Coucou ! Avancée difficile, je vous l'accorde. Mais j'aime faire trainer cette partie de l'histoire. C'est, d'après moi, l'instant le plus crucial. L'instant où Seimei accepte enfin ce qu'il ressent. l'instant de pleins d'autres choses aussi. Mais pas encore la fin ;)
Bonne lecture !
XIV
Le jour où j'ai enlacé un papillon
Les battements de mon coeur ne voulaient pas se calmer. Je n'avais encore jamais senti mes jambes autant trembler. Je me sentai perdre pied alors que le sol se trouvait être définitivement bien trop dur. Il n'y avait pour moi qu'un seul moyen de faire s'arrêter tout ceci. Ce soir, en traversant la rue, je devais réussir à nous imposer soit une fin, soit un début. De quoi ? Je ne savais pas encore. Il fallait que ce soit le cas. Qu'il perde de son emprise sur moi, ou qu'elle se renforce. Que j'arrête de penser à ses lèvres sur les miennes, ou qu'ils se les accaparent définitivement.
A l'instant même où j'eus enfin le courage de faire un pas, de poser le pied sur ce chemin qui nous séparaient, je vis que la porte de son appartement s'ouvrait et ne pus que venir m'emmitoufler aux travers des ombres de mon porche.
Je me sentais ridicule. L'adrénaline montait de plus en plus. Mon coeur battait à tout rompre, mes tempes étaient douloureuses.
Et je vis cet homme aux cheveux corbeaux commencer à redescendre la rue. Je ne le vis que de dos, mais j'étais certain qu'il venait de passer cette porte que j'avais vu s'entrouvrir. Qu'il sortait de chez Mathieu, alors que je me trouvais bêtement là.
Je n'avais rien à faire là !
Cette pensée me vint aussitôt. J'eus honte de mon attitude. Pouquoi avoir peur ? Pourquoi avoir fait tout ce cirque pour s'apercevoir, au dernier instant, que tout avait été bien inutile ! Que tout ceci ne rimait à rien.
Mathieu avait très certainement fait son choix. Et je ne faisais certainement pas parti de celui-ci.
Les larmes me montaient aux yeux. Celles que j'avais toujours réussies à contrôler. Non... je ne voulais pas pleurer. Pas pour lui. Non, pas comme ça. Ce n'était pas à moi de ressentir cela. Je devrais m'en foutre. Oui, cela ne me concerne pas. Ne me concerne plus. Mathieu ne me regarde plus. Je n'étais que de passage.
Je n'aurais jamais dû y accorder tant d'importance...
Les jambes de nouveaux flageolantes, je ne savais plus même comment me mouvoir. Je ne réussissais plus à bouger. Je me sentais disparaître, aspiré par ce mur de pierre. Ce mur si froid, sans sentiment, juste là parce qu'il doit être là. Ne servant à rien d'autre. Un peu comme moi.
Je voulais me confondre avec lui. Être aspiré. Et disparaître. Ne plus rien ressentir. Devenir froid, et seulement utile. Ne plus devoir à affronter de sentiments aussi douloureux, de sentiments aussi pathétique.
Oui, je me trouvais idiot. Si con. Tellement. Il y a encore quelques temps, je me moquais si facilement de ces gens qui pleuraient après une rupture, qui se disaient ne pouvant vivre sans l'autre, ne pouvant surmonter cela. J'avais quitté tellement de mecs sans me retourner. Et lorque l'on m'avait plaqué, je me disais uniquement "bon, ben, tant pis !
Allons vers de nouvelles aventures !"
Mais non. Il avait fallut que je m'attache à lui. Que je ne vois que lui. Que je ne pense qu'à lui. Je me l'étais interdit. Tout ceci est de sa faute. Pourquoi était-il venu vers moi ?Pourquoi n'avais-je pas plus eu la force de le repousser ? Pourquoi avais-je cédé ?
Oui, à cet instant, je l'aimais déjà...
Et ces mots me firent si mal... si mal...
Ma respiration s'était coupée, mon ventre avait grommelé avant de se contracter férocement. Mon coeur me brûlait. Je tremblais de pitié, de rage. Pour moi, pour nous. Pour l'être ignoble que j'étais devenu.
On ne pleure pas pour un homme.
Il ne le faut pas. Je ne suis pas ce genre de personne. Je ne suis pas capable d'aimer un homme. Je n'ai rien avoir avec toutes ces histoires à l'eau de rose que l'on voit partout. J'aime le sexe. J'aime le sexe avec Mathieu. Mais pourtant, ce n'était pas les seules choses que j'aimais de lui et cela me fit si mal de l'admettre, là, à demi-caché sous le porche de mon habitation, que je ne vis même pas cette silhouette s'approcher de moi.
Se recroqueviller dans un cocon.
Démarrer quelque chose de nouveau.
Et juste renaître. Moins sale.
.. o.O.o ..
"Viens... Suis-moi."
Je sentis ses doigts s'enrouler autour de mon poignet, comme si leur place aurait toujours dû être ici. A cet endroit. Sur moi. Et nulle part ailleurs.
Je sentis son souffle sur mon visage alors que je ne pouvais pas détacher mon regard du sol. Je ne voulais pas le voir. Je ne voulais pas qu'il me touche. Je ne voulais pas être près de lui. Et en même temps, je voulais quand même tout cela.
Je le voulais. Je n'en pouvais plus de ressentir cela. Comment pouvait-on se laisser souffrir comme cela ? C'était dégueulasse ! Je ne voulais pas de ces sentiments ! Je ne voulais pas de Mathieu. Et puis je l'ai voulu. Et maintenant je le veux, encore et encore.
"Lâche-moi..."
Je n'avais plus la force de résister, j'espérais seulement qu'il comprendrait que c'était asez cet instant précis qu'il fallait me laisser partir. Que, finalement, l'animal en cage, c'était moi.
Et pas lui.
Juste moi.
Perdu.
Il m'attira à lui, son souffle dans mon cou.
"Arrête..."
Je ne voulais pas ça.
Non, je ne le voulais pas.
... Si... je le voulais tellement...
Mais pourquoi ? Bordel ! Pourquoi !
"Seimei... Ne te débats pas...
- Arrête !
- Seimei !"
Je réussis à m'écarter, à faire en sorte qu'il me relâche. Je mimai déjà le mouvement de me détourner pour repasser le porche et m'enfuir, le quitter, juste comme cela, que déjà, ses doigts avaient retrouvés leur place et qu'ils m'empêchaient d'avancer.
"Regarde moi ! Seimei !"
Je me débattis à nouveau. Plus violemment. Je ne voulais pas cela.
Je ne voulais pas ça !
Son autre main vint se refermer sur mon épaule, et je ne pus bientôt plus résister. Et ce fut à l'instant où je vis son visage que je ne pus finalement plus retenir mes larmes.
Disparaître sans laisser de traces.
S'envoler.
Déployer ses ailes et s'échapper.
.. o.O.o ..
"Ce n'est pas ce que tu crois. Ce que tu penses voir n'est pas la réalité. Cet homme, il n'est plus rien pour moi."
Comment pourrais-je le croire ?
Mon expression dut trahir mes pensées car, alors qu'il me servait un verre d'eau, il décida de s'asseoir juste à côté de moi sur ce grand lit (que cet homme avait sans aucun doute essayé) et de poser ses yeux sur mes mains que je ne pouvais m'empêcher de triturer.
Je ne savais pas vraiment ce que je faisais là. Mais il m'y avait conduit de force, et, au fond de moi, j'avais la certitude qu'il ne fallait plus fuir. Qu'il fallait écouter, et juger par la suite.
Je ne rétorquai rien, il savait pertinemment ce qui me trottait dans la tête, et y répondis par la suite.
"Samuel, c'est comme ça qu'il s'appelle. Il croit avoir un pouvoir sur moi. Il croit que je lui appartiens... encore..."
Il sembla s'étrangler de devoir prononcer ce dernier mot. Il avait baissé les yeux, semblait se concentrer sur quelque chose de plus lointain. Quelque part ailleurs, ou dans son passé.
Je ne pouvais décrire tout le tas démotions qui passaient sur son visage alors qu'il réfléchissait à la suite de ses propos.
"Il n'est rien pour moi, je...
- Il t'a marqué, ce n'est pas rien." Je lui coupai la parole, toute once de colère ayant disparu.
Je me sentais là, mais ailleurs aussi. Mon corps était présent, mais je n'arrivais plus à penser, je n'arrivais plus à bouger.
J'étais effrayé par la tournure que prendrait les événements, par ce qu'il me dirait. Par tout ce qu'il oserait me dire et tout cce qu'il garderait encore pour lui.
Je voulais en finir au plus vite. Mes membres tremblaient sans que je ne puisse les contrôler.
Il marqua un temps de pause avant de nouveau avoir à choisir ses mots.
"Oui. Il croit pouvoir prendre possession de moi.
- Il sait qu'il le peut, c'est pas plutôt ça ?
- Nan... C'est faux !
- Ben alors, arrête de tourner autour du pot et dis-moi pourquoi tu ne me montres pas ton dos !"
Ses yeux rencontrèrent finalement les miens. Et j'y vis tout ce que j'avais à y avoir. De la peur. De la honte. Du désarroi. Une profonde terreur.
"Je... je ne peux pas...
- Et pourquoi ça ?
- Si je le montre, cela deviendra encore un peu plus réel, non ?"
Quoi ?
"Attends, Mathieu, t'es en train de me dire que t'es pas capable de voir la réalité en face ? Que t'es pas capable d'assumer ce qu'il t'a fait ?
- Je ne me regarde jamais cette partie de mon corps dans un miroir. Je ne l'ai jamais montré à personne. Il n'y a que lui..."
Il baissa à nouveau les yeux. Je suivis son regard. Il fixait cette main tremblante qu'il avait posé à côté de lui, sur le lit. Instinctivement, je décidai de l'enserrer de la mienne, il sursauta.
"Raison de plus ! J'ai discuté avec lui..."
Il releva aussitôt son visage, presque choqué par ce que je lui disais. Il sembla vouloir me rétorquer quelque chose, mais je ne lui en laissais pas le temps :
"... et puis avec toi aussi. Je sais tout ce que cela peut représenter pour lui. Et ce que ça pourrait représenter pour toi. C'est pour cela, qu'il faut que tu te libères. Ce n'est pas ce que tu veux ?"
Durant ces quelques instants de discussion, je m'avais oublié. Je ne pensais plus qu'à la façon de l'aider lui, et seulement lui. Dans tout cela, je ne pensais même pas devoir entrer en compte.
"Ce dos, ce tatouage. Tu sais que tu n'es pas marqué à vie ? Qu'au final, si tu décides de l'affronter, tu pourrais le faire disparaitre ? Voir même l'embellir ?
- Je ne comprends pas ce que tu dis...
- N'as-tu jamais pensé à tourner la page ? A vivre avec ?
- C'est plus facile à dire...
- Je ne sais pas ce qu'il a pu se passer entre vous. Mais c'est fini maintenant. Je sais que c'est ce que tu veux. Tu ne veux plus de lui. Pprouve-le-lui."
Bizarrement, il eut un petit sourire avant de répondre :
"C'est exactement ce qu'il m'a dit..."
Je soufflai d'exaspération.
"Il attends que tu restes faible. Que tu lui reviennes. Je le sais ça parce que n'importe qui aimerait avoir un contrôle sur les sentiments de la personne qu'il aime."
Il me fixa longtemps., je lui répondis :
"Oui, Mathieu, moi aussi. Mais là n'est pas le problème."
Il sembla ne pas tout de suite comprendre.
"Montre-le-moi. Ce papillon. Je veux le voir. Et ensuite, raconte-moi tout."
Je savais qu'il voulait s'en libérer, sinon, il ne m'en aurait jamais parlé. Cette conversation était un appel à l'aide. Je n'avais pas les bons mots, mais je savais me démerder pas trop mal.
Je n'avais pas besoin de grands discours philosophiques et l'heure n'était pas aux excès de compassion. Avec tout cela, il n'avancerait pas.
Je savais aussi que ce n'était pas celui pour lui que j'agissais aussi. Secrètement tout ceci se révélait être très égoïste. Mais si j'avais déjà vu ce tatouage, ce dont il n'était pas obligé de savoir, même si je n'éprouvais plus cette même sensation d'acharnement, j'agissais ainsi parce que j'étais certain que par la suite, il me reviendrait. Quoi qu'il se passe.
Il serait enfin à moi.
Et que ce serait moi, et moi seul, qui le mettrai en cage.