Disclaimer : à moi etc … sauf les chansons : Devil's dance de Metallica et Lullaby de

Dixie Chicks

Rating : M

Genre : romance, angst

Un petit OS sans prétention qui vient en séquelle de Tom & Jerry. A la base c'est une Gundam Wing comme d'hab sauf que là, ce n'était pas une UA donc j'ai bien galéré, comme pour Black Hole en fait.

BakaPink : Hello ! J'espère que tu passeras par ici ! L'adresse mail que tu m'as donné ne fonctionne pas, le mail m'est revenu avec la mention non délivré car compte non actif. N'hésite pas à me contacter et j'espère qu'en attendant cet OS te plaira.

Reconquérir :

_Conquérir de nouveau quelque chose, le reprendre après l'avoir perdu.

_Recouvrer quelque chose, le regagner

_Être de nouveau aimé, estimé par quelqu'un

.

.

_ Hmmm Keith …

Celui-ci reprit ses lèvres avec plus d'avidité encore et l'allongea de tout son long sur le divan. Ses gémissements l'attisaient comme jamais chaque fois qu'ils se retrouvaient seuls tous les deux, ce qui était de plus en plus rare, il en convenait, pourtant le désir était bien présent, lui vrillant les reins douloureusement.

Chassant ses idées noires, il posa sa main sur l'entrejambe de son amant et malgré le jean, il le sentit durcir plus encore. S'en réjouissant, il commença à le déboutonner, tout doucement, prenant un malin plaisir à le faire languir.

_ Ahhh Keith ! … Encore …

Le dit amant se cambra en cherchant sa respiration, ses mains sur lui … Elles lui manquaient tant ! Il avait l'impression de les redécouvrir. Il ferma les yeux pour savourer plus encore les caresses de son compagnon, se laissant porter par le souffle chaud qui courait sur son cou et sa nuque.

Leurs t-shirt avaient disparu depuis plusieurs minutes déjà et l'un comme l'autre ne pouvaient empêcher leurs mains de toucher, caresser, palper et titiller tous les points sensibles qu'ils rencontraient.

Les halètements qui s'élevaient dans la pièce attenante au bureau du grand PDG ne laissaient aucun doute quant aux activités qui y régnaient. Ce genre d'activités entre ces deux personnes en particulier n'avaient rien d'extraordinaire même si cela avait pu surprendre au départ, tout le monde, ou presque, s'y était fait.

Biiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiip !

Ils sursautèrent de concert mais alors que le brun se relevait à toute vitesse en attrapant son portable sur la petite table, le jeune homme aux cheveux longs, lui, laissa retomber sa tête sur l'accoudoir en soupirant, une main devant ses yeux.

_ Shit ! Elle a un radar ou quoi pour toujours nous déranger à ce moment là ?! Demanda-t-il sans vraiment attendre de réponse.

Sa main retomba mollement à côté de sa tête et dans un mouvement vif qui contrastait totalement avec son attitude précédente, il se leva du canapé et reboutonna son jean. Alors qu'il cherchait son haut, il se rendit compte que son amant était déjà rhabillé et enfilait ses chaussures.

Une colère noire s'empara de lui mais il fit un effort surhumain pour se contenir. Cela fonctionna si bien que la colère laissa soudainement place à une sorte de fatalisme résigné. Il le savait que ça ne pouvait pas durer … Se détournant pour cacher ses pensées, il s'appuya à la fenêtre, attendant que son amant quitte la pièce pour laisser éclater sa rage et sa douleur.

Ce dernier était tout autant frustré mais comme d'habitude, il ne laissait rien paraître. Cela faisait bien un mois qu'ils n'avaient pas pu aller au bout d'un moment câlin, chaque fois dérangés par un appel, une sonnerie, des coups frappés à la porte, … Il devait bien reconnaître que cela faisait beaucoup pour de simples coïncidences mais chaque fois les appels étaient justifiés alors … Comme toujours, il rangea ses doutes au fond de son esprit et attrapa la pile de dossiers qui ne le quittait jamais.

Il hésita un moment, il y a encore quelques temps il serait allé prendre son amant dans ses bras, l'aurait embrassé, lui aurait assuré qu'il faisait au plus vite afin de revenir rapidement et de reprendre où ils en étaient …

Seulement, après toutes les disputes qu'ils avaient eu concernant son poste dans l'entreprise, il n'osait plus. Il savait que si il l'approchait, Cory ne pourrait pas retenir sa colère. Ce fut donc sans un mot mais en jetant un regard désespéré au dos de son amant qu'il enclencha la poignée de la porte, s'apprêtant à sortir.

_ Je rentre, le coupa la voix froide de Cory.

Keith fronça les sourcils. D'habitude quand il ne quittait pas l'immeuble de la boîte pour un rendez-vous extérieur et que Cory était en congés ou en week-end, il l'attendait dans cette pièce qu'ils avaient aménagés ensemble pour se voir même quand le bourreau de travail qu'il était ne pouvait s'absenter de son poste plus de quelques heures.

_ Pourquoi ?

Cory ne se retourna pas, il ne voulait pas flancher et il savait que c'était ce qu'il se passerait si il se tournait vers son amant. Il devait être fort, conserver un minimum de dignité, c'était tout ce qu'il lui restait.

_ Pourquoi ? Répéta-t-il alors avec une pointe d'ironie dans la voix. Tu ne t'es pas dit que j'avais peut-être autre chose à faire de ma journée, de ma vie, que d'attendre que tu reviennes coincé entre quatre murs ?

Le silence qui lui répondit fut suffisamment éloquent. Il baissa les yeux sur ce qui se passait dans la rue sous la fenêtre, même si en réalité, il ne faisait pas du tout attention à ce qu'il pouvait y voir. Il ne voulait pas être si froid avec Keith, il crevait d'envie de se jeter dans ses bras, de le supplier de rester avec lui et de lui dire de l'envoyer se faire voir ailleurs. Mais il savait parfaitement que Keith ne resterait pas avec lui quoi qu'il fasse ou dise ...

_ Je préfère rentrer chez no... à l'appart, conclut-il d'une voix redevenue normale.

Le froncement de sourcils de l'australien s'accentua ainsi que son inquiétude. Non seulement c'était étrange de la part de Cory de vouloir partir, mais, en plus, le ton de sa voix et le fait qu'il se soit repris en parlant de leur foyer, refusant de prononcer ce « nous » qui était pourtant sur le bout de ses lèvres …

Tout cela creusait un gouffre au fond de son estomac. Il allait l'interroger mais le son strident de son téléphone résonna à nouveau. Il l'éteignit en soupirant – son assistante aurait sa peau – conscient qu'il devrait remettre leurs explications à plus tard, encore ...

_ Je t'appelle dès que j'ai fini dans ce cas.

Cory entendit la porte se fermer doucement et seulement là, il se retourna, la contemplant comme si elle pouvait répondre à ses questions. Après avoir fermé les yeux une seconde pour refouler les sentiments de tristesse et de rage qui l'étreignaient, il termina de se rhabiller, repensant à tout ce qu'ils avaient vécu pour en arriver là.

Contrairement à ce qu'il avait cru après ces quelques jours dans la maison de la plage, Keith ne lui avait pas tourné le dos. Il avait pensé qu'après avoir eu ce qu'il désirait, et malgré les mots d'amour du brun, celui-ci lui dirait « salut » et qu'ils ne se croiseraient plus qu'à des repas ou des galas de charité.

Pourtant, en le raccompagnant chez lui, Keith lui avait longuement parlé, expliquant son rôle de PDG, ses obligations et ses voyages à l'international pendant un long moment avant de conclure en lui demandant si malgré tout ça il était réellement motivé pour construire quelque chose à deux.

_ Bien sûr que oui ! S'était-il alors exclamé. On en a déjà parlé et je pensais avoir été clair, j'ai conscience de qui tu es et des difficultés qui s'annoncent mais je ne veux pas te lâcher, lui affirma-t-il en posant une main sur la cuisse du brun alors qu'ils venaient de s'arrêter devant la demeure de ses parents.

_ Ça va te sembler précipité, mais réfléchis bien avant de répondre, lui avait alors répondu Keith très sérieusement. J'aimerai que tu t'installes chez moi, avait-il lâché rapidement comme si il avait eu peur de perdre tout son courage.

_ Chez toi ? Avait soufflé Cory, pas certain d'avoir bien compris.

_ C'est rapide et totalement fou je te l'accorde, mais aux vues de nos emplois du temps, c'est la seule façon pour qu'on arrive à se voir plus d'une fois ou deux par mois, s'était-il justifié devant les yeux ahuris du jeune homme. Je ne te demande pas une réponse imméd...

_ C'est oui, lui avait-il souri en lui coupant la parole.

_ Tu es sûr ? Je ne veux pas que tu précipites et que tu regrettes, je peux être particulièrement invivable et stressant et …

_ Ce n'est pas comme si je risquais grand chose, l'avait-il coupé à nouveau, si ça ne fonctionne pas je retournerai chez mes parents et on tentera autre chose c'est tout.

Keith l'avait longuement dévisagé avant de lui sauter dessus comme un sauvage pour l'embrasser à perdre haleine. Cory avait souri dans le baiser, ravi de la fougue de son amant, avant de se rappeler qu'il devait encore le présenter à ses parents.

Ils n'avaient rien dit à personne d'abord, à part aux parents de Cory pour des raisons évidentes. Les premiers mois de leur relation avait été très discrets, ils voulaient se tester avant d'en parler à leurs amis, pour être sûrs que ça marcherait.

Au bout de cinq mois d'une relation passionnée et très charnelle, entrecoupée de moments tendres et de partage, ils avaient réunis leurs plus proches amis, Quincy et Shawn, Cassie et Nigel – la sœur de Shawn et son compagnon qu'ils connaissaient déjà tous les deux chacun de leur côté – et Sheryl, l'assistante et meilleure amie de Keith.

Si ils avaient tant attendu c'était surtout à cause de Cory. Il restait toujours persuadé qu'un jour Keith le quitterait, lassé d'être avec un gamin, et du coup il n'arrivait pas à croire en leur couple suffisamment pour en parler aux autres. Il avait fallu toute la force de persuasion du brun pour qu'il accepte de mettre leurs amis dans la confidence, amis incluant Sheryl que le jeune homme ne pouvait pas encadrer et elle le lui rendait bien. Elle se doutait de ce qui se passait entre eux depuis un bon moment déjà et elle ne l'épargnait pas dans ses commentaires dès que Keith avait le dos tourné. Il n'en avait jamais rien dit à son compagnon, ne voulant pas qu'il se retrouve en mauvaise posture entre son amie d'enfance et son amant, pourtant il en souffrait énormément.

Alors après l'annonce de leur couple pendant le dîner, il avait tenté d'aborder le sujet une fois ou deux, lui expliquant qu'elle était particulièrement odieuse avec lui et qu'il la soupçonnait d'être amoureuse de lui, le complexe de la secrétaire en quelque sorte.

_ Et quand bien même ce serait vrai, c'est toi que j'aime, sinon je serai avec elle depuis longtemps, non ? Lui avait répondu Keith avant de l'embrasser et de lui faire tout oublier.

Les craintes de l'américain s'étaient pourtant révélées fondées lorsqu'à peine un mois après l'annonce officielle de leur installation ensemble, soit en réalité six mois, Sheryl avait commencé à les déranger systématiquement quand elle les savait ensemble, s'arrangeant toujours pour avoir une bonne excuse, un client imprévu mais important, un coup de fil urgent à cause des décalages horaires, des dossiers en retard, des papiers que lui seul pouvait signer … Nombreuses étaient les nuits où il ne rentrait même pas chez eux.

Après ces cinq semaines épuisantes, ils avaient eu l'idée d'aménager le débarras mitoyen à son bureau, et qui lui servait d'archives, en petite pièce à vivre. Elle faisait bien vingt mètres carré, ils y avaient installé un grand divan confortable, une table basse, un mini-bar, un four à micro-onde, une cafetière et un bureau avec connexion internet pour que Cory puisse bosser ses cours en attendant son amant. Ils avaient eu une accalmie de quelques jours jusqu'à ce les rendez-vous deviennent de plus en plus nombreux, surchargeant le planning de Keith qui relevait déjà de l'inhumain.

Cela durait depuis un mois maintenant et pendant ce laps de temps, ils s'étaient pris la tête un nombre incalculable de fois, les portes avaient claqué, le ton était monté, mais jamais, jamais Cory n'avait éprouvé le besoin de partir. Jusque là …

Parce que jusque là, il avait le réel sentiment de se battre contre Sheryl, alors que depuis quelques jours, il savait qu'il se battait contre Keith. Keith et son air blasé quand Cory lui faisait part de ses doutes et souriait en lui rappelant son homosexualité affirmée, Keith qui le traitait de parano quand Cory émettait l'idée qu'elle faisait exprès de les déranger dans ces moments là et qu'elle avait dû mettre des caméras dans leur pièce, Keith qui restait stoïque quand Cory lui disait qu'il lui manquait …

Son impassibilité à la limite de l'apathie alors que leur relation était en danger, l'américain ne le supportait plus. Il lui semblait qu'il se battait contre des moulins à vent. Une relation se construit à deux certes, mais elle s'entretenait de même, non ?

Ne voulant plus penser à ça maintenant, il attrapa son sac de cours et jeta vite fait ses quelques affaires dedans. Il claqua la porte derrière lui sans même se retourner. Il traversa les couloirs étrangement vides et grimpa sur sa moto. Tant mieux, il ne voulait croiser personne et surtout pas elle. Elle avait gagné et la défaite était dure à encaisser, même si elle était prévisible.

Arrivé à leur appart, il jeta son sac dans le salon. Il était totalement désœuvré. Depuis le temps qu'ils étaient ensemble, il ne savait pas si il pourrait vivre seul à nouveau. Il avait quelques jours de congé avant la reprise des cours et il ne savait même pas comment les occuper sans Keith à ses côtés. C'était pathétique. Lui qui n'avait jamais eu besoin de personne, aujourd'hui que son amant n'était plus là, il se sentait comme un chaton abandonné.

Hors de question qu'il appelle un de leurs amis communs, non seulement ils étaient également occupés mais en plus, quoi qu'il fasse, il aurait droit à un sermon de Quincy. Ce dernier n'hésiterait pas à annuler une de ses si importantes réunions pour venir lui tirer les oreilles. Ils en avaient parlé tant de fois tous les deux depuis ces dernières semaines que Quincy ne laisserait pas passer facilement l'abandon du cuivré. Il était d'ailleurs le seul à croire complètement Cory, il connaissait bien Sheryl et voyait clair dans son jeu mais Cory avait refusé qu'il en parle à Keith.

Il ne voulait pas que son amant voit son amitié, sa première amitié, déçue et pour être honnête il craignait toujours que le brun ne le quitte pour cette femme si jamais il réalisait qu'elle l'aimait. Après tout, dans son milieu, ne serait-ce pas plus convenable d'avoir une épouse et des enfants plutôt qu'un compagnon de onze ans plus jeune ?

Non. Il ne mêlerait personne à sa décision. Et non. Il ne se laisserait pas abattre. Son amant préférait s'occuper de son travail en compagnie de l'autre blondasse ? Grand bien lui fasse ! Lui aussi trouverait une occupation. Il n'était pas venu le jour où il resterait à attendre le retour de l'amant prodigue en lui cuisinant de petits plats telle une parfaite maîtresse de maison !

Après un coup d'œil à l'horloge murale qui affichait presque vingt heure, il se dit qu'il avait le temps de se préparer tranquillement avant de filer faire un tour, il ne savait pas encore, ciné ? bar ? boîte ? Il se déciderait sur le moment, en fonction des places de parking comme il faisait avant, quand il était célibataire … A cette pensée son cœur se serra et il dû se forcer à penser à autre chose en filant sous la douche.

La boîte dans laquelle il avait fini était plus enfumée que dans son souvenir, plus bruyante aussi mais c'était tant mieux. Ça l'empêchait de trop réfléchir. Il laissa l'alcool engourdir ses sens, la musique l'emporter et il ferma son esprit à tout le reste. Cela faisait plus de sept heures qu'il avait quitté le siège de l'entreprise et il n'avait toujours pas de nouvelles de son amant.

Accoudé au bar, il reçut un vrai choc électrique en reconnaissant la chanson qui passait à cet instant. Le sort s'acharnait contre lui, il ne voyait que cette explication. Sa main se serra autour de son verre presque à l'en briser et ses paupières étaient tellement plissées par la douleur que des points lumineux apparurent sur ses rétines. Malgré lui, les souvenirs de cette nuit là lui revinrent avec force comme pour le punir d'avoir tenté de les ignorer.

_ Cor', soupira Keith, tu sais que j'ai horreur de ce genre d'endroit. Je suis venu pour te faire plaisir mais là tu m'en demandes beaucoup.

Le brun était assis à une table non loin du bar et Cory tentait tant bien que mal de l'en déloger pour rejoindre Quincy et Shawn sur la piste de danse. Ils avaient avoué depuis peu leur installation ensemble à leurs amis et Quincy avait proposé cette sortie en boîte entre couples « pour fêter ça » avait-il dit.

Si Cory n'aimait pas les boîtes ordinaires, celle-ci avait le bon goût de ne passer que du rock et il était ravi, Keith beaucoup moins. Sa jalousie était exacerbée par ce sentiment de propriété qu'il avait sur son amant et il espérait vraiment pouvoir se contenir et éviter un esclandre alors qu'il le regardait évoluer sur la piste entouré de prédateurs tout sauf discrets. Ce qui était compréhensible vu comment Cory se déhanchait sur la piste. Mais c'était quoi cette chanson ? Son amant était un véritable appel au viol là !

Cory, lassé par les refus systématiques de son amant, avait décidé de tester autre chose. Il connaissait sa jalousie, au moins égale à la sienne, et il savait qu'il pouvait jouer dessus. Enchanté par la chanson qui débutait, il rejoignit la piste et se laissa enflammer par la danse du diable.

Ouais, je te sens aussi
Je ressens,

Ces choses que tu fais
Dans tes yeux je vois un feu qui brûle pour te sauver
C'est une volonté
Ancrée profondément tu sais, les graines que je plante pousseront

Il espérait que l'australien ferait attention aux paroles tendancieuses de la chanson et qu'il sentirait comme lui le feu monter progressivement au creux de ses reins. En ce qui le concernait, Cory était déjà proche de la combustion spontanée.

Un jour tu verras
Et oseras venir à moi
Ouais, viens, viens maintenant saisir la chance
C'est vrai
Allez danse !

Il ferma les yeux et ondula plus fort, invitant ainsi les plus téméraires à tenter une approche mais priant intérieurement pour que les mains qui se poseraient sur lui soit celles de son compagnon. Il allait le rendre dingue, le faire sortir de ses gonds pour le faire sortir de sa léthargie. Il voulait, il avait besoin de danser avec lui !

Serpent,

Je suis le serpent
Tentant,

Cette morsure te prendra
Laisse moi construire ton esprit,

Laisse ton « toi » derrière
Ne sois pas effrayée
J'ai ce dont tu as besoin, j'alimenterai ta faim

Il rouvrit un œil en sentant un mouvement dans son dos, il savait déjà que ce n'était pas Keith mais il voulait voir sa réaction. Il jubila en voyant les yeux noirs à la fois de désir et de colère de son amour. A n'en pas douter, il valait mieux pour le mec derrière d'oublier sa proie et de passer son chemin... A croire que le pouvoir hypnotique de Cory était plus fort que tout … car il resta.

Un jour tu verras
Et osera venir à moi
Ouais, viens, viens maintenant saisir la chance
Ah ah, viens danser

Cory sourit en coin en se détournant de Keith. Le mec derrière lui suivit le mouvement et leva une main pour la poser sur la hanche du cuivré. Elle n'arriva jamais à destination. Ce fut un glapissement de douleur qui tira l'américain de sa transe. Il se retourna vivement et sourit d'autant plus devant le spectacle qui s'offrait à lui.

Le prédateur, un rictus de douleur au visage, tentait de libérer son bras de la prise du brun qui le dévisageait de son regard de tueur, pas besoin de mot pour lui faire comprendre qu'il était en terrain privé et derrière eux le regard brillant et complice de Quincy et celui un brin amusé de Shawn.

Ouais, viens danser

Un jour tu verras
Et oseras venir à moi
Ouais, viens, viens maintenant saisir la chance

Le pauvre ère qui avait cru pouvoir avoir le jeune homme comme quatre heure se détourna si tôt libéré et s'enfuit tant que ses jambes le portaient encore. Cependant, ni Cory ni Keith n'y prêtèrent attention, subjugués l'un par l'autre. Cory tenta le tout pour le tout et entoura son amant de ses bras. Maintenant qu'il avait réussi l'exploit de l'avoir debout sur la piste de danse, il ne le laisserait pas retourner s'asseoir. Langoureusement il se frotta à lui et quand il senti la réciproque de son désir contre sa cuisse, il plongea son visage dans son cou et entrepris lui aussi de rappeler à tout le monde que cet homme était pris.

Ouais, je te sens aussi
Je ressens,

Ces choses que tu fais
Dans tes yeux je vois un feu qui brûle pour te sauver
C'est une volonté
Ancrée profondément tu sais, les graines que je plante pousseront

_ Petit diable … tu arrives toujours à tes fins hein ?Le gronda amoureusement Keith

_ Hum … ose me dire que ça te déplaît ...

Ils dansaient toujours, ondulant, se déhanchant au rythme langoureux et lancinant de la chanson qui tournait toujours. Leurs mains caressaient et palpaient sans retenue chaque parcelle de peau qu'elles pouvaient attraper.

_ J'y crois pas … tu as réussi à me faire danser … moi !

Cory releva paresseusement la tête, signifiant ainsi qu'il estimait avoir mieux à faire que de discuter mais que la dernière réplique de son petit ami ne lui avait pas plu du tout.

_ Sheryl y est bien arrivée elle … répondit-il laconiquement.

Keith soupira. Il avait oublié. Et pour cause, cela n'avait aucune importance pour lui, c'était dans une autre vie.

_ C'était pour un bal de charité. Et je n'ai jamais « dansé » avec elle comme je « danse » avec toi, murmura-t-il dans un mouvement de rein plus qu'éloquent.

Cory étouffa le cri indécent qui menaçait de franchir ses lèvres contre l'épaule de son cavalier. Il la lui mordit franchement pour se venger de ce mouvement traître qui avait attisé encore plus son désir, son envie de lui. C'était une faim qu'ils ne se lassaient pas d'entretenir ni l'un ni l'autre à l'instar des paroles de la chanson.

Un jour tu verras
Et oseras venir à moi
Ouais, viens, viens maintenant saisir la chance
C'est vrai, allez danse !

Sentant qu'il ne pourrait plus tenir très longtemps et n'ayant pas du tout envie de rentrer en moto avec un pantalon souillé, c'était franchement désagréable comme sensation et il y avait un délicieux moyen d'éviter ça, Cory releva la tête et attrapa les lèvres de Keith, lui coupant le souffle.

Ils s'embrassèrent un long moment, inconscients de tout ce qui les entouraient. Cory entraînait doucement Keith vers une porte au fond de la salle, sûr de lui et des effets de ses baisers sur les sens de l'australien, il savait qu'il avait un moment avant que celui ne comprenne son manège.

_ It's nice to see you here

La dernière parole de la chanson, murmurée en rythme par Cory à même la bouche du brun fit ouvrir les yeux à ce dernier. Il sourit en voyant que Cory les avait mené jusqu'aux toilettes. Ce n'était pas glamour certes mais dans l'état où ils étaient, ils n'avaient guère le choix.

Ce fut d'un pas précipité qu'ils entrèrent dans une des cabines avant de se jeter l'un sur l'autre comme des affamés.

Les mains de Cory s'affairaient à déboutonner leurs jeans, tandis que Keith ouvrait leur chemise pour sentir le contact de la peau de son amant. Leurs jeans et boxers enfin baissés, entravant quelque peu leurs gestes, ils se prirent mutuellement en main et commencèrent à se caresser. Ils gémissaient et hoquetaient sans cesse, étouffant au maximum leurs plaintes de plaisir contre le corps de l'autre partout où leur bouche pouvait se poser, c'était à celui qui ferait craquer l'autre, leur jeu préféré …

Et pour une fois ce fut Cory qui gagna, sûrement le contre coup de sa danse diabolique.

_ Prends-moi, gémit Keith à l'oreille de son amant, le faisant trembler de désir.

Aussi fébrile que son amant, Cory se détacha de lui une seconde, le temps de le retourner face au mur et de se positionner plus confortablement. Il attrapa ses hanches en même temps que le lobe de son oreille gauche entre ses dents, lui faisant tourner la tête vers lui. Ce qu'ils pouvaient lire dans leur regard respectif était bien plus puissant qu'un simple besoin animal, l'amour et le respect étaient au moins autant présent, c'était ce qui leur permettait de faire ça à cet endroit et de cette façon sans se sentir souillés. Tout était dit, il n'était plus besoin de mot.

Pendant les vingt minutes qui suivirent, ils s'affairèrent à apaiser le désir violent qui leur vrillait les reins et ce fut calmés et épuisés qu'ils rejoignirent leurs amis à leur table, ignorant leurs regards goguenards.

Perdu dans ses souvenirs, Cory s'était levé sans même réaliser ses gestes et s'était mis à danser. Échauffé par l'alcool présent dans son sang, il revivait cette nuit sans penser à rien d'autre. D'ailleurs, le corps chaud et musclé qui venait de se coller contre lui était un bon dérivatif. Il se laissa aller contre lui, frottant son bassin, ouvrant plus sa chemise, penchant la tête en arrière, laissant les mains étrangères s'égarer là où seules les mains de l'australien avaient le droit d'aller quelques heures auparavant.

Une bouche gourmande dévora son cou, laissant les marques de son passage. En fermant les yeux très fort, Cory pouvait s'imaginer des cheveux chocolat et des yeux bleu profond, l'alcool aidant il rêvait que c'était Keith tout contre lui. Cela faisait si longtemps qu'il n'avait pas partagé ce genre de moments, de passion …

Il se laissa traîner vers les toilettes sans même le réaliser, toujours perdu dans son rêve. La lumière violente des wc le tira brutalement de ses songes et il commença à refaire surface. La personne qui venait de le coller au mur et qui était maintenant à genoux devant lui à descendre son jean n'était pas brune mais blonde, ses cheveux étaient fins et lisses et ses yeux noisettes beaucoup trop provocants.

Ce n'est que lorsqu'il sentit une bouche vorace entourer son sexe qu'il retrouva pleinement ses esprits et le repoussa. Il remonta son jean vite fait et sans même prendre la peine de le rattacher, il quitta précipitamment les toilettes puis la boîte.

Arrivé sur le parking, il s'agrippa à sa moto et plié en deux, vomit tout ce qu'il avait ingurgité depuis le début de la soirée, à savoir uniquement du liquide et uniquement de l'alcool. Il n'avait pas réussi à manger quoi que ce soit et là … Il se sentait vraiment très mal. Il avait failli laisser un inconnu le baiser dans les toilettes sordides d'une boîte non moins sordide. Malgré sa rancœur envers Keith, il ne pouvait pas faire ça … Il l'aimait encore tellement !

Ravalant ses sanglots, il s'essuya la bouche à l'aide d'un mouchoir trouvé miraculeusement dans son blouson, il réajusta sa tenue, mis son casque et enfourcha sa moto.

_ Keith … Seigneur ! Qu'est-ce que tu as fait de moi ?

Un mec rongé par la jalousie, dépendant de l'amour et de l'attention de son compagnon, incapable de tenir une journée sans lui sans faire de connerie … Il sursauta et manqua de se manger un trottoir en sentant son portable vibrer dans sa poche. Ralentissant l'allure et sans quitter la route des yeux, il parvint à sortir son téléphone et jeta un regard à l'écran. Keith. Il remit le téléphone dans sa poche et accéléra.

Il se foutait vraiment de sa gueule ! Il osait l'appeler à trois heure du matin ! Il était censé être chez eux en train de dormir et même si il n'en était rien, Keith n'était pas censé le savoir. Ça ne le dérangeait donc pas de risquer de le réveiller à une heure pareille ? Pour lui dire quoi en plus ? «J'ai fini, tu peux revenir » ? Il croyait vraiment que Cory accourrait comme un gentil toutou ?

Autant, il se dégoûtait d'avoir failli le tromper et de s'être laissé aller comme ça, autant la colère qu'il éprouvait envers lui était toujours bien présente. Il ne se reconnaissait plus, il se sentait si faible.

Il se sentait comme prisonnier d'une spirale infernale qui ne s'arrêtait pas. Cette femme leur pourrissait la vie !

Arrivé chez eux, il gara sa moto et monta les marches d'un pas las. Il n'avait même pas pensé à l'ascenseur. Il jeta son casque et son blouson dans l'entrée sans même allumer la lumière et se dirigea vers la salle de bain. Il se passa de l'eau sur le visage et se lava les dents tout en évitant de se regarder dans le miroir. La lumière avait beau être éteinte, la pénombre n'était pas totale et il n'avait vraiment pas envie de faire une introspection à cette heure là.

Ce n'est que quand il revint dans le salon, se demandant si il allait se coucher ou non, qu'il comprit pourquoi Keith l'avait appelé à une heure aussi tardive.

Il stoppa net et contempla la silhouette du brun assis dans le canapé. Voyant que son amant s'était enfin rendu compte de sa présence, ce dernier se leva et alluma la lumière. Ébloui, Cory ferma les yeux et baissa la tête. Ce fut une main sous son menton qui la lui fit relever. Ils se dévisagèrent un moment sans rien dire. Keith regardait avec attention les yeux rouges et le teint vitreux de Cory, devinant sans mal où il avait passé une partie de la nuit.

_ Je peux savoir où tu étais ? Demanda-t-il tout de même d'une voix froide et impersonnelle.

Cory esquissa un sourire en coin teinté d'ironie qui ne plut pas du tout au brun.

_ Qu'est-ce que ça peut te foutre ? T'es pas mon père ! Et t'avais de quoi t'occuper non ? Pourquoi tu serais le seul à t'amuser ?

Keith n'aimait ni la voix de Cory ni ce qu'il sous entendait. Il ne l'aurait tout de même pas trompé, n'est-ce pas ?

_ Où est-ce que tu étais ? Répéta-t-il en accentuant inconsciemment la pression de sa main sur le visage de son amant.

Ce dernier se dégagea violemment d'un revers de main et recula. Il était trop prêt, il pouvait sentir son parfum entêtant, il devait s'éloigner de lui.

_ Ça ne te regarde pas... Ça ne te regarde plus, répondit Cory d'une voix amère.

Le cœur de Keith s'arrêta une seconde avant de repartir douloureusement. Sa gorge se serra. Ce qu'il redoutait depuis des semaines était en train de se passer. Cette fois, ça allait être la dispute de trop.

_ Comment ça ? Demanda-t-il tout de même d'une voix blanche.

_ Je te pensais plus perspicace que ça ! Persifla Cory. En même temps … tu dois être épuisé, tu n'as plus toutes tes capacités …

_ Arrête avec tes sous entendus ! Je n'ai rien fait d'autre que mon travail et tu le sais ! S'écria l'australien, franchement énervé cette fois ci.

_ Non, je n'en sais rien ! S'exclama Cory vivement. Je ne sais plus rien. Je suis fatigué ! Fatigué de me battre seul, de faire un couple tout seul, de vivre seul, je suis fatigué de te partager avec elle, de t'entendre la défendre chaque fois que je te dis qu'elle essaie de nous séparer !

_ Elle sait très bien que je t'aime et que je suis gay, qu'elle n'est qu'une amie !

_ Tu lui as dit clairement ? Mot pour mot ? Ou tu lui as fait comprendre sans trop la brusquer, de façon à ce qu'elle ne soit pas trop déprimée pour faire son boulot ?

_ Putain Cory ! Tu sais très bien qu'il se passera rien entre elle et moi bordel !

_ Je préférerais ! S'écria Cory à bout de patience.

_ Quoi ? Demanda Keith, complètement interloqué.

_ Ouai, répondit Cory les yeux baissés, je préfère encore croire qu'elle est ta maîtresse et que tu te la tapes, ça expliquerait au moins pourquoi tu m'abandonnes sans cesse pour elle, pourquoi tu te plies en quatre pour elle et pas pour nous ! Hurla-t-il en relevant des yeux remplis de défi. Parce que si elle n'est pas ton amante alors ça veut dire que c'est ton travail qui passe avant moi et ça ...je suis pas sûr de pouvoir l'encaisser alors je … Je préfère tout arrêter maintenant … avant que ce ne soit pire … Avant de te haïr … murmura-t-il avant de baisser la tête pour fuir l'éclair de douleur dans les yeux cobalt qui lui faisaient face.

Cory ne pensait pas dire tout ça quand il avait commencé sa phrase, sa langue avait été plus rapide que son cerveau, la fatigue sans doute. En même temps, il réalisa que ce n'était rien d'autre que le fond de son cœur qui s'exprimait.

_ Non... Tu n'es pas sérieux Cory, commença Keith en tentant un mouvement d'approche très vite arrêté par les yeux lasers de l'américain. Tu savais à quoi t'attendre quand on s'est mis ensemble, je t'avais dit que certaine période serait plus chargée que d'autres, on a bientôt fini l'implantation de la succursale en Europe, après ça ira mieux ...

_ C'est faux, le coupa calmement l'américain. Rien ne sera plus jamais comme avant. J'ai vu une part de toi que je ne suis pas sûr de pouvoir accepter. Tu es le plus important à mes yeux et tu passeras toujours avant tout et, c'est peut être un tort, mais j'en attendais autant de toi. Aujourd'hui je vois qu'il n'en est rien. Elle, ou ton entreprise, passera toujours avant moi … j'en déduis donc que tu ne m'aimes pas comme je t'aime … mais c'est de ma faute, je n'aurai pas dû y croire … Je le savais pourtant que c'était trop beau pour être vrai, murmura-t-il pour lui-même.

Keith aurait voulu protester, lui dire que c'était faux, qu'il se trompait, qu'il se faisait des idées mais il n'avait aucun argument pour le lui prouver car il se rendait bien compte que son comportement de ces dernières semaines lui portait plutôt préjudice.

Comment avait-il pu en arriver là ? Avait-il été si aveugle pour ne pas voir à quel point Cory allait mal ? Avait-il une telle confiance dans l'amitié de Sheryl qu'il ne pensait pas sincèrement qu'elle pouvait les séparer volontairement ?

Son silence fit office d'aveux pour le cuivré qui attrapa son sac à dos et abaissa la poignée de la porte d'entrée. Ce n'est qu'à ce moment là que l'australien sembla se réveiller. Il était toujours planté au milieu du salon, simplement éclairé d'une lampe halogène créant une ambiance étrange.

Il n'avait pas dormi depuis plus de 36 heures et la lumière jaune faisait ressortir son teint pâle et ses cernes mais il ne ressentait même pas la fatigue, juste un grand froid et un immense vide en lui. Il posa ses yeux sur son amant, ex-amant ?, et attendit le verdict.

_ Je vais aller à l'hôtel, le temps de réfléchir, j'irai peut-être chez mes parents après. Tu peux rester ici, après tout, c'est chez toi, je prendrai mes affaires dans quelques jours et … Cory ne put continuer, il sentait les sanglots remonter le long de sa gorge.

Il ne voulait pas pleurer devant lui, aussi il quitta le loft sans même finir sa phrase. Il avait espéré au fond de lui que son homme le retiendrait, l'empêcherait de le quitter, mais apparemment, encore une fois, cela n'avait été qu'un espoir infondé.

.

Allongé dans un lit qui n'était pas le sien, dans une chambre qui n'était pas la sienne, dans un hôtel minable car le seul ouvert à cette heure tardive, il tentait de faire abstraction des gémissements et des cris des prostitués et de leurs clients. Comment la situation avait-elle pu dégénérer à ce point ? Cette après-midi même, il annonçait à son amant qu'il avait des jours de congé après ses partiels éreintants et Keith l'avait prit tendrement dans ses bras pour lui souhaiter la bienvenue, et là, à quatre heure du matin, alors qu'il aurait dû dormir au creux du corps de son amant, il était seul dans cette piaule minable et lui …

Sur ses pensées plus que déprimantes, il s'endormit, vaincu par tous les événements de la journée.

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Il poussa un soupir à fendre l'âme et s'apprêta à entrer dans la salle de bain quand la porte de sa chambre s'ouvrit brusquement sur un jeune homme blond déchaîné, aussitôt suivi d'un second, un peu plus grand et qui lançait un regard désolé mais impuissant à l'occupant de cette pièce.

Ce dernier avait sursauté si fort qu'il avait bien cru que son cœur s'était arrêté. Il les dévisagea un moment, juste pour être bien sûr qu'il ne s'agissait pas d'une hallucination due au manque de sommeil. Cet hôtel était bien mieux que le précédent mais ce n'était pas chez lui et il n'y trouvait pas le sommeil non plus.

Les yeux furieux du blond ne le quittait pas et il soupira, il était foutu, il le savait rien qu'à la façon dont il le regardait.

_ Est-ce qu'on a le droit à une explication ou tu comptes nous ignorer indéfiniment Cory ? demanda Quincy d'une voix si basse que l'autre en tressaillit.

Quand il parlait comme ça, Quincy n'était pas l'ami, le confident, il était l'homme d'affaires intransigeant et Cory allait morfler. Quant à Shawn, ce n'était pas la peine de compter sur un quelconque soutient de sa part. Il avait beau être plus modéré que son amant, il ne prendrait pas le risque de s'attirer ses foudres.

_ Je ne vous ignore pas, soupira Cory en s'asseyant sur « son » lit.

_ Oh ? Et comment tu appelles le fait de ne pas nous donner de nouvelles, de quitter ton domicile sans nous le dire et de ne pas répondre à nos messages pendant une dizaine de jours ?

_ J'avais beaucoup de travail et surtout besoin de faire le point, je ne me suis pas rendu compte que vous vous inquiéteriez, pardon.

Quincy sentait bien que Cory était sincère et il voyait à son air fatigué et déprimé qu'il n'était pas du tout au mieux de sa forme, ce fut en partie ce qui le calma. Il inspira un grand coup et laissa retomber la pression. Il s'avança finalement dans la chambre et Shawn pu refermer la porte, que les autres clients de l'hôtel ne profitent pas de leur discussion. Ils prirent tout deux place, Quincy sur le lit à côté de Cory et son compagnon sur le fauteuil, légèrement en retrait.

_ Cory, commença Quincy, explique-nous. On ne sait rien de ce qui se passe. Tu étais injoignable, j'ai eu beaucoup de mal à te trouver, j'ai dû demander à Nigel de faire jouer ses relations dans la police et crois-moi je vais en entendre parler pendant des lustres, tenta-t-il de plaisanter, vainement. Au début, reprit-il devant l'air hagard de Cory, j'ai cherché à te joindre chez vous mais personne ne répondait, j'ai pensé que tu étais en période d'examens et que tu t'étais coupé de tout alors j'ai essayé d'avoir Keith à son bureau mais il est parti en voyage d'affaires avec Sheryl alors ...

Quincy s'interrompit devant l'air ahuri de Cory qui le fixait la bouche ouverte et les yeux ronds emplis de larmes qui menaçaient de couler à tout moment. Il comprit tout de suite.

_ Tu l'ignorais... Cory que se passe-t-il avec Keith ?

L'interpellé ne put répondre, il se plia soudain en deux en se tenant le ventre et tomba à genoux sur le sol, se laissant glisser brutalement du lit. Il suffoquait et les larmes glissaient maintenant toutes seules de leur prison.

Shawn et Quincy s'étaient aussitôt précipités sur lui mais ils étaient totalement impuissants. Ils ne purent qu'attendre qu'il se calme en restant près de lui, lui montrant qu'il n'était pas seul et s'assurant qu'il reprenne une respiration normale. Il lui fallut presque dix minutes avant de reprendre ses esprits mais cela ne suffit pas et il resta au sol, à la fois épuisé et dépité.

_ J'avais raison alors …il a fini par la choisir, il ne partait jamais en voyage d'affaires avec elle avant, murmura-t-il.

Il s'en était douté mais se l'entendre confirmer le tuait plus sûrement que n'importe quel poison.

_ Cory ?

Pour la première fois depuis sa crise, il se tourna vers ses amis. Ses yeux vides les firent sursauter, jamais, même pendant la guerre, ils ne lui avaient connu un tel regard.

_ Je … j'ai quitté Keith.

L'expression incrédule qu'affichaient Quincy et Shawn aurait pu le faire sourire si il ne souffrait pas autant.

_ Mais … ?

_ Explique-nous, demanda Shawn pour venir en aide à son amant qui n'arrivait plus à parler.

_ Il n'y a rien à dire … Il l'a choisi elle c'est tout …

_ Bien sûr que non ! Explosa Quincy.

Cory n'avait même pas eu besoin de dire de qui il parlait tellement c'était évident. Et puisque son ami ne le croyait pas, il entreprit de leur raconter d'une voix lasse tout ce qui s'était passé ces derniers jours et même ces dernières semaines.

Après un silence pesant, chacun repensant à ce qui venait de se dire, ce fut Shawn qui le brisa.

_ Il ne l'aime pas. C'est toi qu'il aime.

_ Il éprouve une certaine forme d'amour pour moi, je ne le nie pas, fit Cory, mais c'est elle qu'il a choisi finalement. C'est fini maintenant, il faut que je m'y fasse et puis c'est mieux comme ça, dans son milieu, avec ses responsabilités, il sera mieux avec une vraie famille.

_ Non mais je rêve ! Où est passé le Cory Belfer prêt à tout pour ce qui compte pour lui ?! S'écria Quincy. Tu vas la laisser gagner ?!

Le blond se releva vivement et secoua Cory en le tirant à lui. Il le mit debout de force et le tourna vers lui. Ses yeux brûlaient littéralement et Cory en eut des sueurs froides.

_ Tu vas te secouer Cory et ne pas baisser les bras, tu vas te battre et le reconquérir ! Tu m'entends ?

_ Qu'est-ce qui te fait croire que j'en ai envie ? Demanda Cory en relevant la tête, un sourire ironique aux lèvres. Pourquoi se serait à moi de me battre pour lui ? Je n'ai pas arrêté de le faire depuis des semaines, je suis fatigué. Pourquoi ce ne serait pas à lui pour une fois de se battre pour moi hein ? De me prouver que j'ai tort et qu'il m'aime comme je l'aime ?

Quincy secoua la tête, il savait qu'un Cory blessé n'était pas facile à raisonner. Aussi il tenta de changer de sujet.

_ Ça ne nous explique pas ce que tu fais dans cet hôtel minable ?

Cory failli rire en repensant au bouge encore plus pitoyable dans lequel il avait élu domicile le premier soir. Puis il se rappela ce qui l'avait conduit dans celui-là et il perdit son sourire. Il leur expliqua ce qui s'était passé cette nuit-là puis la conversation avec ses parents.

Comme d'habitude, ils ne cherchaient qu'à le protéger mais il s'était senti étouffer au bout de trois minutes. Entre son père essayant de justifier le comportement de Keith pour les réconcilier et sa mère qui avait déjà appelé une gouvernante pour lui faire monter un chocolat chaud, il avait été pris d'une ahurissante envie de hurler à plein poumons. Jaugeant que cela ne ferait qu'inquiéter plus encore ses parents adoptifs, il les avait remercié et avait fait ses bagages pour cet hôtel.

_ Crétin ! Pourquoi tu n'es pas venu à la maison au lieu de t'installer ici ?

_ Pour les mêmes raisons qui font que je ne vous ai pas prévenu. Déjà j'avais besoin de réfléchir et ensuite je me suis dit que peut-être Keith me chercherait et que c'est par là qu'il commencerait, mais je vois surtout que je me suis encore bercé d'illusions. Comme si il allait prendre le temps d'essayer de me voir ! Comme si elle allait lui laisser le temps de le faire !

_ Raison de plus pour ne pas baisser les bras.

Clair et concis. Tout Shawn en quelques mots.

Quand les affaires de Cory furent transférés chez Shawn et Quincy et lui-même installé dans la chambre d'amis, ils s'installèrent dans le salon autour d'un café, histoire de faire le point. L'américain était vraiment touché, voir que ses amis s'inquiétaient autant pour lui lui faisait plaisir, il avait l'impression de compter encore pour quelqu'un et ça le réchauffait quelque peu.

Mais le ton était tout de même monté quand Quincy avait tenté de remettre le sujet « reconquête de Keith » sur le tapis. Cory avait été très clair et très ferme. Ce n'était pas à lui de lui courir après, d'essayer de le récupérer. C'était à Keith de le faire si tant est qu'il en ai envie. Et quand Quincy vit les yeux sans vie de son meilleur ami, il se jura de lui faire entendre raison à ce crétin de PDG buté !

.
.

_ Quincy ? Que me vaut ce plaisir ? Demanda Sheryl en relevant la tête de son bureau.

_ Sheryl, la salua-t-il. Je ne voudrai pas paraître malpoli mais ce n'est pas toi que je suis venu voir. Je viens voir Keith comme tu t'en doutes.

Le sourire factice de la blonde trembla quelque peu mais elle se ressaisit vite. Après tout, elle avait mené des combats plus durs que celui-là.

_ Oh ! Tu m'en vois navrée alors car il est débordé et je doute qu'il ai le temps de te recevoir. Tu n'es pas sans savoir que nous sommes en phase finale pour le projet en Europe et ….

Quincy lui rendit le même sourire faux et légèrement ironique et vit avec plaisir son assurance vaciller. Elle cachait quelque chose c'était certain. Le fin stratège qu'était Quincy savait reconnaître ce genre de visage, et alors qu'il allait répondre, la porte s'ouvrit brusquement mais sans pour autant faire de bruit.

_ Sheryl ! J'ai besoin du numé... Quincy ?

Keith dévisageait le blond avec les sourcils froncés, cherchant sûrement une explication à sa présence dans ce lieu.

_ Bonjour Keith. Tu tombes bien. Ton assistante m'expliquait à quel point tu n'avais pas le temps de me recevoir et je m'apprêtais à lui dire que tu prendrais bien 5 minutes pour un de tes meilleurs amis que tu n'as pas vu depuis plus de deux mois … n'est-ce pas ?

La voix mielleuse et les menaces sous-jacentes dans la voix de Quincy firent presque trembler Keith. A n'en pas douter, il n'était pas à prendre avec des pincettes, mais si il venait pour les raisons que Keith imaginait alors il allait être vite reçu !

_ Sheryl, appela Keith en se tournant vers elle. Laisse-nous, prend une pause.

_ Mais …

_ Laisse-nous.

Le ton était sans appel. La jeune femme sortit, les laissant face à face, debout au milieu de la pièce. Ils s'affrontèrent en silence d'abord, juste armés de détermination.

Finalement, ce fut Keith qui céda, fatigué de cette attente, mais aussi par curiosité même si il ne l'avouerait jamais.

_ Bon. Que veux-tu Quincy ? Demanda-t-il en s'installant sur un fauteuil.

Le blond l'imita avant de lui répondre calmement. Il savait que crier avec lui ne servait à rien et même si il avait une très forte envie de lui massacrer la tête, il se devait de garder son calme pour mener sa mission à bien.

_ Je ne vais pas y aller par quatre chemins. Tu es con. Très, très con. Et, enchaîna-t-il très vite en voyant les sourcils de Keith se froncer, ça me déçoit parce que je ne pensais pas que tu pouvais être si facilement manipulable.

Keith voyait rouge. Il n'avait vu aucun de ses amis depuis plus de deux mois, depuis que Cory l'avait qui... Et quand, enfin, l'un deux venait lui rendre visite c'était pour l'insulter !

_ Si tu es venu pour me dire ça, tu peux repartir ! Je ne sais pas de quel droit tu te crois autoriser à me parler comme ça mais tu ferais mieux de sortir avant que je ne m'énerve, répondit-il d'une voix glaciale.

_ Certainement pas, rétorqua Quincy sans se démonter par le regard noir du brun. J'ai des choses à te dire et tu vas les écouter.

_ Et en quel honneur ? demanda Keith avec une arrogance qui avait le don d'excéder Quincy.

_ Si tu as un jour aimé Cory tu vas m'écouter ! S'emporta-t-il.

La phrase avait fait mouche même si Quincy s'en voulait d'avoir avancé cet argument. En attendant, Keith s'était rassis et même si il le regardait toujours de méchante façon, il semblait vouloir l'écouter. Il devait saisir cette chance de tout lui expliquer, il était bien conscient qu'il n'en aurait pas d'autre.

_ Il y a des choses que tu dois savoir et j'espère qu'au nom de l'amitié qui nous lie depuis des années tu ne mettras pas ma parole en doute.

_ Notre amitié ? S'exclama Keith. Je peux savoir où tu l'avais caché, où vous l'avez tous caché notre soit-disant amitié depuis que Cory et moi sommes sépa... Pas une nouvelle ! Se reprit-il. Pas un mot ! Pas une visite ! Rien ! Comme si je n'avais jamais existé ! Finit-il à nouveau debout et sur la défensive.

Si Quincy était désolé de la douleur bien visible du brun, il n'en était pas moins heureux de voir qu'il n'arrivait pas à prononcer certains mots en ce qui concernait Cory et lui. Ce serait plus facile.

_ Cela fait justement parti de ce que je suis venu te dire. Depuis plus de deux mois que Cory et toi êtes séparés, sourit Quincy intérieurement en voyant Keith tressaillir à ce mot, Nigel, Shawn et moi-même n'avons cessé d'essayer de te joindre mais cela s'est avéré mission impossible, même pour nous. Tu as changé de numéro de portable et chaque fois que nous avons appelé ici tu étais comme par hasard injoignable, chaque fois que nous sommes venus en personne, on nous refusait l'entrée et tu étais soit-disant occupé ou en déplacement. Je ne compte plus les coups de téléphone mais sache qu'aujourd'hui c'est la septième fois que je viens en personne, Shawn a essayé quatre fois et Nigel cinq. Chaque fois nous nous sommes fait rembarrer par la sécurité. Nous en avons déduit que tu refusais de nous voir mais je n'ai pas voulu renoncer et heureusement, puisque je suis enfin devant toi, je te passe les détails quant au forcing que j'ai dû faire pour que les gardes me laissent entrer. Quelque part je me doutais bien que quelqu'un faisait barrage entre nous … finit-il d'expliquer, laissant à Keith le soin d'en déduire ce qu'il y avait à en déduire.

Le brun ne savait plus que penser. Bien sûr il n'irait jamais remettre en doute la parole de son ami … pourtant … pouvait-il douter de Sheryl ? Elle avait été sa première amie, la première à qui il avait fait confiance et elle l'avait toujours soutenu…

Il s'appuya contre le mur en soupirant. Si elle lui avait fait une chose pareille, de quoi d'autre pouvait-elle être encore responsable ? Après un bref moment d'hésitation, il fit face à Quincy.

_ Donc, ce n'est pas que vous avez pris le parti de Cory ?

Quincy ouvrit de grands yeux ronds sous la surprise.

_ Quoi ?! Mais enfin Keith ! Comment as-tu pu penser ça ?!

_ Sheryl.

_ C'est elle qui t'a mis ça en tête ? Et tu l'as cru ?! Mais putain Keith ! Où est passé ton cerveau bordel ! S'écria Quincy hors de lui. Comment as-tu pu mettre en doute notre amitié pour toi aussi facilement ?!

Keith était bouleversé par la colère sincère de Quincy. Dans quel monde s'était-il égaré pour ne pas s'être aperçu de tout ça lui-même ?

_ Je … je ne sais plus où j'en suis, répondit-il en se laissant tomber dans son fauteuil encore une fois. Je n'aurai jamais pensé qu'elle puisse être ainsi …

_ Et pourtant ... marmonna Quincy.

Si il n'avait pu s'empêcher de laisser passer cette phrase, il l'avait seulement murmuré mais pour l'ouïe si fine du soldat parfait, c'était tout à fait compréhensible.

_ Explique-toi. Pourquoi j'ai l'impression que tu me caches quelque chose ?

_ Parce que Cory m'avait demandé de ne rien te dire, il avait peur que tu en souffres, expliqua-t-il d'une voix douce. C'est assez ironique en fait, parce qu'au final c'est lui qui en souffre, c'est comme si il avait lui-même tendu le bâton pour se faire battre.

Keith avait l'impression que Quincy pensait tout haut plus qu'autre chose, le blond semblait perdu dans ses pensées, le regard dans le vague comme si il était seul et surtout il ne donnait toujours aucune explication.

_ Ma patience a des limites, sois plus clair ou rentre chez toi ! Gronda-t-il.

Son ton n'impressionna pas l'homme d'affaires qui en avait vu d'autres et qui leva les yeux sur lui en fronçant les sourcils, prouvant par là que l'australien n'avait pas le monopole de ce tic.

_ Tu permets Keith ? Je cherche juste le meilleur moyen de t'annoncer ça avec tact mais soit … puisque tu es aussi impatient … commença-t-il avec un sourire diabolique, te souviens-tu du jour où Cory et toi nous avez annoncé que vous vous étiez installés ensemble ?

Il sut qu'il avait fait mouche en le voyant tressaillir, nul doute qu'il s'en rappelait et que ce souvenir lui était particulièrement douloureux aujourd'hui qu'ils n'étaient plus ensemble. Tant mieux ! Au moins ça prouvait qu'il avait encore des sentiments pour Cory et, de plus, songea Quincy, ce n'était qu'un juste retour des choses, Cory avait souffert mille fois plus.

Il secoua la tête et se gifla mentalement. Ce n'était pas un concours et il sentait que la douleur du brun était bien réelle et profonde. Il s'en voulut aussitôt de ses mauvaises pensées et enchaîna pour que Keith n'ai pas le temps de plus replonger seul dans ce souvenir en particulier. Ils iraient tous les deux et Quincy lui ouvrirait les yeux !

_ Ce jour-là Cory et moi avons eu une discussion particulièrement houleuse, on a failli en venir aux mains …

Keith le regarda comme un échappé d'asile, persuadé que jamais le Cory qu'il connaissait ne pourrait lever la main sur son ami. Et pourtant … Il aurait dû se douter que la seule chose qui pourrait tourner Cory contre le monde entier était lui-même … Quincy se chargea alors de lui expliquer.

Quincy arrivait bon dernier mais il avait prévenu Cory qu'il serait en retard. Une réunion de dernière minute mais qu'il ne pouvait décaler. Il poussa la porte du salon privé du restaurant où Cory leur avait réservé une table pour qu'ils soient plus tranquilles, juste entre eux.

Il salua tout le monde et pris place au côté de son amant. A sa gauche se trouvait Keith, lui-même à côté de Cory. Tout autour de la table ronde se trouvait réunis ceux qu'ils considéraient comme leur famille, y compris Sheryl.

Quincy se doutait que cette dernière était plus là pour faire plaisir à Keith et que si ça n'avait tenu qu'à Cory elle serait restée au chaud chez elle. Maintenant, la question qui se posait était de savoir pourquoi Cory avait tenu à ce qu'elle soit là, car après tout c'était lui qui avait lancé les invitations pour cette soirée, « en famille » avait-il dit. Ce n'était pas comme si il avait organisé tout ça pour Keith, pour son anniversaire ou un truc dans le genre. Non. Il avait bien précisé qu'il avait une annonce importante à faire, donc cette soirée était pour lui alors pourquoi la gâcher avec Sheryl qui ne pouvait pas le voir en peinture ?

Le cerveau de Quincy tournait à plein régime mais il fut interrompu par son amant qui lui demanda des nouvelles de sa journée avant de l'embrasser tendrement. Baiser lui-même interrompu par un Cory particulièrement en forme. Quincy pouvait sentir les vibrations de joie et de plénitude qui émanaient de lui et de ... Keith ? Les choses se mettaient doucement en place dans l'esprit de Quincy et le coup d'œil qu'il surprit entre les deux concernés lui suffit pour en être sûr.

_ Quincy ? Tout va bien ? Tu as l'air ailleurs, demanda Shawn.

_ Hum ? Oh ! Oui, tout va très bien amour, tout va très bien, très très bien …

Quand il prenait cet air de conspirateur, Shawn n'avait qu'une envie, le torturer à sa manière afin qu'il lui révèle ce qu'il savait. Il n'en eut juste pas le temps.

_ Bon et bien, maintenant que tout le monde est là ... commença Cory en se grattant légèrement la gorge pour attirer l'attention de toute la tablée, je vous ai invité ce soir pour une raison particulière. J'ai quelque chose à vous annoncer... Voilà … Je voulais vous dire que j'étais en couple depuis plusieurs mois et que nous vivions ensemble ...

Il fut coupé par des félicitations qui fusaient de toute part. Cory se gratta la gorge une nouvelle fois, il était devenu assez rouge, gêné, et ses amis qui n'avaient pas l'habitude de le voir ainsi en rajoutèrent une couche, histoire de se venger de toutes les farces qu'il avait pu leur faire un jour. Quincy remarqua tout de même qu'une certaine personne ne participait pas aux félicitations et il attendait, impatient de voir se confirmer sa théorie.

_ Et bien vas-y Belfer, crache le morceau on va pas te manger !

Cory sourit, penaud, et allait se lancer quand Cassie prit la parole à son tour. Il resta donc là, à les regarder la bouche encore ouverte sur les mots qui n'étaient finalement pas sortis de sa bouche.

_ Non mais Nigel ! Tu peux pas attendre sagement comme tout le monde ? Le rabroua-t-elle avant de tourner vers Cory, les yeux pétillants. Alors Cory c'est qui, c'est qui ? Et pourquoi elle est pas là ? Elle va arriver qu...

_ De quoi je me mêle hein Cassie ? Se moqua son compagnon.

_ T'es gonflé ! C'est plutôt à moi de te demander de quoi tu te mêles ! On t'a jamais appris à pas couper la parole ? S'énerva-t-elle comme toujours quand il s'agissait de Nigel.

_ Quoi ! C'est toi qui dit ça ?!

Leur joute verbale continua, en énervant certains et en amusant d'autres, toutefois tout le monde en avait l'habitude. Mais si d'ordinaire ce n'était pas vraiment dérangeant, Quincy sentait bien que ce soir ce n'était pas le bon moment.

La gêne de Cory se transformait en frustration et il émanait de Keith un étrange mélange entre agacement et impatience qui devenait plus fort à chaque instant.

Pourtant, tout stoppa d'un coup quand, lassé de voir que Cory n'arrivait pas à s'imposer, l'australien s'était tourné brusquement vers Cory, l'avait attrapé par la nuque et l'avait juste délicieusement et longuement embrassé.

Le cuivré s'était d'abord légèrement tendu, plus par surprise qu'autre chose, avant de participer activement, nouant ses bras autour des puissantes épaules de son amant, coupant net toutes les discussions en cours.

Quincy jubilait. Il était heureux, plus qu'heureux pour ses amis. Il savait l'américain amoureux du brun depuis leur rencontre coup de foudre mais il n'avait jamais réussit à mettre un nom sur ce que ce dernier éprouvait pour Cory et il craignait que leur mode de vie respectif ne coïncide pas, mais en s'installant ensemble, ils limitaient les problèmes.

Il fronça les sourcils brusquement en surprenant un regard de Sheryl sur Cory. Si elle l'avait pu, nul doute qu'elle l'aurait transpercé avec le couteau à fromages. Quincy se leva en s'excusant et quitta la pièce rapidement sous le regard inquiet de Shawn et Cory. Ce fut ce dernier qui le suivit après un geste rapide à Shawn et Keith pour qu'ils ne s'inquiètent pas.

_ Quincy !

L'interpellé s'était arrêté dans le hall d'entrée du restaurant le temps de récupérer sa veste. Il fallait qu'il prenne l'air. En entendant Cory, il soupira de soulagement, il espérait que son mai comprendrait le message et le suivrait, il avait vraiment besoin de lui parler, il prit le temps de l'attendre et ce fut à deux qu'ils franchirent le seuil. Ils marchèrent en silence quelques minutes dans le parc du restaurant puis ils s'installèrent sur un banc face au petit étang.

La nuit commençait doucement à tomber mais il faisait encore doux et l'air était agréable. Ce fut Quincy qui brisa le silence.

_ Tu sais à quel point elle tient à lui ?

_ Je crois oui.

Quincy secoua la tête, lui en doutait. Si Cory l'avait vraiment su, elle n'aurait pas été là ce soir.

_ C'est obsessionnel chez elle, précisa-t-il. Elle te hait encore plus qu'avant et elle souffre, elle peut devenir dangereuse et imprévisible. Je le sens Cory, elle est instable, tu n'as pas vu comme elle te regardait tout à l'heure, ses doigts crispés sur le bord de la table. Méfie-toi d'elle.

_ Je me méfie déjà Quincy, lui assura l'américain. Crois-moi, je me méfie d'elle comme d'un serpent venimeux. Depuis que je la connais elle n'a cessé de me dénigrer pour se rapprocher de lui et Keith l'aime beaucoup, il croit à cette amitié et il en a besoin.

_ Il t'a toi maintenant. C'est plus fort que ce qui le lie à Sheryl. Tu devrais lui dire, lui expliquer ce qu'il en est, qu'il sache à quoi s'attendre …

_ Non ! S'exclama-t-il fortement. Non, reprit-il plus calme, je ne peux pas faire ça, il en souffrirait trop.

_ Il est fort Cory et ton amour l'aidera, ne le prends pas pour un enfant. Il peut surmonter ça.

_ Tu ne comprends rien Quincy. Le problème n'est pas de savoir si il peut ou non surmonter la perte de cette amitié. Je ne veux pas qu'il ai à le faire c'est tout !

_ Mais enfin Cory ! Tu préfères courir le risque de le perdre si jamais elle parvient à ses fins ? Tu es con à ce point ! Le défia-t-il.

Cory se releva d'un bond, le poing serré et les mâchoires contractées à faire mal. Il s'était retenu de justesse de coller son poing sur le visage de son ami. Il s'en était mordu la langue presque au sang.

_ Bien sûr que non ! Je ne suis pas « con à ce point » ! Ragea Cory. Tu ne comprends pas Quincy, reprit-il un ton plus bas en baissant la tête, comment t'expliquer ? Keith et moi sommes ensemble depuis plusieurs mois mais chaque matin où je me lève près de lui reste pour moi un miracle. Je n'arrive toujours pas à croire qu'il puisse m'aimer, que quelqu'un puisse m'aimer autrement que comme un ami sympa et drôle … surtout l'homme que j'aime. Je l'ai aimé dès le premier regard Quincy, tu le sais, et que lui m'aime en retour … j'ai encore du mal à y croire alors que je le vis tous les jours et je lui suis tellement reconnaissant, je l'aime tant que je suis prêt à accepter cette menace dans notre entourage si ça peut le rendre heureux, il a besoin d'elle Quincy, quoi que tu en dises, et je reste persuadé que si un jour je dois le perdre ce sera pour elle, quand il se rendra compte qu'au final, je ne vaux pas qu'on passe sa vie près de moi, que je n'ai pas grand chose à lui offrir par rapport à elle, elle vaux bien plus que moi … mais pour une fois j'ai envie d'être un peu égoïste, je profiterai de chaque moment passé près de lui comme si c'était le dernier et si un jour il doit la choisir alors c'est qu'il ne m'aimait pas tant …

_ Cory ! Le coupa Quincy.

Le blond hésitait entre l'engueuler, le gifler ou le prendre dans ses bras. Ils pleuraient tous les deux et finalement, Quincy l'attrapa et le serra contre lui le plus fort possible. Il était littéralement bouleversé par ce que venait de lui confier Cory. Il le savait fragile sur le plan émotionnel mais pas à ce point et cela l'effrayait grandement.

_ Oh Cory … pourquoi ne m'as-tu pas parlé avant ? … Tu sais … j'ai bien vu les regards de Keith sur toi tout à l'heure et il t'aime plus que tout … Tu ne dois pas croire qu'il te quittera comme ça, tu ne dois pas vivre avec cette épée de Damoclès au-dessus de ta tête, il faut que tu vives pleinement cet amour, que tu t'y épanouisses …

_ Ce qui m'importe moi, c'est que Keith s'y épanouisse. Il a encore tant de chose à découvrir de la vie, il a vécu enfermé dans une tour d'ivoire tant de temps, je veux que mon amour lui ouvre ces portes. C'est tout ce qui compte.

_ C'est dangereux Cory, tu t'y perdras mon ami, lui répondit Quincy d'une voix navrée.

Pendant un long moment, ils ne dirent plus rien et restèrent l'un contre l'autre à se réconforter mutuellement. Quand ils se décidèrent à rejoindre les autres, il faisait nuit et ils eurent la surprise de constater le départ de Sheryl qui avait dû les quitter suite à un appel mystérieux. Si Quincy parut septique face à cette excuse, cela redonna le sourire à Cory et ils poursuivirent et finirent la soirée dans une ambiance excellente. Le sujet ne revint jamais sur le tapis et Quincy respecta la promesse qu'il avait faite à Cory sur le chemin du retour au restaurant, il n'en parla jamais à Keith.

_ Enfin, jusqu'à maintenant, constata le brun quand son ami eut fini de tout lui narrer.

Il était dévasté, il n'aurait jamais imaginé que son amant puisse avoir de telles pensées et le pire dans tout ça était que ses propres actes allaient dans le sens de ce que Cory avait cru. Comment pourrait-il jamais se faire pardonner ?

_ Hum, acquiesça Quincy. Crois-moi Keith quand je te dis que ce soir là Sheryl aurait pu tuer Cory de rage tellement elle était jalouse. Quant à Cory, il pensait chaque mot qu'il m'a dit ce soir-là, je te rappelle qu'il a été abandonné très jeune et c'est un traumatisme qu'il n'a jamais exorcisé, il part du principe que si même ses propres parents n'ont pas voulu de lui, alors personne ne l'aimera jamais vraiment pour une durée indéterminée. Il tente juste de profiter pleinement de l'instant présent en étant persuadé qu'il ne durera pas et aujourd'hui, il reste convaincu que si tu l'as laissé partir, si tu ne t'es pas opposé à votre rupture c'est parce que tu ne l'aimais pas comme lui t'aime et que tu avais choisi Sheryl. J'ai pu constater avec bonheur que ce n'était pas le cas... Du moins je l'espère …

Quincy laissa volontairement sa phrase en suspend, laissant à Keith le temps d'enregistrer tout ce qu'il venait de dire. Quand au bout de cinq bonnes minutes, le brun n'avait toujours pas réagi, il attrapa sa mallette de travail et y pris une pochette cartonnée. Il se leva pour la donner à Keith mais dû la lui mettre de force dans les mains tant l'australien était perdu dans ses pensées.

_ Qu'est-ce que c'est ?

_ Je me suis permis de mener une petite enquête sur tous tes nouveaux clients qui te sont soudainement tombés dessus en même temps, les problèmes liés à l'implantation de ta succursale en Italie, bref tout ce qui a fait de ta vie professionnelle un gouffre chronophage ces derniers temps et je dois te dire que si après avoir lu ça, tu ne réagis pas, je ne pourrais plus te considérer comme mon ami et je te rayerai de ma vie Keith, sois-en assuré.

Le ton calme et posé de Quincy était plus qu'effrayant, on ne pouvait absolument pas douter de sa parole quand il prenait cette voix là et la détermination qui brillait dans ses yeux laissa Keith perplexe. Que pouvait-il y avoir dans ce dossier pour que son ami réagisse ainsi ?

Il le lut, il le relut pour être sûr et il le feuilleta une troisième fois, abasourdi par ce qu'il y lisait … Il avait brisé son couple, perdu ce qui faisait toute sa vie, pour ça ?

Lentement, il se leva, les yeux dans le vague quand brutalement, pris d'un accès de rage soudain, il balança le dossier contre le mur près de lui et regarda, impassible, les feuilles s'éparpiller au sol.

_ Comment mes conseillers ont-ils pu cautionner ça ? Gronda-t-il.

_ Tu le sais bien Keith, mieux que quiconque en fait, tu as démontré depuis longtemps que tu avais une confiance absolue en Sheryl, du coup quand elle s'adresse à eux en ton nom, ils n'ont aucune raison de douter d'elle et de ses demandes, lui rappela-t-il.

_ Très bien, alors pourquoi as-tu attendu aussi longtemps pour me montrer ça ? Et pouquoi maintenant ?

Keith ne comprit pas pourquoi le regard de Quincy se voilà subitement.

_ Pour les mêmes raisons qui font que cette fois je n'ai pas renoncé et ai forcé l'entrée de l'immeuble. Parce qu'avec ce qu'il vient de se passer, je me suis dit qu'attendre que tu ouvres les yeux tout seul était trop long et peut-être pas la bonne méthode à appliquer avec toi.

_ Putain Quincy ! Tu parles encore à mots couverts ! Dis-moi clairement ce qu'il en est !

Keith sentait des sueurs froides couler le long de son dos, son estomac était noué et il avait du mal à déglutir, un mauvais pressentiment lui enserrait le cœur dans un étau d'acier.

_ Depuis que vous êtes séparés, Cory a pété les plombs, il mange à peine, dort trop peu, sèche les cours et pire que tout, il traîne avec une bande … Il s'est mis à faire des courses de moto, du no speed limit, des courses sauvages sur des terrains vagues ...

Quincy n'arrivait pas à finir sa phrase, toute la tension des derniers jours retombait doucement, probablement dû au soulagement de voir Keith réagir dans le bon sens. Pourtant, il subsistait une étincelle de frayeur dans le cœur de Quincy, il avait peur de la réaction de Keith quand il apprendrait …

_ Cory est à l'hôpital. En soin intensif mais ses jours ne sont plus en danger, finit-il rapidement en voyant Keith blanchir d'un coup.

Les poings de Keith se serrèrent et son cœur rata un battement. Son amour avait failli perdre la vie, il aurait pu ne jamais le revoir, le tenir dans ses bras, sentir son parfum si entêtant, se perdre dans ses yeux captivants. Il ne se pardonnerait jamais … mais il avait quand même besoin de savoir. Réprimant l'envie subite qu'il avait de courir le rejoindre, il se tourna vers Quincy duquel il s'était détourné un moment pour tenter de contenir cette déferlante d'émotions.

_ Que s'est-il passé ? Cory est un excellent pilote de moto, je l'ai accompagné assez souvent sur les circuits pour le savoir.

_ Il est peut être l'un des meilleurs Keith, mais tout le monde à ses limites. Depuis qu'il t'a quitté, c'est à peine si il a dormi et mangé, il se contente du minimum, je te l'ai dit tout à l'heure et crois-moi je sais ce que je dis, on l'a installé de force chez moi au bout de quelques jours et jamais je ne l'ai vu si peu dormir. Il enchaînait les courses et ne se soignait que lorsque je l'y contraignais, quant à manger ou reprendre des forces, ces mots ont disparu de son vocabulaire. En clair Keith, il s'est plus ou moins laissé dépérir. Il n'a même pas touché son appareil photo une seule fois, même pour les dossiers de son école. Au départ, il répétait que ce n'était pas à lui de tenter de te reconquérir, que si tu l'aimais tu reviendrais de toi-même. J'ai eu le tort de prendre ça pour de la fierté, mais j'ai fini par me souvenir de notre discussion ce fameux soir et j'ai vite compris qu'en réalité c'était de la peur. Il était tellement persuadé que jamais vous ne vous remettriez ensemble, il avait peur de tenter une reconquête qui ne pouvait se finir, selon lui, que par un échec et de souffrir plus encore.

_ Depuis quand est-il là-bas ? demanda Keith d'une voix abattu.

_ Hier matin. Tu m'excuseras mais j'ai préféré m'assurer de sa survie et savoir ce qu'il s'était passé avant de venir te trouver et puis je voulais finir de préparer ce dossier avant.

Ce dossier. Keith en était malade. Tout ce qu'il y avait lu lui donnait envie de tuer Sheryl de ses propres mains. Il ne se contenait que pour Cory. Il allait aller le voir et le plus tôt possible, il devait juste aller trouver son directeur adjoint avant tout et une fois fait, il serait tranquille.

_ Tu viens avec moi Quincy, dit-il en ramassant les feuilles, on va voir Hampton et on file à l'hôpital.

Le brun n'avait pas franchement l'air en forme mais Quincy préféra s'abstenir de tout commentaire et lui emboîta le pas. Il ne savait pas ce qu'il voulait faire avec son adjoint mais si il jugeait devoir y aller avant de passer voir Cory c'est que c'était important, Quincy le sentait au plus profond de lui.

Arrivé devant la porte du bureau de Hampton, Keith frappa trois coups et entra sans attendre. L'homme d'une soixantaine d'années et à l'allure de vieux dandy était assis à son bureau au téléphone et Sheryl était là également. Quincy grimaça intérieurement, la blonde s'était réfugiée dans les bras de son père, ça sentait le conflit et il espérait être capable de contenir Keith dont il sentit d'un coup la colère croître de façon presque exponentielle.

L'australien s'avança dans la pièce, tentant d'ignorer la présence de la jeune femme qui l'avait salué en souriant. Sourire qu'elle perdit vite devant l'impassibilité du brun. Elle se renfrogna et jeta un regard peu amène au blond qui le lui rendit avec plaisir. Keith se posta finalement devant le bureau et attendit que l'ami de son parrain ai raccroché. Quincy se fit le plus discret possible, se fondant dans le décor.

_ Que me vaux ta visite Keith ? Demanda-t-il en reposant ses mains sur son bureau.

_ Je viens te présenter une requête, en tant que directeur adjoint et responsable des ressources humaines, je te demande de rédiger dès à présent l'acte de licenciement pour faute grave de Sheryl Collins.

_ Quoi ?! Mais Keith tu n'y penses pas ! Tu ne peux pas me renvoyer ! Tu as besoin de moi ! S'écria Sheryl en se relevant d'un bond.

Elle s'agrippa au bras de Keith qui se retint de justesse de la gifler. Il se contenta de se dégager sèchement devant l'air ahuri de Hampton. Dépitée, la jeune femme se rassit, l'air perdu.

_ Si tu ne veux pas que je perde le peu de calme qu'il me reste Sheryl, tu ferais mieux de ne pas t'approcher, gronda-t-il d'une voix sourde.

_ Peux-tu me donner les raisons de ce renvoi au moins ? Intervint le père de la jeune femme.

Keith n'était pas naïf, il savait que le ton calme et détendu du vieil homme était un leurre. Celui-ci n'avait pas apprécié le geste que le brun venait d'avoir. Il avait beau avoir conscience que sa fille était collante avec lui, il n'avait pas à être si sec. Elle était tout de même son amie depuis longtemps, ils formaient presque une famille !

Pour toute réponse, Keith se contenta de tendre le dossier qu'il avait pris la peine de ramasser un instant plus tôt. Il attendit que l'homme l'ouvre pour lui expliquer ses raisons.

_ Comme tu peux le voir, les problèmes que nous avons rencontrés en Italie, les retards de livraison, les rendez-vous soit-disant annulés, les matériaux en rupture de stock, tout ça c'était l'œuvre de ta fille, lui résuma-t-il les feuillets qu'il lui avait donné. De même pour tous les nouveaux clients qui nous sont tombés dessus tous en même temps apparemment par hasard, doublant notre temps de travail par leur insistance à vouloir être traités en priorité, tout ça c'était les manigances de Sheryl. Elle a été trop loin et peu importe ses excuses, asséna-t-il d'une voix froide.

_ Et ce n'est pas tout, annonça Quincy en prenant la parole d'une voix grave pour la première fois.

Tout le monde se retourna vers lui. Keith impassible, Hampton vert de rage et Sheryl livide et se demandant comment se sortir de là. Elle aurait pu arracher les yeux de Quincy tant elle était en colère.

_ Auras-tu le courage d'avouer Sheryl ou devrais-je le faire à ta place ? Demanda-t-il en se doutant bien de la réponse.

Si des yeux avaient pu tuer, Quincy serait mort à l'instant. Sheryl ne desserrait pas les lèvres, aussi Quincy s'avança au côté de Keith qui perdait doucement patience. Le sourire ironique de Quincy s'effaça quand il fit face au directeur adjoint.

_ Hampton, nous nous entendons bien et je reconnais beaucoup de qualités en toi, aussi je suis persuadé que tu feras le bon choix concernant le renvoi de ta fille. Toutefois, tu dois savoir une dernière chose avant de prendre ta décision. Tu sais que depuis son anniversaire, Keith est en couple avec Cory, tu l'as rencontré a de nombreuses reprises déjà, n'est-ce pas ?

_ Oui, évidemment, c'est un jeune homme charmant et j'ai déjà eu le plaisir de rencontrer ses parents lors de plusieurs soirées mondaines. Où veux-tu en venir ? L'interrogea le directeur, perdu.

_ J'y viens. Comme tu l'as dit, c'est un jeune homme charmant, c'est aussi mon meilleur ami et un garçon encore jeune mais qui a beaucoup souffert dans son enfance, il en est resté très fragile même si il le cache bien, expliqua-t-il patiemment sans pour autant entrer dans les détails de la vie privée de Cory. Depuis le début de leur histoire, ta fille n'a eu de cesse de s'en prendre à lui. Keith n'en a jamais rien su car Cory n'a jamais voulu lui dire, il ne voulait pas qu'il se retrouve coincé entre eux deux, précisa-t-il autant pour Hampton que pour le brun. Dès qu'elle se retrouvait seule avec lui, notamment quand il attendait que Keith sorte d'un rendez-vous ou d'une réunion, elle le traitait de profiteur, de gigolo, de traîné, de bâtard, lui répétant que Keith ne resterait pas éternellement avec un gosse comme lui, qu'il n'était qu'un passe-temps, qu'un jour Keith voudrait des enfants, je vous en passe et des meilleurs. Cory ne lui répondait jamais, il tentait de l'ignorer mais je sais que ça le touchait durement. Depuis leur rupture, Cory est déphasé, il ne se contrôle plus et hier il a eu un grave accident de moto pendant une course sauvage, il est à l'hôpital Hampton, conclu-t-il en fixant le vieux directeur sans ciller.

_ C'est bien fait pour lui ! Il m'a volé Keith ! Je regrette seulement qu'il ne soit pas mort ! Hurla Sheryl en se mettant debout les poings serrés et les bras collés le long du corps. Elle avait tout de la petite fille faisant un caprice.

Keith n'eut pas le temps de réagir aux paroles de Sheryl que déjà son père s'était levé et l'avait giflé violemment.

_ Comment peux-tu dire ça ?! S'écria-t-il, éberlué. Tu n'as pas le droit de lui reprocher l'amour que lui porte Keith, personne ne choisit de qui son cœur s'éprend. Je n'arrive pas à croire tout ce que je viens d'entendre. Tu n'es pas la fille que j'ai élevé, c'est impossible. Qu'es-tu devenue ?

Hampton avait dépassé le stade la colère. Sa fille le regardait, les larmes aux yeux, la main sur sa joue meurtrie. Keith et Quincy se dirent qu'ils n'avaient plus leur place ici et un certain australien avait quelqu'un à aller voir de toute urgence. De plus, il valait mieux qu'il parte avant de tuer la blonde.

_ Nous allons vous laisser maintenant. Hampton, tu peux contacter Dennis en cas de problème, je vais de ce pas contacter mon parrain pour le tenir au courant. Quant à moi, vous oubliez mon existence jusqu'à nouvel ordre.

Sur ces mots, Quincy attrapa le bras de son ami et le traîna dehors.

_ Comment te sens-tu ? Lui demanda-t-il, soucieux.

_ Mal.

_ C'est tout ce qu'il y a de plus normal Keith.

_ Je n'ai pas l'habitude de me retrouver dans ce genre de position, gronda-t-il, de m'être laissé berner comme ça, qu'elle ai pu trahir ma confiance aussi facilement... J'ai une furieuse envie de lui coller une balle entre les deux yeux.

_ Crois-moi, le pire que tu puisses lui faire est de la laisser vivre dans ton indifférence et dans ton absence. Vu son état émotionnel, il n'y aura pas pire châtiment pour elle, supposa Quincy.

_ Probablement, pourtant je ne me sens pas mieux, soupira l'australien. Je pense que ça s'améliorera quand j'aurai vu Cory.

_ Et bien … n'en soit pas si sûr, fit le blond d'une voix peu assurée. Cory risque de ne pas être très coopératif.

Keith s'arrêta en plein milieu du couloir et se tourna vers son ami, un air de défi au fond des yeux.

_ Peu importe, finit-il pas répondre en secouant la tête avant de reprendre son chemin. Il m'aime toujours et je l'aime. A moi de regagner sa confiance. Je me battrai. Je ne le laisserai pas me fuir.

Quincy sourit devant l'air assuré du PDG. Ils s'occuperaient de Sheryl et Hampton plus tard, pour le moment, il y avait plus urgent, même si ça n'allait pas être une partie de plaisir.

.

.

_ Veux-tu te tenir tranquille ? Gronda une voix mi-amusée mi-énervée.

_ Mais Shawn … Je m'ennuie ici, lui répondit une autre voix, grognon celle-ci. Je serais aussi bien dans ma chambre et au moins je pourrai me reposer. Comment veux-tu que je récupère ici alors que les infirmières ne cessent de me déranger pour une raison ou une autre ? Et quand ce ne sont pas elles, c'est le médecin !

Cory était très irritable depuis son réveil et le pauvre Shawn avait bien du mal à le garder dans son lit. Il pensait sérieusement à l'y attacher solidement et à l'assommer, pas forcément dans cet ordre d'ailleurs, quand la porte s'ouvrit sur celui qu'il n'espérait plus.

_ Et bien Cory ! Je t'ai connu plus coopératif.

_ Quincy ! S'exclama son amant, visiblement soulagé.

_ Je t'ai manqué ? Demanda-t-il sournoisement en l'embrassant rapidement.

_ Tu n'imagine pas, soupira Shawn.

_ Ok, merci, sympa pour moi, râla le blessé faussement vexé.

_ Cory tu sais bien que tu es insupportable quand tu es malade ou blessé.

_ Oaui … mais même c'est pas une raison. Je veux rentrer Quincy !

_ Pas avant au moins trois jours … de plus, hésita-t-il soudain … tu vas sûrement m'en vouloir mais sache que si j'ai fait ça c'est parce que je t'aime.

L'air sérieux et inquiet de Quincy intriguèrent Cory autant qu'ils l'inquiétèrent. Qu'avait-il pu faire qui le mettrait en colère au point de lui en vouloir à ce point ? D'autant que la veille au soir c'était le blond qui l'avait généreusement engueulé pour son comportement suicidaire de ces dernières semaines.

Pourquoi ne comprenait-il pas qu'il ne cherchait pas à mourir mais qu'il n'avait plus pour autant envie de vivre ? La vie sans Keith était juste un putain de purgatoire, fade et sans âme, elle ne valait pas la peine d'être vécue et la seule chose qui retenait sa main quand il pensait au suicide était qu'il ne voulait pas infliger ça à ses amis et surtout, il ne ferait pas ce plaisir à Sheryl. Il lui restait tout de même un minimum d'orgueil !

C'était pourquoi il ne comprenait pas ce que son ami avait pu … Non ! Il n'aurait pas osé lui faire ce coup là ?

_ Qu'est-ce que tu as fait ? Demanda-t-il d'une voix blanche.

_ On va te laisser maintenant, il y a quelqu'un qui a besoin de te voir.

Cette seule réponse suffit à Cory pour comprendre qu'il avait vu juste.

_ Non ! S'exclama-t-il en se levant totalement paniqué. Non ! Pas lui ! Je peux pas. Me fais pas ça Quincy s'il te plaît, le supplia-t-il.

_ Je t'aime Cory, tu es mon ami, mon frère, ne l'oublie pas, se contenta de répondre le blond en le repoussant doucement sur son lit.

Cory savait qu'il n'aurait pas la force de le repousser, il se réveillait seulement et était encore sous le coup de la morphine. Il ne fit rien, restant assis sur son lit l'air hagard, quand ses amis poussèrent la porte pour sortir, laissant la place à un Keith qui ne savait pas trop sur quel pied danser.

L'australien savait que le combat qu'il allait mener serait sans doute le plus difficile mais aussi le plus important de sa vie. Et pour la première fois, il avait peur d'échouer.

Ce fut presque en tremblant qu'il s'avança vers le lit où Cory restait assis comme si il ne le voyait pas. Keith n'osait pas le toucher et pourtant il en crevait d'envie. Le prendre contre lui et respirer son parfum, le rassurer, le cajoler, se faire pardonner ses semaines de torture par sa seule faute.

_ Cory ? Murmura-t-il .

Le jeune homme blessé ne réagissant pas, Keith s'approcha un peu plus, se mettant lui-même à la torture. Être si près de lui sans pouvoir le toucher était un vrai calvaire.

_ Cory ? Insista-t-il encore.

Il allait tendre une main incertaine vers lui quand, soudain, l'américain se redressa et recula brutalement.

_ Ne me touche pas !

C'étaient les premiers mots que Cory lui adressaient depuis plus de deux mois et finalement Keith se dit qu'il aurait peut être préféré qu'il reste muet. La colère sourde mêlée de panique contenue dans la voix de son amour lui perforait le cœur.

Il stoppa net son avancée pour ne pas le brusquer plus et attendit qu'il retrouve un semblant de calme. Voyant que ce ne serait pas chose aisée et bien décidé à prouver à Cory qu'il ne se laisserait pas décourager, il s'installa dans le fauteuil pour les visiteurs sans le lâcher des yeux.

Pourquoi avait-il fallu que Quincy s'en mêle ? Putain ! Il souffrait déjà assez physiquement, il aurait au moins pu lui accorder un peu de répit ! Lui qui espérait que la morphine l'aiderait à dormir d'un sommeil sans rêve, lui permettant de passer au moins une nuit sans penser à son ex, il en était pour ses frais.

Cory ne savait plus quoi faire, il ne pouvait pas quitter sa chambre d'hôpital et à n'en pas douter le brun ne se laisserait pas virer comme ça. Il craignait trop ce qui pourrait se passer. Il était hors de question qu'il se laisse manipuler de nouveau par Keith. Il ne l'aimait pas, les faits l'avaient plus que prouvé, et si il était venu par pitié ou espérant profiter d'un moment de faiblesse de sa part pour tirer son coup ? Il voulait en avoir le cœur net.

_ Pourquoi es-tu venu Keith ? Dit-il en espérant que sa voix ne tremblait pas.

_ Parce que je m'inquiétais pour toi … et que j'avais terriblement envie de te voir.

_ Hmpf ! Envie de me voir ? Et comme par hasard ton envie de me voir coïncide parfaitement avec le moment où je me retrouve ici et affaibli ! Tu me prends pour un con ? Va-t-en !

Cory s'énervait, preuve qu'il était émotionnellement perturbé et donc qu'il éprouvait encore bien des sentiments pour lui, restait à le lui faire admettre, ce serait la première étape.

_ J'ai eu une discussion avec Quincy.

_ Le traître !

_ Non. L'ami.

Seul un regard noir lui répondit, aussi enchaîna-t-il rapidement.

_ Si il n'avait pas été là, il y a énormément de choses que j'aurai ignoré, peut être pour toujours. J'ai cru qu'aucun de nos amis n'étaient venus me voir ou n'avaient cherché à me joindre parce qu'ils étaient de ton côté et qu'ils m'en voulaient, en réalité je sais aujourd'hui que Sheryl les en a empêché, filtrant leurs appels et les mettant sur liste noire. Je sais aussi pour tous les problèmes qu'elle nous a causé et Hampton le sait également, il se chargera de son cas, c'était soit ça, soit je la tuais de mes mains.

Cory leva vers lui des yeux étonnés et Keith s'en réjouit, il espérait le faire réagir ainsi. Il le laissa ruminer tout ça, il voulait qu'il vienne chercher ses réponses de lui-même. C'était un peu lâche mais ça le rassurerait de voir que le cuivré avait peut être encore envie de sauver leur couple lui aussi. Le temps lui parut interminable.

_ La tuer ? Mais …

Cory ne comprenait plus. D'accord, elle avait largement dépassé les limites et il avait même failli y passer mais le brun était amoureux d'elle, non ? Alors dans ce cas, il devrait être de son côté, non ?

_ Mais quoi Cory ?

_ Tu n'es pas avec elle ?

_ Je te l'ai toujours dit. Je n'aime pas Sheryl. Je la considérais comme une très une bonne amie mais aujourd'hui il paraît évident que je ne peux que la haïr.

_ Pourquoi ?

Keith ne savait pas ce qui l'énervait le plus. Le fait qu'ils soient en train de parler de la jeune femme au lieu de parler d'eux ou bien le fait que Cory ai l'air sincèrement étonné que Keith puisse en vouloir à la blonde.

_ Mais enfin tu as manqué te tuer à cause de ses conneries ! S'écria-t-il en perdant son sang-froid.

Devant l'air interloqué et choqué de Cory, il se calma et se leva pour se poster en face de lui. Faisant fi du mouvement de recul du jeune homme, il attrapa son menton d'une main pour s'assurer qu'il ne détournerait pas les yeux, il devait voir la sincérité dans son regard.

_ C'est toi que j'aime Cory, toi seul, depuis le début.

Cory secoua la tête en s'arrachant de l'emprise de Keith. Il ne pouvait pas y croire. Il mentait forcément. Il avait perdu Sheryl alors il se rabattait sur lui, oui, c'était ça, ça ne pouvait pas être autre chose. Il ne pouvait pas dire la vérité. Si il l'avait vraiment aimé, ils n'en seraient pas là aujourd'hui.

_ Je te jure Cory que je n'ai jamais aimé que toi.

_ C'est impossible. Tu mens. Si tu m'avais aimé, tu ne m'aurais pas laissé partir, on n'en serait pas arrivé là, tu aurais mis un frein aux agissements de Sheryl bien plus tôt.

Cory était quelqu'un de particulièrement buté et si Keith avait toujours trouvé jusque là que c'était une qualité, à cet instant, il penchait plus pour l'autre vision des choses, à savoir que l'américain était une vraie tête de mule bornée.

_ J'ai été maladroit c'est vrai et …

_ Maladroit ?! Tu appelles ça de la maladresse toi que de délaisser celui que tu prétends aimer pour accourir au moindre sifflement d'une soit-disant amie ? S'indigna Cory. Tu sais Keith, si tu avais été honnête avec moi, si tu m'avais quitté franchement pour te mettre avec elle, je l'aurai compris et accepté même si j'en aurai cruellement souffert, mais ce que tu as fait …

Cory s'interrompit, des sanglots dans la gorge et le cœur du brun se serra à le voir si malheureux. Comment avait-il pu passer tant de temps près de lui sans jamais remarqué ce mal-être ? Il voulait tant le réconforter mais il était certain que Cory ne se laisserait jamais faire.

Ce dernier d'ailleurs venait de se rallonger, de toute évidence épuisé, et gardait les yeux fixés vers l'extérieur. Keith baissa la tête, cela s'avérait plus dur que prévu.

_ Cory … soupira-t-il. Je ne sais pas encore comment, mais crois-moi je regagnerai ta confiance, je te prouverai que c'est toi que j'aime et que ça a toujours été le cas. Je me ferai pardonner, je t'en fais la promesse …

_ Tu perdras ton temps … répondit simplement Cory d'une voix terne, prouvant qu'il ne croyait pas un mot de son ex.

Keith secoua la tête comme pour chasser ces dernières paroles.

_ Peu importe … j'y passerai ma vie si il le faut pour expier mes erreurs, tu le vaux largement.

Cory tourna brusquement la tête vers lui, les yeux exorbités par ce qu'il venait d'entendre. Keith était ravi, il avait fait exprès d'utiliser cette expression, la même que celle que Cory avait utilisé lors de sa discussion avec Quincy. Ce fut donc sur un dernier sourire d'espoir et un regard brillant de conviction qu'il referma la porte derrière lui, laissant Cory ruminer tout ce qui venait d'être dit.

.

.

_ Cory ! Tu es prêt ?

Quincy s'impatientait, le photographe en herbe avait vingt minutes de retard et il était maintenant en train de monter l'escalier pour aller le chercher dans sa chambre alors que son compagnon les attendait dans la voiture.

Il défroissa inconsciemment des plis de son smoking pourtant impeccable et ouvrit la porte sans prendre la peine de frapper. Cory était sur son lit, à moitié habillé ou à moitié déshabillé, c'était difficile à déterminer en fait.

L'américain, les yeux dans le vague, l'avait forcément entendu entrer mais ne réagissait pas pour autant.

_ Qu'est-ce que tu fous ?! S'écria Quincy. Tu as vu l'heure ? On est en retard et ça le fait clairement pas !

_ En fait … allez-y sans moi.

Le blond fronça les sourcils. Il s'y attendait à vrai dire mais là … au dernier moment.

_ Même pas en rêve, finis de t'habiller et on y va. Ne fais pas l'enfant !

Cory se redressa d'un bond et fixa son ami.

_ Je n'ai jamais été un enfant Quincy ! Gronda-t-il.

Le blond le savait. Il le connaissait par cœur. Il ne pensait pas ce qu'il avait dit mais au moins il était debout. Il en profita pour s'approcher rapidement et l'attraper à bras le corps. Avant d'avoir pu dire « ouf », Cory se vit habiller en quatrième vitesse.

Les mains de Quincy étaient partout. Sa chemise fut boutonnée jusqu'en haut, lui attirant un sifflement quand il chercha son air, elle fut rentrée dans son pantalon alors qu'il virait à l'écarlate et il ne put souffler que quand le blond se détourna pour attraper sa cravate.

_ Quincy ! S'exclama-t-il, indigné. Je t'ai dit que je n'irai pas !

_ Oh que si Cory ! Cette situation n'a que trop duré et en plus Nigel ne te le pardonnerait jamais et tu le sais.

Quincy était très énervé. Non seulement il avait pu constater par lui-même le désespoir sans fond qui habitait toujours Cory mais en plus il s'étendait désormais à l'australien. L'acharnement de ce dernier, si il était remarquable en tout point, commençait doucement à s'amenuiser.

Dès le lendemain de sa visite à l'hôpital, Keith avait commencé à prendre le taureau par les cornes, bien décidé qu'il était à ne pas se laisser éjecter de la vie de son américain, même si il avait en quelque sorte lui-même provoqué cette situation.

Il avait profité que Cory soit en train de passer des examens de contrôle pour aller dans sa chambre et mettre en place les premières pièces de son plan. Puisque Cory ne voulait pas le voir, il ne le brusquerait pas mais cela ne l'empêchait de lui faire sentir sa présence et sa volonté.

Il se contenta donc de lui déposer un sac empli d'affaires qu'il avait laissé chez eux ou que Keith venait d'acheter et qui lui manquerait forcément, surtout dans un hôpital ennuyeux à mourir. En revenant dans sa chambre, l'américain eut donc la surprise de trouver les derniers livres de ses auteurs préférés, son lecteur de musique, un lecteur de films avec tous ses films préférés, des vêtements qu'il adorait et qu'il n'avait pas eu le courage de revenir chercher, notamment un sweet super confortable que le brun lui avait offert sur un coup de tête et dans lequel il passait la plupart de ses soirées, ses bonbons préférés et … un album avec des photos d'eux.

Keith appris par Quincy que Cory avait été très touché et très surpris mais il n'avait pas eu de nouvelles de l'intéressé, il s'en doutait et ne se découragea pas pour autant. Il entama le deuxième acte et se rendit chez Quincy avant que Cory n'y retourne après sa sortie d'hôpital.

Lorsque le garçon retrouva sa chambre d'amis attitré, il put constater quelques changements. Notamment le matelas. Il aimait par-dessus tout le matelas à eau qu'ils avaient installés chez eux et il lui manquait, Keith s'en était douté et en avait installé un sur son lit d'emprunt. Il avait revu la déco en ramenant les tableaux et photographies que Cory avait accroché partout dans leur chambre. Il voulait lui rappeler le confort et la chaleur de leur foyer, que lui-même avait oublié l'espace de quelques temps, espérant que celui-ci finirait par lui manquer.

Quand il avait demandé à Quincy la réaction que Cory avait eu, celui-ci avait détourné les yeux, gêné de lui avouer que le cuivré avait pleuré pendant deux jours en refusant de mettre les pieds dans sa chambre et dormant dans le salon. Il rassura cependant Keith, qui avait viré au blanc, en lui racontant comment Shawn l'y avait traîné de force et que, depuis, il était presque impossible de l'en déloger.

Quant il sut que Cory avait réintégré son école, il s'arrangea dans son emploi du temps pour être à la sortie des cours chaque jour sans faute. Il ne cherchait pas à lui parler, il lui montrait juste qu'il était là, qu'il avait su se rendre disponible, alléger son temps de travail.

Son petit manège dura plusieurs semaines mais Keith sentait bien qu'il faiblissait devant ses attentions et il espérait que bientôt ils pourraient au moins se parler un peu. Parce que l'australien n'avait pas renoncé, il voulait pousser Cory à sortir de sa réserve, quitte à provoquer un affrontement, n'importe quoi pourvu qu'il réagisse, tout plutôt que cette apparente indifférence qu'il savait feinte.

Par exemple, lorsqu'il apprenait que Cory avait beaucoup de travail ou que Quincy rentrerait tard et que Shawn serait indisponible également, il faisait livrer les plats préférés de son ange chez leur ami pour qu'il puisse manger sans pour autant arrêter de rattraper le retard pris sur ses cours. Il savait qu'il était touché par ses attentions grâce à Quincy qui jouait à merveille le rôle d'intermédiaire.

Tous les deux furent extatiques le jour où Cory accorda quelques mots à Keith. Pas grand chose certes mais c'était un début, juste un petit signe de tête et un remerciement pour les repas, mais c'était déjà tellement ...

Quincy en avait longuement parlé plusieurs fois avec Keith et il savait que cette soirée serait une étape cruciale, voire décisive car plus le temps passait et plus Keith perdait espoir. De son côté, l'américain souffrait énormément de cette proximité et de ses attentions, tout comme il en était dépendant. C'était pour cela qu'il fallait y mettre un terme coûte que coûte et qu'il était impératif que Cory vienne.

_ Cory, nous en avons parlé plusieurs fois, il est hors de question que tu manques cette soirée ! Tu sais que Nigel a prévu de faire sa demande ce soir, tu dois être là !

Cory se mordit la lèvre, dépité. C'était égoïste en effet mais il craignait tellement cette soirée. Quincy le savait bien pourtant. Tout comme lui savait parfaitement ce que Nigel voulait, il en parlait assez ces derniers temps. Ce dernier comptait profiter du gala de bienfaisance au profit des enfants malades et géré par Cassie pour lui demander de devenir son épouse.

_ Je ne peux pas Quincy, tu ne comprends pas, avait dit Cory en secouant la tête.

Il s'était détourné de la fenêtre du salon de son ami pour prendre place dans un fauteuil.

_ Parfait. Alors explique-moi, avait répondu le blond sans se départir de son flegme apparent.

Disant cela, Quincy s''était installé dans le fauteuil qui faisait face à celui de l'américain et croisé les jambes avant de poser les mains dessus en un signe évident d'attente. Quincy avait surtout voulu montrer à Cory qu'il ne lâcherait pas l'affaire. De toute façon, ils étaient chez lui et le cuivré n'aurait pas pu fuir bien loin.

Cory avait ouvert la bouche une première fois mais aucun son n'en était sorti, comme coincé au fond de sa gorge. En fait, c'était surtout un ressenti, un sentiment d'anxiété profond à l'annonce de la soirée et par conséquent il n'était pas parvenu à mettre de mots dessus.

_ J'ai un mauvais pressentiment.

_ De quelle sorte ? Avait demandé Quincy, intrigué.

_ De … depuis quelques temps … j'ai de plus en plus de mal à lui résister … il est trop près de moi, à l'école … partout … et toutes ses attentions … il est si prévenant et même … mon Dieu je n'aurai jamais cru dire ça de Keith un jour mais … il est si … romantique !

Cory s'était arrêté un moment, fermant les yeux pour retrouver une respiration normale, heureusement pour Quincy car si il avait pu voir le petit sourire que le blond tentait de cacher, nul doute qu'il y aurait eu une mort inexpliquée au JT du soir.

_ Je ne veux pas lui céder ! Avait repris Cory avec plus de véhémence. Il est … Je … Nous deux à nouveau c'est impossible ! C'était déjà une erreur la première fois !

_ Tu ne penses pas ce que tu dis ! S'était exclamé Quincy, dépité.

Cory s'était contenté de secouer la tête en signe de négation.

_ Je n'ai ni la force ni le courage de croire de nouveau à un futur possible pour nous deux. … Je crois que je vais demander un échange étudiant pour ma dernière année ...

Quincy cette fois était bloqué. Il était resté là, à le dévisager, bouche entrouverte et les poings le démangeant dangereusement. Il avait fait un effort surhumain pour prendre sur lui et parler le plus calmement possible.

_ Tu es stupide Cory. Keith t'aime plus que tout. Je ne vois pas pourquoi tu continues de vous faire souffrir tous les deux. C'est cruel et inutile.

Les yeux de Cory avaient très clairement montré à quel point il était blessé de ce que Quincy venait de lui dire. Pourquoi personne ne le comprenait ?

_ Écoute, on a déjà eu cette conversation. Je ne peux pas retenter une histoire avec Keith malgré tout mon amour pour lui, je ne survivrai pas à un nouvel échec, avait-t-il affirmé d'une voix sèche.

_ Je suis sûr que tout va s'arranger Cory. Fais moi confiance.

L'américain ne répondit pas, il baissa la tête en signe de résignation et attrapa son manteau.

.

.

La fête battait son plein. La nourriture et l'alcool étaient présents en abondance, la décoration faite avec goût, la lumière tamisée et la musique agréable. Partout, les discussions allaient bon train, entrecoupées d'éclats de rire.

Les invités étaient répartis en plusieurs tables rondes d'une douzaine de personnes et bien sûr les amis proches des futurs mariés se trouvaient tous rassemblés autour de Cassie qui venait de dire « OUI ! » à un Nigel aux anges .

Cory évitait soigneusement tout contact même visuel avec l'australien. Si celui-ci n'en était pas surpris, il en souffrait tout de même et cela commençait à être difficile pour tout le monde. Les sentiments et la tension exacerbée qui régnait à la table commençaient à rendre dingue les différents protagonistes de la scène.

Brusquement, il se leva et attrapa Shawn par le poignet pour le tirer sur la piste de danse, le tout sans un mot. Si certains, comme Cassie, trouvèrent ça mignon, d'autres, comme Cory ou Keith, étaient parfaitement interloqués. Depuis quand Quincy avait-il prévu de faire son coming-out et de reconnaître la vraie place de Shawn prêt de lui ?

Si Cory avait pu éviter Keith au maximum depuis le début de la soirée, maintenant que tout le monde commençait à se lever pour aller danser, il savait que dans peu de temps, ils seraient seuls à la table.

Ce fut donc avec l'espoir d'échapper à une confrontation qu'il anticipa et se dépêcha de rejoindre la piste de danse. Il commença à se déhancher au rythme de la musique, laissant sur son passage des yeux vagabonds qui s'égaraient allègrement sur sa personne. Il s'en moquait pourtant éperdument. Il n'avait pas du tout l'intention de se trouver quelqu'un.

Keith devenait fou à le regarder ainsi, et tous ces vautours qui lui tournaient autour. Beaucoup, hommes comme femmes, avaient attendu impatiemment leur rupture pour tenter leur chance et si pour l'instant, ils s'y étaient tous cassé les dents, Keith craignait que ce soir Cory ne cède. Il devait prendre les devants, il en avait parlé avec Quincy et il savait que Cory était à bout. Il devait à tout prix le faire craquer ce soir et pour ça il allait devoir mettre le paquet.

Il se leva tranquillement en cherchant surtout à ne pas se faire remarquer et parti voir la personne qui s'occupait de la programmation musicale. Après lui avoir glissé quelques mots à l'oreille, il se rendit sur la piste de danse. Il la traversa droit vers Cory, se moquant totalement des regards surpris, curieux ou même moqueurs qu'il pouvait croiser. Il n'avait qu'une cible, qu'une mission, qu'un but … Cory.

Celui-ci ne s'était rendu compte de rien, perdu qu'il était dans les méandres de son esprit, son corps indépendant de ce dernier continuait à se mouvoir avec grâce et aisance au son de la musique. Ce fut l'arrêt brutal de celle-ci qui lui fit rouvrir les yeux. Ce faisant, son regard fut capturé aussitôt par deux perles cobalt d'une intensité incroyable.

Il en aurait sursauté si il n'avait pas été captivé ainsi. Il ne s'attendait pas du tout à se retrouver face à face avec celui qu'il tentait d'éviter plus que tout, surtout sur la piste de danse. Perdus tous deux dans cette contemplation douloureuse, ils ne prêtèrent guère attention aux paroles de l'organisateur de la soirée qui résonnaient à travers le micro. Ils reprirent leurs esprits vers la fin de son intervention, Keith en secouant la tête et Cory en clignant bêtement des yeux, comme pour rompre l'envoûtement.

_ … c'est donc pour cela que je vous demande de rester dormir dans cet hôtel ce soir, il y a suffisamment de chambres, mais les consignes sont très claires, l'orage qui sévit depuis le début de la soirée a provoqué une inondation et coupé la route d'accès qui rejoins l'autoroute, les autorités ont été très claires, toute personne ayant la possibilité de rester sur place jusqu'à ce que les éléments se calment est priée de ne pas prendre le volant.

Si les deux hommes n'avaient pas vraiment écouté, ils avaient tout de même saisi l'essentiel, tout comme ils avaient remarqué que la soirée était repartie.

Pourtant, aucun des deux n'osait parler ou bouger. Cory, parce qu'il se demandait ce que Keith pouvait bien avoir encore manigancé et ce dernier parce que bizarrement, en se trouvant là devant l'homme de sa vie, il perdait tous ses moyens. Il savait que c'était sa dernière chance et il avait peur de la tenter. Peur d'échouer.

Il ne retrouva son assurance légendaire qu'aux premières notes de la chanson suivante. Le programmateur semblait s'être souvenu de sa requête. Comme sur pilote automatique, il tendit la main vers Cory, l'invitant sans prononcer un mot.

Ce dernier hésita quelques secondes mais finalement accepta, sans savoir vraiment pourquoi. Il voulait le fuir et là, il acceptait une danse. Était-ce la détermination brillante dans les yeux du brun ? Ou, peut-être, une façon de lui dire adieu ?

Cory ferma les yeux aussitôt qu'il sentit la chaleur des bras de Keith autour de lui. Seigneur ! Ça lui avait tant manqué. Ce sentiment d'être enfin complet, de se sentir protégé de tout, à l'abri des agressions extérieures. Mais quand l'agression venait de cette chaleur même, comment ne pas souffrir à vouloir mourir ?

Il savait qu'il regretterait de s'être laissé aller ainsi quand il leur faudrait se séparer, mais pour l'instant il se laissait aller à écouter les paroles, si Keith avait choisi cette chanson c'était pour une bonne raison, il voulait lui passer un message.

L'australien, lui, avait laissé échapper un soupir de plaisir au contact de Cory contre lui. Il ignorait pourquoi Cory avait accepté mais pour le moment il s'en moquait, il était dans ses bras, c'était la seule vérité vraiment importante du moment. Aux premiers pas de danse, il pria intérieurement pour que Cory fasse attention aux paroles.

Ils ne t'avaient pas là d'où je viens
Je ne savais pas que le meilleur était à venir
Ma vie a commencé quand j'ai vu ton visage
Et j'entends ton rire comme une sérénade

Cory sentit des larmes lui piquer les yeux et il ne les ferma que plus fort, espérant naïvement qu'ainsi elles ne s'en échapperaient pas. Son cœur battait sourdement dans sa poitrine. Les mots de la chanteuse était un baume sur son cœur meurtri. Les mots que Keith ne lui avait jamais dit, il les entendait enfin.

Combien de temps veux-tu être aimé
Est-ce que l'éternité suffit, est-ce que l'éternité suffit
Combien de temps veux-tu être aimé
Est-ce que l'éternité suffit
Car je ne te laisserai jamais, jamais tomber

Cette fois, Cory pleurait franchement, tout en silence, la tête posée sur l'épaule du brun, il se fondait complètement contre son corps. Ils ne faisaient plus qu'un et Cory n'arrivait plus à penser. Devait-il, pouvait-il y croire encore comme tout le monde s'acharnait à lui dire ? Ou bien n'était-ce qu'une chimère passagère ?

Je me glisse dans le lit pendant que tu dors
Pour me tenir contre toi et sentir ton souffle sur moi
Il y aura tellement de choses à faire demain
Alors cette nuit je sombrerais dans un rêve avec toi

Cory se rappela alors toutes les nuits où il s'était endormi seul, attendant le retour de son amant, et Keith qui se glissait doucement dans le lit contre lui lorsqu'il arrivait enfin, relâchant alors toute la tension de son corps accumulée dans la journée, ne trouvant de réconfort que près de lui, même si le lendemain il recommençait le même rituel acharné. Qui apaisait Keith maintenant qu'il n'était plus là ?

Une vague de culpabilité envahie l'américain à cette pensée. Quincy avait donc raison quand il disait que Cory les faisait souffrir tous les deux et ce dernier en prenait réellement conscience à ce moment précis.

Keith ne comprit pas pourquoi, d'un coup, l'étreinte de Cory sur son corps se fit plus forte, mais il sentit parfaitement les gouttes d'eau glisser dans son cou et il raffermit lui aussi sa prise sur ce corps qu'il désirait tant.

Combien de temps veux-tu être aimé
Est-ce que l'éternité suffit, est-ce que l'éternité suffit
Combien de temps veux-tu être aimé
Est-ce que l'éternité suffit
Car je ne te laisserai jamais, jamais tomber

Keith priait comme il ne l'avait jamais fait, lui qui n'était pas croyant implorait à cet instant toutes les divinités qu'il connaissait pour que Cory ouvre les yeux et reconnaisse son amour, pour qu'il lui revienne … parce que comment vivre sans l'amour de celui qu'on aime, sans sa présence et sa chaleur ? Sans ses yeux brillants de joie ? Sans la douceur de ses cheveux sur son torse le matin au réveil ?

Il avait tellement d'amour à lui apporter, à lui qui en avait tant manqué étant enfant. Keith, lui, n'avait pas eu conscience d'en manquer, il n'avait su ce qu'était l'amour qu'en rencontrant Cory et on n'est pas en manque de quelque chose que l'on ignore ; alors que Cory avait perdu l'amour des personnes qui auraient dû le chérir toute sa vie, et quand bien même ses parents adoptifs l'adoraient, ça ne serait jamais pareil.

Pendant que tu erres dans ce monde troublé
A la recherche de toutes les belles choses
Il te suffit de fermer les yeux quand tu es à des kilomètres de distance
Pour entendre ma voix comme une sérénade

Keith le connaissait si bien... Il savait tout de ses envies de voyager à travers le monde, de satisfaire ses envies de photographier la Terre entière, d'en faire un ouvrage encore jamais vu. Ils avaient longuement parlé tous les deux des endroits où ils iraient en premier dès qu'ils auraient des vacances.

Cory comprit enfin que si le brun lui avait promis tout ça c'était qu'il l'aimait vraiment, ce n'était pas des paroles en l'air pour lui faire plaisir.

Combien de temps veux-tu être aimé
Est-ce que l'éternité suffit, est-ce que l'éternité suffit
Combien de temps veux-tu être aimé
Est-ce que l'éternité suffit
Car je ne te laisserai jamais, jamais tomber

En réalité, il avait toujours été tellement persuadé que personne ne pourrait l'aimer qu'il avait pris l'amour de Keith pour une passade, une erreur du PDG qu'il rectifierait très vite. Il n'y avait pas cru du tout, il s'était complu dans cette histoire qui pour lui serait forcément éphémère.

Il tombait de haut mais paradoxalement il tombait dans le bon sens. Il découvrait qu'il avait fausse route sur toute la ligne et il prenait enfin conscience de l'immensité et de la ferveur de l'amour que l'australien lui portait depuis le départ.

Combien de temps veux-tu être aimé
Est-ce que l'éternité suffit, est-ce que l'éternité suffit
Combien de temps veux-tu être aimé
Est-ce que l'éternité suffit
Car je ne te laisserai jamais, jamais tomber

La chanson prit fin et ils durent se séparer. Jamais un si petit geste ne leur avait paru si difficile. A contrecœur, Cory s'arracha à l'étreinte du brun pour lui faire face. Ce dernier posa sa main sur la joue de Cory et y passa son pouce doucement. Lentement, hésitant et peu sûr de lui comme il ne l'avait jamais été, il s'approcha de lui et déposa ses lèvres sur les siennes, un simple contact, fugace et bref, puis se recula à nouveau. Ils se fixèrent en silence plusieurs secondes, Keith cherchant une approbation dans les yeux de l'américain. Il n'y lut que de la surprise, abattu, il baissa les yeux et sa main retomba mollement à ses côtés.

_ Joyeux anniversaire Cor', merci pour cette danse, dit-il d'une voix sombre.

Et avant que Cory n'ai eu le temps de comprendre ou de réagir, Keith avait disparu au milieu des autres danseurs. Il se passa lentement les doigts sur ses lèvres, se demandant si il avait rêvé ou si Keith l'avait bien embrassé avant de s'enfuir. Et d'ailleurs … pourquoi s'était-il enfui alors que pour la première fois Cory était prêt à se laisser aller ? Et pourquoi l'avait-il embrassé dans ce cas ? N'était-ce rien d'autre qu'un baiser d'adieu ? Keith abandonnait alors ?

Il lui avait fallu du temps, mais Cory venait de réaliser que si il ne bougeait pas très vite, il le perdrait définitivement alors qu'il venait enfin de comprendre la portée de son amour. Après tout, ne s'était-il pas souvenu de leur anniversaire ? Ce qui signifiait que c'était aussi le sien et il ne le fêtait même pas ! Et lui qui avait complètement oublié, perdu égoïstement dans sa propre douleur.

Keith marcha droit devant lui, évitant sans les voir les couples de danseurs et les divers obstacles sur son chemin. Il avait abandonné. Il avait échoué. Cette danse, cette chanson, c'était sa dernière tentative. Il comprenait ce que Cory avait voulu dire quand il l'avait quitté, se battre seul pour sauver un couple qui n'en était déjà plus un était épuisant et décourageant. Il avait été aveugle et négligent et aujourd'hui il en payait le prix. Il devrait réapprendre à vivre sans Cory. Mais comment ? …

Ses pas l'avait porté jusque dans l'entrée de l'hôtel et il sortit sans même y prêter attention. L'air humide lui sauta au visage et le vent s'engouffra dans le moindre interstice laissé par ses vêtements, les goutte de pluie tombaient si fort qu'elles lui piquaient le visage comme des milliers d'abeilles furieuses.

Il frissonna mais son état de dépression lui permis de faire presque abstraction de la tempête qui s'élevait. Et quand bien même, ce n'était qu'une bien faible punition pour avoir laissé passer sa chance de rendre heureux l'homme qu'il aimait plus que tout. Ce n'était pas de la vantardise, il savait qu'il aurait pu offrir à Cory tout ce qui lui manquait.

Il en était là de ses pensées, évitant soigneusement mais par automatisme les tourbillons de pluie de plus en plus violents quand il vit se dessiner devant lui la silhouette fantomatique du portail de l'hôtel.

_ Keith !

Il se retourna juste à temps pour voir l'américain venir vers lui, luttant contre le vent. Il avait l'air furieux pour le peu que Keith pouvait en voir.

_ Co... commença-t-il

_ Oh toi le suicidaire attends ton tour ! Gronda Cory. C'est à moi de parler mais pas ici ! Ramène ton joli petit cul à l'intérieur avant que je ne te laisse te noyer !

Keith était scotché par la vision de Cory, furieux, les cheveux dans le vent, les joues rougies par le froid, sa veste de costume qui volait derrière lui, il était sublime. Le brun secoua la tête pour reprendre ses esprits, tout autour d'eux devenait gris à cause du rideau formé par la pluie. Le vent ininterrompu faisait ployer les arbres fins qui bordaient l'allée menant au portail, menaçant de les arracher à tout instant. C'était une véritable tempête tropicale là ! Il fallait retourner à l'hôtel et vite, avant de ne plus retrouver le chemin. Quelle idée stupide il avait eu de sortir par ce temps. Enfin, ce n'était pas comme si il y avait vraiment réfléchi, il avait juste eu un besoin violent de sortir prendre l'air. Pour le coup s'était réussi !

Il s'avança alors que Cory était sur le point de se jeter à sa gorge pour l'étriper et l'attrapa par le bras. Il le tira à lui et finalement rebroussa chemin. Il avait bien envie de savoir ce qui avait poussé Cory à affronter ce déluge pour venir le chercher.

_ Mais … ! Commença Cory, furieux.

_ Il faut rentrer.

Bref, court, concis, Keith. Cory fulminait mais devait bien reconnaître que le brun avait raison. Il ravala sa colère le temps de rentrer à l'hôtel mais se promit de ne pas laisser passer cette histoire. Ils avaient des choses à régler !

Ils mirent plus de temps que prévu à retrouver leur route. Keith ne s'était pas beaucoup éloigné et le parc n'était pas si grand mais malgré la faible lumière qui leur parvenait des fenêtres de l'hôtel, ils ne distinguaient plus grand chose. Ce qui commençait à devenir un ouragan s'intensifiait, un épais rideau de pluie leur bouchait la vue, ils ne voyaient rien à cinq mètres devant eux.

En outre, ils étaient à peine couverts, ils n'avaient pas vraiment pris le temps de mettre un manteau ou autre avant de sortir et ils commençaient à geler sous les trombes d'eau glacée. Leur peau avait bleuie et ils ne sentaient plus les extrémités de leur corps. Cory sentit la fatigue des derniers jours rappliquer à vitesse grand V et certaines de ses blessures lui rappeler leur existence, il senti sa tête tourner puis il ne sentit plus rien.

Ce fut Keith qui tira Cory dans le hall de l'entrée, puisant dans ses dernières force, il le prit dans ses bras et se dirigea vers la réception où une hôtesse horrifiée par leur état s'empressa de leur remettre une clé et de prendre la commande de l'australien.

_ Vous n'aurez besoin de rien d'autre Messieurs vous êtes sûrs ? Demanda-t-elle, effrayée de les voir si frigorifiés.

_ Non, seulement ce que je vous ai demandé et après qu'on ne nous dérange plus. Merci.

Sur ces quelques mots, Keith recala le corps de Cory contre lui et entra dans l'ascenseur. Arrivé dans la chambre, il le déposa sur le lit et se dirigea dans la salle de bain. Il y fit couler un bain chaud et après s'être dévêtu, il en fit de même pour Cory qui était toujours sans connaissance. Nul doute que l'américain n'aurait pas apprécié et l'aurait accusé d'en profiter mais l'instant était critique si il voulait que le jeune homme attrape une pneumonie.

Ce ne fut que presque une heure plus tard, réchauffé et rhabillé, que Cory émergea de la torpeur dans laquelle il avait plongé pour se trouver au chaud dans un lit. Il cligna plusieurs fois des yeux, tentant de comprendre où il était et comment il y était arrivé. Assuré qu'il n'y avait aucun danger, il se releva et repoussa la couverture, dévoilant par là même le corps à ses côtés.

Keith était étendu près de lui, sur le flanc et le fixait sans rien dire. Cory se releva d'un bond et le fixa avec colère. Le brun s'y attendait et il sortit lui aussi du lit mais beaucoup plus calmement. Une fois face à Cory, il ne put qu'encaisser sans broncher le coup de poing qu'il se prit en pleine tête. Il aurait une belle marque c'était certain.

_ Crétin ! Qu'est-ce qui t'a pris ?!

Keith tiqua un instant, il ne savait pas trop si Cory parlait du baiser ou de sa fuite et à voir la tête que Cory faisait à cet instant, lui-même devait se poser la question. Le silence qui s'installa devint très vite pesant et Cory sentit sa colère vaciller devant le regard tendre de Keith sur lui. Il secoua la tête, toute cette histoire devenait ridicule, c'était en train de dégénérer. Il fallait y mettre un terme. Il soupira, une main sur son front.

_ Pourquoi m'as-tu invité à danser, toi qui déteste ça ? Pourquoi m'avoir embrassé pour t'enfuir après ? Je ne te comprend pas, j'ai l'impression que je ne te comprendrais jamais, finit-il d'une voix basse.

Keith soupira à son tour et s'approcha de Cory qui se retrouva acculé contre le mur de la chambre. Devant son air de chiot apeuré, Keith arrêta son avancée.

_ Écoute Cory, on a un gros problème de timing. On est jamais en phase. Il faut absolument y remédier. Tout ça a pris une telle ampleur … J'ai parfaitement conscience que tout est de ma faute, j'ai été aveugle et négligent et je t'ai perdu pour ça. Quand j'ai enfin retrouvé la raison, c'est toi qui ne voulait plus croire … Tout ce que je veux savoir maintenant c'est si il est vraiment trop tard, si je t'ai définitivement perdu ? Demanda Keith une once d'espoir dans la voix.

_ Tout à l'heure … ce baiser … c'était un adieu ? L'interrogea Cory sans répondre à sa question, les yeux baissés.

_ Oui … lui avoua-t-il, tu n'avais eu aucune réaction et j'en ai déduit qu'il était trop tard, mais puisque tu m'as suivi …commença-t-il avant de s'avancer précipitamment et de relever le visage de Cory, se collant à lui. Dis-moi que tout n'est pas perdu, que tu m'aimes encore, le pria-t-il d'une voix douloureuse.

_ Je n'ai jamais cessé de t'aimer Keith, lui répondit le cuivré avec un calme qui n'était qu'apparent.

La proximité de l'homme, son odeur, son corps, le rendaient trop fébrile pour réfléchir correctement. Les souvenirs de leur danse lui revinrent avec force et il dû prendre sur lui pour ne pas céder tout de suite, de nombreuses choses devaient être éclaircies.

_ Le problème n'était pas là, reprit-il le plus calmement possible. Mes sentiments pour toi n'ont jamais changé, sinon peut être qu'ils sont devenus de plus en plus forts, mais ils ont toujours été là, dit-il en mettant la main sur son cœur. Le problème est que ma confiance en toi avait disparu. Tous les moments où j'ai eu besoin de toi, les moments où j'étais seul, triste, fatigué, tu n'étais pas avec moi mais à ton bureau avec elle et quand j'ai voulu t'ouvrir les yeux tu as refusé de le voir. C'est ça qui nous a détruit.

_ Tu dit « avait disparu », puis-je en déduire qu'elle est revenue ?

Keith ne savait plus trop quoi penser mais il ne pouvait s'empêcher d'espérer.

_ Disons que tu as montré une facette de toi ces derniers temps qui ne m'a pas laissé indifférent. Je dois admettre que toutes tes attentions, même si elles m'ont beaucoup déstabilisé au départ, m'ont fait énormément plaisir, avoua-t-il les yeux baissés et les joues rouges. Je ne pensais pas que tu pouvais être ainsi, tellement que ça m'a fait peur et il y a peu je songeais encore à partir mais … je crois que j'aime encore plus ce nouveau toi et que je serais finalement incapable de m'éloigner, conclu-t-il d'une petite voix.

Il ne bougea plus et laissa à Keith le temps de comprendre. Ce dernier le fixa, n'osant croire à ce qu'il voyait dans les yeux si doux qui lui faisaient face, dans ce petit sourire hésitant. Il l'attrapa par la taille, relâchant son visage pour le serrer fort contre son torse. Il enfouit sa tête dans son cou, se pliant un peu car Cory était légèrement plus petit.

_ Cory, dit-il la voix brisée par l'émotion. Cor'... Je ne te mérite pas, je t'ai tellement fait souffrir … Je te jure de ne plus jamais te laisser, je préférerai mourir que de revivre ces derniers mois. Je t'aime tant, j'ai l'impression que l'amour que je te porte est si fort que tout le monde le voit, je n'aurai jamais pensé que quelqu'un puisse le mettre en doute un jour et surtout pas toi, ce n'est pas que je te prenais pour acquis, c'est juste que mon amour pour toi me semblait si évident, si visible que je …

_ Stop, le coupa Cory d'une voix douce et rassurante. Ne te justifie pas, j'ai compris. Je suis désolé d'avoir douté, moi aussi je nous ai fait souffrir alors arrêtons là nos excuses lamentables. Je ne veux retenir qu'une chose de tout ça, nous nous aimons et nous sommes très cons.

Disant cela, l'américain s'était un peu retiré de l'étreinte de son compagnon pour le regarder dans les yeux et lui faire un magnifique sourire. Keith porta ses mains au visage de Cory une nouvelle fois et le caressa, il semblait ne pas y croire. Il avait la chance de le tenir à nouveau dans ses bras et c'était effectivement la seule réalité importante. Il se pencha légèrement pour l'embrasser.

Cory se tendit, des centaines de papillons tourbillonnaient dans son ventre, ses jambes tremblaient comme si c'était leur premier baiser. Il attendit impatiemment, yeux fermés, que les lèvres de son compagnon se posent sur les siennes mais un coup sec à la porte les fit sursauter.

_ Service d'étage !

Keith se détacha après un coup d'œil d'excuse et un léger grognement de frustration et alla ouvrir. Il revint deux minutes plus tard avec un plateau sur lequel se trouvait deux tasses, un pot de chocolat chaud et des petits gâteaux. Cory éclata de rire devant la mine renfrognée du brun et s'extasia à nouveau devant sa prévenance.

_ Tu vois, c'est justement de ce genre d'attentions dont je parlais, tu n'y aurais jamais pensé avant.

_ Je n'en avais pas besoin, tu le faisais pour nous deux. C'est ton absence qui me l'a fait réalisé. Mais ne t'inquiète pas, à partir de maintenant, il en sera toujours ainsi. Tu as faim ?

Cory pencha la tête sur le côté avec cette moue si adorable qu'il faisait quand il était gêné ou ému, se mordant à moitié la lèvre inférieure. Il devait le faire exprès, c'était pas possible autrement, il devait forcément savoir que cela donnait à Keith envie de lui sauter dessus. Lui qui faisait des efforts pour ne pas avoir l'air obsédé et pour s'occuper d'abord de la santé de son compagnon … Il le mettait au supplice.

Cory le savait, en effet, mais ce n'était pas une forme nouvelle de torture qu'il expérimentait. Il était tout simplement réellement gêné. Il retombait amoureux de Keith et il se faisait l'effet d'un adolescent avant sa première fois. Il ne savait plus quoi faire, lui qui avait pourtant pas mal d'expérience. Il se contenta de secouer la tête pour refuser. Il n'aurait rien pu avaler tellement il avait la gorge serrée.

_ Très bien, je vais les mettre au chaud pour tout à l'heure, si tu changes d'avis, répondit le brun en remettant le plateau sous cloche.

Une fois fait il se tourna à nouveau vers Cory et s'approcha de lui. Il fallait mettre un terme à cette tension insupportable et pour ça il ne voyait qu'une seule solution. Il l'embrassa. Sans précipitation, avec délectation, comme si il goûtait sa bouche pour la première fois. Ses lèvres papillonnaient sur celles du cuivré, sa langue taquinait sa jumelle. Encore et encore, ne donnant qu'un avant-goût de la nuit. Sa main passait et repassait sur son ventre, sous sa chemise à moitié reboutonnée depuis le bain qu'il lui avait donné, effleurant sensuellement la peau fine et contractée de ses abdos. Quand le baiser prit fin, Keith se recula pour le contempler et voir sa réaction, laquelle ne se fit pas attendre.

_ Encore, le supplia Cory.

Le regard de Keith se fit prédateur, il n'avait plus de doute. Il reprit ses lèvres, toujours sans précipitation aucune, au contraire il prenait tout son temps, se frottant lascivement contre ce corps qu'il savait si brûlant. Il voulait sentir l'excitation monter en lui. Ce soir, il se donnerait complètement à lui, de tout son corps, de toute son âme. Il lui ferait oublier tout ce qui les avait mené jusque là. Il lui ferait perdre la tête jusqu'à ce qu'il se perde lui-même. Alors qu'il sentait son compagnon durcir contre lui, il laissa un instant ses lèvres.

_ Sur le lit.

Net, précis, comme toujours. Il n'attendit pas la réponse et l'entraîna sur leur couche. La couverture avait été repoussée au pied du lit un peu plus tôt par l'élan de Cory, dévoilant des draps très accueillant.

Ce dernier se passa inconsciemment la langue sur les lèvres, il avait la bouche sèche d'un coup. Son amant l'attrapa et le coucha sous lui dans un mélange de précipitation et de douceur et vint se placer à quatre pattes au-dessus de lui. Il le regarda sans rien faire, son corps si proche du sien sans pour autant le toucher.

Keith le vit ouvrir la bouche mais posa vite un doigt sur les lèvres si douces. Pas de mot. Cory sourit. Il aimait beaucoup cette idée, après tout ils avaient suffisamment parlé. Il agrippa la nuque du brun et l'attira à lui délicatement. Il se laissa faire mais ne resta pas inactif pour autant. Il enleva les encombrants vêtements de son amant et caressa doucement son torse.

Ses lèvres entamèrent un circuit qu'elles connaissaient par cœur sans pour autant s'en lasser. Elles glissèrent le long du cou, suçotant et mordillant la peau. Elles freinèrent un peu en arrivant près des boutons de chaire, la langue du brun les titilla, joua avec un moment puis repartie sur le chemin menant au nombril, laissant derrière elle une traînée de feu vif et de nombreux gémissements.

Il remonta au moment où Cory se cambrait pour soulager la pression de son bas-ventre. Ce dernier laissa échapper un grognement mécontent au brusque changement de direction de son amant.

Keith ne put retenir un sourire qu'il sentit parfaitement sur sa peau et il planta ses ongles dans ses épaules pour se venger. Avait-il prévu que ce petit geste ne ferait qu'exciter d'avantage le brun ?

Celui-ci cessa donc ses aller-retour sur le torse imberbe et si appétissant de l'américain et remonta ravager sa bouche quand soudain Cory recula pour s'arracher à ses lèvres. Étonné, ce dernier se laissa tout de même faire.

_ Hummm … attends … Keith … hummm … bafouilla-t-il entre deux baisers.

Keith cessa donc tout mouvement, curieux et inquiet à la fois. Cory reprit sa respiration et planta ses yeux dans les siens avant de lui faire ce petit sourire si sensuel qu'il ne faisait qu'à lui.

_ Qu'y-a-t-il ? Demanda finalement l'australien devant le silence de son homme qui s'éternisait.

_ J'ai juste oublié de te dire quelque chose avant …

Un autre petit silence mais qui devint vite pesant. Sentant l'angoisse de Keith monter en flèche, Cory mit fin au supplice.

_ Joyeux anniversaire lover mine, lui murmura-t-il d'une voix rauque.

_ Idiot, soupira Keith, soulagé.

Il avait craint le pire. Si Cory lui avait demandé de tout arrêter, il en serait mort de frustration. Les caresses reprirent alors mais gardèrent pour cible le haut du corps. Leurs boxers, seuls vêtements qui leur restait, les gênaient mais aucun ne voulait céder, c'était à celui qui exciterait le plus l'autre. Le premier qui se jetterait sur son amant pour le mettre à nu aurait perdu. Et Cory perdit. Il était à bout, et cela depuis plusieurs mois.

D'un mouvement souple, il inversa leur position. Il fit glisser le sous-vêtement le long des cuisses musclées alors que son amant avançaient déjà ses mains pour lui faire subir le même traitement.

Keith ne se rendait même plus compte de ce qui se passait. Cory avait pris les commandes et bien comme il faut ! Dès qu'il fut parvenu à débarrasser Keith de son boxer, sa bouche et ses mains continuèrent leur progression vers le bas de son corps. Elles caressèrent son membre avec déférence et application. Alors que ses mains s'affairaient sur le haut de ses cuisses, taquinant par moment ses bourses avant de repartir tout aussi vite sur les plis de l'aine, sa langue s'ingéniait à parcourir chaque millimètre de son sexe fièrement et douloureusement dressé. Jamais Cory n'avait été si excitant, si torride.

Les mains de Keith se perdirent malgré lui dans les cheveux lâchés de son amant. Il les caressa longuement, se repaissant de leur douceur et encourageant ainsi Cory à le prendre plus loin dans sa bouche. Ce fut quand il fit l'erreur de baisser les yeux vers son tourmenteur et qu'il le vit, nu entre ses cuisses, son sexe entre ses lèvres pleines et les yeux rivés sur lui qu'il se tendit dans un cri de jouissance et se libéra. Ses hanches retombèrent sur le matelas et il resta là, haletant, alors que Cory remontait vers lui tout sourire et se léchant les lèvres comme un chat gourmand.

Keith mit du temps à revenir de son orgasme et quand il le fit il tomba sur la vision de son amant, toujours au-dessus de lui et le regardant avec tendresse et amusement.

_ Tu te remets my love ?

D'un coup de rein puissant, Keith inversa leur position et le coinça sous lui.

_ Petit diable, gronda-t-il, tu ne perds rien pour attendre.

_ J'espère bien, lui répondit Cory d'une voix diablement sexy.

Keith l'embrassa sans plus attendre et reprit ses caresses où Cory les avait stoppées un moment plus tôt. Cette fois, il ne s'arrêta pas aux hanches et descendit, plus bas, toujours plus bas. Il n'avait pas oublié les points érogènes de son amant et ce fut sans attendre qu'il commença à lécher délicatement le creux du genoux gauche de Cory.

Immédiatement, celui-ci se mit à ronronner de contentement. Ses doigts agrippèrent les draps à les déchirer et il gémit. Keith le rendait fou, il se vengeait délicieusement et Cory savait qu'il ne tiendrait plus longtemps.

_ Keith … je t'en prie … supplia-t-il.

S'interrompant deux secondes, Keith releva la tête et le contempla, une lueur de malice au fond des yeux.

_ Hum ? Que désires-tu ?

Cory fronça les sourcils. Son amant était devenu un vrai tortionnaire. Voyant qu'il ne répondait pas, Keith reprit sa torture et passa au genou suivant.

_ Ah ! Keith ! Non … je t'en prie … je ne veux pas … comme ça … suce-moi ...

Le brun releva la tête et put constater qu'effectivement Cory était sur le point de jouir alors qu'il ne l'avait même pas encore caressé. Cela était flatteur certes, mais il comprenait parfaitement le point de vue de son homme.

Cory avait besoin de sentir les mains du brun sur lui, il lui avait trop manqué pour se contenter des caresses et effleurements que le brun lui prodiguaient. Il avait besoin de plus de contact, de plus de toucher.

Accédant à sa supplique, Keith entreprit de remonter vers son membre rouge de désir et de lui octroyer les mêmes attentions qu'à ses genoux et passa sa langue sur toute la longueur sans prévenir Cory qui hoqueta sous cette soudaine mais si affolante caresse.

Après l'avoir embrassé, léché, mordillé, Keith le prit entièrement en bouche et se délecta des plaintes de jouissance s'échappant de la gorge de son amant. Ce dernier ne fut pas bien long à venir tant il était excité et Keith recueilli à son tour la semence douce-amère de son amant.

Ils se câlinèrent un instant, tous les deux étendus l'un contre l'autre, savourant un moment de pause et laissant le désir les regagner doucement. Keith, sur le dos, passait lentement sa main dans les cheveux éparpillés sur son torse. Il en avait rêvé des nuits entières, pendant des mois et encore maintenant, malgré ce qu'ils venaient de faire, il avait du mal à réaliser que cette fois tout était bien réel et pas seulement le résultat d'un de ses fantasmes.

Il en était de même pour Cory qui ne se lassait pas de tracer des arabesques sur le torse musclé et si chaud du brun. Il suivait des lignes imaginaires, visibles de lui seul en chantonnant un air que Keith était sur d'avoir déjà entendu mais dont il était incapable de se souvenir.

Puis, peu à peu leurs caresses, se firent plus lascives et reprirent de la vigueur. Tout doucement, ils reprirent leurs jeux érotiques, visant uniquement à les mener au septième ciel. La flamme s'attisa à nouveau et Keith se cala dans le dos de l'américain, en profitant pour lui prodiguer des caresses bien précises afin de le préparer à sa venue. Il savait que c'était la position préférée de Cory, étendus tous deux sur le flanc, collés l'un à l'autre, Cory cambré au maximum de façon à pouvoir tourner la tête et ainsi voir son amant au moment de l'orgasme.

Lorsque Cory sentit son brun en lui jusqu'à la garde, il laissa échapper un soupir de contentement et s'étira effectivement en arrière, provoquant le rapprochement de la totalité de leur corps. Il sentit Keith frémir aux frottements occasionnés par ce mouvement et s'en réjouit grandement. Il avait décidé un peu plus tôt qu'il se donnerait à lui comme jamais. Il se souciait peu à cet instant de son propre plaisir, il s'était fixé un but : faire perdre toute retenue à son amant, lui donner plus de plaisir qu'il n'en avait jamais eu. Défi oh combien ambitieux quand on connaissait leurs exploits passés !

Toujours allongé devant lui, il mit ses hanches en mouvement, il ne voulait pas que le brun fasse tout le travail. Il voulait participer pleinement à leurs ébats, ne pas se contenter d'un rôle de passif. Ces nouveaux mouvements accentuèrent la pénétration et il sentit le sexe de son amant entrer plus profondément en lui, aller et venir de plus en plus vite, comme si Keith ne pouvait plus résister et pourtant, Cory savait très bien qu'il se contrôlait parfaitement et que l'heure de la jouissance n'avait pas encore sonnée.

Il était très rare qu'ils s'en tiennent à une unique position et Keith lui démontra encore une fois qu'il le connaissait parfaitement car, alors qu'il était sûr de ne pas pouvoir se retenir plus longtemps, ce dernier se retira et lui mordilla gentiment l'oreille pour lui signifier de se retourner. Ce que Cory fit sans attendre et avant même qu'il ai put prononcer un son, un corps recouvrit le sien et ses lèvres furent happées avec un mélange de sauvagerie et de désir qui lui coupa le souffle. Profitant de cet instant de trouble chez le cuivré, Keith le pénétra à nouveau et le fit cette fois se tendre à s'en déchirer les muscles en tombant directement sur sa prostate, Cory haletant sous la jouissance.

Il continua sur ce rythme un moment mais n'y tenant plus, il accentua le balancement de ses hanches et Cory se mit en mouvement également, allant à nouveau à sa rencontre et ce fut dans un ultime coup de rein qu'ils jouirent ensemble et atteignirent les portes de ce monde qu'ils pensaient avoir perdu à jamais.

Les deux corps épuisés retombèrent ensemble, l'un sur l'autre, sur le lit et Keith roula sur le côté pour se retrouver sur le dos, attirant Cory à lui. Il le serra fort comme si il voulait fusionner avec lui, ne faire plus qu'un pour toujours. Cet homme contre lui avait ouvert les portes d'un univers dont il n'aurait même pas soupçonné l'existence. Un univers rempli d'amour et de partage. Son enfance ne l'avait pas préparé à affronter ça et il lui avait fallu du temps pour ne plus s'y perdre, pour y trouver sa place et maintenant qu'il y était, il comptait bien y rester pour l'éternité.

_ Je t'aime, souffla-t-il sans vraiment s'en rendre compte.

Lui-même ne savait même pas si les mots avaient vraiment franchi ses lèvres ou si il les avait juste pensé très fort. Mais, quand Cory se redressa pour planter ses yeux dans les siens, lui dédiant le plus beau des sourires, il sut qu'il les avait effectivement prononcés.

_ Je t'aime aussi... On a failli faire une belle connerie hein ? Demanda Cory d'une voix douce.

Keith caressa son visage, balayant quelques mèches de sa frange au passage.

_ Hn. Mais on s'est rattrapé à temps. Je me suis rattrapé à temps, se reprit-il. Pardonne-moi Cor', mon ange …dit-il en posant son front contre le sien.

Cory releva la tête, étonné, les sourcils levés.

_ De quoi voyons ? L'interrogea-t-il sincèrement

_ D'avoir mis tout ce temps pour réaliser à quel point tu es important dans ma vie, bien plus que n'importe quelle réunion ou n'importe quel contrat, à quel point ma vie sans toi est juste inutile.

Cory se blottit contre son homme, sa tête sur son torse, ses bras autour de sa taille.

_ Il n'y a rien à pardonner. Je ne veux plus y penser maintenant. Aime-moi encore, susurra-t-il en prenant la lèvre du brun entre ses dents pour la mordiller doucement.

_ Tu es insatiable, répondit-il à même sa bouche.

_ De toi toujours …

Plus tard, ils finiraient les discussions laissées en suspens, ils se décideraient pour tout reprendre à zéro et repartir sur de nouvelles fondations, qu'ils comptaient bien rendre inébranlables cette fois. Cory arrêterait sa recherche d'appartement et remercierait Quincy et Shawn. Keith éclaircirait les choses avec Hampton et apprendrait que le directeur avait décidé d'envoyer Sheryl dans une maison de repos médicalisée, espérant qu'une personne avec les diplômes adéquats ferait entendre raison à sa fille.

Plus tard, ils feraient tout ça oui … mais pour l'instant, leurs projets étaient tout autre.

_ Oh ! Keith ! Encore !

C'est tout pour cette fic, sans prétention je vous avais prévenu mais j'espère que ça vous aura plu tout de même un peu.

;-)