Loup & Louve

Résumé

Pauvre, sans croissance économique, Arachas est une ville si quelconque qu'on lui prête peu d'attention. Mais les humains ont tort de l'ignorer, tort de mésestimer sa communauté car la réalité est toute autre. Sous ses airs tranquilles, Arachas est une ville de prédateurs abritant la plus grande communauté de loups-garous du pays.

C'est là que Cléophée, fille de deux loups et pourtant humaine, vit. Depuis la mort de ses parents, méprisée par la meute pour son humanité, elle a trouvé en Louka et Sean, deux puissants lycanthropes, des alliés. Plus que des amis, la découverte d'un corps viendra bousculer leur quotidien et leurs sentiments. Mais sont-ils prêts à y faire face ?

Romance, M/M/F, Bit-lit, Terminée mais en cours de publication - Chapitres : 1/30 - Publication: 21 Février

Auteur : Yomika & Béta sens : Enais66 (merci d'avoir lu avec patience vingt versions de ce chapitre) & Béta orthographe et Cie : Yuiko (merci de l'avoir corrigé aussi vite !)

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Chapitre 01 : Cléophée

En arrivant devant leur appartement, je suis exténuée. J'ai l'impression d'avoir vu passer une semaine en à peine vingt-quatre heures. Trop de jours dans un seul jour.

D'une épaule, je pousse la porte d'entrée, une main occupée à retirer la clef de la serrure, l'autre à empêcher mon sac bien trop chargé de tomber. Quand je claque la porte d'un coup de pied, dans le mouvement, je réussis à déverser une bonne partie de mes affaires au sol ! Mon livre de comptabilité s'écrase sur mon gros orteil et en voulant rattraper mon portefeuille, je l'envoie valdinguer quelque part sous le meuble.

— Putain de merde !

Je reste quelques secondes debout, dépitée, l'orteil douloureux, avant de lâcher tout ce que j'ai dans les mains. Tant pis. Il y a des jours, il faut savoir renoncer et je crois qu'aujourd'hui est un de ces jours. Inutile de plus s'acharner. J'abandonne sac et chaussures en vrac dans le vestibule.

La seule chose que je prends soin de ranger est ma veste dans le placard coulissant de l'entée. Dans ce placard, il y a toujours un cintre de libre. Il me donne l'impression d'avoir une place dans cet appartement. Même après une absence d'un mois, je n'ai jamais vu un autre manteau sur ce cintre. Maintenant je considère ce cintre comme mon cintre, un bienvenu permanent.

— Loup ? Sean ? je les appelle en passant dans le salon.

L'appartement est tout en longueur. Au-dessus d'un magasin de sport, il longe la façade du bâtiment. L'entrée s'ouvre sur le salon-cuisine qui donne sur le couloir desservant les deux chambres. Toutes les fenêtres sont du même côté et ont vue sur la ville. Rien de très joyeux. Un paysage gris de saleté et de pauvreté.

Ma ville, elle est comme ces documentaires sur les régions qui périclitent. Les mêmes paysages tristes, les mêmes baraques abandonnées, les mêmes panneaux rouillés, les mêmes gens marqués par le travail…. Il y a plus de pancartes « en vente » ou « en faillite » que de maisons habitées et de magasins ouverts. Le tout recouvert d'un filtre gris absorbant le peu de couleurs existantes. Du gris et du vert ! Partout du vert ! Perdue au milieu de forêts et séparée en deux par un fleuve, Arachas est pauvre et oubliée des politiques, peu de travail et une économie en chute libre. Ici, le taux de chômage et d'endettement sont records. Trente ans plus tôt, lors du boom économique, un port fluvial et quantité de bureaux avaient été construits. Dix ans et une crise économique plus tard, le port avait été déserté et les bâtiments abandonnés ou transformés en appartements pour budgets très modestes. Traversée par une grande route à quatre voies, si pas mal de voitures traversent la ville, très peu s'arrêtent pour autre chose qu'un plein à la station-service. Il n'y a rien ici. Et d'année en année, la population diminue.

Quand Sean et Loup s'étaient installés, deux autres appartements étaient occupés. Quatre ans plus tard, ils sont les derniers locataires. L'immeuble est à présent aussi vide que la ville.

L'appartement, mal insonorisé, laisse passer la rumeur de la route et les voix des passants. On entend même la sonnette d'entrée du magasin de sport qui occupe le rez-de-chaussée. Mais dans le salon, aucun bruit en dehors de l'électro-ménager. Il n'y a personne. Je sens la boule dans mon thorax grossir un peu à l'idée qu'ils ne soient pas là. J'ai vraiment besoin de les voir.

Aujourd'hui plus que les autres jours parce qu'aujourd'hui est vraiment un mauvais jour.

La pièce principale est immense, blanche et bien rangée. Une sorte d'appartement témoin impeccable qui tranche avec l'extérieur décrépi. Il n'y a rien qui dépasse, même le bonzaï posé sur la petite table devant le canapé semble avoir été placé au millimètre près. Des photos de nous à tout âge longent le mur du salon et continuent dans le couloir. La plupart sont prises sur le vif et nous montrent Sean et moi nous chamaillant. Loup est toujours à côté, nous regardant, ou plutôt nous surveillant. La seule où nous avons l'air calme est celle prise alors que nous nous étions endormis pêle-mêle. Loup et Sean me recouvrent pratiquement de leur corps et chacune de mes mains est dans une des leurs.

Plus de dix ans de souvenirs étalés en photos.

La première chambre, sensée être celle de Sean, est vide et je vais directement dans la deuxième. Discrètement, je pousse la porte donnant sur un espace blanc épuré parfaitement rangé comme le reste de l'appartement.

Je sens l'angoisse refluer. Ils sont là. Sous les draps défaits, Loup et Sean dorment. Sean est à moitié sur Loup. Sa tête sur sa poitrine, ses larges épaules couvrent pratiquement tout son corps. Je ne sais même pas comment Loup arrive encore à respirer, écrasé par le gigantisme de Sean. Leurs poitrines se soulèvent doucement et régulièrement, rythmées par la respiration paisible des gens profondément endormis.

C'est rare de voir Loup avec cette expression détendue. Le sommeil, c'est le seul moment où ses traits se relâchent, et encore... Le reste du temps, le visage de Loup est comme figé, sans aucune expression. Ni bien, ni mal. Tout le monde dit qu'il est insensible, moi je leur réponds qu'ils confondent avec impassible, ce n'est pas pareil. Loup ressent. Ils ne comprennent pas que ne pas avoir de sentiments et ne montrer aucune émotion, ce n'est pas pareil. S'il y a bien une chose sur laquelle on est d'accord Sean et moi c'est que Loup est la personne la plus sensible qui existe, la plus belle aussi.

Alors que j'entre et que mon pied s'enfonce dans l'épaisse moquette, Loup ouvre brusquement les yeux. Une main posée sur l'épaule de Sean prêt à le renverser pour le défendre, il se détend dès qu'il me voit. Il me fixe, son regard remontant de mes pieds à ma tête, et soupire. Je sais qu'il a déjà compris. Pas besoin de paroles, de longues et fatigantes explications… Loup sait beaucoup de choses quand il s'agit de moi.

— Viens, me dit-il en écartant Sean de sa poitrine qui grogne sans pour autant ouvrir les yeux.

Sans attendre que Sean se réveille totalement, je grimpe sur le lit et le pousse de toutes mes forces pour me faire une place entre eux deux. Sean est bien trop lourd pour que je le déplace de beaucoup mais c'est suffisant pour me caler au milieu.

Ils sont immenses à côté de mon petit gabarit, surtout qu'on ne peut pas dire qu'ils soient fins et tout en ligne. J'atteins difficilement un mètre cinquante-cinq. Je suis sûre que mon médecin l'a marqué dans mon carnet de santé uniquement pour me faire plaisir. Sean doit être proche des deux mètres et Loup pas loin du mètre quatre-vingt-dix. Généralement, on ne me voit pas entre eux, il faut baisser la tête pour ça et les gens le font rarement en présence de mes deux hommes. On ne quitte pas le danger des yeux.

— Fée ? m'interroge Sean encore endormi.

Bayant bruyamment, râlant contre Loup de l'avoir délogé de sa place, il pose sa main sur ma gorge et me caresse distraitement la mâchoire. Je sens ses doigts se faire lourds alors qu'il est sur le point de se rendormir mais d'un coup, il se tend et se redresse. Il regarde le réveil puis moi.

— Tu ne devrais pas être là, me dit Sean en plissant les yeux.

— Sympa, je riposte en l'ignorant préférant fixer le plafond que sa mine soucieuse.

Loup n'a toujours rien dit et me caresse doucement le bras. Son visage est neutre, rien ne passe dans son expression mais ses doigts disent tout. Réconfort et soutien. Amour aussi.

— Tu sais ce que je veux dire, râle Sean à moitié assis le drap cachant à peine son intimité. Tu n'avais pas un rendez-vous ? Genre un dîner ultra-romantique ? Celui avec lequel tu nous bassines depuis une semaine.

Si, je l'avais. Et je ne l'ai plus.

Je ne réponds pas. Je n'ai pas envie de réponde.

C'est vrai que je leur en avais beaucoup parlé. J'avais saoulé pas mal de monde avec ça. Préparer cette soirée romantique m'avait demandé une organisation folle. J'avais décalé tous mes services pour avoir cette fichue soirée de libre. Annuler le sport. Dépenser des sommes absolument pas raisonnables en lingerie, et tout ça pour rien.

— Ma perle ? insiste Sean en me forçant à le regarder.

Une main sur mon menton, il tourne ma tête vers lui. Il veut savoir. Ne pas savoir ce qui m'arrive le rend dingue.

Sean ne supporte pas le doute et l'incertitude. Tout savoir tout de suite. Tout le temps.

— Rien de grave, j'articule difficilement en secouant la tête.

Sean se penche et embrasse mes cheveux. Je sais qu'il regarde Loup. C'est ce qu'il fait toujours quand il veut savoir quelque chose sur moi. Sean part du principe que Loup sait tout, et il n'a pas tort. Loup il n'a pas besoin que je lui explique pourquoi je ne suis pas bien, il me regarde et il comprend. Ça n'a pas toujours été comme ça mais je crois qu'à force de le coller et de le suivre partout depuis mes neuf ans, il a fini par apprendre.

— Cléophée ?

Quand Sean commence à m'appeler par mon prénom complet c'est qu'il est vraiment inquiet et qu'il vaut mieux lui dire la vérité avant qu'il invente des hypothèses. Ses hypothèses sont toujours nulles et à côté de la plaque.

— Franck a annulé.

— Ah…

Merci pour l'éloquence.

— On a rompu, je rajoute après quelques secondes histoire que les choses soient claires.

Le dire à voix haute rend le tout plus réel. Plus douloureux aussi.

J'entends Loup soupirer dans mon dos. Ses lèvres se posent contre mon cou et sa main dégage mes cheveux de mon visage.

— Il ne te méritait pas, ma perle, lâche Sean en grognant.

Sean est nul pour réconforter.

J'acquiesce silencieusement, je savais qu'il dirait ça. Mais ça ne m'aide pas. C'est son discours habituel, celui qu'il me sort après chaque rupture : « il n'était pas assez bien pour toi. Tu mérites mieux que ce genre de type. Je suis sûr que tu ne prenais pas ton pied au lit, qu'il ne t'offrait pas assez de fleurs, qu'il ne te traitait pas assez délicatement… ». Sean peut enchainer des heures sur tout ce qu'un mec devrait faire pour avoir le mérite de sortir avec moi. Le mec qu'il décrit n'existe pas, mais ça, il ne le prend pas en compte.

— Ma louve, chuchote Loup à mon oreille, il n'y a rien qui cloche chez toi.

Encore une fois, Loup touche juste.

— C'est ce qu'il t'a dit ? grogne Sean, ses ongles s'enfonçant dans ma peau.

— Non, c'est ce qu'elle pense, le corrige Loup en soulevant la main de Sean pour l'empêcher de me blesser.

— Ma perle ?

Au bout de onze ruptures dont une seule venue de moi, c'est difficile de penser autrement.

— Ce n'est pas toi le problème, c'est lui, insiste Sean en tournant mon visage vers lui d'une poigne ferme.

Il attend que je le regarde dans les yeux pour ajouter :

— C'est un idiot.

C'est ce que me suis répétée en boucle tout au long du chemin : Ce n'est pas grave, c'était un sale con, mais ça ne m'avait pas soulagée. Parce que ce n'est pas vrai, la seule chose qui n'allait pas c'était son prénom. On n'a pas idée d'appeler son fils Francky ! C'est ringard et ça réduit les chances de réussite professionnelle. Quel patron engagerait un mec qui s'appelle Francky ? D'ailleurs, je l'avais involontairement dit à sa mère qui n'avait pas particulièrement apprécié. Sa mère… Une chose de plus que je peux rajouter sur la liste « Pourquoi ce n'est pas grave qu'il m'ait quitté». Une liste vraiment restreinte. Il n'y a pas beaucoup d'arguments à inscrire dessus.

— Tous ceux qui ne mesurent pas la chance d'être avec toi sont des idiots, poursuit Sean le regard dur en me caressant la joue.

Je pose ma main sur la sienne et ferme les yeux, luttant contre les larmes qui s'y pressent.

Je m'attendais à beaucoup de choses aujourd'hui sauf à me faire larguer. D'habitude, je vois venir les choses. Mais celle-là… Je pensais qu'on était bien. Mais ça devait être juste moi. Comme toutes les autres fois.

Francky avait rompu le matin en me déposant devant le restaurant où je travaille. Pendant les trois heures de mon service, je m'étais attendue à ce qu'il revienne. Il ne pouvait pas être vraiment parti. Mais quand, il n'avait pas répondu à mon cinquième appel et à ma dizaine de sms, j'avais compris que si, c'était fini. Du genre définitif. Sans retour. Plus rien… Juste comme ça ! Cinq mois de relation jetés à la poubelle avec quatre mots : ça ne fonctionne pas.

Il m'avait reproché de lui cacher une partie de ma vie, de ne pas être impliquée dans notre relation. Il m'avait reproché tout un tas de choses. Il m'avait dit que mon amitié avec Loup et Sean n'était pas saine, qu'elle n'était pas compatible avec une vie de couple. Il m'avait demandé si j'arrêterais de les voir et je lui avais répondu non. Loup et Sean étaient là bien avant lui et le seraient bien après lui. Ils étaient la constante de ma vie depuis mes neuf ans, depuis la mort de mes parents. Nous avions grandis ensemble et fait beaucoup de choses ensemble. Ça comptait un millier de fois plus qu'une relation de cinq mois.

— Tu réfléchis trop, ma perle, grogne Sean en se débattant avec mes cheveux qui se sont étalés sur son oreiller.

Il essaye de les repousser mais à chaque fois, mes mèches blondes dégringolent et il abandonne, se couchant dessus.

— Tu sais que si je me lève, ça va me tirer les cheveux, je grogne.

— Je sais, me répondit-il dans un sourire.

— Tu t'en fous, c'est ça ?

— Complètement.

Sale petit con bodybuildé.

Enervée, je lui frappe le torse du plat de la main.

— Aïe, râle-t-il en se frottant la poitrine.

Je tourne la tête vers lui en levant les yeux au ciel.

— Si seulement ça pouvait te faire mal… Tu pourrais te prendre un mur que tu le sentirais à peine.

Bâti comme un rugbyman, si je devais décrire Sean en un mot, ce serait sans aucune hésitation : puissance. Grand et large, très large. Sean a la peau aussi épaisse qu'un rhinocéros.

— Tu penses à quoi ? me demande Sean.

— Je pense que tu es un rhinocéros.

— J'espère que tu me compares à lui à cause de la taille de mon sexe.

Loup et moi soupirons en même temps.

— Si tu avais le sexe de la taille d'un rhinocéros, personne ne coucherait avec toi.

— En même temps, mon choix est limité, dit-il dans en rire en enfonçant son index dans mes côtes.

— Ça te pose un problème ? grogne Loup qui jusqu'à présent, se contentait de masser tranquillement ma main.

— Aucun, répond tout de suite Sean.

Loup est comme ça. Il ne dit rien mais quand il parle, il vaut mieux ne pas le contredire surtout lorsque ça concerne Sean. Sean est à lui. Et personne n'a le droit de toucher ce qui est à lui. Je crois que Sean met tant d'application à rejeter les avances des autres, c'est parce qu'il sait que ça pourrait très mal tourner. Loup ne rigole pas avec leur couple.

— Je t'aime, chuchote Sean en passant son bras par-dessus moi pour caresser la poitrine nue de Loup.

— Pitié, je sors d'une rupture ! dis-je en lui mordant le bras qui passe juste sur mon cou.

Mais Sean m'ignore royalement. Il se penche au-dessus de moi, m'écrase pratiquement sous son torse et embrasse succinctement Loup avant de reprendre sa place.

La pointe de jalousie habituelle se réveille dans mon ventre et je soupire en pensant que je n'arriverais sans doute jamais à m'en débarrasser. Sean et moi nous étions longtemps battus pour l'amour de Loup. Aucun de nous ne voulait partager. Ça avait duré jusqu'au jour où je m'étais rendu compte que je ne pourrais jamais gagner. Loup était à Sean et ma présence n'y changerait jamais rien. Je ne faisais pas le poids contre ce qui les unissait.

J'avais dû faire avec leur couple et accepter leur amour. Un des plus beaux qu'il m'ait été donné de voir. Ils sont beaux ensemble. Heureux. En public, il y a peu de gestes d'affection entre eux. Ils ne peuvent pas prendre le risque qu'on interprète leur rapport différemment qu'une forte amitié virile. Mais ils n'en ont pas besoin, il suffit juste de faire attention à la façon dont ils se regardent. C'est flagrant et ceux qui ne remarquent pas l'attirance et le désir qu'ils ont l'un pour l'autre sont simplement aveugles. Quand Sean regarde Loup, le monde s'arrête. Et quand Loup regarde Sean, le monde se remet à tourner.

Aucun homme ne m'a jamais regardé de cette façon. Il y a toujours quelque chose qui ne va pas. Moi. Toujours moi. A force qu'on me le dise, il doit bien y avoir une part de vérité.

Je frissonne lorsque les doigts de Loup remontent le long de ma jambe pour se poser contre ma hanche. Son nez se perd dans mon cou et je le sens inspirer mon odeur avant de grogner de contentement. Loup me mordille le cou en geste d'affection avant de lécher la petite marque qu'il vient de faire.

— Je t'entends penser, ma Louve, murmure-t-il à mon oreille de sa voix basse et froide. Ce ne sont pas des bonnes pensées. Tu es parfaite. Ne pense jamais à changer quoi que ce soit pour quelqu'un.

— Sauf cette propension à parler sans réfléchir, se moque Sean en me donnant un coup de coude joueur.

Je n'ai vraiment pas besoin qu'on m'enfonce aujourd'hui ! Sean devrait parfois apprendre à la fermer. Mais avant que j'aie pu lui en faire la remarque, et lui dire à quel point il pouvait être pénible, Loup me devance.

— Ferme-la, Sean !

Quand Loup devient grossier, il vaut mieux faire ce qu'il dit.

Je me retiens de me tourner vers Sean pour lui tirer la langue. Que Loup prenne ma défense et s'énerve contre lui m'a toujours plu ! Enfants, Loup nous laissait nous chamailler tant qu'aucun de nous n'était blessé. Il se contentait d'intervenir juste avant qu'on se blesse par des gestes ou des paroles. En grandissant, certaines choses ont changé mais pas celle-là. Loup veille toujours sur nous deux.

Je prends le visage de Loup entre mes mains et l'embrasse avidement. Comme à chaque fois, ses baisers m'ont manqué. Cinq longs mois sans eux. Son sexe est dur entre nous et je sens son cœur pulser contre ma poitrine. Ou peut-être est-ce le mien tellement bruyant qu'il me donne l'impression de battre pour deux. Ses mains passent autour de ma taille et il me ramène contre lui dans un geste possessif. « Ma Louve » murmure-t-il quand je cherche à reprendre ma respiration.

— On se calme, grogne Sean en essayant de me ramener vers lui, c'était une plaisanterie !

Sean déteste être ignoré. Surtout quand je m'accapare l'attention de Loup. Et ça, même quand il ne s'agit pas de sexe. Petite, j'essayais d'avoir Loup pour moi toute seule, et lui de ne jamais nous laisser seuls. Quand Sean lui prenait la main, je lui prenais la main. Quand je touchais Loup, Sean m'imitait. Une sorte de guerre qui n'a jamais vraiment pris fin.

— Tu es jaloux, lui dis-je en m'accrochant à Loup alors qu'il essaye de détacher mes doigts pour me « désagripper » de son homme.

— Absolument pas, riposte-t-il en souriant férocement.

Son manège me fait rire et je me débats quand il commence à me chatouiller. Sean me tire en arrière et me bloque contre son torse alors qu'il continue de faire courir ses doigts le long de mes côtes.

— Ça t'énerve que Loup sache mieux embrasser que toi, lui dis-je pour le narguer en essayant de reprendre ma respiration entre deux gloussements.

— Pardon ?

Je ris parce que je sais qu'il est véritablement vexé. S'il y a bien un truc qu'il ne faut pas faire avec Sean c'est remettre en cause ses capacités sexuelles. Sean me bloque sous son corps tout en continuant de me chatouiller. Je rigole de plus en plus fort jusqu'à ce que sa bouche s'écrase contre la mienne et que mes gémissements se mêlent à mes gloussements.

— Tu me redis ça ? me demande Sean en me laissant respirer.

— Tu te débrouilles.

Très bien même. Mais ça, il hors de question que je lui dise. Il est assez fier de lui pour que je ne remette pas, en plus, une couche sur son autosatisfaction.

— J'ai du mal entendre, grogne-t-il en continuant sa torture.

— Tu as très bien entendu.

Il secoue la tête, plisse les yeux et m'embrasse. Ses lèvres happent les miennes et sa langue pousse dans ma bouche. Son baiser est profond et terriblement excitant. Quand il y met fin, il soulève un sourcil en attendant le verdict.

—C'est… Pas mal.

— Pas mal ? Toi, tu cherches les ennuis, me menace-t-il en me bloquant sous lui.

À moitié assis sur moi, j'essaye de me débattre mais Sean me maintient de tout son poids. Plus de cent kilos de muscles contre lesquels je suis incapable de lutter. Nu, son sexe posé contre mon ventre commence à se tendre lentement. Il embrasse mes lèvres puis mon cou quand d'un coup, il bloque et se redresse.

— Fais attention, je râle lorsqu'il tire brutalement sur mon décolleté, manquant de déchirer ma chemise.

— Je ne l'ai jamais vu, grogne-t-il en suivant d'un doigt les bords de mon soutien-gorge blanc.

Sean soulève mon haut et je sens son érection prendre de l'ampleur, enthousiaste à mon choix de lingerie. En dentelle et transparent, ce soutien-gorge est particulièrement osé. Un achat pour faire plaisir à Francky… Un achat inutile.

— Il est neuf… dis-je en repoussant Sean des deux mains sur le torse, histoire qu'au moins il sente mon geste.

Sean me libère et je remets en place ma chemise.

— C'était pour lui ? me demanda Loup en me caressant le dos.

J'hoche la tête.

— Oui. C'était…

Mais je ne continue pas et hausse les épaules.

C'était pour ce soir. Pour lui faire plaisir, comme tout ce que je porte aujourd'hui.

Sean se rallonge à côté de moi et caresse doucement ma joue.

— Dommage pour lui.

Dommage pour moi.

— Le bon côté, reprend Sean quand je ne lui réponds pas, c'est qu'on peut de nouveau te toucher et t'embrasser.

Son pouce passe sur mes lèvres et s'insinue entre elles pour venir effleurer ma langue. Son regard s'éclaircit quand je commence à suçoter son doigt en le regardant droit dans les yeux.

— C'est vrai que c'est un bon côté, je confirme en relâchant son pouce et en me redressant pour poser doucement mes lèvres sur les siennes.

À peine un frôlement, mais nous frissonnons tous les deux.

— Et d'autres choses aussi, ajoute Sean en faisant courir ses doigts le long de mon jean.

Ils remontent ma cuisse jusqu'à se poser tout contre mon aine.

Alors que Sean se penche pour m'embrasser et que ses doigts commencent à se faufiler sous mon jean, d'un coup de hanche, le prenant par surprise, je le retourne pour le chevaucher.

— Vengeance, je m'exclame assez fière de moi.

Mes doigts se perdent sur ses cotes nues et Sean, à son tour, couine ridiculement quand je commence à le chatouiller.

— Tu triches, s'esclaffe-t-il me refaisant basculer.

Manquant de nous écraser contre Loup qui a heureusement le réflexe de se décaler, Sean me bloque les poignets de chaque côté de ma tête. Comme un gamin de cinq ans, il se penche et souffle dans mon cou, faisant un horrible bruit de pet qui le fait marrer.

— Abruti, je grogne en me débattant.

— Vous bougez trop, grogne Loup en se levant après avoir évité de justesse une de mes mains alors que j'essaye de reprendre ma liberté.

La vue de Loup nu suffi à nous calmer et sans me lâcher, Sean et moi regardons Loup se diriger vers la porte de la chambre. Plus mince que Sean, Loup n'en est pas moins musclé. Une musculature proche de celle d'un nageur.

— Ne vous faites pas mal, nous ordonne-t-il avant de disparaitre dans le couloir.

— Arrête de mater Loup, glousse Sean comme une adolescente en me maintenant toujours épinglée contre le matelas.

Je suis sûre qu'il est à deux doigts de me tirer la langue.

— Ce n'est pas moi qui suis en érection, je riposte.

— Et pas moi qui pue l'excitation, réplique-t-il en faisant courir son nez le long de mon cou.

— Ok, je matais ton mec. Mais reconnais qu'il a de très belles fesses.

Surement les plus belles fesses du monde. Même le derrière de Sean tout en muscle et ferme n'arrive pas au niveau de celui de Loup.

— Plus que les miennes ?

— Tu vas beaucoup te vexer si je réponds « oui » ?

— Sans aucun doute.

— Et si je te dis que tu as le plus beau sexe ?

— ça pourrait rattraper, concède-t-il en se couchant à moitié sur moi.

— T'es lourd.

— C'est toi qui est trop légère.

Tout en me regardant, sa main se ballade tranquillement sur mon corps. Elle parcourt mon visage, mes cheveux, descend sur mon torse, dessine mes seins et mes bras. Sean plie un à un mes doigts avant de masser mon poignet et de remonter jusqu'au creux de mon coude qu'il soulève pour l'embrasser.

— Vous faites quoi ce soir ? je lui demande alors qu'il joue avec mes cheveux.

Il tire sur mes boucles et les regarde se reformer dès qu'il les relâche.

— Réunion du conseil. Il y a un barbecue après, tu veux venir ?

— Je ne sais pas.

Je n'ai jamais aimé ces réunions, je ne m'y suis jamais sentie à ma place. Tout le monde me regarde bizarrement, comme l'humaine non désirée du groupe. Ce qui est exactement le cas. Habituellement, je n'y vais que quand on m'en a donné l'ordre. Depuis que j'ai pu prendre mon indépendance, j'essaye de réduire au minimum les contacts avec la meute.

— Anna et Henri seront là. Ça leur ferait plaisir de te voir.

Sans aucun doute. Mes parents adoptifs s'inquiètent pour moi. Ils n'aiment pas me voir prendre mes distances avec la meute. Pour eux, c'est m'éloigner de toutes protections.

— Peut-être.

— Viens. Tu ne vas pas rester seule ce soir.

— Peut-être.

Sean n'insiste pas et continue de ma câliner alors que nous entendons l'eau de la douche couler.

— C'est là que tu es le mieux, ma belle, murmure Sean à peine assez fort pour que je l'entendre. Avec nous.

Je ne dis rien. Si ça m'était possible, je serais toujours avec eux. Moi, l'humaine coincée entre deux créatures surnaturelles. Mes deux lycanthropes.

oOo

A suivre

Et voilà pour ce premier chapitre qui c'est fait un peu attendre mais très heureuse de (enfin) le publier. J'ai hâte de partager avec vous cette histoire : D

Écrite dans son ensemble, je posterais un chapitre tout les 21 du mois. Peut-être un deuxième chapitre le 7, si j'arrive à gérer mes corrections (mais ça, c'est pas gagné XD )

Je fais une petite annonce pour ceux qui ont suivi Une larme douloureuse. Il y a aura un OS rangé dans « Murmures pour adultes », le 7 février.

N'hésitez pas à me rejoindre sur Facebook à Yomika Fiction et à aller voir mon site : www . la-serre-aux-murmures . com

A très vite !

Camile Dit Yomika