Hey hey hey ~

Cette fois je ne me suis pas absentée trop longtemps ! (hohoho, ça change hein !) Il faut dire que j'ai été pas mal inspirée pour écrire récemment, et même si j'en ai pas vraiment le temps ... Je le prends quand même !

Donc voilà, je vous présente un de mes nouveaux projets ! Cette fois-ci, aucun rapport avec mes fictions précédentes (même si j'ai tendance à croiser mes univers). Je l'ai commencé assez récemment, mais il est bien avancé, alors je commence par poster celui là. (Mon autre fiction "Colors" qui devait être publiée avant "Rebirthing" qui est maintenant terminée continue à trainer ... Je me désespère toute seule.)

Breeeef ! Je ne sais pas trop à quel rythme je vais poster. Pour l'instant, je pense essayer le "un chapitre toutes les deux semaines", je verrais si ça me convient par la suite !

ATTENTION ! Je dois prévenir quand même avant, cette histoire est aussi sombre que "Ne m'abandonne pas" (pour ceux qui ont lu l'ancienne version), si ce n'est pas pire. Ceux qui veulent quelque chose de tout mignon feraient mieux de passer leur chemin ... Langage cru, violence, souffrances, torture mentale ... Il y a pas mal de choses comme ça qui seront présentes. Je pense que c'est nécessaire d'avertir. Le rating M est plus que justifié ici, et ce dès le premier chapitre.

Aussi, je précise que je traite ici d'une histoire où mes personnages principaux sont homosexuels, comme dans mes autres fictions publiées auparavant sur ce site.

N'hésitez pas à me donner votre avis (bon j'oblige personne hein), je réponds toujours et ça me fait toujours plaisir de voir qu'on me suit ^^

Je m'excuse d'avance pour vos petits cœurs, et vous présente - avec un petit sourire machiavélique - "Enchaîné" ! Bonne lecture ~


Chapitre 1

Obsession

Alors que je sortais de la salle de bain, mon regard blasé se posa sur la personne assise sur mon canapé, se goinfrant peu gracieusement de chips tout en regardant la télé.

- Greg, tu comptes me faire répéter combien de fois que je veux pas que tu bouffes sur mon canapé ? Je sifflai.

Les yeux verts de l'intéressé se levèrent vers moi. Ses cheveux blond vénitien en bataille retombaient légèrement devant ces derniers. Ils avaient beaucoup poussé dernièrement, et leur propriétaire était plutôt fainéant en ce qui concernait leur entretien. Il ne les coiffait que rarement, et pourtant, ils lui donnaient quand même un air sexy.

- Si t'es pas content t'as qu'à me mettre dehors, maugréa-t-il froidement en retournant son attention vers le match de football.

Il me cherchait, je le savais. J'avais beau savoir qu'il faisait tout pour me provoquer, il gagnait à chaque fois. Il maitrisait complètement mes nerfs, sachant exactement comment me mettre hors de moi. Plus le temps passait, plus c'était facile pour lui, ma patience diminuant de plus en plus.

Piqué au vif, je fondis sur lui. Je lui arrachai son paquet de chips pour l'envoyer voler à l'autre bout de la pièce, avant d'attraper le col de son tee-shirt. Mes dents étaient tellement serrées qu'elles commençaient à me faire souffrir. Je tremblais de rage, étant pourtant pleinement conscient que j'étais en train de péter un câble pour rien.

- Je vais sérieusement te mettre dehors ! Je fulminai.

Gregory était nullement surpris par ma soudaine réaction. Au contraire, c'était ce qu'il voulait. Ses sourcils étaient légèrement froncés, et un sourire narquois s'étirait sur son visage masculin. Il était beau, ce connard. J'aimais ce visage, ses expressions, et ce corps lourd de muscle que je pouvais à peine faire bouger de mes bras bien plus fins. J'aimais sans doute la personne à qui tout cela appartenait, aussi. Ou du moins, je l'avais aimée.

Le premier coup partit lorsqu'il ouvrit la bouche pour me défier. Mon poing s'écrasa sur sa mâchoire, lui arrachant un grognement sourd. Incapable de la retenir, sa tête partit sur le côté. Si mon autre main ne le soutenait pas en tenant son tee-shirt, sans doute se serait-il écroulé sur le canapé, sonné.

Mes phalanges douloureuses, je tenais pourtant son pull de tous mes doigts maintenant, le soulevant un peu plus vers moi. Il reprit assez rapidement ses esprits, mais son sourire avait été remplacé par une grimace, sans doute parce que son visage le faisait trop souffrir pour vraiment étirer ses lèvres. J'avais frappé fort cette fois, après tout.

J'hésitais à lui assener un autre coup pour bien lui faire comprendre à quel point j'en avais marre. Lui ne fit que m'y encourager ; il me cracha au visage, ce que je compris être du sang en m'essuyant l'œil du revers d'une main. Il riait maintenant, en crachant ses habituels mots blessants.

- Espèce de déchet, pourquoi tu m'as toujours pas tué ? Je te suis si indispensable que ça ? Pauvre merde !

Ses doigts vinrent agripper mes cheveux sans douceur, attirant ma tête vers la sienne. Je pouvais maintenant sentir son souffle sur ma peau, et je ne pus m'empêcher de me mordre la lèvre. J'avais beau bouillonner de colère, mon corps réagissait toujours autrement lorsqu'on était aussi proche. Tout était contradictoire chez moi, c'était insupportable.

Je le poussai de toutes mes forces loin de moi, le prenant par surprise. Il tira un instant sur ma chevelure, m'entrainant presque dans sa chute. Je pus cependant garder l'équilibre, me rattrapant in extremis, alors que son dos avait violemment tapé contre le dossier du canapé. Je fis deux pas en arrière. Il sembla sonné quelques secondes, sans doute parce que sa tête avait subi des mouvements trop brusques, mais se reprit rapidement.

Nos regards se verrouillèrent l'un dans l'autre. Un courant électrique sembla me traverser la colonne vertébrale, et je frissonnai.

Gregory et moi nous connaissions depuis que nous étions touts petits. On avait été ce que l'on appelle communément des "meilleurs amis", quasiment toujours collés l'un à l'autre. Il avait toujours été un garçon adorable, souriant. Il m'avait toujours écouté quand j'allais mal, et on avait presque tout vécu ensemble. On avait toujours été le pilier l'un de l'autre, s'offrant une épaule sur laquelle pleurer et une oreille attentive.

Puis les choses avaient basculé. Quand était-ce, déjà ?

Le blond se leva, puis s'avança vers moi, le regard voilé. Je restai figé, ne pouvant lâcher ses yeux. Mes lèvres s'étaient entrouvertes, et je respirais bruyamment, au bord de la crise. Ses mains effleurèrent mes joues, puis il passa doucement ses doigts dans mes cheveux qu'il avait malmenés plus tôt. Je frissonnai.

Il était imposant. Je faisais facilement une dizaine de centimètres de moins que lui. Je n'étais déjà pas bien grand, mais lui était un colosse. C'était une chance qu'il ne soit pas aussi violent que moi, parce que s'il m'avait fait ce que j'avais fait plus tôt, je n'aurais pas donné cher de ma peau. Il aurait sans doute pu me tuer d'un coup de poing.

Mais je savais qu'il ne le ferait pas. Oh, ce n'est pas comme s'il était le genre à être doux. Cependant, cela l'embêterait si je me retrouvais incapable de bouger, ou si je mourrais. Cela gênerait son désir maladif d'être blessé, que je lui accordais toujours, peu importe à quel point je tentais de me retenir. Il me provoquait pour ça. Il voulait que je frappe, que je lui fasse mal.

Ses lèvres fines emprisonnèrent les miennes. Mon corps répondit rapidement, conditionné pour ça. Je lui laissai l'entrée à ma bouche, et nos langues s'enroulèrent. Il variait souvent, mordillant de temps en temps mes lèvres en poussant des souffles rauques.

Je brûlais toujours de l'intérieur, mais pour une autre raison cette fois. Ma libido s'était déjà éveillée. Mes mains avaient agrippé ses fesses, pour plaquer nos corps le plus possible.

Il me souleva de ses bras puissants, puis me jeta sur le canapé. Je le laissai me dominer de toute sa stature, admirant un instant son visage rougi par les coups qu'il avait reçus, mais aussi par la chaleur ayant envahi son corps excité. Alors que ses mains baladeuses caressaient doucement le mien et que ses lèvres parsemaient la moindre parcelle de mon cou, je pouvais le sentir trembler.

Je savais qu'il pleurait. C'était toujours comme ça. Il me provoquait, je le frappais, on finissait par s'arracher nos vêtements pour coucher ensemble, et il fondait en larmes. ça ne me surprenait plus, il était toujours comme ça. Je ne le comprenais pas. Je laissais juste faire.

- Mat ? souffla-t-il, sanglotant, en arrêtant un instant tout ce qu'il faisait.

Je ne répondis pas, il savait que je l'écoutais.

- Je suis désolé, je t'aime …

J'entourai son cou de mes bras, l'attirant avec douceur contre moi. Encore une fois, je restai silencieux. C'était moi qui aurais du m'excuser. J'aurais du lui demander pardon pour l'avoir tant frappé, même s'il l'avait cherché, et pour ne jamais répondre que nos sentiments étaient mutuels.

Cela faisait longtemps que nous n'étions plus des amis. Mais au début, notre relation n'était pas comme ça. Cela avait sans doute commencé pendant le divorce de ses parents, alors qu'on était en quatrième. Le schéma de base, en quelque sorte : le père alcoolique abusant de son enfant, et la mère impuissante face à ça. Son paternel n'avait pourtant jamais vraiment été violent, avant. Mais son addiction à la boisson avait empiré lorsque lui et sa femme avaient décidé de se séparer. Et c'était Gregory qui avait essuyé les dégâts à chaque fois.

Alors ce dernier n'avait fait que se tourner plus vers moi. J'avais du rompre avec ma copine du moment, ce qui s'était avéré plus ou moins être une libération. J'aimais bien cette fille, mais sans plus. Mon ami était bien plus important.

Je l'avais soutenu, il passait la plupart de son temps chez moi. Mes parents le traitaient plus ou moins comme leur propre fils, mais il était vrai que ça les embêtait un peu par moments de l'avoir à la maison. Surtout que ma petite sœur plus jeune de deux ans et lui ne pouvaient pas vraiment s'entendre.

Notre famille était plutôt aisée, sans vouloir me vanter. Dans notre jardin, on avait un petit bâtiment, composé de quatre pièces. Mes parents l'avaient aménagé de façon à ce que je puisse y vivre dès mon entrée en troisième. Je mangeais toujours avec eux, bien que mon "appartement" était doté d'une cuisine et d'un salon. C'était surtout un endroit où j'avais mon intimité, et où Gregory pouvait aller et venir tranquillement. Ce n'était pas vraiment comme si je vivais seul.

Même après que son père ait déménagé très loin, et qu'il aurait pu vivre avec sa mère, il était quand même resté à mes côtés.

Quoi qu'il en soit, lui et moi avions passé tellement de temps ensemble qu'il ne jurait plus que de moi. Son attachement n'avait fait que grandir, et il me lâchait de moins en moins. Lentement, il avait commencé à avoir des petites manies, comme de passer sa main dans mes cheveux le matin quand on se levait, ou me prendre dans ses bras dès qu'on rentrait des cours. Au début, je m'étais juste dit qu'il avait besoin d'affection, et je l'avais laissé faire.

Puis son avidité n'avait fait que croitre. Il était toujours littéralement cramponné à moi. Lorsque j'avais commencé à faire la cuisine moi-même pour qu'on mange tous les deux dans mon "studio", il m'enlaçait toujours par derrière. Il me tenait la main lorsqu'on regardait la télé … Des petites choses comme ça.

Il m'avait fallu un moment pour comprendre que ce n'était pas normal. Que deux gars, deux amis, ne faisaient pas ça normalement. J'ai eu le déclic la première fois qu'il m'a embrassé. Et sans doute ai-je réalisé à ce moment là que j'avais des sentiments plus qu'amicaux pour lui. Savoir que j'étais bisexuel ne m'avait pas plus embêté que ça, à vrai dire. Je n'avais jamais eu aucun préjugés à ce propos.

Après ça, on avait entretenu une relation secrète, connue de nous deux seulement. Au début, ça s'était limité à de simples baisers, qui au fil du temps s'étaient faits de plus en plus entreprenants. On avait commencé à se toucher mutuellement. Et évidemment, on avait couché ensemble.

Très franchement, cette relation de départ, je la regrettais maintenant. Je ne sais plus exactement quand cela était arrivé, mais un jour, tout avait encore radicalement changé. C'était une période sombre de notre passé, à laquelle je préférais ne pas penser. Gregory avait commencé à devenir plus distant. Pourtant, je savais pertinemment que nos sentiments étaient des plus forts. On brûlait de passion, et je pouvais le voir dans son regard lorsqu'il le dirigeait vers moi.

Je m'étais énervé parce qu'il avait commencé à m'éviter. Et c'est là qu'il avait commencé à me provoquer.

Au début, ça ne marchait pas trop. Puis notre passion était devenue maladive, et son état mental n'avait fait qu'empirer. Il épuisait ma patience, et me faisait remettre en question tout ce que j'étais. Le jeune moi, qui avait toujours détesté la violence et qui méprisait les hommes battant leur femme, j'étais en train de faire la même chose, même si mon partenaire n'était pas une fille.

Je n'étais pas sûr d'avoir encore des sentiments amoureux pour Gregory. J'étais avec lui parce que ça allait de soit et qu'il n'était pas encore parti, c'était tout. Il continuait à me coller, étant possessif et jaloux, ne laissant personne au lycée s'approcher de moi.

On était en première, maintenant. Du haut de nos dix sept ans, on était déjà tous les deux bien détruits. Je ne savais pas vraiment pourquoi on restait ensemble. Quel était l'intérêt à continuer de se faire souffrir ?

- Mat, regarde moi …

Sorti de mes pensées, je m'exécutai. Il s'était redressé sur ses bras. Ses yeux étaient rouges, et ses joues encore humides. Mon torse était couvert de ma propre semence, et je pouvais sentir, par la chaleur dans mon arrière train, qu'il s'était encore lâché en moi, malgré mes avertissements lui disant bien que je refusais qu'il vienne à l'intérieur s'il n'avait pas de préservatif.

- Tu l'as encore fait … Je m'étranglais en lui mettant un coup dans la clavicule.

Il poussa un grognement, puis un soupir. Trop fatigué pour me battre plus, je le forçai à descendre du canapé. Je m'installai face au dossier, étendu de tout mon long et nu comme un vers, ne lui laissant pas de place pour s'y installer aussi.

- Et moi je dors où ? S'offusqua-t-il.
- Toi tu fermes ta gueule, démerde toi ou rentre chez toi, je grommelai. Je te veux pas à côté de moi.

Je l'entendis pousser un nouveau soupir. D'une oreille attentive, je suivis ses bruits de pas. Il revint quelques secondes plus tard pour me mettre une couverture, puis repartit.

Je me recroquevillai sur moi-même, me maudissant d'avoir craqué une fois de plus. Sûr qu'il n'était plus dans le coin, je me laissai aller aux larmes, sanglotant silencieusement dans le drap imprégné de son odeur.

Cette relation allait nous tuer, un jour.

.oO0Oo.

Une grimace prit place sur mon visage lorsque je vis le regard tueur de Gregory se diriger vers notre professeur de physique. Il l'avait toujours détestée, cette femme un peu trop gentille et fausse sur les bords. "Elle est dangereuse, elle", qu'il me disait toujours. "ça se voit que c'est une faux-cul." Je pensais qu'il exagérait un peu, à vrai dire. Mais je ne l'aimais pas non plus. Surtout que j'étais très irritable en ce moment, et me retenir de péter un câble au lycée était dur pour moi.

Tous les regards de la classe s'étaient tournés vers nous. Je savais que le blond n'avait qu'une envie : c'était tous les envoyer balader. Violemment si possible. Et vu ce que la prof venait de nous demander, je me disais qu'il était très probable qu'il le fasse.

Elle avait décidé de nous séparer pour les travaux pratiques, parce qu'on "discutait" trop. A vrai dire, on était sans doute ceux dans la classe qui parlaient le moins, mais c'était sûrement le regard de Gregory toujours dirigé vers moi qui la gênait. Il ne tournait que rarement la tête vers le tableau, alors ...

- Oscar, viens te mettre à côté de Mathieu. Gregory, tu vas devant.

Je fronçai les sourcils. Le fait d'être séparé de mon voisin pendant deux heures ne m'embêtait pas plus que ça, mais avoir ce mec au prénom ridicule à côté de moi … D'ailleurs, en croisant l'expression déconfite de ce dernier, je compris tout de suite qu'il pensait la même chose que moi. Cela m'arracha presque un sourire amusé, mais ce fut juste une nouvelle grimace qui déforma mes lèvres.

Je pouvais voir le regard désespéré du blond à côté de moi, semblant me supplier de me rebeller contre la prof. Mais je n'en fis rien. Je me contentai de rouler des yeux. Je posai mon coude sur le bureau, et mon menton dans ma main pour maintenir ma tête, las.

Alors que la prof s'impatientait, je pus parfaitement imaginer la mâchoire serrée de Gregory, qui rangeait ses affaires avec rage, puis traina des pieds jusqu'à la place où il devait s'installer, échangeant avec Oscar.

Ce dernier était sans doute le moins sympathique de la salle, bien que mon "ami" et moi rivalisions avec lui dans ce domaine. Cela faisait depuis notre entrée au lycée qu'on se retrouvait dans la même classe. Et dès le premier regard, j'avais su qu'on ne pourrait pas s'entendre.

Je détestais ses billes noires me regardant de haut, comme si j'étais un moins que rien, et son rictus pincé lorsqu'il m'apercevait, comme s'il me jugeait constamment. Je ne l'avais jamais vu sourire, je me demandais même si c'était possible venant de lui.

Il s'installa à côté de moi, gardant cependant le plus de distances possible. J'eus un bref rire outré, qui attira à nouveau les yeux sur moi. Mais cela ne dura pas. Ils se tournèrent rapidement après que je leur aie jeté un regard meurtrier. Enfin, sauf Gregory, qui me fixa un peu plus longtemps, avant de pousser un soupir et de se tourner, résigné, vers le tableau.

Quant à moi, je restai simplement silencieux, n'ayant pas plus envie que ça d'avoir affaire à mon nouveau voisin de table. Je n'eus pas à interagir avec lui jusqu'à ce qu'il se plaigne de tout faire tout seul.

- Ecoute, je soupirai en posant mon bras soutenant ma tête sur la table et en me tournant vers lui. Je m'en contrefiche de son TP pourri, si tu veux avoir une bonne note tu ferais mieux de bosser tout seul.

Son regard ennuyé en disait long. Ses lèvres pulpeuses se pincèrent à nouveau un instant, avant qu'il ne claque la langue, montrant ouvertement son agacement. Je remarquai alors un détail curieux. Ce gars était sans doute un métisse, du moins c'est le sentiment que j'eus en regardant ses yeux de plus près.

Légèrement plissés, on pouvait clairement voir que sa paupière supérieure était plutôt orientée vers le haut, donnant l'impression qu'il avait des yeux un peu semblables à ceux des asiatiques. Je n'avais jamais remarqué jusqu'ici, étant donné qu'il avait de grands yeux. Mais son visage poupon aux traits délicats que l'on remarquait en voyant de plus près ne faisait que renforcer l'idée du métissage caucasien et asiatique. Mais peut-être que je me trompais …

- Tu peux faire un effort, grogna-t-il.

Bizarrement, lorsqu'on entendait sa voix, il avait l'air d'être le genre de personne qui n'était pas crédible lorsqu'il s'énervait. Même s'il avait dit ça en ronchonnant, son ton restait doux et clair.

Alors que je remarquai le regard de Gregory dirigé vers nous, j'en profitai pour le rendre jaloux et pinçai le coin de la lèvre d'Oscar en grimaçant. Je me retins de rire en voyant son expression outrée, mais aussi les yeux écarquillés de ma victime.

- Toi aussi, tu pourrais en faire, je soufflais d'un air narquois. J'ai déjà pas envie de bosser, alors avec un gars imbu de lui-même qui me regarde de haut à chaque fois, je vois pas pourquoi je devrais faire un effort.

Je l'avais lâché, voyant la prof me jeter un regard torve, et retournai mon attention vers ma feuille de compte rendu totalement vierge. Je commençais à prendre des airs de Gregory, c'était pas bon ça.

- Je suis pas imbu de moi-même, s'indigna alors mon voisin.

Je levai à nouveau mes yeux vers lui, vaguement amusé. Je lui répondis que même si ce n'était pas le cas, il en avait tout l'air. Et que ça m'énervait.

- Démerde-toi, je conclus en jouant avec mon crayon.

Cette phrase était sans doute celle que je disais le plus dernièrement. Elle sortait tellement naturellement qu'il se pouvait que je finisse par le dire à la mauvaise personne. Mais bon, si c'était seulement Gregory et Oscar, ce n'était pas bien grave.

Malgré le regard torve de ce dernier, il sembla se résigner. Je l'observais distraitement mettre en place le montage pour "l'expérience" du jour. Il ne m'accorda pas plus aucun contact visuel, se concentrant simplement sur son travail comme s'il était seul.

N'ayant rien de mieux à faire, je pris le temps de détailler ce qui se présentait sous mes yeux. Ma foi, il n'était pas moche ce gars qui portait un nom d'animal de compagnie. De profil, son petit nez semblait délicat, légèrement recourbé au bout, ce qui lui donnait une forme un peu ronde. Plus bas, ses lèvres prenaient le relais. Elles étaient le complet opposé de celles de Gregory, qui étaient fines. Sa lèvre supérieure était un peu orientée vers le haut, bien plus fine que l'inférieure, qui était presque ridiculement pulpeuse. Leur forme était plutôt jolie, à vrai dire, sans doute devait-il être agréable à embrasser.

Sa peau était plutôt claire, signe qu'il ne devait pas beaucoup sortir. Sa mâchoire était facilement visible car il était très mince, et elle semblait aussi tranchante qu'une lame. Je remarquai une boucle d'oreille noir mat en forme de croix plutôt discrète, ainsi qu'un piercing au cartilage, légèrement caché par ses cheveux.

Parlons-en, de sa chevelure. C'était quelque chose d'assez curieux, à vrai dire. J'avais l'impression qu'il s'était fait une décoloration, et pourtant, leur teinte châtaine n'avait pas changé depuis que je l'avais rencontré. Cependant, il les stylisait toujours d'une manière différente. Dernièrement, ils avaient l'air duveteux, légèrement crépus, partant un peu dans tous les sens, comme s'il ne les avait pas coiffés. Il était évident qu'il les entretenait, la façon dont ils étaient coupés le prouvait. J'étais assez curieux de savoir s'ils étaient aussi doux qu'ils en avaient l'air.

- Qu'est-ce que tu regardes comme ça ? Râla-t-il en tournant finalement ses yeux vers moi.

Il avait légèrement rougi, n'étant sans doute pas habitué à être dévisagé pendant si longtemps. Ses grands yeux noirs s'étaient à nouveau plissés, montrant son mécontentement.

- Que veux-tu que je regarde ? Je soupirai, vaguement ennuyé qu'il m'ait arrêté dans mon observation.

Il sembla se renfrogner, gonflant légèrement ses joues, puis recommença à m'ignorer.

Je passais le reste du cours à lutter contre le sommeil, remarquant de temps à autres le regard de Gregory posé sur moi. Lorsqu'on put enfin sortir, Oscar ne dit pas un mot, rangea ses affaires à toute vitesse et s'éclipsa sans même tourner ses yeux vers moi. Je ne m'en préoccupais pas, et sortis à mon tour de la classe, plus tranquillement.

Le blond m'attendait à la sortie, appuyé contre le mur. Je pouvais voir, grâce à l'expression sur son visage, qu'il était loin d'être de bonne humeur. Cela voulait sans doute dire qu'il allait me faire la misère quand on allait rentrer à la maison ce soir. Déjà, je sentais mon moral se décimer un peu plus, comme si un lourd poids s'écrasait sur mes épaules.

Le reste de la matinée fut long. Comme d'habitude, Gregory était resté silencieux la plupart du temps, ne m'adressant la parole que quand c'était absolument nécessaire. Je me demandais réellement comment le gosse si souriant et si gentil qu'il avait été avait pu devenir comme ça. Sans doute étais-je le fautif. Je l'avais trop chouchouté lorsqu'il avait eu des problèmes avec ses parents, et j'en avais fait quelqu'un d'égoïste avec des obsessions maladives.

C'était ma faute.

Nous prenions notre repas au lycée le midi, étant donné que ma maison était un peu trop loin pour qu'on rentre manger. Il ne mangea que très peu, et je dus le forcer à avaler un peu plus de nourriture. Il n'avait déjà pas pris grand-chose pour le petit déjeuner, et ce gros tas de muscles avait besoin d'énergie. Je ne tenais pas à ce qu'il fasse un malaise. Il se négligeait un peu trop dernièrement.

- Arrête toi, t'es pas ma mère, s'était-il énervé lorsque je lui avais dit de manger plus et mis la fourchette dans la bouche lorsqu'il avait refusé.

Je n'avais pas tiqué, et avait juste continué d'insister. J'avais senti la tension monter entre nous, et je savais que l'un de nous allait finir par craquer, et ce n'était pas une bonne idée que ça arrive au lycée. Cela aurait été très embêtant qu'on s'entretue devant tout le monde, dans la cantine. Pourtant, je n'avais pas arrêté. J'avais soutenu son regard, et avais continué de lui dire de manger plus d'un ton sec.

J'avais presque réussi à lui faire manger la moitié de son assiette. Mais il craqua avant.

Il se leva brusquement, faisant grincer la chaise qui était partie en arrière. Quelques regards se tournèrent vers nous, avant de reporter leur attention ailleurs. Gregory avait les sourcils froncés, et je pouvais voir ses dents se serrer, faisant ressortir sa mâchoire puissante. Allait-il me frapper ? Non, en général, il ne levait pas trop la main sur moi … Enfin si, ça arrivait. Mais pas aussi souvent que je le faisais.

- Remue-toi, on sort, grinça-t-il en attrapant son plateau pour aller le mettre avec les autres.

Je renonçai à finir mon repas, ne convenant pas plus que ça à mes goûts de toute façon, et me levai à mon tour. Je pris cependant mon temps, ne tenant pas vraiment à ce qu'il pense que j'étais à sa merci. Je suivais parce que je ne tenais pas à être seul, pas parce qu'il me l'avait demandé. Je savais qu'il m'attendrait, de toute façon.

Je restai à une bonne distance de lui, pour quelque raison que ce soit. Il était à bout de nerfs, ça se voyait. Le pire était que je n'étais même pas sûr de la raison. Etait-ce à cause de notre séparation en cours de physique et de mon insistance pour le faire manger ? Je trouvais ça étrange, tout de même. Etait-il en train de perdre patience comme moi ? Au point qu'il ne pouvait plus se retenir d'engager une confrontation entre nous dans les lieux publics ?

Il m'entraina jusqu'aux toilettes du bâtiment le moins fréquenté du lycée. Déjà, mon cœur commençait à battre un peu trop fort, et tous mes muscles s'étaient tendus à cause de l'appréhension. Je savais que ce n'était pas prudent de le suivre. Pourtant, mes jambes continuaient de me porter derrière lui, comme si j'étais possédé.

Il nous enferma dans l'une des cabines, et me plaqua contre la porte. On était très serrés, et je me sentais mal à l'aise. Je n'aimais pas trop les pièces où je ne pouvais pas bouger librement, surtout lorsque j'étais en sa présence.

Ses mains étaient placées des deux côtés de ma tête, et il me dominait de sa hauteur. Son regard semblait en feu. Il y avait une lueur de folie effrayante qui y dansait. D'habitude, je n'avais pas peur de lui. Mais là … Je me sentais trembler. Je ne savais pas ce qui lui prenait, ni ce qu'il allait faire. Je priais pour qu'il n'insiste pas pour qu'on baise ici, dans les toilettes du lycée.

Un minimum de tenue, tout de même …

- Alors, c'était bien le cours avec monsieur toutou ? Siffla-t-il d'une voix puant le sarcasme.

Je lui jetai un regard outré et confus. Alors c'était à cause d'Oscar qu'il était de si mauvaise humeur ?

- Bordel, tu sais très bien que c'est cette conne de prof qui l'a forcé à se mettre à côté de moi ! Je m'indignai, sachant très bien que j'avais besoin de me justifier rapidement si je ne voulais pas qu'il s'énerve plus.
- ça avait pas l'air de te déplaire tant que ça.

Ses yeux verts s'étaient réduits à deux fentes minuscules. Sa voix froide et vide m'avait donné des frissons d'horreur. La sueur froide qui me coulait dans le dos était des plus désagréables. J'avais beau essayer de me persuader qu'il n'oserait pas me faire du mal, la vision de ses muscles massifs à travers son pull ne faisait qu'accentuer ma panique.

Je me rappelai alors que je l'avais provoqué, ce matin, en touchant le visage d'Oscar pour lui dire que son expression hautaine m'agaçait. J'avais eu envie de le rendre jaloux, mais je le regrettais. Gregory devenait un fou furieux dès que je touchais quelqu'un, ou inversement. Je savais que j'aurais passé un mauvais quart d'heure en rentrant à la maison. Mais je ne m'étais pas imaginé qu'il perdrait pied au lycée.

Cela avait définitivement été une mauvaise idée.

Je fus pris d'un rire nerveux.

- Arrête tes conneries ! J'aboyais en le poussant.
- Tu l'as touché ! Fulmina-t-il en replaçant ses mains sur la porte, car il avait un peu reculé suite à mon dernier geste.
- Ouais, je l'ai fait ! Mais putain Greg, c'est pas comme si je m'étais laissé enculer devant toute la classe !

J'allais me faire démonter dans tous les cas, alors tant qu'à faire, je devais lui montrer que je n'avais pas peur. Que c'était moi qui avais toujours le contrôle. J'avais été un peu vulgaire, j'espérais vraiment que personne n'entrerait dans les toilettes. Même si c'était peu probable, cela pouvait arriver, n'est-ce pas ?

- Quoi, tu aurais aimé qu'il le fasse ? Susurra-t-il alors dangereusement, approchant son visage du mien.

Je pouvais sentir son souffle brûlant sur ma peau. Mon cœur allait exploser. Dans mes oreilles, je sentais mon sang pulser. J'étais effrayé. Pourtant, je pus articuler :

- Et si c'était le cas ?

Ce fut le déclic. Quelque chose changea dans son regard. Il s'éloigna un instant, et je compris qu'il allait frapper lorsque son bras se leva. Les yeux écarquillés, je pus éviter le coup de justesse. Son poing s'était écrasé sur la porte, qui avait craqué sinistrement.

Je pus lever le regard une fraction de seconde, pour voir la porte de bois enfoncée. Des morceaux s'étaient arrachés. S'il m'avait touché, je pense qu'il m'aurait sans doute détruit les os. Non, il t'aurait tué.

Je poussai un gémissement pitoyable lorsqu'il me souleva par mon gilet pour me remettre debout. Je ne pouvais plus cacher ma peur. Je n'avais plus le contrôle ! Il allait me tuer, je devais le calmer, vite ! Mais ma bouche, pourtant ouverte béante, ne laissa échapper aucune parole. Je ne pouvais que regarder, horrifié, son visage déformé par une rage dévastatrice.

Mes mains tremblantes attrapèrent son poignet tenant mon vêtement, mais ma maigre résistance n'eut aucun effet face à sa poigne puissante et obstinée.

Alors, il frappa. Ma tête, que je ne pus retenir face au choc, se tourna pour taper sur le mur. J'avais beau être sonné, je pouvais sentir la douleur se répandre le long de ma colonne vertébrale, et sur tout mon visage. Il n'attendit pas que je reprenne mes esprits pour cogner mon nez de son autre main, me lâchant au passage. Je glissai le long de la porte, paralysé.

Il me souleva un instant, ignorant les larmes roulant déjà sur mes joues, pour me brusquer contre mon "dossier", faisant taper tout mon corps dessus et me sonnant un peu plus. J'avais l'impression que mon esprit s'était détaché de mon corps, parce que je ne le contrôlais plus non plus. Je voyais, impuissant, ma vision devenir floue alors qu'il continuait de me secouer comme une poupée de chiffon.

Il s'arrêta juste avant que je perde connaissance, sûrement parce qu'il avait vu que je commençais à tourner de l'œil.

Et alors, il baissa mon pantalon. Je revins soudainement à moi, et recommençai à me débattre.

- Arrête putain, Greg !

Mais il ne m'écoutait pas. Il m'avait mis face au mur, une main appuyée sur l'arrière de ma tête pour me retenir et l'autre m'agrippant un bras sans douceur. Je le suppliai de ne pas faire ça lorsque je le sentis essayer de forcer l'entrée, mais encore une fois, il m'ignora.

.oO0Oo.

Je l'avais laissé sanglotant tel un bébé dans les toilettes. J'aurais du être celui en train de pleurer. J'étais celui qui souffrait le plus, actuellement. Pour qui se prenait-il ?

Je m'étais vaguement rincé le visage, pour ne pas qu'on voie le sang couler en abondance de mon nez, qui était sans doute cassé. Mais j'en avais plein mes vêtements de toute façon, donc on le verrait dans tous les cas. Les ecchymoses étaient déjà apparues sur mon visage, donnant une couleur disgracieuse à ma peau. J'avais du mal à marcher. Ce connard m'avait forcé sans même me préparer.

J'avais mal. Très mal. Je n'avais qu'une envie : pleurer. Mais je me retenais, serrant les poings car je ne pouvais pas le faire avec mes dents. Ma mâchoire me faisait trop souffrir pour ça.

Alors que je marchais, le regard flou, je bousculai quelqu'un. Je ne pus pas immédiatement mettre un nom sur le propriétaire du "ouch" mécontent qui avait suivi, mais lorsque je levai les yeux, je pus le reconnaitre malgré ma vision imprécise. Je pouvais même voir ses yeux horrifiés face à l'image qu'il avait devant lui. Eh oui, toutou. Je suis pas très présentable, là.

- Qu'est-ce qui t'est arrivé ? S'étrangla-t-il.

Ses mains se posèrent sur mes épaules, et je réalisai qu'elles étaient elles aussi douloureuses. J'avais du mal à me souvenir si Gregory avait fait quoi que ce soit pour les blesser … Sans doute tout mon corps avait fini par être endolori suite à sa violence.

J'eus un rire de folie, alors que tout mon corps se reposa sur celui d'Oscar. J'étais épuisé. Il était chaud, et j'avais froid. Il avait beau être un salopard hautain, il ne me ferait certainement pas de mal comme l'avait fait le blond.

- Je suis fatigué … Je soufflai, avant de perdre connaissance.