Bonjour, bonjour! Les excuses pour l'attente sont un peu devenues une habitude ces dernières semaines et je réitère aujourd'hui. J'avais un peu de mal à trouver la motivation pour écrire cette fin, à vrai dire. Mais bon... j'ai finalement revêtu mon habit de lumière – parce qu'il le fallait bien – pour vous livrer ce dernier chapitre qui, je l'espère, vous plaira.


20

Cinq mois plus tard

Vendredi 27 novembre
New York

« Alors, comment ça c'est passé aujourd'hui au boulot ? » me demanda Noah à l'autre bout du fil. « Ce n'était pas trop dur ? »

« Hum… oui, quand même un peu… » répondis-je doucement, inspectant d'un œil incrédule une paire de magnifiques escarpins rouges que je ne me souvenais plus de posséder. « Ils ont tous été très gentils avec moi ; même Claudi-nosaure ! »

« Tu vas leur manquer… Je suis sûr qu'ils ne trouveront jamais personne d'aussi bien que toi pour te remplacer ».

J'esquissai un sourire et jetai ma "nouvelle" paire d'escarpins dans le carton le plus proche. J'appréciais vraiment les efforts de Noah pour me remonter le moral, mais je n'étais pas sûre que me dire qu'ils ne trouveraient jamais mieux que moi pour me remplacer était la meilleure chose à dire à une personne qui vient de quitter son travail définitivement. Après tout, c'était moi qui me retrouvais totalement démunie ; pas eux. C'était moi qui n'avais plus de boulot et donc plus de revenu à la fin du mois…

L'adieu que m'avaient réservé mes collègues avait été extrêmement émouvant ; bon, il est vrai que je ne me souvenais pas avoir travaillé avec la moitié des personnes présentes, mais l'intention m'avait beaucoup touchée. Et l'étreinte de Neela m'avait même arraché une larme… Mine de rien, la jeune secrétaire allait me manquer ; elle m'avait toujours soutenue quoi que je fasse et nous avions été relativement proches tout le temps que j'avais travaillé au Lennox Hill. Et si je tombais sur une méchante secrétaire bostonienne qui me détestait et refusait de prendre des messages pour moi ? Ce serait trop injuste et bien trop dur à supporter !

« J'ai fait quelques recherches pour toi dans des hôpitaux de la ville » dit Noah. « Pour l'instant, je n'ai rien de bien concluant, mais ne t'en fais pas, je suis sûr qu'on va trouver »

« Et si on ne trouvait pas ? Et s'il n'y avait pas de travail pour moi à Boston ? »

« On va trouver, chérie. Fais-moi confiance. On cherchera aussi longtemps qu'il faudra, mais on finira par trouver ».

« Je te fais confiance ».

J'étais touchée par sa détermination et incroyablement rassurée d'avoir son soutien. Car Noah avait décidé que puisque j'étais celle qui avait dû quitter son job, il n'aurait aucun repos tant que je n'aurais pas retrouvé du travail ; aussi, il faisait des recherches pour moi depuis plus d'un mois à présent. Il m'était d'une grande aide ; grâce à lui je ne perdais pas espoir…

« Kit… ? Qu'est-ce que tu portes ? » demanda-t-il d'une voix légèrement rauque après une poignée de secondes de silence entre nous.

Je jetai un coup d'œil à mon survêtement gris chiné et à mon gros pull de l'université de Columbia. Pas très glamour. Ce jour-là, j'avais quitté mon boulot – définitivement – à une heure de l'après-midi, et en rentrant chez moi j'avais enfilé la tenue la plus confortable qui soit ; j'avais tout de même des cartons à faire, puisque mon déménagement était imminent.

« Euh… qu'est-ce que tu voudrais que je porte ? »

Je l'entendis rire à l'autre bout du fil et j'esquissai un sourire hésitant.

« Mmm… j'aime bien t'imaginer avec ce petit déshabillé rouge, tu sais… J'adore quand tu portes du rouge ».

« Oh… tu parles de celui avec lequel je t'ai ébloui pendant notre nuit de noces ? » demandai-je sur un ton malicieux.

« Oui, celui-là même… »

J'ai peut-être oublié de le préciser, mais Noah et moi étions à présent mariés. Nous avions officialisé notre union à la fin du mois de juillet à, je vous le donne en mille, Middletown. Ça avait été une cérémonie très, très intime, puisqu'il n'y avait que nous et nos témoins, Amelia et Mark. Nous avions voulu faire quelque chose de très simple, éviter la grande pompe, ce qui, à nos yeux, mettait l'accent sur le fait qu'il n'y avait jamais eu que nous. Nous n'avions jamais eu besoin de personne ; nous nous suffisions l'un à l'autre. Nous étions ensuite partis une semaine au lac Tahoe en Californie, où nous avions passé un séjour paradisiaque… Malheureusement, comme nous vivions pour le moment dans deux villes différentes, nous ne pouvions profiter de notre nouvelle vie de jeunes mariés que pendant les week-ends que je passais à Boston – pour, disait Noah, m'habituer à la ville. Ainsi, depuis notre mariage, nous ne nous voyions que deux jours sur sept. C'était parfois dur à gérer, mais ce n'était que temporaire.

« Oui… c'est exactement ce que je porte en ce moment… » mentis-je d'une voix langoureuse. « Et si tu veux, je peux même l'enlever pour toi… mais je te préviens : je n'ai rien en dessous ».

« Hum, non, non, vaut mieux pas… Je suis au bureau là, et… wow… je ne peux pas me permettre de fantasmer sur… enfin tu vois ».

J'éclatai de rire, imaginant Noah assis derrière son bureau, les mains crispées sur les angles de ce dernier, essayant de réprimer une érection…

« Ok, j'avoue. Je porte un vieux survêtement et un pull extra large… J'ai l'air d'une ménagère de moins de cinquante ans qui se prend pour l'héroïne de Flashdance ».

« Ouh, sexy… » plaisanta-t-il. « Je bande toujours, c'est normal ? »

J'éclatai de rire et il fit de même, puis je poussai un profond soupir avant de jeter un œil circonspect autour de moi ; mon appartement était un vrai foutoir et je ne savais même pas comment j'allais emmener tout ce bazar chez Noah !

« Tu me manques, ma puce… Quand est-ce que tu viens ? » dit-il, me tirant de ma contemplation désastreuse.

« Je prends le bus à huit heures ce soir. Tu viens me chercher à la gare routière vers minuit ? »

« Avec plaisir, princesse… Et au fait, tu n'as pas oublié pour demain soir, n'est-ce pas ? »

« Tu parles du dîner de Noël de ton cabinet ? Non, je n'ai pas oublié ».

« Super. Donc, on se voit ce soir. Il faut que je te laisse maintenant, j'ai du boulot qui m'attend ».

« Ok, alors à ce soir ».

« Je t'aime, Kit ».

« Moi aussi ».

Sur ce, il raccrocha et je poussai un énième soupir. Non, je n'avais pas oublié ce dîner de Noël à son cabinet au sujet duquel je n'étais, dès le départ, pas très enthousiaste, mais j'étais sa femme et il avait besoin de ma présence. Apparemment, il était question de faire bonne impression sur un de ses patrons susceptible de lui offrir une promotion… Vraiment, pour faire bonne impression, il n'avait pas choisi la bonne personne… Quoi qu'il en soit, je n'avais rien à me mettre pour l'occasion et je songeais à prendre un peu de temps pour faire les magasins une fois à Boston (je sais bien que New York aurait été l'endroit rêvé, mais je n'avais tout simplement pas le temps). J'avais même convaincu Zoë et Lisa de venir me donner un coup de main – disons plutôt que je leur avais payé le billet aller-retour en bus – et elles viendraient me rejoindre à Boston le lendemain par le premier autocar du matin…

Je grimaçai et jetai le combiné du téléphone sur le lit pour me concentrer à nouveau sur mes cartons ; Noah n'aurait jamais assez de place chez lui pour mettre tout mon bazar ! Son appartement n'était pas spécialement petit ; c'était moi qui prenais beaucoup de place… Sa penderie, par exemple, était bien trop petite pour contenir ses affaires et les miennes. Horreur ! Cela voulait-il dire que j'allais devoir faire un tri dans mes vêtements ?! Non, hors de question ; j'avais déjà perdu mon boulot, il était hors de question que je perde aussi mes précieuses affaires ! J'avais déjà rempli un grand carton rien qu'avec mes chaussures, et une énorme pile de pantalons attendait sagement d'être entreposée dans une boîte. Je commençais à me faire à l'idée que j'allais bel et bien devoir faire un tri quand la sonnette de la porte retentit. Je soupirai et me levai péniblement pour aller ouvrir, sans même me soucier du fait que j'avais l'air d'un pneu, vêtue comme je l'étais…

Une chance pour moi, la personne qui se tenait sur le pas de ma porte avait également l'air d'un pneu…

« Est-ce que j'interromps quelque chose d'important ? » demanda Amelia avec un léger sourire moqueur sur les lèvres.

« Un peu, oui », répondis-je. « J'étais en pleine communion spirituelle avec une pile de jeans… Mais bon, maintenant que tu es là tu peux entrer ».

Elle secoua la tête doucement et entra ; je fermai alors la porte derrière elle. Ce qui me valait le plaisir de sa visite, je n'en avais aucune idée ; je croyais même qu'elle était supposée travailler à cette heure-là.

« Dis donc, ça avance bien ton déménagement », dit-elle sur un ton légèrement ironique, alors qu'elle retirait son manteau, arborant ainsi le ventre rond et proéminent de ses six mois de grossesse.

« Tu es venue pour superviser mon travail ? » demandai-je. « Parce que je n'ai pas besoin d'un contremaître et avec ta bedaine je ne pense pas pouvoir compter sur ton aide… »

Elle libéra un éclat de rire et dégagea une pile de livres qui encombrait mon canapé afin de se faire une place pour s'y installer.

« Non, rien de tout ça », dit-elle. « Je sors de chez mon gynéco et j'ai eu envie de passer pour voir où tu en étais… Je sais que tu as quitté ton travail aujourd'hui et je me suis dit que tu avais peut-être envie d'un peu de soutien ; c'est aussi à ça que sert une grande sœur, non ? »

J'esquissai un sourire touché et allai m'installer à-côté d'elle sur mon canapé – je m'assis sur les livres, cela va de soi, libérant un petit couinement de douleur avant de me redresser pour les pousser plus loin. Amelia m'adressa un regard plein de sympathie qui ne fit que me rappeler que c'était bientôt fini ; rien ne serait plus comme avant. Ma vie allait radicalement changer.

« Alors, quand est-ce que tu déménages ? »

« Bientôt… Je dois rendre l'appartement au propriétaire à la mi-décembre, donc j'y vais petit à petit ».

Ma sœur hocha la tête d'un air entendu, mais ne dit rien. J'avais l'impression qu'elle voulait le faire, mais qu'elle s'était retenue parce que ça ne servait à rien. Je connaissais pertinemment la question qu'elle voulait me poser ; elle l'avait déjà fait. Tu est sûre de ce que tu fais, Kate ? Comment le pourrais-je ? Comment pourrais-je être sûre à cent pourcents que déménager à Boston était la bonne solution ? J'aurais aimé pouvoir en être sûre, mais c'était plus difficile que je ne l'avais imaginé au départ. J'aimais Noah, il n'y avait aucun doute à avoir là-dessus ; et je voulais vivre avec lui. Mais je n'avais pas eu bien conscience de tous les sacrifices que ça me demanderait. J'allais devoir m'ajuster, je n'avais pas d'autre choix ; quoi qu'il arrive, il était bien trop tard pour revenir en arrière.

« Kit, pourquoi tu fais cette tête ? Je croyais que tu étais contente de partir… »

Apparemment, mon expression légèrement nauséeuse ne lui avait pas échappé.

« Mais je suis heureuse, Mia… J'ai juste… peur. Je suppose que c'est normal ».

« Tu sais, Boston n'est pas à l'autre bout du pays ».

« Ce n'est pas la question… Ma vie va changer, je vais devoir tout reprendre à zéro. Je n'arrive pas à croire que j'ai tout quitté pour un homme ! Tu vas peut-être trouver ça romantique, mais ça fout une trouille d'enfer ! »

« Mais ce n'est pas n'importe quel homme… » dit-elle doucement en glissant sa main sur l'arrière de ma tête. « C'est Noah ».

« Je sais oui », soupirai-je en posant paresseusement ma tête sur son épaule. « Et je dois reconnaître qu'il fait ce qu'il peut pour me rendre les choses plus faciles… »

« Tu vois… Et puis vous êtes mariés, maintenant, les choses vont être différentes ! Et bientôt vous aurez des enfants, et tout… »

Je me redressai précipitamment et lui adressai un regard méfiant, fixant tantôt son visage et tantôt son gros ventre. Bientôt des enfants ? Et puis quoi encore ?! Elle m'adressa le sourire cynique de celle qui a réussi son mauvais coup et je plissai les yeux.

« Fais pas cette tête, Kit, je suis sûre que t'as déjà choisi les prénoms… »

« Ta gueule. C'est même pas vrai ».

Elle éclata de rire et je l'imitai, l'atmosphère nettement plus détendue. Non, non et non, je n'avais pas choisi les prénoms de mes futurs enfants avec Noah ! Enfin, oui, je l'avais fait à une époque lointaine ; mais tellement lointaine que je ne me souvenais plus de ce que j'avais sélectionné. Enfanter ne faisait pas partie de mes projets immédiats ; je pensais bien avoir un jour les enfants de Noah, mais j'avais des choses autrement plus importantes que cela auxquelles penser pour le moment.

« Et toi, alors ? » demandai-je, espérant ne plus être le centre de l'attention. « Comment ça se passe ? »

Amelia frotta son gros ventre fièrement et à en juger par son sourire, tout allait pour le mieux. Elle avait eu un peu de mal à se faire à cette nouvelle grossesse qui tombait à peine un an et demi après le décès de son deuxième enfant, mais à présent tout semblait rouler. Elle était retournée vivre avec Mark – pour le plus grand bonheur d'Allie – et toute la famille semblait parfaitement ravie de l'arrivée de ce nouveau membre. Même notre père, avec qui elle avait renoué un contact certes encore un peu tendu, était heureux de ce nouveau petit enfant.

« Ça se passe très bien », répondit-elle, le sourire jusqu'aux oreilles. « D'après mon gynéco, je me porte très bien et mon bébé aussi ! »

« Je suis ravie de l'entendre. J'espère pouvoir venir vous rendre visite le plus souvent possible quand le petit sera né ! »

Le sourire d'Amelia s'estompa légèrement et se transforma en rictus sympathique, puis elle saisit ma main qu'elle serra affectueusement dans la sienne.

« Je suis sûre que ce ne sera pas un problème », dit-elle doucement. « Vivre dans deux villes différentes ne changera rien entre nous, d'accord ? »

Je hochai la tête avec un léger sourire et elle me serra dans ses bras.

*

Boston

Noah passait en revue une série de documents juridiques relatifs à des affaires en cours ; il les relisait pour la deuxième fois, espérant retenir quelque chose. En effet, le jeune avocat avait beaucoup travaillé et très peu dormi, et ses yeux se fermaient tous seuls. Il n'avait envie que d'une chose : que sa journée soit finie et qu'il puisse enfin rentrer chez lui faire une sieste avant d'aller chercher Kate à la gare routière. Malgré tout, il savait que ça allait être compliqué ; il avait énormément de choses à faire et s'il ne les faisait pas d'ici une heure, il allait devoir poursuivre à domicile.

Il fut soudain alerté par la sonnerie de son téléphone et fut profondément reconnaissant de cette interruption. Il saisit le combiné et l'appuya nonchalamment contre son oreille, réprimant un bâillement.

« Maître Curnyn ? » dit la voix mure d'Abigail, sa secrétaire, à l'autre bout du fil. « Il y a quelqu'un pour vous sur la ligne deux. Je peux vous le passer ? »

« S'il vous plait », répondit Noah d'une voix lasse. « Euh… Abigail ? Pourriez-vous m'apporter un café, s'il vous plait ? Noir et sans sucre ? »

« Certainement. Je vous mets en ligne ».

« Merci ».

Noah se sentait mal à l'aise de demander à qui que ce soit de lui apporter telle ou telle chose, et ça devait bien être la première fois qu'il demandait à Abigail de lui amener un café. Il n'avait pas été habitué à ça ; il n'avait jamais eu personne à son service et préférait d'ordinaire exécuter lui-même ses propres demandes.

« Monsieur Curnyn ? »

Une voix masculine à l'autre bout du fil l'arracha à ses pensées, et il se redressa sur sa chaise, comme s'il avait peur que son interlocuteur ne puisse le voir avachi sur son siège.

« Oui ? »

« Ici Lionel Hurst de l'agence ; nous nous sommes parlés au téléphone la semaine dernière ».

« Oh, oui, je me souviens ; bonjour Monsieur Hurst ».

« Bonjour. Je vous appelle pour vous dire que les locaux qui vous intéressent sont encore disponibles. Vous pouvez venir visiter dès lundi ».

« Vraiment ? Merci infiniment ; nous passerons lundi dans ce cas. Entre midi et une heure ? Ou est-ce que vous préférez en fin d'après-midi ? »

« Entre midi et une, c'est parfait. Alors à lundi, Monsieur Curnyn ».

« Au revoir et encore merci ».

Noah raccrocha au moment même où Abigail passait la porte de son bureau, une tasse de café à la main. Le jeune homme regarda la secrétaire s'approcher de son bureau et lui adressa un sourire reconnaissant.

« Merci, vous êtes un ange ».

« Je vous en prie. Vous semblez fatigué Noah ; vous devriez sans doute faire une petite sieste ».

« Je suis tout à fait d'accord avec vous, mais je n'ai pas vraiment le temps, malheureusement ».

Noah adressa un sourire fatigué à Abigail et fut touché par son air sincèrement inquiet. Cette dernière, une femme d'une cinquantaine d'années au moins, avait toujours eu tendance à le materner, et ce même si leurs rapports n'avaient jamais dépassé du cadre professionnel : ils n'étaient pas amis, ni confidents. Mais dans toute sa candeur, Abigail trouvait que le jeune avocat travaillait beaucoup trop. Elle se disait toutefois que maintenant qu'il s'était marié et qu'il avait une vie de couple à entretenir, il lâcherait un peu la bride…

Après ces quelques mots échangés, la secrétaire quitta le bureau de Noah qui, après une gorgée de café, se pencha à nouveau sur ses dossiers. Il était cependant bien trop excité pour travailler, à présent : le coup de fil qu'il avait reçu de l'agence immobilière ne quittait pas son esprit. Il préparait cette surprise pour Kate depuis plus de deux semaines, et il espérait seulement que ça lui plairait…

*

Samedi 28 novembre
Boston, 1:12 a.m.

L'appartement de Noah était plongé dans le noir complet quand j'y entrai. Je remis mes clés dans mon sac à main et traînai péniblement mon énième valise à l'intérieur de la pièce avant de la laisser reposer contre le canapé du salon. Intriguée et légèrement agacée, j'ouvris les stores en grand afin de laisser entrer la lumière de la lune, constatant de ce fait que l'appartement était bel et bien vide. Noah n'était pas venu me chercher à la gare routière comme il me l'avait promis, et je me demandais bien pourquoi ! Bon, je n'allais pas en faire toute une histoire, j'étais parfaitement capable de prendre un taxi ; mais dans ce cas il aurait pu me prévenir pour que j'évite de l'attendre dans le froid pendant une demie heure ! J'espérais qu'il avait une bonne excuse !

J'ôtai mon écharpe et mon manteau que je laissai suspendus au dos du canapé, et pris le chemin de la chambre. Je n'avais pas pris la peine d'allumer la lumière, puisque de toute façon je n'avais pas l'intention de m'attarder. J'avais sommeil et l'idée qui me semblait la plus alléchante à ce moment-là était de me laisser tomber paresseusement sur le lit moelleux de Noah. Sauf que le lit moelleux de Noah était déjà occupé, par Noah lui-même. J'appuyai mon épaule contre le cadre de la porte et le regardai dormir entièrement habillé, étalé sur le ventre comme une baleine échouée sur la plage, et il n'avait même pas pris la peine de poser sa tête sur un coussin.

J'ôtai mes chaussures et m'approchai doucement avant de m'accroupir à-côté du lit, mon visage au niveau du sien. Il était profondément endormi, les yeux hermétiquement clos et les lèvres légèrement entrouvertes. Il dormait si paisiblement que j'hésitai grandement à le réveiller ; mais je me dis malgré tout qu'il se sentirait nettement plus à l'aise une fois débarrassé de sa chemise et de son pantalon de costume.

Je glissai alors le dos de mes doigts sur son visage et parcourus la courbe de ses lèvres avec mon pouce. Il bougea doucement dans son sommeil, et je me penchai pour déposer un baiser sur son front.

« Noah… » appelai-je d'une voix douce.

« Hum… »

« Réveille-toi, mon cœur, allez… Couche-toi correctement sous les draps ».

Il grogna légèrement et se retourna paresseusement pour se mettre sur le dos. Je m'assis alors sur le bord du lit et me penchai au-dessus de lui ; il ouvrit doucement ses yeux engourdis par le sommeil.

« Kit… ? Tu es là… »

« Oui, je suis là ».

Il se redressa alors si vite que je dus faire un bond en arrière pour éviter que sa tête ne vienne percuter la mienne.

« Merde ! » s'exclama-t-il. « Qu'elle heure est-il ? »

Visiblement étourdi de s'être relevé aussi vivement, il se laissa tomber en arrière et porta sa main à son front. Je laissai échapper un éclat de rire bref et posai ma main sur son bras.

« Une heure et quart », répondis-je, amusée.

« Du matin ? Et merde ! Chérie, je suis désolé… J'avais du travail à finir et je voulais juste faire une pause ; je voulais juste… dormir une petite heure ».

« Ce n'est rien, rassure-toi. Je comprends ».

« Oooohh… je suis un mauvais mari ».

« Mais non, qu'est-ce que tu racontes ? » demandai-je en riant à moitié. « Tu n'es pas un mauvais mari ».

« Un bon mari ne t'aurait pas fait prendre le bus aussi tard pour après te faire attendre à la gare dans le froid sans jamais se montrer… »

Je ris une fois de plus et me hissai sur le lit ; je passai alors une jambe de chaque côté de ses hanches et je m'allongeai sur lui, le visage plongé au creux de son épaule. Aussitôt ses mains vinrent se promener sur mon dos, glissant sous mon pull et traçant du bout des doigts des arabesques sur ma peau nue. J'appuyai mes lèvres contre son cou et laissai échapper un soupir de satisfaction.

« Ça n'a aucune importance maintenant », murmurai-je. « Et puis peu importe que tu sois un bon ou un mauvais mari ; tu es tout ce que j'ai alors je suis bien obligée de faire avec… »

Il rit et je sentis sa poitrine bouger sous moi. Je frissonnai au moment où ses doigts caressèrent mes flancs, et il dut le sentir car il posa alors ses mains à plat sur ma peau. Je relevai la tête et m'appuyai sur mes coudes pour pouvoir le regarder en face et il m'adressa un sourire las qui allait de pair avec ses yeux engourdis par le sommeil.

« Tu ne regretteras pas », dit Noah en dégageant une mèche de mes cheveux qui retombait entre mes yeux.

« Quoi donc ? »

« Tout ça. Notre mariage, ton déménagement… Je ferai tout ce qui est possible pour que tu ne regrettes rien ».

Je souris et me penchai doucement pour presser mes lèvres contre les siennes. Notre baiser tendre et amoureux devint petit à petit plus passionné et je sentis son étreinte se serrer autour de ma taille. Nos langues s'entrechoquèrent et je glissai ma main derrière sa nuque de sorte à approfondir notre embrassade. Je gémis dans sa bouche et mes mains partirent à la recherche des boutons de sa chemise que je défis hâtivement, sans jamais briser l'étreinte de nos lèvres. Je posai mes paumes à plat sur la peau de son torse et il grogna de satisfaction, puis je libérai sa bouche pour partir explorer la peau de son cou et de sa poitrine. Mes baisers étaient cependant très lents et presque paresseux ; en effet, malgré mon excitation due au fait de revoir Noah après une semaine de séparation, je n'en avais pas moins pris quatre heures d'autocar dans les dents au milieu de la nuit. Et ce, bien entendu, après avoir passé mon après-midi à faire des cartons… En résumé, j'étais extrêmement fatiguée et je m'apercevais à présent que là, tout de suite j'avais plus envie de dormir blottie au chaud dans les bras de Noah, que de coucher avec lui… Je levai la tête vers lui et poussai un soupir auquel il répondit par un sourire fatigué ; ses yeux étaient à demi clos, et je ne savais pas comment il n'était pas déjà tombé dans le sommeil pendant que je l'allumais paresseusement…

« Ça te dit qu'on aille dormir ? » proposa-t-il avec un sourire, tout en caressant tendrement ma joue.

« Oui, je crois que ça vaudra mieux… »

Je déposai un autre baiser sur ses lèvres et le libérai de mon étreinte. Ensuite je me déshabillai entièrement, ne gardant sur moi que mes sous-vêtements, et me glissai sous la couette avant de me blottir contre Noah qui s'y trouvait déjà. Il glissa alors un de ses bras sous ma tête et enroula l'autre autour de ma taille, et je tendis le cou pour réclamer un dernier baiser avant de m'endormir presque immédiatement, son front appuyé contre ma tempe, son souffle au creux de mon épaule.

*

« Tu as quelque chose à mettre avec ça, ou on doit aussi aller acheter des chaussures ? » me demanda Lisa, alors que je payais la robe que j'allais mettre le soir même pour la soirée de Noël des avocats.

« J'ai des escarpins rouges qui mettront une petite touche de couleur », répondis-je, obtenant du même coup la totale approbation de la caissière qui hocha la tête vivement.

J'avais opté pour une robe de cocktail très simple en mousseline de soie, mi-longue, sans manches, larges bretelles, décolleté en V et noire. Je m'étais dit – peut-être me trompais-je – que les avocats faisaient plus dans la sobriété que dans l'extravagance… Je ne voulais pas faire honte à Noah, aussi j'avais décidé de me fondre dans la masse. Mais hors de question que je me pointe là-bas habillée comme pour un enterrement ! Une touche de couleur, aussi petite soit-elle, me semblait absolument essentielle.

« Ah oui, bonne idée ! » s'exclama Lisa, apparemment emballée. « Et mets aussi une bonne couche de rouge à lèvres rouge sang ».

« C'était prévu… » répondis-je pensivement.

Lisa, Zoë et moi quittâmes la boutique spécialisée en robes de soirée dans laquelle nous étions entrées à peine une heure auparavant et nous nous engageâmes dans une des avenues les plus bondées de la ville de Boston. Il n'était que dix heures du matin ; nous avions fait très vite. Je n'avais pas spécialement envie de me casser la tête pour trouver une tenue, aussi je ne m'étais pas montrée particulièrement difficile : la première dans laquelle je m'étais trouvée jolie avait été la bonne.

« Comment tu peux habiter ici ? » lança Zoë qui, frustrée de ne pas pouvoir passer la journée avec son cher et tendre, faisait la moue constamment. « Je veux dire… tu ne crois pas que New York va te manquer ? La ville de New York ? »

« Tu sais, j'ai vécu presque douze ans à Manhattan… Je pense qu'un peu de changement ne pourra pas me faire de mal », répondis-je, espérant avoir l'air convaincue.

« Euh… mouais. Moi j'ai l'intention de vivre à New York toute ma vie ! »

Lisa laissa échapper un petit rire ironique.

« Bien sûr Zoë, tu dis ça maintenant », dit-elle. « Mais imagine un peu : Connor te demande en mariage et toi tu es tellement amoureuse que tu dis oui sans hésiter. Et là, il te dit : mais il faudra qu'on aille vivre à… Tucson en Arizona. Tu fais quoi ? Tu le quittes parce que tu tiens trop à New York ? »

« Bah, j'en sais rien, moi ! »

« Tu vois, tu ne peux pas te permettre de juger… Et encore, Kate a de la chance que ce soit Boston ! Tu t'imagines aller vivre à l'autre bout du pays là où il y a des cactus ? »

J'éclatai de rire, à la fois amusée, soulagée et convaincue par le raisonnement de Lisa.

« Non, là je crois que j'aurais fait une crise ! » m'exclamai-je.

« Tu m'étonnes ! Tu sais, moi aussi d'une certaine façon j'ai quitté New York… Je vis à Brooklyn ».

« Lisa, Brooklyn c'est aussi New York… » dit Zoë sur un ton las.

« Je le sais bien, je ne suis pas complètement conne ! » s'exclama mon amie blonde alors que nous tournions à l'angle d'une rue. « C'est une façon de parler, c'est tout ».

Nous marchions à présent le long d'une avenue beaucoup moins peuplée, et des voitures étaient stationnées au bord du trottoir.

« Kate, tu es sûre que tu sais où on va ? Je ne me souviens pas être passée par ici », dit Zoë l'air peu rassuré.

« Oui, c'est par-là… On est à Beacon Hill, c'est un quartier résidentiel, c'est pour ça qu'il y a quelques rues moins peuplées… »

« Si tu le dis… »

Nous marchâmes en silence pendant quelques instants, puis Zoë et Lisa se remirent à débattre pour savoir si Brooklyn devait être considéré comme "New York" ou non. Lasse de leurs gamineries, je préférai rester à l'écart et profitai de ces instants de pause mentale pour observer les environs. J'étais déjà venue dans ce quartier auparavant et je savais qu'il était charmant ; je n'avais jamais vu autant de maisons de brique de toute ma vie, et encore moins des cottages à l'anglaise en plein milieu de la ville ! La rue dans laquelle nous nous trouvions était ni plus ni moins qu'un alignement de maisons collées les unes aux autres, de brique couleur rouille, précédées d'une petite allée de pierres, d'une dizaine de marches, et pourvues de quelques mètres carrés de verdure devant la façade. Ça, c'était des jolies maisons. Nous marchâmes encore quelques mètres, nos pas toujours rythmés par les conversations puériles de mes deux amies, puis soudain je m'arrêtai brusquement. Lisa, qui ne s'était pas aperçue de ma halte, me rentra dedans. Et après avoir lâché un "hey" bruyant, elle suivit mon regard. Ce dernier avait été attiré par une des entrées dont la porte était ouverte ; une femme se tenait dans l'encadrement, un porte-documents à la main et un panneau "A Vendre" était planté dans le petit carré de verdure.

« Qu'est-ce qu'il y a ? » demanda Zoë.

Une idée folle venait de traverser mon esprit, et je ne savais pas si je devais en tenir compte ou non. Mon temps de réflexion ne dura qu'une fraction de secondes, puis je décidai de me lancer.

« Vous voulez bien m'attendre ici ? Je vais jeter un coup d'œil ».

Avant même qu'elles n'aient eu le temps de répondre, je me lançai dans l'allée et gravis les quelques marches qui me séparaient de celle qui semblait être un agent immobilier. Elle m'adressa un large sourire que je lui rendis, et je me demandai par où commencer.

« Euh… cette maison est à vendre ? » demandai-je, effrayée à l'idée qu'elle puisse me dire "non" ou pire, "plus maintenant".

« Elle est à vendre », me répondit la femme, toujours aussi souriante. « Vous êtes intéressée ? »

Sa question me prit un peu au dépourvu. Etais-je intéressée ou non ? Je n'étais pas spécialement à la recherche d'une nouvelle habitation ; j'avais déjà un endroit où vivre. Mais cette maison… J'étais totalement hypnotisée par son aspect pittoresque, à la fois moderne et ancien. Mais de là à dire que j'étais intéressée

« Assez, oui », m'entendis-je répondre.

« J'ai rendez-vous avec un acheteur potentiel pour faire visiter… Si vous voulez en profiter… »

« Je… euh… Je ne peux pas maintenant… c'est que… » bafouillai-je. « En fait, je ne sais pas si je suis intéressée… je dois d'abord en parler à mon mari et… Est-ce qu'on pourrait la visiter un autre jour ? Lundi, peut-être ? »

« Bien entendu. Je vous laisse ma carte ; rappelez-moi et on conviendra d'une heure ».

Alors qu'elle cherchait sa carte de visite dans son porte-document, je jetai un coup d'œil à l'intérieur de la maison. J'aperçus alors l'énorme living room, la cheminée en brique, les larges baies vitrées qui donnent sur le jardin, la cage d'escalier en bois sombre… C'était parfait. Il me fallait absolument cette maison ; je la voulais ! Je nous imaginais parfaitement vivre là, Noah et moi ; le tout était de l'en convaincre. L'agent immobilier me tendit sa carte avec un large sourire et je la remerciai avant de tourner les talons pour aller rejoindre Lisa et Zoë sur le trottoir. Nous reprîmes alors notre route et je pouvais sentir les regards intrigués de mes amies sur moi.

« Tu veux acheter cette maison ? » Zoë se décida enfin à demander.

« C'est une option », répondis-je, un large sourire sur les lèvres.

« Elle est vraiment très jolie, en tout cas », commenta Lisa. « Et elle doit surtout être très chère… »

Évidemment, une maison pareille devait valoir son pesant d'or… Elle ne devait certainement pas coûter aussi cher qu'un duplex dans l'East Side avec vue sur Central Park, mais le prix devait tout de même être conséquent. Je ne voulais même pas y penser, de peur que ça n'entame mon enthousiasme.

« Vous pensiez à déménager Noah et toi ? » demanda Zoë.

« On en a vaguement parlé une ou deux fois, oui… Mais rien de très concret. On se disait seulement qu'un endroit avec plus d'espace ne serait pas plus mal ».

« Vous auriez tout l'espace nécessaire dans cette baraque ! » lança Lisa sur un ton jovial.

Je hochai la tête avec un sourire. Si cette maison était aussi parfaite à l'intérieur qu'elle ne l'était à l'extérieur, j'étais prête à y emménager tout de suite !

« Je vais en parler à Noah ce soir… J'espère qu'il va accepter d'envisager la chose ».

« Il ne peut rien te refuser », commenta Zoë. « Après tout, il t'a forcée à déménager, il te doit bien ça ».

Je lançai à mon amie un regard réprobateur et ses joues s'empourprèrent. Non, Noah ne me devait rien. Rien du tout. S'il acceptait de visiter cette maison, je ne voulais pas qu'il le fasse pour moi, pour me faire plaisir. Je voulais qu'il le fasse pour nous…

*

« Tu aurais dû la voir, mon cœur, cette maison est absolument magnifique ! » m'exclamai-je à l'intention de Noah, alors que nous étions séparés par la porte de la salle de bain. Je n'avais pas fini de me préparer et apportais les dernières touches à mon maquillage – très léger au niveau des yeux, alors que mes lèvres étaient très rouges.

« Où est-ce que tu as dit que c'était ? » demanda-t-il.

« À Beacon Hill. Je n'ai jamais vu une aussi belle maison de ma vie ; j'en suis littéralement tombée amoureuse ! »

« Je vois ça… Continue comme ça et je vais finir par être jaloux ».

Je libérai un petit rire et après avoir jeté un dernier coup d'œil à mon reflet dans le miroir, j'ouvris la porte de la salle de bain. Noah m'attendait de l'autre côté, appuyé contre le mur de sorte à ce que nous puissions communiquer sans trop de difficultés. Quand il m'entendit arriver, il se redressa immédiatement et me regarda de la tête aux pieds, l'œil rêveur et la bouche entrouverte.

« Kate… » souffla-t-il.

« Ça te plait ? Tu crois que ça ira, ce n'est pas trop… voyant ? » demandai-je en désignant ma tenue.

« C'est parfait… Tu es parfaite. Wow… quand je pense que cette merveille n'est autre que Madame Curnyn ! »

Je ris et il prit mes mains dans les siennes avant de déposer un baiser sur chacune d'elles.

« J'espère que ton rouge à lèvres est résistant, parce que je te préviens : je ne tiendrai pas toute la soirée sans t'embrasser au moins… un million de fois ! »

« Allons, allons, Maître Curnyn, un peu de retenue, voulez-vous ? » plaisantai-je.

« Face à vous, mon adorable épouse, je n'en ai aucune… »

Il glissa ses mains autour de ma taille et m'attira doucement contre lui avant de déposer un baiser sur mon front. J'étais heureuse qu'il apprécie ma tenue ; il suffisait que Noah pose sur moi un regard d'approbation pour que je me sente comme la plus belle femme au monde.

« Chéri, tu crois que j'arriverai à faire bonne impression ? » demandai-je, une pointe d'inquiétude dans la voix.

« Bien sûr que tu y arriveras ! Tout d'abord, tout le monde va être jaloux en me voyant arriver avec toi ! Et puis tu es incroyablement rayonnante, on est obligé de t'aimer ! »

« Oui, mais… Tu sais que je suis plutôt empotée, surtout quand je suis nerveuse… Et si je fais une bêtise ? Si je renverse mon verre sur ma robe ou que je fais tomber une chandelle et mets le feu à la soirée… Si je me tords la cheville et que je me retrouve les quatre fers en l'air devant tout le monde. Je ne veux pas te faire honte, Noah… »

Il caressa doucement ma joue du bout des doigts, puis il saisit mon menton pour m'inciter à lever les yeux vers lui ; il m'adressa alors un sourire rassurant.

« Kate… comment peux-tu croire que tu es susceptible de me faire honte ? Tu es ma femme, je t'aime, et je suis fier de t'avoir à mon bras ce soir. Et si tu commets une maladresse, sache que je serai là pour assumer avec toi. D'accord ? »

Je hochai la tête et il déposa un baiser sur le bout de mon nez avant d'appuyer son front contre le mien. Je fermai les yeux quelques instants et pris une profonde inspiration pour calmer ma nervosité ; puis je sentis les mains de Noah sur ma chute de reins.

« On va y aller maintenant, d'accord ? » murmura-t-il. « Aie confiance en toi ; j'ai confiance en toi. Tu es fabuleuse ».

Il me lâcha et je déposai un bref baiser sur ses lèvres avant d'essuyer tendrement la petite trace de rouge à lèvres que j'avais laissé sur ces dernières. Nous rejoignîmes ensuite le salon, et alors qu'il m'aidait à mettre mon manteau, il dit :

« En ce qui concerne la maison, tu pourras appeler l'agent immobilier et lui dire qu'on est intéressés ».

« C'est vrai ? Tu es sûr ? » demandai-je, proche de l'euphorie.

« Oui, ça ne coûte rien de visiter… Mais si tu prends rendez-vous pour lundi, arrange-toi pour que ce soit en fin d'après-midi, parce qu'entre midi et une heure, j'ai quelque chose de prévu pour toi. Une surprise… »

« Une surprise pour moi ? Vraiment ? Qu'est-ce que c'est ? »

« Si je te le dis, ce ne sera plus une surprise, chérie… »

Il m'adressa un regard malicieux et je lui offris mon plus beau sourire. Le sourire qui voulait dire "je suis folle de toi". Il m'invita galamment à quitter l'appartement en premier, puis il ferma la porte derrière nous.

*

Jusque-là, la soirée se passait plutôt bien. Les associés et les collaborateurs du cabinet où travaillait Noah étaient réunis – ainsi que leurs femmes, compagnes, petites amies ou maîtresses – dans une salle magnifiquement décorée, dans une ambiance incroyablement huppée. Si j'avais une seule fois imaginé que Noah pourrait appartenir à ce monde-là un jour ! Il m'avait présenté à tous ses collègues et patrons, et j'étais à présent "Kate, sa merveilleuse femme" ; bonne nouvelle, jusque-là… Tous s'étaient montrés très gentils et courtois avec moi, et avaient manifesté un certain intérêt envers moi, ce qui était plutôt agréable.

Nous avions pris un apéritif, et alors que Noah discutait avec ses collègues, il me maintenait fermement contre lui, son bras enroulé autour de ma taille, et déposait de temps à autre un baiser sur ma joue. Quand par hasard nous nous retrouvions seuls pendant quelques minutes, il n'hésitait pas à me témoigner de l'affection, une attitude qu'aucun autre invité ne semblait avoir envers sa compagne. Il posait sa main sur ma chute de reins, il embrassait mon front, parfois mes lèvres, il glissait ses mains sur mes bras nus, s'assurait que je n'avais pas froid, que je n'avais besoin de rien… Il était aux petits soins avec moi, et ce malgré le caractère professionnel de cette soirée. Je ne m'étais pas attendue à ce genre d'attitude de sa part ; à vrai dire, je m'étais faite à l'idée que j'allais passer la soirée assise toute seule dans mon coin à le regarder parler boulot avec les autres employés du cabinet.

Nous étions huit à dîner autour de notre table, y compris le soi-disant associé susceptible d'offrir une promotion à Noah. Je n'avais aucune idée de quel genre de promotion il s'agissait, mais dans toute ma naïveté je voulais qu'il l'obtienne ; je savais qu'il en avait très envie. Aussi, je m'étais montrée absolument charmante, encourageante envers Noah et, surtout, chacun de mes gestes était attentivement réfléchi. Je ne voulais pas risquer de commettre une bourde. À la fin du dîner, je croyais pouvoir affirmer que le patron à impressionner m'appréciait beaucoup. Noah semblait ravi ; sa main était souvent posée sur ma cuisse qu'il pressait affectueusement de temps à autre.

« Chérie, je vais te laisser une minute », me dit Noah en se penchant vers moi une fois que nos assiettes furent ramassées. « Monsieur Dawson souhaiterait me parler seul à seul… »

Je levai les yeux vers son patron, puis je les posai à nouveau sur Noah avant de lui offrir un sourire encourageant. C'était le moment ; il allait sûrement recevoir sa promotion. Je hochai la tête et il déposa un baiser sur ma tempe avant de partir rejoindre ce Monsieur Dawson. Je fis mon possible pour ne pas les regarder discuter ; je ne voulais pas mettre mon nez dans les affaires professionnelles de Noah, même si, d'une certaine façon, ses affaires étaient aussi les miennes… Aussi, j'appuyai mon dos contre le dossier de ma chaise et observai les alentours. Les gens discutaient ; ils ne faisaient que discuter au rythme de la faible musique d'ambiance. Avaient-ils tant de choses à se dire ? Je tentai un dernier regard en direction de Noah et lui adressai un sourire encourageant accompagné d'un petit signe de tête. Il avait l'air étrangement pensif ; j'espérais sincèrement qu'il allait obtenir cette promotion tant convoitée…

*

« Je ne vous cache pas que vous êtes un excellent élément au sein de ce cabinet, Noah », dit Ronald Dawson au jeune avocat. « Vous avez fait un excellent travail tout au long de ces années durant lesquelles vous avez travaillé pour nous ; c'est pour cette raison que je tiens à vous offrir le poste d'associé ».

Noah demeura bouche bée et fixa son patron l'air à la fois subjugué et reconnaissant. Il avait attendu cette opportunité depuis si longtemps, qu'aujourd'hui tout cela lui semblait irréel. Lui, associé… C'était à peine croyable.

« J'en suis… très honoré », dit-il avec un petit geste de la tête.

« Vous pouvez l'être, jeune homme. Si vous acceptez ce poste, vous serez le plus jeune associé que le cabinet ait jamais connu. Sans oublier que la paye est colossale et les opportunités immenses ».

« Je n'en doute pas ».

« Évidemment, les responsabilités sont plus nombreuses et la charge de travail considérablement plus lourde, vous le savez. Un associé doit être prêt à se consacrer entièrement à son travail ; ne pas avoir peur des heures supplémentaires, et ne pas hésiter à mettre de côté les week-ends et les vacances. Je sais que c'est peut-être beaucoup demander, mais ça en vaut la peine croyez-moi. D'autant plus que vous aurez l'occasion de travailler avec nos collaborateurs à l'étranger ; vous pourrez aller au Japon, en Angleterre ou en France… »

Il était évident que Ronald Dawson essayait à tout prix de vendre ce poste qui était en tout point le summum de la réussite professionnelle ; pouvait-on rêver de mieux ? Malgré tout, Noah demeurait pensif. Se consacrer entièrement à son travail équivalait à mettre entre parenthèses sa vie privée – jusqu'à présent, cela n'avait pas été un problème, puisqu'il était seul. Mais aujourd'hui il était marié et sa femme avait tout quitté pour venir le rejoindre à Boston ; il ne trouvait donc pas juste de la mettre de côté au profit d'un job, aussi alléchant soit-il.

« Alors, qu'en dites-vous, Noah ? Associés ? »

Il lui tendit sa main, mais le jeune homme ne la serra pas. Au lieu de cela, il tourna la tête vers Kate, et croisa le sourire encourageant de la jeune femme. Elle ne savait même pas ce qui était en train de se passer, et pourtant elle était là et elle lui apportait son soutien inconditionnel. Peut-être devrait-il en parler avec elle avant de prendre une quelconque décision… Mais si elle lui demandait d'accepter ? S'il devenait associé et qu'à cause de ça leur vie de couple tombait en morceaux ? Avait-il réellement envie de passer tout son temps à travailler de toute façon ?

« Je comprends votre hésitation », déclara Dawson en suivant le regard de Noah. « Choisir entre une brillante carrière professionnelle ou une vie de couple épanouie n'est pas chose aisée. J'ai moi-même dû faire ce choix, et je ne le regrette pas ».

Noah regarda son aîné d'un air indécis et poussa un profond soupir.

« Je ne sais pas, Ronald », souffla-t-il. « Votre offre est très alléchante et je serais sans doute stupide de la refuser, mais… Kate est ma priorité, vous comprenez ? Je ne veux pas qu'elle soit malheureuse parce que je n'ai plus de temps à lui consacrer… »

Dawson hocha la tête doucement. Le jeune homme savait parfaitement que ses potentiels problèmes de couple ne concernaient pas son patron ; ce dernier se contentait de lui faire une offre plus qu'alléchante, et il ressentait le besoin de justifier la réponse qu'il allait inévitablement devoir donner.

« J'aime mon travail », déclara Noah. « J'aime ce que je fais et je le fais bien. Mais je ne suis pas prêt à sacrifier ma vie privée pour un job… Je suis désolé, Ronald, mais je vais devoir refuser votre offre ».

Dawson hocha la tête d'un air entendu, pas l'air le moins du monde surpris. Il posa sa main sur l'épaule de Noah et lui adressa un sourire sympathique qui rassura le jeune homme ; c'est vrai, avait-il le droit de dire non à une opportunité pareille ?

« Vous êtes encore jeune et insouciant, Noah », dit-il. « Vous avez encore une longue carrière devant vous et je suis certain que d'autres offres se présenteront… Quoi qu'il en soit, permettez-moi de vous accorder une petite augmentation de salaire pour l'année prochaine, en plus de la généreuse prime qui vous sera accordée pour cette année ».

Noah fit son possible pour cacher sa surprise et rester stoïque face à cette nouvelle, se contentant de serrer la main que son patron lui tendait. Il avait fait un choix très conséquent ; un choix que très peu d'avocats dans sa situation auraient fait. Il avait refusé une importante promotion. Il est vrai que Noah n'avait jamais fait montre d'une énorme ambition ; la richesse ne l'intéressait pas. Ce à quoi il avait aspiré toute sa vie, c'était d'avoir suffisamment d'argent pour pouvoir offrir à Kate tout ce qu'elle désirait ; il voulait la rendre heureuse, et ce n'était pas en lui préférant un travail bien payé qu'il allait y arriver…

Mais Kate ne devait rien savoir de tout ça ; elle ne devait pas savoir qu'il avait refusé cette promotion. Il savait très bien comment elle réagirait ; elle allait lui faire la leçon à grands renforts de regards réprobateurs. Aussi, il devait trouver un moyen d'expliquer la non-obtention de la promotion sans lui dire qu'il l'avait refusée.

Après avoir remercié une nouvelle fois son patron, il partit rejoindre sa femme…

*

Noah s'approcha de moi et je lui adressai un large sourire.

« Alors ? » demandai-je.

Pour toute réponse, il se pencha sur moi et, posant sa main sur mon épaule, il me glissa à l'oreille :

« On va faire un tour sur la terrasse ? »

Je hochai la tête et il me sourit avant de me tendre son bras que je saisis. Avant de sortir, il ôta le veston de son costume qu'il enroula autour de mes épaules pour éviter que je ne congèle, puis il ouvrit la baie vitrée et me fit signe de passer en premier avant de sortir à son tour et de fermer derrière nous.

« Alors ? » réitérai-je. « Qu'est-ce qu'il t'a dit ? »

Noah baissa les yeux brièvement, puis il regarda autour de lui avant de me fixer d'un air indéchiffrable. Je ne pouvais pas dire s'il allait sauter de joie d'un moment à l'autre ou alors se mettre à pleurer ; c'était impossible à déterminer.

« Kate, je… je n'ai pas obtenu la promotion ».

« Quoi ? Mais enfin pourquoi ? »

Il poussa un profond soupir et glissa sa main dans ses cheveux nerveusement.

« Apparemment, je suis encore trop jeune pour occuper le poste d'associé », répondit-il.

« Trop jeune ?! » m'indignai-je. « Comment ça trop jeune ? Non, non, ça ne va pas se passer comme ça ! Je vais aller lui dire ma façon de penser, moi, à ce Dawson ! »

J'étais prête à retourner à l'intérieur pour faire une scène au patron de Noah, mais ce dernier me retint fermement par le bras.

« Non, Kate, reste ici. Ça ne vaut pas la peine, il a raison, je suis trop jeune ; j'ai encore beaucoup de choses à apprendre ».

« Mais tu… »

« Shhh… », me coupa-t-il en encadrant mon visage de ses mains. « Ça n'a aucune importance ».

« Mais ça en avait pour toi ! »

Il pinça ses lèvres et j'eus soudain l'impression qu'il ne me disait pas tout ; malgré tout, je ne voulais pas savoir. Peut-être était-il en train de me mentir, ce n'était pas impossible, mais je préférais rester dans l'ignorance… Il est souvent préférable de demeurer dans le flou.

« C'était ce que je croyais aussi, mais ça en a moins que je ne le pensais… Après tout, ce n'était qu'un job ; et le mien me convient mieux. En plus, on m'accorde une augmentation de salaire et une prime généreuse, alors je n'ai vraiment pas de quoi me plaindre ».

Son air triste contrastait avec ses paroles et je m'empressai d'enrouler mes bras autour de son cou pour le serrer fort contre moi.

« Je suis fière de toi », murmurai-je. « Parce que moi je sais que tu es le meilleur… Et quand ils le comprendront, ils te courront après pour que tu acceptes cette promotion, crois-moi ».

Il caressa affectueusement mes cheveux et déposa un baiser sous mon oreille, ce qui me fit frissonner.

« Je ne serai pas sûr de la vouloir à ce moment-là », dit-il.

« Pourquoi tu dis ça ? »

« Il y a des choses autrement plus importantes pour moi que ce travail… » dit-il. « Toi ; notre avenir ; me réveiller avec toi après avoir passé la nuit à tes côtés ; pouvoir passer du temps en ta compagnie en rentrant du travail ; profiter au maximum de ta présence sans en perdre une miette… C'est ce que j'ai toujours voulu et ça n'a pas changé ».

À vrai dire, je ne comprenais pas bien ce qu'il avait en tête, mais je ne pus m'empêcher de sourire. Peut-être sa préoccupation avait-elle quelque chose à voir avec l'opinion que j'avais des avocats en général, je n'avais aucun moyen de le savoir. Ce qui était sûr, c'est qu'à ce moment précis j'ai senti que j'étais réellement importante pour lui et que je n'avais pas à craindre que son travail ne devienne trop prédominant dans notre vie…

« Ça te dirait qu'on rentre à la maison ? » proposai-je. « Je pourrais te préparer un bon chocolat chaud avec des Marshmallows… Tu veux ? »

Il me fixa pendant quelques instants, le regard chargé de tendresse, puis il m'embrassa doucement.

« Avec plaisir », murmura-t-il contre mes lèvres. « Qu'est-ce que je ferais sans toi, mon ange ? »

Je souris, l'embrassai à mon tour, et me laissai finalement guider à l'intérieur où nous récupérâmes nos manteaux.

*

Lundi 30 novembre

« Alors, c'est quoi cette surprise ? » insistai-je, alors que Noah conduisait sa voiture dans le parking souterrain d'un immeuble de verre et d'acier.

« Un peu de patience, ma puce, tu n'as plus que quelques minutes à attendre ».

J'avais pensé à cette fameuse surprise toute la matinée, sans arriver à me faire la moindre idée de ce que ça pouvait bien être. Le matin même avant de partir travailler, Noah m'avait simplement suggéré de le rejoindre devant son bureau à midi sans pour autant me donner le moindre indice sur ce qu'il manigançait… Résultat : je ne tenais plus en place.

Au moment où Noah coupa le moteur du véhicule, je me précipitai à l'extérieur de celui-ci, excitée comme une puce.

« Et maintenant ? » demandai-je.

« Maintenant, tu fermes les yeux ».

« Pourquoi tout ce mystère ? »

« Ne discute pas, allez ».

J'obtempérai tant bien que mal et fermai les paupières. Je sentis alors le bras de Noah s'enrouler autour de ma taille pour me guider, me priant gentiment de ne pas tricher. Je le laissai me traîner sur plusieurs mètres sans protester, puis nous nous immobilisâmes.

« Je peux ouvrir ? »

« Pas encore ».

J'entendis une petite sonnerie et je compris alors que nous attendions l'ascenseur. Il me fit monter dans la cabine et m'attira contre lui pour me serrer contre sa poitrine pour éviter, je suppose, que je ne fasse une crise d'angoisse. Il n'y avait aucun risque, tant que l'ascenseur ne s'immobilisait pas sans raison… J'essayai de compter le nombre d'étages que nous gravissions, mais ça s'avérait plutôt difficile ; l'ascenseur était très rapide.

« Il y en a encore pour longtemps ? »

Il ne répondit pas, et une fraction de secondes plus tard, je sentis ses lèvres effleurer ma joue ; puis, doucement, il traça la ligne de ma mâchoire avec des baisers. Quelle adorable façon de me faire patienter… La petite sonnerie retentit bientôt et j'entendis les portes s'ouvrir ; Noah m'attira alors à l'extérieur et je le suivis sans rien dire, sans poser d'autres questions. Je n'avais aucune idée d'où nous étions, mais il me semblait que le couloir dans lequel nous marchions sentait le neuf.

« Ah, bonjour Monsieur Curnyn » dit soudain une voix masculine.

Je dus faire un effort pour ne pas ouvrir les yeux à ce moment-là, tellement la curiosité était forte.

« Bonjour », répondit Noah, un sourire dans la voix. « Merci d'être venu. Je vous présente ma femme ».

« Bonjour », dis-je, levant ma main devant moi en signe de salut, mais les paupières toujours closes. « Je n'ai pas le droit de vous regarder, je m'en excuse, c'est extrêmement impoli, mais pour de quelconques réclamations veuillez vous adresser à mon mari ici présent ».

Je l'entendis rire, alors que les lèvres de Noah atterrissaient sur ma tempe.

« Allons-y », dit-il.

Je les suivis, toujours à l'aveuglette, puis Noah me fit m'arrêter et je croisai les bras sur ma poitrine pour lui témoigner mon impatience.

« C'est bon, tu peux les ouvrir ».

Enfin débarrassée de ma cécité passagère, je me trouvai au beau milieu d'une pièce aux murs entièrement blancs et dotée d'une large baie vitrée qui offrait une vue imprenable de la baie du Massachusetts. Je regardai autour de moi et constatai que pour accéder à cette chambre, nous avions passé une porte en bois sombre derrière laquelle se trouvaient deux autres pièces. L'endroit ressemblait à un petit appartement, mais il ne comportait sans doute pas assez de chambres pour pouvoir réellement en être un. Je tournai mon regard intrigué en direction de Noah, et il me sourit.

« Là, tu vois », dit-il en désignant l'espace devant la baie vitrée. « Tu pourrais mettre ton bureau. Et là-bas, il y a de la place pour le canapé et le fauteuil… Dans la pièce d'à-côté, on peut installer la réception et… une salle d'attente. Et il y a aussi des toilettes et une petite cuisine… »

« Mais… Noah, qu'est-ce que… qu'est-ce que ça veut dire ? »

« Et bien… je me suis dit que comme on avait un peu de mal à te trouver du travail dans un hôpital, tu pourrais ouvrir ton propre cabinet… »

Je regardai autour de moi, bouche bée ; cet endroit était tout simplement parfait… À aucun moment, je n'avais imaginé que Noah puisse me réserver ce genre de surprise. C'était au-delà de toutes mes espérances ! Sans prévenir, je lui sautai vivement au cou et le serrai contre moi.

« Merci, merci, merci ! » m'exclamai-je. « Tu es extraordinaire, tu es le meilleur ! »

Il rit et embrassa mon front.

« Je me suis seulement occupé de te trouver un endroit, rien de plus », dit-il très modestement. « Maintenant, c'est à toi de t'occuper des autorisations nécessaires. Et c'est ton salaire qui payera le loyer… »

« Évidemment, je ne voyais pas les choses autrement… »

Un cabinet de psychothérapie rien qu'à moi ! J'étais sur un petit nuage ! Je n'avais jamais osé me lancer de peur de ne pas en avoir les moyens ; mais là, soutenue par Noah je sentais que je pourrais faire des étincelles ! Au moins, j'avais une perspective de carrière professionnelle et ça prendrait le temps que ça prendrait ; je n'étais plus désemparée…

« Alors, est-ce qu'on signe ? » demanda soudain l'agent immobilier, apparu de je ne sais où.

« Je crois bien », répondit Noah, m'adressant un sourire.

*

Je venais d'enfiler ma nuisette de satin et j'étais en train de me tartiner du lait pour le corps sur les jambes quand Noah entra dans la chambre, encore dégoulinant et une serviette enroulée autour de sa taille. Il m'adressa un clin d'œil complice avant de se diriger vers sa commode du tiroir de laquelle il sortit un boxer qu'il posa sur le lit. Puis il ôta la serviette qui dissimulait son intimité et s'en servit pour essuyer son torse et ses cheveux. Je l'observais distraitement, le mouvement circulaire de ma paume sur mes jambes se faisant de plus en plus lent.

« J'étais en train de me demander… » commençai-je, attirant ainsi son regard sur moi. « Tu as dit à la femme de l'agence, tout à l'heure… qu'on pensait avoir bientôt des enfants ».

J'avais prononcé cette dernière phrase de sorte à ce qu'elle ressemble plus à une question qu'à une affirmation, et mon air embarrassé amusa Noah qui hocha la tête avec un sourire. Il saisit vivement son boxer et interrompit son geste pour me répondre.

« Elle se demandait pourquoi on était intéressés par une maison aussi grande alors qu'on n'était que deux. Je trouvais ça plus… glamour que de prétendre que c'était parce qu'on voulait faire chambre à part, non ? »

Je hochai la tête et Noah me sourit avant d'enfiler rapidement son boxer. Nous avions visité la fameuse maison que j'avais repérée à Beacon Hill et le verdict était qu'elle était encore plus fabuleuse à l'intérieur qu'à l'extérieur. Elle avait été rénovée récemment et tout était flambant neuf, qu'il s'agisse des équipements de la cuisine, de la cuvette des toilettes ou de l'énorme baignoire de la salle de bain. Elle était grande, c'est vrai, mais pas exagérément puisqu'elle ne possédait "que" trois chambres. La maison dans laquelle j'avais grandi à Toronto en possédait le double !

Noah avait été d'accord pour dire que cette maison était parfaite – il faut dire que j'avais tellement insisté sur ce point qu'il avait finir par le croire – et nous avions fait une offre pour l'acheter. Elle coûtait très cher, c'est vrai, et j'avais discrètement grincé des dents quand l'employée de l'agence nous avait annoncé sa valeur ; mais Noah m'avait assuré qu'on trouverait un moyen. Il me restait d'ailleurs toujours cet argent que mon père avait mis de côté pour moi, tous les mois depuis treize ans et auquel je n'avais jamais voulu toucher… J'avais là une coquette somme que mon père ne voudrait jamais récupérer, alors autant l'utiliser ; c'était le bon moment… Quoi qu'il en soit, rien n'était encore sûr ; nous n'étions pas les seuls intéressés, et l'agent immobilier avait promis de nous appeler dans la semaine pour nous donner des nouvelles.

« Tu nous imagines vivre dans cette maison ? » demandai-je rêveusement en tendant mon flacon de lait pour le corps à Noah qui le posa sur la commode avant de grimper sur le lit à mes côtés.

« Hum, hum », fut sa seule réponse, qu'il ponctua d'un léger baiser sur mon cou.

Je ramenai mes jambes contre moi et les encerclai de mes bras.

« Et puis dans une maison comme ça, je pourrais garder Max… Parce que je ne suis pas sûre qu'Amelia puisse le garder chez elle éternellement ».

« Certes… J'ai comme l'impression que ce n'est plus si difficile que ça, pour toi, de vivre à Boston, je me trompe ? »

Je poussai un profond soupir et posai ma tête sur son épaule.

« Non, tu as raison… J'ai l'impression que les choses se simplifient ».

Il caressa doucement mes cheveux et je fermai les yeux. Je ne pouvais nier qu'à présent, les choses allaient beaucoup mieux dans ma tête que trois jours auparavant. J'avais Noah, j'avais des projets professionnels, et j'allais peut-être emménager dans une magnifique maison. Je ne me sentais plus perdue ; j'avais eu un petit passage à vide ces derniers mois, mais aujourd'hui j'avais l'impression que ma vie décollait et qu'elle était sur le point de devenir ce que j'avais toujours rêvé qu'elle soit. Alors qu'importe que ce soit à Boston, New York ou ailleurs (oui, enfin… tant que ce n'était pas à Tucson en Arizona)…

« Tu sais, je me disais qu'on pourrait faire une chambre d'amis avec la plus petite chambre à coucher », commentais-je pensivement. « La plus grande serait pour nous, et la moyenne… enfin tu vois… »

Il demeura silencieux et je levai la tête pour le regarder ; ses yeux étaient perdus dans le vide pensivement et je le secouai doucement pour le ramener à la réalité. Il enroula alors ses bras autour de ma taille et m'attira à lui, de sorte à ce que je sois à califourchon sur ses cuisses.

« Kate… Je préférerais que tu arrêtes de faire des projets de ce genre… » dit-il calmement.

« Quels projets ? »

« Des projets d'emménagement. On n'est pas encore sûrs d'obtenir cette maison, et je ne veux pas que tu sois déçue s'ils la vendent à quelqu'un d'autre ».

Je baissai les yeux, hochai la tête, et me dégageai de son étreinte pour me glisser sous la couette. Il avait raison, ce n'était pas une bonne idée de faire des plans sur la comète de cette façon, mais je ne pouvais pas m'en empêcher ; je n'avais pas été aussi enthousiaste depuis très longtemps. J'allongeai ma tête sur mon coussin, dos à Noah, et fixai le mur qui me faisait face. Je sentis le matelas bouger alors qu'à-côté de moi, mon très cher mari se glissait à son tour sous la couverture. Il colla aussitôt sa poitrine contre mon dos, encercla ma taille de son bras, et promena ses lèvres sur ma nuque.

« Je suis désolé, Kit… Je ne voulais pas être rabat-joie. Je sais à quel point tu es rêveuse et j'ai peur que tu sois déçue ».

« Je sais, ce n'est pas grave », marmonnai-je.

« Chérie, regarde-moi. S'il te plait ».

Je tournai doucement sur moi-même pour lui faire face et il m'adressa un sourire que je lui rendis sans même m'en rendre compte.

« Je sais ce dont tu as envie », dit-il. « Tu veux une maison à nous dans laquelle on pourra établir un foyer… et je te comprends. Je veux la même chose. Mais dis-toi que si ce n'est pas dans cette maison-là, ce sera dans une autre. Tu peux me faire confiance ».

Je hochai la tête, admettant ainsi qu'il était dans le vrai. Encore plus que cette maison, je voulais tout ce qu'elle représentait : une vie de famille rangée et tout ce qui allait avec…

« Alors ? Qu'est-ce que tu voulais mettre dans la chambre moyenne ? » demanda-t-il avec un sourire malicieux sur les lèvres.

« Tu le sais très bien… » répondis-je, les joues légèrement rouges sous l'effet de la gêne.

« Hum, hum… Et tu y mettrais plutôt une fille ou un garçon ? »

« Une fille. Comme ça, je pourrais lui faire des petites couettes… »

« Voyez-vous ça… Oui, je suppose que le garçon pourrait venir plus tard ».

« Oui, un de chaque sexe, c'est bien… Oh ! Et à Noël, on mettrait un grand sapin juste à-côté de la baie vitrée ! Et on allumerait le feu dans la cheminée à laquelle on aurait suspendu des petits chaussons ! »

Pour toute réponse, il m'embrassa, glissant doucement sa main sur mon flanc droit puis sur mon ventre ; j'enroulai mes bras autour de son cou et l'attirai à moi davantage jusqu'à ce que la moindre parcelle de son corps soit en contact avec le mien. Ça faisait du bien de rêver un peu et c'était encore plus agréable quand il rêvait avec moi ; on était tous les deux logés à la même enseigne après tout…

« Je t'aime, Kitty… » murmura-t-il.

« Mmm… je sais, mais c'est pas une raison pour m'appeler "Kitty" ».

Il rit, puis il se détacha de moi quelques secondes pour éteindre la lampe de chevet avant de fondre sur moi comme un rapace affamé.

*

Vendredi 4 décembre

Le serveur ramassa nos assiettes et revint quelques secondes plus tard avec la carte des desserts. Mon père et moi échangeâmes un regard amusé alors que Noah plongeait littéralement son nez dans le menu des crèmes glacées. Ce soir-là, mon père avait insisté pour nous inviter à dîner, parce que, selon lui, il ne nous voyait pas assez souvent. S'il avait envie de rattraper ce qu'il avait manqué ces treize dernières années, autant que j'aille vivre avec lui tout de suite ! En ce qui me concernait, j'avais passé la majeure partie de la semaine à New York ; j'y étais retourné mardi et étais rentrée à Boston ce matin-là. Bien que sans emploi, j'avais une tonne de choses à faire là-bas : finir d'empaqueter mes affaires, nettoyer mon appartement que je devais rendre au propriétaire incessamment sous peu, et remplir tout le tas de papiers administratifs qu'implique un déménagement. Que de réjouissances, en somme…

« Vous savez déjà où vous allez passer Noël ? » demanda mon père, son nez à lui également plongé dans la carte des desserts.

« Maman nous a invités », répondis-je aussitôt.

Pour toute réponse, il leva les yeux vers moi et hocha la tête. J'avais effectivement repris contact avec ma mère et il y avait été plutôt favorable, en réalité… Noah et moi avions été lui rendre visite à Toronto où elle vivait toujours avec son compagnon de longue date, et j'avais eu la lourde tâche de lui annoncer que non seulement j'étais mariée depuis peu, mais qu'en plus mon mari n'était autre que le très rejeté Noah. Ce dernier était resté dans la voiture le temps que je lui annonce la merveilleuse nouvelle – qu'elle avait étrangement bien pris, et ce sans même savoir que Noah était avocat – puis j'étais allé le chercher et nous avions mangé tous ensemble le poulet rôti de la réconciliation… Et réconciliation il y avait eu, puisque nous étions cordialement invités à passer la soirée du vingt-quatre décembre avec eux !

« Je crois que je vais prendre le Tiramisù », déclara Noah très solennellement en posant la carte devant lui. « Et toi, qu'est-ce que tu prends ? »

« Je penche pour le Crumble poire-chocolat », répondis-je.

« Hum… c'est vrai que ça pourrait être pas mal ça aussi… »

Je ne pus m'empêcher de rire de son indécision quand il s'agissait de desserts et posai ma main sur la sienne.

« Tu pourras en avoir du mien, si tu veux », dis-je tendrement comme à un enfant.

Il m'adressa un clin d'œil et déposa un baiser sur le dos de ma main. Le serveur ne mit pas longtemps à revenir prendre notre commande, et je salivais à l'avance de mon Crumble.

« Alors, Kate, qu'est-ce que tu penses des locaux que Noah t'a trouvés ? » me demanda mon père. « Prête à te lancer là-dedans ? »

« Absolument ! Et puis tout le monde semble m'encourager dans ce sens, alors je n'en suis que plus motivée ! »

Pendant que j'étais à New York cette semaine-là, j'avais eu l'occasion d'en parler à Zoë, à Lisa et à Amelia qui étaient toutes les trois tombées d'accord sur le fait que je ne devais pas hésiter à me lancer dans cette aventure. Travailler pour moi, me faire un nom, me forger une réputation : Kate Curnyn, Psychologue clinicienne, psychothérapeute. Il fallait donc que je me trouve un ou une secrétaire, et ma sœur m'avait même suggéré de chercher un associé ; un ou une thérapeute qui voudrait se mettre à son compte et qui souhaiterait partager les frais de location des bureaux. C'était effectivement une idée à creuser…

« Je suis ravi de l'entendre. Si tu as besoin de quoi que ce soit, surtout n'hésite pas à venir me voir, d'accord ? »

« C'est gentil papa, mais ne t'en fais pas… Noah s'occupe très bien de moi ».

Le visage de mon père se fendit en un large sourire et les doigts de Noah vinrent s'emmêler avec les miens. Avec lui, je savais que j'étais en de bonnes mains…

« Je n'en doute pas une seconde », déclara mon père.

Soudain, le Blackberry de Noah se mit à sonner et il chercha frénétiquement dans les poches de son manteau en marmonnant des excuses. Qui pouvait bien l'interrompre dans un moment pareil ? J'espérais que ce n'était pas pour son travail et qu'il ne doive interrompre notre dîner pour retourner au bureau. Ça, ça m'aurait agacé… Il fronça les sourcils en prenant connaissance du numéro qui s'affichait sur son écran et finit par répondre, non sans avoir préalablement hésité.

« Allô ? – Oui, c'est moi ».

À ces mots, il se tourna vers moi et je haussai les sourcils d'un air interrogateur.

« Non, ce n'est rien, vous ne dérangez pas, au contraire », poursuivit-il. « Vraiment ? – Vous êtes sûre ? – Merci infiniment… – Oui, lundi, c'est parfait. Merci encore. Au revoir ».

Il raccrocha et me fixa silencieusement pendant quelques secondes, puis saisit mes mains qu'il serra dans les siennes. J'étais intriguée, et j'avais peur de savoir qui était au bout du fil ; mon cœur se mit alors à battre plus rapidement et j'entrouvris la bouche pour respirer plus profondément.

« C'était la femme de l'agence », dit Noah calmement.

Je me raidis et déglutis péniblement, alors que l'expression de mon mari était indéchiffrable.

« Nous étions en compétition avec un autre couple pour la maison, et… il s'est avéré que ledit couple a laissé tomber son offre parce que trois chambres, ce n'était pas assez pour caser leurs six enfants… ce qui veut dire qu'elle est à nous ! »

Mon cœur bondit dans ma poitrine et je crus le sentir remonter dans ma gorge. Je fis un bond accompagné d'un petit cri de joie et sautai au cou de Noah dont le sourire sincère semblait ne pas vouloir s'estomper. On l'avait ! Elle était à nous ! Je n'arrivais pas à croire que nous allions emménager dans la maison de mes rêves ; j'en avais la tête qui tournait. Ma réaction pour le moins extatique fit sourire mon père, alors que je m'accrochais au cou de Noah comme si ma vie en dépendait.

« On doit passer à l'agence lundi pour signer les papiers » dit-il, le souffle légèrement coupé par mon étreinte. « Et pour déterminer le montant d'éventuelles mensualités ».

Je le lâchai et me rassit correctement sur ma chaise, remettant en place mes quelques mèches de cheveux qui s'étaient fait la malle sur mon visage.

« Comment ça se fait qu'on l'aie eu si vite ? » demandai-je, sans jamais cesser de sourire.

« Comme je te l'ai dit, l'autre couple et ses six enfants ne rentraient pas dans les chambres et il semblerait que la nouvelle grossesse de la femme les ait poussés à abandonner… »

« Sept enfants ?! Mais ma parole, se sont de vrais lapins ! »

« Une chance pour nous… »

Je lui adressai un autre sourire et il me prit à nouveau dans ses bras.

« Tu as tout vérifié que tout était conforme ? » demanda soudain mon père à Noah.

« J'ai tout vérifié, ne vous en faites pas. La femme de l'agence m'a montré le dossier quand on a visité et tous les papiers étaient en règle. L'électricité, le gaz et la plomberie ont été contrôlés, il y a peu, les équipements sont neufs, j'ai vu toutes les attestations, tout est en ordre. Mais je demanderai à vérifier une dernière fois avant de signer quoi que ce soit ».

Et oui, quand votre mari est avocat, rien n'est jamais laissé au hasard… aucun risque d'avoir de mauvaises surprises après coup ! À présent, nous pouvions faire des projets, et j'avais hâte de pouvoir me lancer ! C'est à ce moment-là que le serveur nous apporta nos desserts, et mon père commanda une bouteille de Champagne hors de prix pour fêter ça.

« Quand est-ce que vous pouvez emménager ? » demanda ce dernier.

« Une fois que tout sera signé, la maison est disponible à partir du premier janvier ».

« C'est une jolie façon de commencer l'année. Une bonne résolution ».

« Oui », intervins-je. « Et une fois qu'on sera bien installés… on fera de quoi remplir la chambre moyenne… »

Je me tournai vers Noah qui m'adressa un sourire d'approbation avant de déposer un baiser sur mes lèvres. Le serveur nous apporta ensuite le Champagne et nous en servit trois coupes, après quoi nous portâmes un toast à l'avenir. Notre avenir. Parce que même si Noah et moi avions passé douze ans de notre vie éloignés l'un de l'autre, nous comptions bien rattraper le temps perdu. Et cette séance de rattrapage à durée indéterminée commençait tout de suite…

FIN


Et une fois que Noah eut fini de brosser le poil soyeux de son cheval blanc, il emmena sa princesse Kate, remorquée dans une courge, jusqu'au château de brique du pays des merveilles. Ils y vécurent évidemment trèèèèès heureux (parce que dans la vie tout le monde est toujours heureux, c'est bien connu), et eurent beaucoup d'enfants (parce que, avouons-le, ce serait quand même con de laisser des chambres inoccupées).^^

Je suis certes adepte du Happy End, mais j'avoue qu'après un chapitre comme ça je suis liquéfiée et j'ai une furieuse envie de me lancer dans l'horreur gore pour compenser (mais ça n'arrivera pas – pas dans un futur proche, en tout cas :P) Quoi qu'il en soit, j'espère avoir contenté les plus romantiques d'entre vous (même celles qui n'osent pas se l'avouer) quant aux autres, ne vous en faites pas, je comprends... oh que oui, je comprends!^^

Bref, après six mois de dur labeur (enfin... surtout les dernières semaines, dirons-nous), je déclare le point final de cette histoire... ponctué. Je vais de ce pas passer à la suivante, en auteur pantagruélique que je suis... Merci à tous ceux qui m'ont lue, en particulier à Melle-K, Viam et Neyma94 pour leurs reviews hébdomadaires (ou presque)^^ J'espère sincèrement que l'ensemble vous a plu et je me ferais une joie de vous retrouver sur ma prochaine fiction! A bientôt!

Marana