas le rendre heureux, qu'il va le laisser tomber pour son bien...
- Vraiment ? Et le mec, il en pense quoi ?
- Tu as raison ! Je vais appeler Romain...
- Marius, ne te mêle pas de ça...
Mais Marius ne l'écoutait plus, il recherchait frénétiquement le numéro de Romain. C'est alors qu'il reçu un nouvel SMS.
« ...Jusqu'où il faut pour ne jamais le perdre ! Ne t'en fais pas, j'ai compris la leçon ! Joyeux Noël, mon vieux ! »
Marius grimaça et Vincent sourit de toutes ses dents .
- Si je comprends tout, je n'ai plus à m'inquiéter du cas Julien, alors !
Marius lui sourit en retour avant de le plaquer sur le matelas.
- Non ! Mais tu devrais t'inquiéter de ce qui va t'arriver maintenant !
Vincent rit aux éclats avant que Marius n'emprisonnât sa bouche dans un long baiser passionné.
(FIN)
1 Vrai jusqu'en 2006
J'espère que cette fin vous convient mieux que la précédente ! J'avoue cependant que j'ai du mal à les abandonner... Peut-être les suiverais-je un peu jusqu'aux Etats-Unis, si je reste inspirée, et si vous êtes prêts à me rejoindre ^^
Sinon je pense que mes prochaines publications seront, (je dis ça pour ceux qui m'ont mit en "author alert") en Espagnol, on m'a demandé la suite de Un(e), deux, trois...
A bientôt j'espère !
Aceituna.