Une voix grave s'éleva :

« Bon, il faudrait vous calmer, nous allons vous placer dans quelques instants. Je vous rappelle tout d'abord les règles : vous n'avez pas à courir, ni à chahuter dans les couloirs. Dès vingt et une heures, toute nuisance sonore sera bannie. Et, le plus important... Vous devez vous couchez à », et le professeur de sport s'arrêta là.

Des clameurs s'élevèrent dans le réfectoire, je crois bien que les petits camarades de sport d'hiver n'appréciaient pas ce suspens... Guillaume, qui se trouvait juste à côté de moi, me mit un coup de coude et me désigna nos professeurs qui chuchotaient tout près de nous. Il approcha sa bouche de mon oreille :

« Marc, écoute bien, il faut qu'on fasse tout ce qu'on peut pour être dans la même chambre, ils veulent me coltiner Clément Macor. Il y a trois chambres de six lits, deux de huit, et deux de trois lits. Il faut qu'on soit placés les derniers, parce que s'ai bien compris, il remplisse les plus petites chambres en dernier, et nous sommes seulement trente neuf, pour quarante chambres. Il y aura une chambre où il restera un lit, et ça sera la nôtre.

— D'accord, mais, t'as une idée de comment on s'y prend ? l'interrogeai-je.

— On va aller voir dans les toilettes si nous y sommes... Et comme nous ne serons pas là quand ils nous appelleront, ils reporteront nos placements à la fin.

— Ah, c'est que ne t'es pas con quand tu veux ! lui dis-je avec un sourire.

— Merci qui ? Allez, viens me faire un bisou mon chou !

— Merci Guillaume, je te fais un bisou, mais seulement si tu ne m'appelles plus mon chou...

— Rah, cette jeunesse de nos jours ! Ok, je ne t'appelle plus mon chou », se ravisa-t-il.

Guillaume me tendit la joue et la main ; je lui fis son bisou et lui tendis mon poignée pour qu'il m'amène dans notre « planque ». Une fois arrivés, nous nous assîmes contre le mur carrelé. A notre droite, il y avait un grand miroir qui couvrait une grande partie de la longueur de la pièce ; on y apercevait notre reflet. Guillaume avait encore le regard dans le vide. Je me demandais sur quelle planète il vivait... Il était beau. Je l'enviais d'être si attirant.

Et je le détestais pour ça ; mais Dieu que je l'adorais ! Il avait des cheveux assez courts qui formaient des sortes de boucles, d'un châtain tirant sur le brun. Ses yeux dont la teinte était la même que ses cheveux, étaient encadrés de cils fins, qui lui donnaient un regard profond. Sous ses orbes couleurs chocolat au lait ses joues s'ornaient de petites tâches de rousseur qui couraient sur son nez mutin, et un peu partout sur son visage.

Ses lèvres rosies par la chaleur ambiante bougeaient au rythme des paroles du Colonel Reyel : il adorait cette chanson, « Toutes Les Nuits ». Si seulement il pouvait les chanter pour... Je m'égare. Quant à moi, c'était tout autre chose. J'avais la même couleur de cheveux, et d'œil, mais c'était différent. Je n'avais pas ces tâches rousseurs, je n'avais pas ce regard si charmeur. J'avais des cils très épais, mes cheveux lisses me tombaient sur les épaules, et me cachaient les yeux la plupart du temps, me valant des moqueries continuelles. Mais je pouvais mes cacher des autres de cette manière, alors, je n'allais pas me couper les cheveux de si tôt.

Mon nez était un peu plus plat que le sien, m'alourdissant encore le visage, et mes lèvres étaient plus courtes donnant l'impression que je faisais la grimace continuellement...

Je relevai les manches de mon sweat ; les bâtiments étaient vraiment surchauffés...

« Tu sais Marc, je crois que ça va me faire du bien d'être rien qu'avec toi pendant ces quinze jours. Plus de parents, plus de frère, plus de profs chiants, plus de l'ambiance lourde du collège. Et au moins, je sais que je serai avec un vrai ami, me sourit-il.

— Oui, je pense qu'à moi aussi, ça va me faire du bien un peu de recul. Merci pour le compliment hein, lui répondis-je en lui mettant un léger coup d'épaule.

— Quel compliment ? T'entends des voix mon pauvre ami !

— Et mon cul, c'est du poulet ? lui dis-je avec un air puéril.

— Tu ne veux pas me laisser goûter alors, je ne peux pas te dire », me rétorqua-t-il en me tirant la langue.

Il allongea ses jambes et s'étira, puis bascula pour mettre sa tête sur mes genoux en repos sur ses bras. En un mouvement brusque, il me mit un coup de coude dans mon entre-jambes me faisant me tordre de douleur.

« Aaaaaaaaaaïïïïïïe !

— Désolé William, je suis désolée, pardon. Excuse-moi ! Tu me pardonnes ? il s'agitait dans tout les sens.

— Bien sûr que je te pardonne ! Allez, repose donc ta tête », lui indiquai-je en montrant mes jambes.

Il reposa sa tête sur moi, évitant soigneusement de bouger trop rapidement son bras droit. Il recommença à chantonner, mais je n'arrivais pas à déterminer de quelle chanson il s'agissait.

« Tu peux chanter un peu plus fort s'il te plait, lui demandai-je un peu gêné de ma requête.

— Bien sur, et il se mit à chanter.

— Waouh, c'est de qui ? l'interrogeai-je encore embrumé de belles paroles.

— De moi, ça sort de ma tête.

— Guillaume, je te l'annonce, t'as un talent fou, et tu as une voix en or, m'exclamai-je.

— C'est bien. Mais non. »

Il ne me croyait pas, il niait toujours avoir une beauté certaine, une belle voix, un talent à créer n'importe quoi à partir de rien et d'une pensée. Il fallait que je me l'avoue. Oui, j'étais extrêmement jaloux de lui, mais pas que...

« Tu es génial Guillaume, et ne le nie pas, sinon, j'te boude ! m'exclamai-je.

— Pourquoi ? Hein pourquoi est-ce que je suis si génial ?

— Et bien, tu es beau, intelligent, tu as beaucoup de talent, un humour complètement décalé, tu as un accent à tomber par terre, une voix suave à souhait, des yeux d'une profondeur abyssale, des taches de rousseurs craquantes, un corps de rêve, des mains fines qui se glisseraient à la perfection dans mes... Dans n'importe quelles mains ! Une bouche fine qui sait bouger comme il le faut. Un dos à baver... Tu es parfait Guillaume. Pas comme moi, » finis-je en me redressant et en baissant la tête pour me cacher le visage.

Je sentis sa tête bouger et se tourner en ma direction, il posa une main sur ma joue, et détailla mon visage, puis, il passa ses doigts sur mon sweat et les descendit pour toucher ma peau.

« Toi aussi, tu es beau, intelligent, marrant, talentueux ; toi aussi, tu as une belle voix, un accent mignon, un regard profond... Toi, toi, toi aussi, tu es parfait, à ta manière, comme je le suis à la mienne.

— Tu penses réellement ce que tu viens de dire ? Dis-moi la vérité, quémandai-je.

— Toi aussi, tu es beau, intelligent, marrant, talentueux ; toi aussi, tu as une belle voix, un accent mignon, un regard profond... Toi, aussi, tu es parfait, à ta manière, comme je le suis à la mienne, me répéta-t-il plus lentement avec un sourire.

— Tu radotes un peu...

— Beh, j'ai accédé à la requête de mon meilleur ami... »

Il avait un grand sourire et me regardait droit dans les yeux. Il nous arrivait de rester des dizaines de minutes à seulement se mirer. On n'avait pas forcément besoin de mots pour se comprendre ; on n'avait pas besoin de se décoder, on se saisissait grâce à nos mouvements et nos regards. Son sourire disparut, et son regard se fit de plus en plus intense, ses pupilles se dilatèrent.

La seule pensée qui me vint à l'esprit, c'était : « Putain, sa maman la catin, il est trop sexy ce mec ! ». Instinctivement, ma main alla caresser ses cheveux, et il ferma les yeux dès le premier contact. Notre « relation » était jugée bizarre par tous nos amis, qui nous trouvaient très (trop ?) proches. Mais moi je me plaisais dans cette amitié qui était étrange. Je crois que tout ce désir qui n'avait pas lieu d'être allait me rendre dingue...

« La concupiscence que tu m'inspires me rendras fou un jour. »

J'avais fait exprès d'utiliser un mot compliqué pour qu'il ne comprenne pas tout à fait. Et à la vue de son air perdu, j'avais réussi mon coup. J'aimais bien le faire s'embrouiller : il avait un air sémillant qui me faisait rigoler. Donc, là, je riais comme un tordu devant ses yeux tout écarquillé.

« Laisse tomber ! Et, dis, on ne pourrait pas retourner dans la salle maintenant ? Je pense qu'ils ont fini, lui dis-je.

— Oui, ça fait une vingtaine de minutes qu'on est là. Et puis, si tu veux me jarter, tu le dis ! Et puis, je n'ai pas envie de partir. Je suis vachement bien dans cette position moi ! s'insurgea-t-il.

— Mais non plus je ne veux pas partir, mais je n'ai pas envie qu'on se fasse engueuler non plus, lui indiquai-je.

— Mouais, c'est ça. Allez, on y va. »

Et il se leva, puis me tendit une main pour « aider à bouger mon gros cul » dixit Guillaume.

Arrivés dans la grande salle, il restait tout les professeurs et un groupe de trois filles : Jessica, Eléonore, et Hannah. Eléonore, c'est la pote qui me sort des mots bizarres. Les filles et les profs nous regardèrent d'un air de dire : « Mais où qu'c'est qu'ils étaient encore ?! ».

Les profs nous interpelèrent :

« Mais où étiez-vous ? On vous a appelez plusieurs fois, et les filles vous ont cherchés partout !

— On a essayé de trouver les toilettes, et nous nous sommes perdus à l'aller, et au retour... indiqua Guillaume.

— Vous êtes doués tout les deux ! dit M Etchegarray.

— Et beh, oui... On tient l'un de l'autre, hein mon Marc ! renchérit Guillaume.

— Bon, vous avez la dernière chambre, vous serez juste tout les deux. C'est la chambre numéro 7, tenez, votre clé, et, vous êtes chanceux, vous avez votre propre salle de bain, comme les filles », finit le prof en désignant les glousseuses.

Guillaume attrapa les clés, tandis que j'allais chercher nos valises. Alors que nous arrivions devant notre chambre, Eléonore me sauta dessus, me tint le cou, et m'embrassa la joue. Elle me glissa à l'oreille :

« Bonne chance mon Marc, ça sent l'affection, et surtout : ça pue le sexe à plein nez. Bisous, bonne nuit mon Gui-gui ! »

Guillaume me regarda, puis regarda Eléonore en m'interrogeant du regard :

« Cherche pas, elle est attaquée... C'est le froid. »

Il hocha la tête, et ouvrit la porte.

Et là, je me rendis compte que j'avais une putain de chance. On dormait dans la même chambre, on était deux, seulement deux. On avait été les derniers à être placés. Ca me faisait un tel plaisir. Il était avec moi, je suis content, heureux, euphorique, tout ce que vous voulez. J'allai enfin prendre mon courage à deux mains et lui avouer à quel point je suis amoureux de lui… Il se retourne vers moi. Son torse... J'en baverais s'il n'était pas là. Il prit parole d'une voix de fille :

« Tu me regardes mon chou ?

— Arrête de m'appeler mon chou, ça me stresse, » mentis-je.

J'aimais ça, j'adorais quand il m'appelait « mon chou ». Ca imposait une certaine ambigüité, il me paraissait irréel quand il faisait semblant d'être une fille, il croyait que c'était l'allure qu'il avait qui m'excitait, mais c'est la lueur que je décelais dans son regard.

J'aimais tellement son regard charmeur, ses paroles qui m'envoutaient, il avait un accent bien du sud ouest qui en assassinait plus d'un ; mais moi, je me damnerais pour sa voix. Il avait un très léger bégaiement, presque indécelable, mais quand il parlait trop vite ou en continue pendant un certain temps je l'entendais buter sur quelques mots.

Alors qu'il se mettait sous sa couette, je commençai tout juste à me changer je me mis dos à lui et enlevait mon haut et mon pantalon. Je me détestais, je n'aimais pas mon corps, je n'étais pas beau.

Une main se posa dans le bas de mon dos, me faisant sursauter et me retourner. Je me retrouvai nez à nez avec Guillaume. Il ouvrit la bouche, puis se ravisa, et se retourna. Alors qu'il arrivait juste devant son lit qui été placé à un mètre de moi, il se tourna une nouvelle fois, et commença à murmurer :

« Marc, qu'est-ce que tu as ? Pourquoi tu ne parles pas, pourquoi tu ne souris pas ? Pourquoi tu n'es plus toi ? Où es-tu passé… Je ne sais même plus où venir te chercher. Je ne sais pas ce qu'il faut que je te dise…»

Il s'était rapproché de moi, j'me sentais assez mal… J'avais froid, car rappelons que je ne porte qu'un boxer, et j'avais chaud, parce que son regard se faisait de plus en plus baladeur et insistant. Il me scrutait, et ça me donnait des frissons. Je m'asseyais sur mon lit, pour éviter de m'écrouler par terre comme une grosse merde, il faut le dire. Je ne tenais plus sur mes jambes.

« Dis-moi Marc, tu es mon meilleur ami, tu sais très bien que tu peux tout me dire… murmura-t-il encore. S'il-te-plait, je hais te voir comme ça, tu n'as pas l'air heureux. Tu ne l'es peut-être pas ? Qu'y a-t-il ?

— Tu es prêt à tout ?

— Oui, acquiesça-t-il. Dis-moi tout. Je suis là, je t'écoute.

— Alors, c'est, en fait… Je… bafouillai-je, c'est que, enfin, je... Suis, je… Guillaume, ça fait longtemps que, que… Que je t'aime, que je t'aime d'amour Guillaume. »

Il resta interdit pendant une, deux, ou même peut-être trois minutes. J'étais assez impressionné du mal que j'avais eu à lui dire. Mais, j'avais bien fait, ou mal, parce que nous restions pendant quinze jours dans la même chambre… Si il le prenait mal, pendant deux semaines, le silence serait lourd, et le temps long, dans cette chambre.

Il faisait réellement froid, alors voyant qu'il ne faisait rien, je me retournai et pris mon tee-shirt-pyjama pour l'enfiler. En me tournant de nouveau vers Guillaume, je perdis tous mes moyens ; il me regardait avec des yeux intenses, les pupilles dilatées au maximum. J'peux devenir fou ?!

Et je n'ai pas vraiment compris la suite, ses lèvres se sont posées sur les miennes, en un baiser doux, et léger, j'ai à peine eu le temps de m'imprégner de la saveur de mon Adonis…

Il me regarda, sourit et pris parole :

« J'voulais savoir comment c'était, d'embrasser la personne qu'on aime. »

Je m'assis sur mon lit, et Guillaume s'avança encore plus contre moi, et mis ses mains derrière mon cou avant de murmurer :

« Moi aussi je t'aime. Et je savais ce que voulais dire concupiscence ; et tu as pensé à voix haute. J'ai entendu ce magnifique : « Putain, sa maman la catin, il est trop sexy ce mec ! ». »

Il sourit, moi aussi. J'étais bien. J'étais heureux.

Il posa ses mains sur mes hanches, à travers mon tee-shirt, je sentais la chaleur de ses doigts qui se baladaient sur mon torse. Il reposa ses lèvres sur les miennes, pressa sa bouche contre la mienne, quémanda de sa langue à rencontrer la mienne…

Et quand sa langue toucha pour la première fois la mienne, je reçus un frisson dans le corps, je crus que tout allait se finir, que c'était la fin, que j'allai basculer.

Il me poussa à m'allonger sur le lit en appuyant sur mes épaules, tout en continuant de m'embrasser. Il se mit à me déshabiller, ce fut une longue torture pour moi car il frôlait ma peau sans jamais la toucher réellement. Et se détachant de moi, il se leva et retira son tee-shirt et son boxer.

Je fermai les yeux, essayant de retenir cette image pour le temps qu'il me restait à vivre. Puis, je les rouvris. Il venait de se mettre sur moi, il s'allongea et passa ses mains sur mes côtés. Je sentais toutes les parcelles de son corps ; nos vêtements gisaient sur le sol de notre chambre.

Je le sentais durcir contre mon érection. Il me regarda et ferma les yeux. Il inspira et expira de l'air dans mon cou, me faisant frissonner. En le sentant il sourit, et posa sa bouche sur mes lèvres, les happant d'un chaud baiser. Il glissa sa main entre nos deux corps, s'aventurant jusqu'à mon intimité. Ses doigts froids parcoururent ma hampe dressée me faisant lâcher un gémissement.

Il déposa des baisers papillons le long de ma mâchoire et s'attaqua à mon cou. Il suçota la peau fine et y amena une couleur pourpre en son creux. J'avais la chair de poule, sa bouche descendait encore, laissant une petite traîné mouillée le long de mon torse imberbe, je le sentais sourire contre la peau sensible.

Quand je lâchai un soupir portant son nom, il entama un retour vers mon visage et s'empara de mes lèvres si vite que je ne pus rien dire. Il commença des mouvements de va-et-vient mimant l'acte sexuel, et nous excitant de plus en plus. Nous suions tout deux, faisant apparaître une fine pellicule brillante à la surface de nos peaux.

N'en pouvant plus, nous cédâmes à la tentation, et nous découvrîmes...

Alors que nos deux corps étaient encore l'un sur l'autre, en sueur, Guillaume prit parole en quelques douces paroles murmurées :

« C'est vraiment beau, de voir les anges dans les bras de l'un des leurs… Je t'aime Marc. Je t'aime. »