Titre : Jane (Anna Tsushiya –Strip me ?)

Auteur : Nicolina

Date de création : 23 janvier 2010

Avertissement : Shojo ai (relation entre deux femmes), Lime.

Disclamer : Les personnages m'appartiennent.

Petit mot : Voici une nouvelle un peu spéciale, puisque c'est une Shojo ai, c'est-à-dire une histoire d'amour entre deux femmes. J'ai hésité un moment à l'envoyer. C'était un essai et l'histoire est plutôt banale. J'avoue que je ne voulais pas me compliquer. Le titre de cette nouvelle est basée sur la chanson Jane d'Anna Tsushiya, qui se trouve dans l'album « Strip me ? ».

Je vous invite à rebrousser chemin si l'évocation d'une histoire d'amour entre deux femmes ne vous plait pas, je vous aurais averti. Et pour les autres, bonne lecture !

-Qu'est-ce qu'elle peut m'énerver.

Je ne dis rien, j'ai l'habitude que Marie se fâche pour un rien, mais je dois reconnaître qu'en ce moment, sa mauvaise humeur est récurrente. Une nouvelle élève est arrivée au lycée et elle semble plaire à la majorité des garçons, voilà la raison pour laquelle Marie est énervée. Pourtant, il faut avouer que cette Jane n'est pas mal, d'un point de vue objectif. De taille moyenne, élancée, des formes là, où il faut, des cheveux noirs ondulés et des yeux bleus qui ont l'air de faire craquer tous les mecs.

Moi à côté, je suis insignifiante et je m'en rends compte. Avec mes cheveux mi-longs, blond, toujours attaché en queue de cheval et mes yeux bruns, je n'attire pas spécialement le regard. Je ne suis pas très sportive et surtout, je ne perds pas mon temps à regarder mon poids, même si je pense qu'il est plus que correct.

-Eh ! Sarah ! Tu m'écoutes ?

-Mais, oui, je t'écoute, dis-je en soupirant.

-Ca ne t'agace pas, toi ?

-Non, pas plus que ça.

-Pourtant, tu devrais.

-Je ne vois pas pourquoi. Je me fiche complètement d'elle.

-Je ne sais pas comment tu fais, dit Marie. Les garçons ne regardent qu'elle, maintenant.

-Et alors ?

-Parfois je me demande si tu tournes rond ?

-Pourquoi tu dis ça ?

-Pour rien, laisse.

Pourtant, je sais très bien où elle veut en venir. Ce n'est pas parce que je m'en fiche, que ça m'est complètement égal. D'un point de vue objectif, je ne peux rien faire de toute façon. Ce n'est pas comme si je pouvais obliger les garçons à me regarder.

Marie et moi nous asseyons, comme d'habitude, au fond de la classe, près de la fenêtre. Ca me permet de m'évader un peu quand j'ai l'occasion de regarder à l'extérieur. La nouvelle se met juste devant nous et je vois Marie serrer les poings. Je préfère l'ignorer, si elle commence à dire quelque chose, elle ne s'arrêtera plus. Je la sens pourtant tendue à côté de moi, alors que moi, j'écoute le prof d'une oreille, tout en dessinant sur un de mes cahiers.

C'est alors que je m'aperçois que l'on m'observe. Jane s'est légèrement tournée vers moi et me regarde en souriant. Je lui souris à mon tour, un peu gênée en me demandant ce qu'elle peut bien me vouloir pour me regarder de cette manière, puis, je retourne à mes dessins.

Après la première heure de cours, les élèves sortent pour prendre un peu l'air. Je reste en classe, continuant à dessiner.

-Tu ne viens pas ? Demande Marie.

-Non, c'est bon. Je n'ai pas envie de bouger.

-Comme tu veux, moi j'ai besoin d'air.

-Ok !

Je ne la regarde pas et pourtant, après quelques instants, je finis par relever la tête et je tombe sur le visage de Jane, qui me regarde toujours.

-Quelque chose ne va pas ? Demandais-je.

-Non, je… Tu dessines quoi ?

-Rien de spécial, répondis-je.

-Je peux voir ?

-Non, je n'aime pas qu'on regarde ce que je fais.

-Ah ! Pardon. Je ne voulais pas t'embêter.

Elle semble un peu gênée et finalement elle se rassoit correctement. Je suis plutôt étonnée qu'une fille comme ça, s'intéresse à moi, mais je ne devrais pas me faire trop d'illusion, il est peu probable que l'on devienne amies.

Durant la pause de midi, Marie me laisse pour aller faire, je ne sais quelle course, et je me retrouve à manger seule, devant le lycée, un pauvre sandwich. Je la retiens, elle ne m'a même pas prévenue, mais bon, elle n'avait pas l'air d'avoir envie que je l'accompagne. Je la soupçonne d'être allé voir quelqu'un, sûrement son petit copain, mais elle aurait pu au moins m'en parler.

Je mange vite fait, avant de prendre un livre que j'avais emmené au cas où et me plonger dedans. Dessiner en plein air ne me déplait pas, mais ce n'est pas très pratique quand on n'a pas de table. Et alors que je suis en pleine lecture, une personne s'assoit à côté de moi. Je jette juste un coup d'œil, après tout, les bancs sont à tout le monde. Mais ma surprise est telle que je finis par dévisager la personne qui se trouve à côté de moi.

-Salut !

-Salut !

-Je ne te dérange pas ? Comme tu étais toute seule… Mais, tu sembles quand même occupée.

-Heu… Je lis.

Jane semble plutôt gênée, elle qui a l'air si sûre d'elle en tant normal. Quand elle est entourée de garçon, elle a plutôt l'air d'être à l'aise. Ou peut-être est-ce simplement l'illusion qu'elle donne.

-Je peux rester là ? Demande-t-elle.

-Les bancs sont à tout le monde, dis-je en essayant de me replonger dans ma lecture.

-C'est vrai, dit-elle. Ta copine n'est pas avec toi ?

-Elle avait des courses à faire, et toi ? Demandais-je malgré moi.

-Oh ! Heu… Je suis seule.

Seule ? Vraiment, c'est plutôt étonnant, pourtant à la voir, on dirait bien que c'est vrai. Elle a son sac posé sur ses genoux et elle semble gênée.

-Tes princes charmants t'ont fait faux bond ?

-Pardon ?

-Eh bien ! Il y a pas mal de garçons qui te tournent autour.

-Ca ne veut pas dire qu'ils veulent passer du temps avec moi. Mais, depuis que je suis ici, je ne me suis pas fait encore d'amie.

-Ah oui ? Pourtant, tu sembles plutôt populaire.

Je range mon livre dans mon sac. De toute façon, je ne pourrai pas me concentrer et puis, on a l'air plutôt bien parti, pour discuter, alors…

-Ce n'est qu'une illusion. Je ne suis pas populaire auprès des filles, c'est même le contraire, elles me détestent, parce que les garçons me tournent autour, comme tu dis.

-Ah !

-Je l'ai remarqué, dit-elle. Je ne suis pas idiote. Ta copine aussi ne m'aime pas. Quant à toi… en fait, je ne sais pas.

-Je m'en fiche, répondis-je. Ca m'est bien égal.

-Oui, on dirait. Tu n'es pas comme les autres.

-Oh si, plus que tu ne le croies, mais je ne m'embête pas à le dire, c'est tout.

Elle me regarde, un peu surprise. Je ne pensais pas qu'elle pouvait être si timide, mais en discutant avec elle, on remarque bien qu'elle n'est pas très à l'aise.

-Ah ! D'accord, mais c'est bien ce que je pensais, continue-t-elle Tu es vraiment différente. J'aimerais bien… qu'on soit amies.

-Tu es sérieuse ? Demandais-je sur un ton léger.

-Pourquoi je ne le serais pas ?

-Je ne sais pas, dis-je en reprenant mon sérieux, tu sembles si… différente. Mais, je me trompe peut-être.

-Oui, ne te fies pas à ce que je laisse paraitre, ce n'est pas vraiment moi.

-Ah ! Tu te caches alors ?

-On peut dire ça. Alors, tu es d'accord ?

-Oui, pourquoi pas.

Elle me sourit, ayant l'air ravie. Nous restons un moment toutes les deux en silence et bientôt, il est l'heure de retourner en cours. Marie ne me rejoint qu'au moment d'entrer en classe.

-Qu'est-ce que tu as fait pendant la pause ?

-Je suis restée avec Jane, répondis-je.

-Avec Jane ? Elle te voulait quoi ? Demande Marie avec méfiance.

-On a juste discuté.

Le cours commence, coupant court à notre conversation. De toute façon, je suis persuadée qu'elle aurait mal tourné de toute façon.

******

Pendant plusieurs jours, Jane et moi, nous nous sommes rejointes sur un banc près du lycée pour discuter un peu. Marie partait toujours et elle m'a enfin avoué que c'était parce qu'elle voyait son nouveau petit copain. Par contre, elle ne voit pas d'un bon œil ma nouvelle amitié avec Jane. Elle se méfie toujours d'elle, et même si elle me le fait remarquer, elle a bien compris que je ne tiendrais pas compte de son avis.

-Est-ce que tu as quelque chose de prévu, après les cours ? Demande Jane.

-Heu… je ne crois pas.

-Ah ! Ca te dirait qu'on aille faire des courses ensemble ?

-Pourquoi pas.

Elle semble ravie de ma réponse. C'est très étrange, mais je ne la vois pas beaucoup manger, alors que moi je dévore mes sandwichs et mes salades le midi. J'ai l'impression qu'elle fait beaucoup attention à sa ligne.

En fait, c'est très étrange, car quand nous sommes dans le lycée, on fait comme si on ne se connaissait pas, enfin, je veux dire qu'on ne se côtoie pas. Je reste avec Marie pendant les pauses du matin et de l'après-midi et elle fait de même, elle reste… eh bien, avec je ne sais pas qui, parce que je ne la vois jamais durant les pauses. Mais le midi, c'est le moment où nous nous retrouvons.

-Tu as commencé à lire le livre que la prof, nous a donné ? Demande-t-elle.

-Oui, je l'ai fini et toi ?

-Je l'ai presque terminé. Mais, je n'accroche pas.

-Tu aimes quoi comme lecture ?

-Tu vas te moquer si je te le dis ?

-Mais non, vas-y.

-Bon, d'accord. J'aime… les romans d'amours.

Je ne dis rien, et pour cause, j'ai envie de rire, mais je n'ai pas envie qu'elle se vexe. Elle semble si gênée de m'avoir avoué ça. Je reprends contenance dans ma tête et regarde devant moi.

-Eh bien… c'est bien.

-Tu trouves ça ridicule, dit-elle. Je le vois bien.

-Non, chacun ses goûts.

-Oui, c'est vrai. Et toi, tu aimes quoi comme lecture ?

-Les romans fantastiques. J'aime me plonger dans un autre univers, ça me permet de m'évader de la réalité.

-Oui, je te comprends.

En fin d'après midi, alors que je range mes affaires pour partir, Jane m'attend dehors. Marie, elle, est toujours à côté de moi.

-Tu n'as pas oublié, dit Marie, on devait faire nos devoirs ensemble cet aprèm.

-Hein ?

-Je te l'ai demandé hier.

-Ah ! Si, j'avais oublié, excuse-moi.

Nous sortons de la salle et je me retrouve dans une situation, un peu compliquée. D'un côté, j'ai promis à Marie de faire mes devoirs avec elle, de l'autre je devais aller avec Jane faire des courses.

-Tu m'excuses, je reviens, dis-je à Marie.

Je vais à côté de Jane, sous le regard contrariée de mon amie. Ca ne va pas être facile, vraiment pas. Je suis un peu gênée.

-Jane…

-Qu'est-ce qu'il y a ? Tu ne veux plus venir avec moi ?

-Si j'aimerais bien, dis-je.

-Mais, tu ne peux pas.

-J'avais oublié que j'avais promis à Marie de faire mes devoirs avec elle.

-Ah ! D'accord, puisque tu as promis, alors…

-Mais, on ira une autre fois. Si tu veux samedi, on peut sortir toutes les deux ?

-Samedi, je suis prise.

-Eh bien, tu me diras, dis-je.

-Oui, d'accord.

-Je suis vraiment désolée, Jane.

-C'est bon. On se voit demain, comme d'habitude.

-Oui, bien sûr, à demain.

Elle s'éloigne et je me sens mal tout à coup. Je rejoins Marie qui semble vraiment énervée et je regrette de ne pas être restée avec Jane, car je suis persuadée que je vais passer la soirée à entendre les plaintes de Marie à son sujet.

******

Le lendemain midi, j'attends Jane sur notre banc habituel. Pendant plusieurs minutes, j'attends et finalement, je la vois arriver. Pendant, un moment, j'ai cru qu'elle ne viendrait pas. Après tout, je lui avais fait faux bond, hier soir. J'aurais compris qu'elle ne vienne pas. Elle s'assoit à côté de moi, toujours son sac sur les genoux et sort un yaourt, qu'elle mange sans vraiment de conviction. Je fronce les sourcils, mais ne dis rien. Ce n'est pas vraiment mon problème.

-Ca va ? Demandais-je.

-Oui.

-Tu ne m'en veux pas, pour hier ?

-Non, non, ne t'en fais pas.

Mais pourtant, je sens son air crispé. Je l'ai déçue, je le sens bien et je ne sais pas pourquoi, ça me touche plus que ça ne devrait.

-Au fait, je n'ai pas ton numéro de portable. Ce serait bien qu'on les échange… au cas où.

-Heu… Oui. Si tu veux.

Je prends mon portable et elle me donne son numéro. Elle fait ensuite la même chose et je ne peux m'empêcher de sourire.

-C'est dommage que tu ne sois pas là, samedi, dis-je.

-Oui, mais mes parents ont prévu de sortir et je dois garder mon petit-frère.

-Ah ! Tu as un petit-frère.

-Oui, il s'appelle Guillaume.

-D'accord, dis-je en souriant.

-Et toi ? Tu as des frères et sœurs ?

-Non, je suis fille unique. Et je crois que c'est mieux comme ça.

-Pourquoi ?

-J'ai l'habitude d'être seule. Mais d'un autre côté, si j'avais eu des frères et des sœurs, j'aurais sûrement dit le contraire.

-Sans doute.

La conversation tourne autour de notre famille et j'apprends que ses parents sont venus travailler tous les deux dans une entreprise du coin et qu'elle vit aussi près de chez moi. C'est plutôt amusant.

******

Pendant près de trois semaines nous avons continué à manger toutes les deux le midi, mais nous n'avons trouvé aucun moyen de nous voir à la sortie des cours. En fait, je crois que Marie fait en sorte que je ne sois jamais avec elle, même si le midi, elle ne peut rien faire, puisqu'elle préfère manger avec son petit-ami.

-Tu manges avec moi ce midi ? Demande-t-elle.

-Hein ? Tu ne vas pas manger avec…

-Eric, il s'appelle Eric.

-Oui, Eric.

-Il n'est pas là à midi.

-Ah ! Mais, je ne peux pas à midi.

-Pourquoi ?

-Parce que je suis déjà prise.

Elle me regarde avec suspicion avant de regarder Jane. Je soupire en sachant très bien ce qui lui passe par la tête.

-Oui, je déjeune avec Jane, ça te pose un problème ?

-Sarah, pourquoi tu passes du temps avec elle ? Tu ne vois pas…

-Je ne vois pas quoi ? la coupais-je. Elle n'est pas comme tu le penses et au moins elle ne me laisse pas tomber le midi.

-Mais…

-Laisse-tomber, je n'ai pas envie qu'on se dispute. Si tu veux, viens déjeuner avec nous. Nous allons manger dans la sandwicherie du coin, comme il pleut.

-Je ne sais pas…

-Si tu ne veux pas, tant pis.

Elle prend un air contrit, mais je ne céderai pas cette fois. Et bien entendu, comme je m'y attendais, elle nous suit, finalement le midi. Elle n'aime pas être seule. La situation est tendue et personne ne parle. Je ne sais pas quoi dire à Jane alors qu'il y a Marie. J'ai l'impression qu'on parle plus librement quand on est toutes les deux. Marie ne dit rien, mais je sens qu'elle est tendue et ça m'agace encore plus. Jane semble gênée et j'ai l'impression qu'elle a envie de partir.

-Je peux vous laisser, dit-elle en se penchant vers moi.

-Mais non, tu restes avec nous.

-Tu es sûre ?

-Oui, sûre. Ne t'en fais pas, Marie n'est pas si froide quand on la connait.

-Hum.

Pourtant, pendant toute la durée du déjeuner, elle n'a fait que regarder Jane avec un regard méprisant et j'ai eu envie plus d'une fois, de la jeter dehors sous la pluie. En fin d'après-midi, j'ai rejoint Jane alors que Marie courait voir son petit-ami.

-Eh ! Ca va ? Demandais-je. Je suis désolée pour à midi. Je ne pensais pas qu'elle serait là.

-Ce n'est pas grave, ça va.

-Dis, tu… as un peu de temps ? On pourrait rentrer ensemble ?

-Oui, pourquoi pas, dit-elle en souriant.

-Bien, génial. Comme ça, je vais te montrer où j'habite. Je te raccompagnerai chez toi, après, je connais bien la ville.

-D'accord.

Nous prenons le bus, jusqu'au centre-ville et en attendant le deuxième, nous nous asseyons sur le banc, sous l'abri bus.

-C'est dommage qu'on n'ait pas eu encore l'occasion d'aller se promener ensemble, dit-elle.

-Oui, c'est vrai, répondis-je. On a pas mal été occupées, il faut dire.

-C'est vrai.

-Mais, tu fais quelque chose samedi ?

-Non, normalement, je n'ai rien de prévu.

-Même pas une sortie avec un garçon ? Demandais-je en souriant.

-Non.

-C'est étonnant. Je pensais qu'ils essaieraient de t'inviter tous les week-ends.

Elle semble mal à l'aise et je préfère ne rien dire de plus. Je sais que ce n'est pas bien de juger une personne de cette manière.

-Pardon, ce n'est pas… commençais-je.

-En fait, tu n'as pas tout à fait tort. On m'invite souvent, mais je préfère refuser.

-Ah !

-Je ne suis pas comme tu le crois, Sarah.

-Excuse-moi. Je ne voulais pas te donner cette impression. Le bus arrive, dis-je en changeant de sujet.

Nous montons dans le bus et le trajet se fait en silence. Je suis vraiment nulle, j'aurais mieux fait de me taire. Nous allons chez moi en courant, il pleut encore beaucoup et nous arrivons trempées.

-On prendra un parapluie, tout à l'heure.

-Tu n'es pas obligée de me raccompagner, tu sais.

-Si, si, c'est moi qui t'ai fait venir, alors, je te raccompagne.

-D'accord, comme tu veux, dit-elle en souriant.

Nous allons dans ma chambre et je la vois regarder autour d'elle.

-Tu as des tas de livres, dit-elle.

-Oui, j'aime beaucoup lire.

-Moi aussi.

-Des romans à l'eau de rose, dis-je en souriant.

-Oui, des romans d'amour. Je vois que tu n'as pas oublié.

-Difficile d'oublier.

Je la laisse observer ma chambre, alors que je vais dans la salle de bains pour aller chercher une serviette pour nous sécher. Je la retrouve au même endroit, toujours en train de regarder autour d'elle.

-Tu peux t'asseoir, tu sais, dis-je. Le service est gratuit.

-Je ne voulais pas mouiller ta chaise.

-Tiens, comme ça, tu ne le feras pas.

Elle prend la serviette et sèche ses longs cheveux. J'imagine que ça ne doit pas être facile à entretenir. Ils doivent s'emmêler facilement, c'est pour cela que je ne laisse pas trop pousser les miens. Je m'assois sur le lit et la regarde continuer à se sécher. Je comprends pourquoi les garçons craquent pour elle, elle est vraiment belle, en toute objectivité.

-Qu'est-ce qu'il y a ? Demande-t-elle.

-Rien. Je me disais, que tu avais de la chance d'être aussi belle.

-Je ne sais pas si ça l'est. Mais, tu l'es aussi, tu sais ?

-Bien moins que toi.

-C'est gentil, mais tu te dévalorises.

Elle s'assoit à côté de moi et je me sens soudain gênée. Nous restons un moment assises l'une à côté de l'autre, en silence, jusqu'à ce qu'elle fasse un geste auquel j'étais loin de m'attendre. Sa main se pose sur la mienne. Je regarde ses ongles parfaitement manucurés, comparés au miens, que je n'aime pas trop laisser pousser, comme mes cheveux.

-Tu es plus belle que tu ne le crois, dit Jane en me regardant.

-Mais non, je…

Sa main se resserre et c'est à ce moment que je me lève. Je m'assois sur ma chaise de bureau et elle semble déçue. Seulement, je ne sais pas comment réagir. Je pense que je me fais simplement des idées. Il ne doit y avoir aucun sous-entendu dans son geste. Elle se lève.

-Je vais m'en aller.

-Heu… mais, on vient à peine d'arriver.

-Oui, mais il pleut vraiment beaucoup et ça risque d'être plus difficile de rentrer.

-Ah ! D'accord.

-C'est gentil de m'avoir invitée.

-Ce n'est rien. J'espère que ce ne sera pas la dernière fois.

-Moi aussi.

Je me lève à mon tour et alors que nous allons sortir de ma chambre, Jane se retourne. Je ne dis rien, elle non plus et sans que je comprenne, elle se met légèrement sur la pointe des pieds et pose ses lèvres sur les miennes. Son baiser est doux et léger. Il ne dure pas plus de quelques secondes, mais je sais qu'il restera à jamais gravé dans ma mémoire.

Elle se recule et va dans le couloir sans un mot. Je la vois remettre sa veste et alors que je mets mes chaussures pour l'accompagner, elle vient vers moi.

-C'est bon, je vais me débrouiller.

-Mais…

-Ne t'en fais pas, ça ira. J'espère que… tu vas y réfléchir.

Je rougis et avant que je n'aie pu dire quoi que ce soit, elle passe la porte. C'est à ce moment que je m'aperçois qu'elle n'a pas pris de parapluie. Je sors dehors en chausson, je sais que je vais me faire tremper, mais tant pis.

-Attends, Jane.

Elle se retourne et revient vers moi. Mes cheveux dégoulinent déjà. Je lui tends le parapluie et elle le prend.

-Tu me le rendras demain, dis-je.

-D'accord. Merci. A demain, Sarah.

-A demain.

Elle s'en va, sans plus un regard. Moi, par contre, je l'observe s'éloigner et quand je ne le vois plus, je me décide enfin à entrer. Je suis trempée, mais bizarrement, ce n'est pas ce qui me gêne le plus. J'ai du mal à croire le geste de Jane. Je touche mes lèvres et je suis sûre que je rougis. Je ne m'attendais pas à un geste pareil et je ne sais pas vraiment quoi penser. Je ne pensais pas que Jane… pouvait avoir des sentiments pour moi. Mais, peut-être encore une fois, je me fais des idées. Il est même possible qu'elle se moque de moi. Si ça se trouve, c'est un pari, qu'elle a fait, mais je dois être trop suspicieuse, ce n'est pas bien d'être aussi méfiante, je le sais, mais je ne comprends pas. Je ne sais même pas si je peux être attirée par une femme.

******

Le lendemain, je ne sais toujours pas quoi penser de ce qui s'est passé. Je crois que je ne peux pas imaginer ce genre de chose concrètement. Jane me regarde, alors qu'elle est entourée de garçons. Elle me sourit et je le lui rends, un peu crispée, tandis que Marie me rejoint.

-Tu as une drôle de tête, aujourd'hui, dit-elle.

-Ah bon ?

-Oui, on dirait que quelque chose te tracasse.

-Ca va, dis-je toujours avec crispation. Ca devrait passer.

Nous entrons en cours, Jane est devant moi et je ne peux m'empêcher de regarder ses longs cheveux noirs, pourtant bien vite, cette vue me trouble et je me concentre sur les cours. Marie me regarde, en fronçant les sourcils, mais elle ne me dit rien. A la pause de midi, je rejoins Jane à notre endroit habituel. Aujourd'hui, il y a un grand soleil et je remarque que Jane a mon parapluie à la main. Je ne l'avais même pas remarqué ce matin.

-Tiens, dit-elle en s'asseyant à côté de moi.

-Merci.

-Est-ce que… tu vas bien ?

-Oui, oui, merci.

-Pour hier… j'espère que tu ne m'en veux pas trop.

-Non, je…

Je ne dis plus rien, quand je vois un garçon venir vers nous. Il regarde intensément Jane et je sais très bien qu'il veut lui parler.

-Jane, est-ce que tu veux déjeuner avec moi ? Demande-t-il.

-Je suis avec mon amie, dit-elle. Je suis désolée.

-Ah ! Dommage. On pourra se voir un peu plus tard. J'aimerais te parler.

-Oui, bien sûr.

-Bien, alors à tout à l'heure, dit-il ravi.

Il repart, heureux, tandis que Jane a un sourire radieux. Elle se tourne vers moi et son sourire s'estompe.

-Quelque chose ne va pas ? Demande-t-elle.

-Ce… Non, rien, dis-je en souriant. Tu es toujours aussi populaire.

-Oui et je sais très bien ce qu'il va me demander.

-De sortir avec toi ?

-Sans doute. Mais, tu sais, je… je vais lui dire non.

-Tu fais ce que tu veux.

-Oui, mais… enfin, je croyais que tu avais compris, dit-elle déçue.

-Désolée, j'ai du mal à imaginer ça, répondis-je.

-Je comprends, je ne veux pas te brusquer.

Tout le reste de la pause, nous restons silencieuses, profitant juste du moment. Je crois que j'aime vraiment sa compagnie, mais je ne sais même pas si je peux éprouver plus qu'une amitié pour une fille. C'est trop étrange, de penser à ça.

-C'est toujours bon pour demain ? Demandais-je.

-Heu… oui, répond-t-elle.

-Tu croyais que j'allais annuler ?

-Oui, avoue-t-elle.

-Je ne suis pas comme ça. Je t'avoue que je ne sais plus trop où j'en suis.

-Je comprends. Mais, si tu veux prendre un peu de recul.

-Non, ne t'en fais pas, je vais réfléchir et je te donnerai une réponse. Mais en attendant, je ne veux pas arrêter d'être ton amie.

-D'accord, merci, dit-elle avec un sourire radieux.

Cette fois, je remarque que son sourire est bien plus réel. Elle a l'air vraiment rassurée et heureuse. Je ne peux m'empêcher moi aussi d'être touchée. Cela lui va mieux, beaucoup mieux.

******

Jane et moi nous rejoignons devant le cinéma, même si nous n'y allons pas. Mais, c'était plus facile pour se retrouver. Elle a l'air heureuse d'être là. Elle a mis une robe bleue pour l'occasion, avec une veste et des bottes. J'aurais mis ça, j'aurais eu l'air d'une cruche, mais sur elle, ça fait vraiment classe. Je remarque même que plusieurs garçons l'ont regardé avec insistance et j'avoue que je n'aime pas trop leurs regards sur elle.

-Salut ! Dit-elle. Ca va ?

-Oui, bien. Et toi ?

-Bien aussi. Je suis contente de sortir un peu avec toi.

-Moi aussi. Mais dis-moi, tu fais sensation, dis-je sur un ton qui se veut léger.

-Comment ça ?

-Tu as fait tourner la tête à pas moins de cinq garçons.

-Oh ! Je n'ai pas remarqué. C'est toi que je regardais.

-Oh !

Je rougis malgré moi. Je crois que ça me fait plaisir, mais je ne sais pas très bien pourquoi. Je crois que ça me fait plaisir, en fait, qu'elle me porte autant d'attention, alors qu'elle ne regarde pas les autres garçons. Pourtant, je devrais être plus perturbée que ça, je le sais.

-On y va ? Demande-t-elle.

-Oui, bien sûr.

Toute l'après-midi, nous arpentons les rues de notre ville et nous revenons avec pas mal de paquets dans les bras, surtout Jane, qui semble adorer les vêtements. Dans mes sacs, se trouvent essentiellement des livres et des CDs, même si je me suis permise d'acheter une robe que Jane voulait absolument me voir porter. Je n'ai pas pu lui dire non, même si je lui ai dit que je portais rarement des robes.

Nous nous rendons chez elle. Elle vit dans une maison assez sobre, l'intérieur est plutôt bien arrangé. Nous montons dans sa chambre et je remarque que l'intérieur n'est pas du tout comme je me l'imaginais. Je pensais voir des posters de stars, de chanteurs, des choses, qui lui ressemblent, au lieu de ça, sa chambre est aussi sobre que le reste de la maison. Tout est parfaitement rangé et je remarque une bibliothèque où se trouvent des livres pour la plupart des romans d'amour. Je remarque un ordinateur sur le bureau, de couleur rose, finalement je ne m'étais pas trompée sur tout. Mais, ça lui va plutôt bien.

-Tu peux t'asseoir. C'est gratuit, dit-elle en souriant.

-Ah ! Chez toi aussi, c'est rassurant.

-Tu sais, je suis rassurée que tu te comportes comme ça, avec moi.

-Comment ça ?

-Tu aurais pu me rejeter, après que je t'ai… embrassée.

-C'est vrai, mais je ne suis pas comme ça. C'est vrai que ça m'a surprise, mais je t'ai dit que je te donnerais la réponse.

-Merci.

Jane s'assoit à côté de moi et mon cœur commence à battre un peu plus vite. Je me sens mal à l'aise, mais pourtant, j'apprécie la proximité.

-Je ne veux pas te faire peur, dit-elle. Si tu ne veux pas, tu me le dis.

-Heu… Oui.

Elle se rapproche un peu plus et sa main se pose sur ma cuisse. Son visage se rapproche de mien et je la laisse faire. Je crois… que j'ai envie de succomber, au moins pour savoir si ce que je ressens dans ma poitrine est bien réel. Comme la dernière fois, Jane pose ses lèvres sur les miennes, sans forcer. Son baiser est aussi léger qu'une plume. Je sens le goût de son rouge à lèvres sur mes lèvres. Bien vite, j'ouvre la bouche et sa langue s'insinue en moi. C'est une sensation incroyable, mieux encore que mon premier baiser, qui a été un souvenir laborieux. Sa langue se mélange à la mienne et je la laisse faire avec envie. Ses mains entourent mes hanches et maladroitement je pose mes mains sur ses bras. Nous nous séparons, Jane a un sourire radieux sur les lèvres. Je ne sais pas vraiment quelle tête je fais, mais finalement, je ne peux m'empêcher de sourire.

-On essaie ? Dit-elle.

-Je crois, répondis-je.

******

Pendant près de trois mois, nous avons vécu notre histoire. Personne n'a eu l'air de se douter de ce qui se passait et j'avoue que j'avais envie de garder cette histoire pour moi, j'avais envie de garder Jane pour moi seule. J'ai eu du mal à mettre des sentiments sur notre relation, mais je crois qu'aujourd'hui, je sais ce que je ressens. Pourtant, tout va peut-être se terminer. Nous avons passé les dernières épreuves du bac, mais c'est le moment qu'a choisi Jane pour m'annoncer la mauvaise nouvelle.

-Je vais déménager, dit-elle.

-Quoi ? Comment ça ?

-Mes parents doivent encore partir pour leur travail. Je suis obligée de les suivre.

-Mais… tu es majeure, tu peux…

-Ce n'est pas si simple. La fac que j'ai choisie est éloignée d'ici, donc…

-Mais…

-C'est un choix que j'ai fait avant que l'on soit ensemble, Sarah. Je ne savais pas comment t'en parler. Je ne pensais pas que je t'aimerais autant.

-Tu ne pensais pas ?

-S'il te plait, ne rends pas les choses plus compliquées. A l'heure d'aujourd'hui, je t'aime. Tu ne me l'as jamais dit, c'est pour cela que je ne t'en ai pas parlé. J'ai bien compris que notre relation te satisfaisait, mais j'ai pensé que ça n'irait pas plus loin.

Je ne dis rien, je suis abasourdie. Je n'en reviens pas de ce qu'elle me dit. Sans un mot, je m'en vais et elle me laisse partir. De toute façon, elle sait que ça ne sert à rien de parler. Je me retrouve chez moi, bien vite et malgré moi, mes larmes coulent, je ne peux pas m'empêcher d'éprouver de la tristesse. Je n'ai aucune envie qu'elle parte.

Pendant plusieurs jours, je n'ai pas eu de nouvelles et moi-même, je n'ai pas eu le courage de l'appeler. Mes parents s'inquiètent, je le sais, mais je ne vois pas comment leur dire ce qui m'arrive. En fin d'après-midi, je me rends devant chez Jane. Les camions de déménageurs sont là. Elle aussi, elle regarde les déménageurs emporter ses affaires. C'est à ce moment qu'elle me voit. Elle s'approche de moi et cette fois, je ne m'enfuis pas.

-Je m'en vais demain, dit-elle en arrivant près de moi.

-Déjà ?

-Oui, déjà. Viens, dit-elle.

Elle me prend la main et nous allons chez elle. La maison est désespérément vide. On va dans sa chambre, où il ne reste presque plus rien. Un ou deux livres qui traînent. Un matelas avec des draps, un lecteur mp3.

-Alors, c'est fini, dis-je.

-Ce n'est pas ce que je voulais.

-Je sais.

-Mais, on peut s'écrire, non ?

-Oui, mais tu crois que notre relation pourra tenir la distance ?

-Je ne sais pas, dit-elle avec sincérité.

-Je t'aime, Jane.

-Je ne crois pas que ce soit le moment de me le dire.

-Pourtant, je trouve que c'est vraiment le meilleur. Je ne t'oublierai jamais. Ces derniers mois ont été les meilleurs de ma vie.

-A moi aussi, dit-elle. Je ne t'oublierai jamais.

Elle baisse la tête. Je sais qu'elle ne veut pas partir et je sais que je ne veux pas la laisser partir. Pourtant, nous n'avons pas le choix. Je lève sa tête doucement pour qu'elle me regarde et mon cœur se serre quand je vois qu'elle pleure. Mes larmes aussi menacent de couler. Je me penche pour l'embrasser et pour la dernière fois, je touche ses lèvres douces, mais une chose est sûre, jamais je n'oublierai, le sourire de Jane.

Fin !